Application de la loi pénale dans le temps

Application du Droit Pénal dans le temps

De façon générale, il s’agit de régler les conflits de loi dans le temps, de déterminer la loi applicable le jour du jugement.

Dans ce chapitre nous évoquerons les « le principe de la non rétroactivité de la loi pénale ». Ce principe permet de bloquer l’application d’une loi nouvelle à une violation non encore jugée qui a été commise avant l’entrée en vigueur de cette loi.

Nous évoquerons aussi la notion de rétroactivité in mitius qui est une exception à la règle générale qui veut que la loi ne régisse que des situations futures, lorsque celle-ci est favorable au prévenu. La rétroactivité de la loi pénale la plus douce est ainsi appliquée obligatoirement par les juges.

& 1. Les solutions de principe

En cas de conflit de loi dans le temps, 3 solutions sont envisageables : soit la loi nouvelle n’est pas rétroactive, soit elle l’est, soit elle est immédiatement applicable.

Ces solutions vont avoir des conséquences différentes :

1ère solution : la non rétroactivité de la loi

Article du 2 Code Civil : c’est le principe selon lequel « la loi ne dispose que pour l’avenir, elle n’a point d’effet rétroactif ».

L’article 1 du Code Civil détermine la date d’entrée en vigueur de la loi : soit le jour prévu par la loi elle-même, soit le lendemain de sa publication au Journal Officiel.

2ème solution : la rétroactivité de la loi

La rétroactivité de la loi : la loi, dès son entrée en vigueur, concerne l’avenir mais aussi les situation juridiques antérieures. La rétroactivité est très dangereuse et porte atteinte à la sécurité juridique.

Elle porte atteinte aux attentes que les citoyens pouvaient avoir quant aux anciennes lois.

PORTALIS, dans son discours préliminaire sur le Code Civil en stigmatisait l’utilisation en ce qu’elle est « contraire à la sureté et porterait atteinte aux libertés civiles ».

3ème solution : l’application immédiate

Ce n’est ni de la Non-rétroactivité ni de la rétroactivité. La loi nouvelle (dès son entrée en vigueur) s’applique aux litiges en cours sans pouvoir remettre en question les situations juridiques antérieures. En Droit Pénal, c’est l’article 112-4 du Code Procédure Pénale.

& 2. Les solutions retenues par le droit pénal

Le Droit Pénal va utiliser les 3 solution de principe. Pour déterminer laquelle sera utilisée, il faut déterminer l’objet de la loi pénale : le Droit Pénal de fond, le Droit Pénal de forme ou le Droit Pénal relatif à l’exécution ou à l’application des peines

A) Droit Pénal de fond

1) définition : le Droit Pénal de fond concerne les normes relatives à l’engagement de la responsabilité pénale, c’est à dire les règles qui déterminent les éléments constitutifs d’une infraction et les conditions d’imputation d’une infraction (responsabilité du fait personnel, responsabilité pénale des personnes morales, règles relatives à l’auteur et aux complices, les causes d’irresponsabilité pénales).

Le Droit Pénal de fond a pour objet l’infraction, l’imputation, et la sanction.

Le Droit Pénal de fond créé, modifie ou abroge une sanction pénale.

Le régime juridique du Droit Pénal de fond : article 112-1 du Code Pénal : prévoit la non rétroactivité du Droit Pénal de fond sauf pour une loi plus douce.

La non rétroactivité des lois pénales plus sévères se retrouve à l’art 8 de la DDHC : « nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit ». Principe à valeur constitutionnelle (CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 30.12.1982).

L’article 7 & 1 de la CESDH consacre également ce principe.

Ce principe connait un tempérament :

* les lois interprétatives : elles ne font que préciser la signification d’une loi antérieure et n’ajoutent rien au droit positif. Ex : une loi de 1998 précise que par mauvais traitement infligé à un mineur, il faut entendre « mauvais traitement à caractère sexuel » donc, la loi a été considéré comme rétroactive.

* les lois déclaratives : elle n’interprète pas mais constate une règle existante. Ex : la loi du 26/12/64 qui constate l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité. Qualifiée de loi déclarative dans l’affaire BARBIE, 26.01.1984.

La question du revirement de jurisprudence et de leur application dans le temps. Si un revirement de jurisprudence rend la loi pénale de fond plus sévère, est-ce-que ce revirement peut s’appliquer de manière rétroactive ?

Ex : pendant longtemps la Cour de Cassation considérait qu’il ne pouvait pas y avoir de viol entre les époux.

Elle va changer d’avis et considérer qu’il peut y avoir viol entre époux (1980).

La Cour de Cassation considère qu’en l’absence de modification de la loi pénale, le principe de non rétroactivité ne s’applique pas à une simple interprétation jurisprudentielle (C. Cass, 30.01.2002 et 05.05.2004). Sa position a été très critiquée.

La CESDH a une position différente dans 2 jurisprudences où elle considère que dès lors que le revirement était prévisible, la jurisprudence qui rend la loi pénale plus sévère doit s’appliquer.

CESDH, 10/10/2006, PESSINOT c/ France : les décision administratives ne sont pas suspensives.

PESSINOT voit son permis de construire (PC) suspendu. Il continue sa construction. Un revirement de la Cour de Cassation dit que ce genre de fait constitue l’infraction pénale de construction sans Permis de Construire et applique cette solution rétroactivement à PESSINOT. La CESDH dit que confère l’article 7 de la CESDH, le revirement n’étant pas prévisible, la rétroactivité ne doit pas s’appliquer.

CESDH, 22/11/95 : viol entre époux en Angleterre. 2 époux sont poursuivis. Ils saisissent la CESDH qui déclare que le caractère avilissant de l’acte ne peut être interprété que comme une atteinte aux principes fondamentaux de l’article 7 de la CEDH dont l’essence même est le respect de la dignité et de la liberté des hommes. Le revirement étant prévisible, la rétroactivité est fondée.

CESDH, 22.03.2001, STRELETZ, KESSLER et KRENZ c/ Allemagne : gardes frontière qui ont tirés sur des fugitifs qui tentaient de passer à l’Ouest sur le mur de Berlin quelques jours avant la réunification. La cour applique la rétroactivité et valide des poursuites pour meurtre alors qu’au moment des faits, la loi de RDA, qui était entrée en vigueur, autorisait le tir.

Motif : « Le revirement était prévisible ».

La CESDH considère qu’à partir du moment où le revirement n’est pas prévisible, le principe de non rétroactivité doit s’appliquer à l’interprétation jurisprudentielle.

2) la rétroactivité « in mitius » (Rétroactivité des lois pénales plus douces)

C’est l’article 122-1 al 3 du Code Pénal : Les dispo° nouvelles s’appliquent aux infraction commises avant leur entrée en vigueur et n’ayant pas donné lieu à une condamnation passée en force de la chose jugée lorsqu’elles sont moins sévères que les dispositions anciennes.

La loi pénale peut alors être rétroactive lorsque la nouvelle loi est plus douce car elle ne menace pas les libertés individuelles.

L’ancien Code Pénal était muet mais la Cour de Cassation a dégagé ce principe dans une décision de la chambre criminelle du 01.10.1813.

Le CONSEIL CONSTITUTIONNEL en a fait un principe à valeur constitutionnelle en se fondant sur l’article 8 de la DDHC dans sa décision « sécurité et liberté » du 19 et 20.01.1981.

Egalement consacré par le Pacte relatif aux droits civils et politique, article 15 & 1.

La CJCE en a fait un principe général du droit communautaire, décision du 03.05.2005 Berlusconi.

La CESDH a jugé qu’il est possible de faire rétro agir une loi pénale plus douce parce que ça ne porte pas atteinte à la non rétroactivité de la loi pénale plus sévère (article 7 de la Convention). Elle a aussi considéré en 2009 que la « rétroactivité in miteuse » est un droit fondamental.

Le Code Pénal pose des limites à cette rétroactivité :

La limite posée par l’article 112-1 al 3 est que cette loi nouvelle plus douce ne s’applique que s’il n’y a pas de condamnation passée en force de chose jugée.

Une autre limite, l’article 112-4 al 2 prévoit la peine cesse de recevoir exécution si l’infraction disparait en vertu d’une loi postérieure au jugement.

Une autre règle a été dégagée, uniquement par la jurisprudence, C. CASS, 28.06.2002, chbre criminelle : sauf disposition contraire, l’abrogation de la loi instituant une peine fait obstacle à son exécution.

Il existe des exceptions à la « Rétroactivité in mitius » car la Cour de Cassation ne l’applique pas aux règlements économiques.

Si le législateur dit dans la loi qui est plus douce qu’elle ne s’applique pas rétroactivement, la Cour de Cassation valide la non rétroactivité de façon contraire au droit international.

3) la comparaison des lois en conflit

Plusieurs cas :

Si la nouvelle loi augmente la peine de prison et diminue l’amende : la jurisprudence considère que c’est la peine d’emprisonnement qui compte.

Si on considère que les dispositions de la loi nouvelle sont divisibles, dans ce cas, seules les dispositions plus douce rétroagissent (= on sépare les dispositions de la loi).

Ex : la loi Bérenger du 26.03.1891 est une loi créant le sursis mais aussi la petite récidive correctionnelle :

  • instaurer le sursis sur les peines d’emprisonnement c’est plus doux,
  • la petite récidive correctionnelle c’est plus sévère,

Donc application distributive : le sursis va rétroagir et la petite récidive ne rétroagit pas.

Autre exemple. Le Code Pénal de 1992 contient de nombreuses dispositions autonomes plus ou moins douces que le droit antérieur. Il y aura un vrai problème lorsqu’il y aura indivisibilité entre les dispositions.

La jurisprudence utilise alors 2 méthodes :

  • soit on recherche dans la loi générale la disposition principale qui communiquera son caractère au texte entier,
  • soit les juges portent une appréciation globale sur chacune des lois en présence (l’ancienne et la nouvelle). Si de manière globale la nouvelle est plus douce, application rétroactive (ex : le Code Pénal de 92 a réprimé le délit d’atteinte sexuelle en le punissant de 2 ans de prison et 200 000 F d’amende. Antérieurement s’était le délit d’attentat à la pudeur sans violence, puni de 5 ans de prison et 60 000 francs d’amende. Texte nouveau globalement plus doux donc rétroactivité).

B) Les lois relatives à l’exécution et l’application des peines (LREAP)

L’article 112-2 troisièmement prévoit que « les LREAP sont d’application immédiate sauf si ces lois ont pour résultat de rendre plus sévères les peines prononcées par la décision de condamnation».

Le principe d’application immédiate des LREAP a une valeur législative mais pas CONSTITUTION. Le CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 08.12.2005, « surveillance judiciaire », considère qu’une simple loi plus sévère en matière d’exécution et application des peines qui se déclare elle-même rétroactive s’applique rétroactivement.

C) le droit pénal de forme

Le principe est dans l’article 112-2 du Code Pénal : c’est l’application immédiate.

1er application du principe : concerne les lois de compétence et d’organisation judiciaire qui sont applicables immédiatement « tant qu’un jugement au fond n’a pas été rendu en 1ère instance ».

Donc, si un jugement a été rendu en 1ère instance on appliquera la loi antérieure.

2ème application du principe : concerne les lois fixant les modalités des poursuites et les formes de la procédure.

Il y a une exception et une atténuation au principe d’application immédiate :

Exception : article 112-3 du Code Pénal qui précise « les lois relatives à la nature, au cas d’ouverture des voies de recours, aux délais et aux personnes admises à se pourvoir, s’appliquent aux décision prononcées après leur entrée en vigueur. Toutefois, la forme du recours sera celle prévue par la loi en vigueur au jour de son usage.

Atténuation : article 112-4 du Code Pénal (commune à toutes les applications immédiates) qui précise « l’application immédiate de la loi nouvelle est sans effet sur la validité des actes accomplis conformément à la loi ancienne ».

3ème application du principe : concerne les lois relatives à la prescription d’une part de l’action publique, d’autre part des peines : ces lois sont d’application immédiate sauf si la prescription a déjà été acquise.

D) L’application dans le temps des mesures de sureté

Il n’y a pas de définition dans le code pénal. C’est une réaction instituée par le législateur visant à lutter contre la récidive et reposant non sur la culpabilité de l’intéressé mais sur sa dangerosité.

Ex : loi du 25.02.2008 : la rétention de sureté : retenir quelqu’un dans un établissement psychiatrique après sa peine si peine de + de 15 ans si on l’estime toujours dangereux après exécution de la peine. Renouvelable tous les ans.

Ex : loi du 25.02.2008 : possibilité pour la chambre de l’instruction ou le Tribunal Correctionnel de prononcer des mesures applicables aux irresponsables : interdiction de conduire, de fréquenter certains lieux… Si la mesure n’est pas respectée, encours 2 ans de prison et 30 000 Euros…

Ex : l’inscription de l’individu dans un fichier judiciaire automatisé, certaines déchéances, interdictions ou incapacités…

2) le régime juridique d’application des mesures de sureté dans le temps

Il y a deux dynamiques :

  • 1- soit on essaie de soumettre la mesure de sureté à une qualification prévue dans le Code Pénal (fond, forme, exécution et l’application des peines),
  • 2- soit on considère qu’elle est autonome et on va lui créer un régime juridique propre, (beaucoup plus récent).
  • a) Soumission aux classifications du code pénal

Rappel de la règle générale :

  • Loi Pénale de fond : application rétroactive si loi plus douce, sinon, pas de rétroactivité
  • Loi Pénale de forme : application immédiate (sauf exception)
  • Loi Pénale relative à l’application et l’exécution des peines : application immédiate sauf si rend les peines prononcées sont plus sévères.

Ex 1 : soumission à la loi pénale de forme : ex : inscription automatisée au fichier national des auteurs d’infractions sexuelles (FNAIS)

Le CONSEIL CONSTITUTIONNEL et la Cour de cassation ont considéré que cette inscription au FNAIS n’était pas une peine mais une mesure de police. Il s’agit en réalité d’une mesure de police administrative dans son rôle préventif (protéger l’intérêt général) et d’une mesure de PJ puisque ça permet de faciliter l’identification des auteurs d’infractions. Donc, dans ce sens, c’est une Loi Pénale de forme, ce qui justifie que le législateur ait pu choisir l’application immédiate. Confirmé par CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 02.03.2004 et C. Cass, 31.10.2006.

La CEDH considère aussi que cette inscription n’est pas une peine mais une simple mesure préventive qui échappe au principe de rétroactivité.

Ex 2 : soumission à la loi relative à l’application et l’exécution des peines. CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 08.12.2005, considère au sujet de la surveillance judiciaire qu’une mesure de sureté peut également être une disposition modifiant l’exécution ou l’application des peines. Le CONSEIL CONSTITUTIONNEL dit qu’il s’agit d’une modalité d’exécution de la peine. Rappelle ainsi que le législateur peut valablement aller à l’encontre de l’article 112-2-3 : principe d’application immédiate des lois relatives à l’exécution et l’application des peines sauf si cela rend la peine prononcée plus sévère.

La mesure de sureté a pour but de prévenir la récidive mais c’est une modalité d’exécution de la peine. Donc mesure de sureté = application immédiate.

Ex 3 : Soumission à la Loi Pénale de fond. La Cour de cassation a jugé qu’une mesure de sureté peut être qualifiée de peine. Elle traitait la loi du 25.02.2008 qui instaurait un nouveau régime juridique pour les irresponsables pénaux de l’art 122-1 Code Pénal (peut faire l’objet d’une hospitalisation judiciaire, de diverses interdiction, de suspension…). La loi n’a rien dit quant à son application dans le temps.

Question : peut-on appliquer ces nouvelles dispositions à un aliéné : application dans le temps de la loi ?

La Cour de cassation s’est prononcée à 2 reprises. Le 21.01.2009, elle considère que le principe de la légalité des peines de l’article 112-1 al 2 du Code Pénal fait obstacle à l’application immédiate d’une procédure qui a pour effet de faire encourir à une personne des peines prévues à l’article 706-136 du Code de Procédure Pénale alors que son état ne lui faisait pas encourir sous la loi ancienne. On applique la loi existante au moment des faits.

2 observations : la Cour de Cassation ne se sent pas liée par la définition du législateur. Toutes les mesures de l’article 706-136 du Code de Procédure Pénale sont des peines complémentaires de droit commun. D’autre part, au terme de cette décision, la cour conclu qu’on peut appliquer des peines à des irresponsables.

Suite à cette décision, le ministère de la justice a conseillé (par circulaires) aux juridiction du fond de ne pas suivre cette décision de la Cour de cassation.

La Cour de cassation fait un revirement de jurisprudence le 16.12.2009. La cour suit la qualification du législateur (les mesures de sureté ne sont pas des peines) et les irresponsables n’encourent pas de peines.

  • b) La détermination d’un régime spécial (ad hoc) d’application dans le temps

Ce régime spécifique vient de la décision du 21.02.2008 sur la loi du 25.02.2008 portant sur le volet des irresponsabilités créant la rétention de sureté. Cette Rétention de Sureté est la possibilité pour une juridiction ad hoc de placer en rétention un individu qui au terme de sa peine présente une dangerosité avérée par 2 experts. Cette rétention est limitée à 1 an renouvelable indéfiniment.

La spécificité de cette mesure est qu’elle s’applique alors que la peine initiale a été exécutée. Dans le cadre de la loi, le législateur avait décidé que le texte s’appliquerait aux infraction commises avant son entrée en vigueur. Le CONSEIL CONSTITUTIONNEL saisi pour savoir si cette application immédiate était conforme ou non à la CONSTITUTION adoptera pour répondre un raisonnement complexe.

Dans un 1er temps, il cherche à démontrer que la Rétention de Sureté n’est pas une peine en estimant que la décision de la cour d’assise ne consiste pas à prononcer cette mesure mais à la rendre possible dans le cas où à l’issue de la peine, les autres conditions seraient réunies. La Rétention de Sureté n’est pas prononcée par la cour d’assise lors de son prononcé mais à l’expiration de celle ci par une autre juridiction : la juridiction régionale de la rétention de sureté. Le CONSEIL CONSTITUTIONNEL précise que la Rétention de Sureté ne repose que sur le caractère particulièrement dangereux de l’individu et a pour but de prévenir la récidive pour les personnes ayant un trouble grave de la personnalité. La Rétention de Sureté ne peut pas être assimilée à une peine ni à une sanction à caractère punitif, donc, la Rétention de Sureté n’est pas soumise à la non rétroactivité.

Dans un 2ème temps, le CONSEIL CONSTITUTIONNEL dit qu’eu égard à sa nature privative de liberté, à son caractère renouvelable indéfiniment et au fait qu’elle est prononcée après une condamnation par une juridiction, la Rétention de Sureté ne saurait être appliquée à des personnes condamnées avant la publication de la loi ou faisant l’objet d’une condamnation postérieure à cette date pour des faits commis antérieurement.

Conclusion : le CONSEIL CONSTITUTIONNEL s’emploie à démontrer pourquoi la Rétention de Sureté n’est pas une peine pour au final soumettre la Rétention de Sureté au régime d’application dans le temps des peines, à savoir ici la non rétroactivité, puisqu’il est évident que la nouvelle loi est plus sévère que l’ancienne.

La CEDH a eu à se prononcer sur la détention de sureté Allemande (comparable à la rétention Française). Dans sa 1er décision du 17.12.2009, la CEDH considère qu’il s’agit d’une peine qui est donc soumise à la non rétro, peine qui en outre est contraire à l’article 5 & 1 de la CESDH (privation de liberté illégale). En effet, en Allemagne, la mesure est ordonnée par un tribunal après une condamnation pour une infraction. Elle est potentiellement illimitée tant qu’un tribunal n’a pas constaté que le risque grave de renouvellement d’infraction n’a pas disparu. C’est une peine illégale car la 2ème juridiction qui se prononce ne se fonde pas sur la culpabilité du coupable mais sur sa dangerosité. Cette privation de liberté intervient sans condamnation.

Suite à cette condamnation par la CEDH on avait conclu que la rétention de sureté Française risquait la même chose car également prononcée en 2ème juridiction comme en Allemagne et se prononçant sur la dangerosité.

Une nouvelle décision du 21.10.2010, GROSSKOPF c/ Allemagne intervient sur la rétention de sureté en Allemagne. Cette fois, la CEDH considère qu’elle n’est pas contraire à la Convention car le requérant n’a pas été détenu plus longtemps que la période maxi autorisée au moment des faits et aussi car cette détention avait été prévue par le jugement initial. En l’espèce, il y a un lien avec la culpabilité. Par ailleurs, la cour précise qu’il s’agit d’un moyen efficace de lutter

c/ la récidive.

Conséquence à tirer pour la France : cette décision semble valider l’idée d’une rétention de sureté dès lors qu’elle est initialement prévue par la condamnation. Ce qui est plus délicat, c’est la possibilité de placer dès aujourd’hui en rétention de sureté dès lors qu’un individu viole les obligations de sa surveillance de sureté. En effet, dans ce cas, la privation de liberté n’a plus de lien avec la condamnation initiale.