Définition et caractère du droit administratif

DÉFINITION DU DROIT ADMINISTRATIF ET ADMINISTRATION

Le droit administratif est classiquement définit par deux définitions qui s’opposent : l’école du service public et celle de la puissance publique.

-. La définition de l’école du service public. : Selon Duguit, le droit administratif est un droit de service public, il se définit par son objet qui se définit lui par la question de l’activité du service public destiné à satisfaire l’intérêt général, la mise en œuvre des règles du droit administratif. Dès lors, le juge administratif est compétent, donc pour le service public, le droit administratif correspond au juge administratif. On remarque cependant des problèmes pour certaines activités de l’état qui ne constitue pas de services publics et échappe le droit commun : le droit administratif. Il y a aussi un problème lorsque le champ d’application du droit administratif excède celui du service public. Cette équation devient inexacte du fait de la création de deux services publics : le tribunal des conflits et services d’état. La notion de service public éclate entre service public administratif régit par le droit administratif et service public industriel et commercial régit par le droit privé.

-. La définition de l’école de puissance publique. : le droit administratif se reconnaît aux moyens que l’administration met en œuvre pour mener à bien sa mission, le droit administratif s’applique et le juge administratif est compétent. A l’inverse, si l’administration met en œuvre des moyens de gestions privées, la compétence appartient au juge judiciaire.

– L’école ne représente pas toute la réalité. Pour donner une nouvelle définition, dans les années 1950, le doyen Vedel propose une nouvelle doctrine pour affiner cette définition du droit administratif. Elle est plus pragmatique, mais aussi plus complexe, c’est la doctrine des bases constitutionnelles des droits administratifs. C’est l’idée que l’on peut trouver dans la constitution les bases de définition de l’administration et du droit administratif. Son point de départ se trouve dans l’approche que fournit la constitution et traite du parlement, du gouvernement, de l’autorité judiciaire, du Conseil Constitutionnel.

— Le droit administratif s’intéresse aux institutions administratives qui dépendent pour l’essentiel du pouvoir exécutif, et qui vont tisser des relations entre elles, et œuvrer dans l’intérêt général. (Ex. L’université)

— Nous allons seulement étudier les moyens juridiques à la disposition de ces personnes publiques. C’est un droit essentiellement jurisprudentiel.

— C’est en apparence un droit inégalitaire. On a l’impression que les autorités administratives disposent de prérogatives exorbitantes de droit commun. Elles ont le pouvoir de faire des choses qui sont hors de portée du particulier. Elles peuvent néanmoins consister à faire peser sur les autorités administratives des contraintes qui ne pèsent pas sur les simples particuliers (Impossibilité de vendre un bien qui appartient à son domaine etc.) Sujétions exorbitantes de droit commun.

— Le droit administratif va accorder les libertés aux citoyens opposables aux autorités administratives grce au législateur et à l’évolution de la jurisprudence. Le droit se rééquilibre peu à peu.

Section 1 : Le droit administratif, un droit de l’administration

Sous-section 1 : Identification de l’administration

Le mot administration n’est pas réservé au droit administratif, ni même au monde juridique. C’est un mot polysémique :

§1 : L’Administration au sens organique

— C’est l’ensemble des institutions publiques chargées de faire fonctionner des services d’intérêt public. Dès lors, le pouvoir législatif entrerait dans cette définition, tout comme le pouvoir juridictionnel.

ARTICLE 20 de la Constitution : « Le Gouvernement détermine et conduit la politique de la nation. Il dispose de l’administration et de la force armée » Cette disposition constitutionnelle semble rattacher l’administration au pouvoir exécutif, et plus précisément au Gouvernement. Cette vision des choses est insuffisante. D’autres institutions rentrent dans la catégorie de l’administration, tout comme les collectivités territoriales (Communes, départements, régions). Néanmoins, l’ARTICLE 20 nous permet d’exclure les pouvoirs législatifs et juridictionnels de cette définition.

L’Administration au sens organique ne vise que l’ensemble des institutions qui composent le pouvoir exécutif et toutes ses institutions, ainsi que tous les établissements publics et les personnes publiques distinctes de l’Etat sur lesquels celui-ci n’exerce qu’une tutelle (Mairies, conseils généraux etc.).

— Tous les services de l’Etat, d’une commune etc. des institutions administratives en général, sont des institutions administratives, même s’ils n’ont pas d’existence juridique propre.

— L’Administration française est par tradition très étatique et centralisée. Cela signifie que les grandes administrations françaises sont pour la plupart des services de l’Etat, rattachés, au 1er Ministre, au Président de la République ou au Gouvernement. Mais aujourd’hui une évolution se fait vers la décentralisation et la déconcentration. Depuis 30 ans on a un mouvement qui vise à décongestionner Paris. On confie des pouvoirs à des services de l’Etat ou d’autres personnes que l’Etat alors qu’avant ils étaient confiés aux ministères.

§2 : L’administration au sens matériel

Services qui servent prioritairement l’intérêt général. On peut donc écarter l’organe législatif et le juridictionnel. Il ne reste que le pouvoir exécutif. C’est lui qui a des prestations de service dans un but d’intérêt général. Parmi les institutions du pouvoir exécutif, elles n’ont pas toutes les mêmes activités.

— L’exécutif gouverne et administre, or il faut distinguer les deux.

Mais il vaut mieux comprendre que le pouvoir exécutif a trois missions :

  • Participer au bon fonctionnement des pouvoirs publics et des rapports entre eux
  • Assurer les relations diplomatiques de la France avec les autres pays et organisations internationales ·Tout le reste

— La spécificité des activités administratives se manifeste lorsqu’on compare la finalité de l’action des personnes publiques à celles des personnes privées.

— Qu’est-ce que l’intérêt général ? Unique justification du fait que l’Etat a le monopole de la violence légitime (Conseil d’Etat) L’intérêt général n’est pas la somme des intérêts particuliers. Il vise à mettre en avant l’unité de la société.

§3 : Combinaison des sens organiques et matériels de l’administration

4 hypothèses :

o On est en présence d’une administration au sens organique qui exerce une organisation administrative au sens matériel (Paris)

o Une administration au sens organique qui n’a pas une activité administrative au sens matériel (Les communes, régions etc. ont parfois des activités qui ne servent pas l’intérêt général : propriété d’une forêt etc.)

o Personne qui n’est pas une administration au sens organique mais qui a une activité administrative au sens matériel (Des personnes privées se voient confier par une personne publique une tche administrative. L’assainissement de l’eau dans certaines communes par exemple)

o Personne qui n’est pas une administration au sens organique et qui n’a pas une activité administrative au sens matériel (Cas ordinaire de tout le monde)

Sous-section 2 : La soumission de l’administration au droit administratif

Prosper Veil « L’existence même d’un droit administratif relève en quelque sorte du miracle » : il n’est pas évident que l’Etat accepte de soumettre à une règle de droit. L’Etat a accepté que sa mission soit d’être au service de l’intérêt général. Il a également accepté qu’un juge puisse contrôler sa soumission au droit.

§1 : Les étapes de la soumission

L’administration a besoin de s’organiser de répartir en son sein les fonctions. Cela va se traduire par l’apparition de règles de compétence de telle ou telle composante de l’institution. Puis des règles qui vont organiser le processus de décision. Une hiérarchie entre les différents organes va apparaitre. Ces règles sont purement internes à l’institution. Les règles encadrent seulement son fonctionnement interne.

Il a des zones d’ombre que le juge n’accepte pas de contrôler : des choses internes à l’administration. Mais c’est peu de choses.

— Pourquoi l’Etat a-t-il voulu se soumettre au droit ? Pour donner l’exemple, pour répondre à la pression sociale, apparition d’une juridiction administrative qui a réussi à se faire accepter par l’Etat et les collectivités publiques puis à leur imposer le strict respect de la règle de droit. État de droit non achevé,

  • 2 : La soumission à quel droit ?

— Dans certains pays il n’y a pas de droit propre à l’administration (CL). Mais c’est juste en apparence. Il peut aussi y avoir des règles entièrement spécifiques pour l’administration. Ou alors une combinaison d’un droit spécifique et d’un droit commun en fonction des hypothèses (Si la commune gère sa forêt etc.) C’est ainsi en France.

Section 2 : Un droit spécifique à l’administration

— Le droit administratif n’est pas le droit applicable à l’administration au sens large (Organique

+ matériel), mais le droit applicable à l’administration au sens matériel. Il importe donc de considérer, non pas les organes, mais l’activité qu’ont les organes. Si l’administration a une activité destinée à protéger l’intérêt général, on va avoir une activité administrative régie par le droit administratif. Le droit administratif s’intéresse à tout organe qui a une activité administrative (Une commune qui a un service culturel, qui gère une crèche etc. Ou des activités de type culturel mais accomplies par une personne privée etc.)

— En revanche, le droit administratif ne gère pas l’activité privée d’un organe administratif

(Exemple : La commune qui gère une forêt lui appartenant, son patrimoine etc.), auquel cas cet organe sera soumis au droit privé ordinaire.

— Il faut donc une activité matériellement administrative pour qu’une institution soit soumise au droit administratif.

— Le droit administratif n’est pas le seul droit applicable à ces activités matériellement administratives, même si lui ne s’applique qu’à elles. Il n’a pas d’exclusivité. Parfois, le droit privé trouve à s’appliquer à des activités matériellement administratives. Ce sont des hypothèses dans lesquelles l’activité sert l’intérêt général, mais qui ressemble plutôt à une activité industrielle et commerciale. Ces services publics industriels et commerciaux sont dans le champ du droit administratif, mais ils sont par exception plutôt assujettis au droit privé.

— Le droit administratif est la part des règles applicables aux activités matériellement administratives, dont on exclu les règles du droit privé. C’est donc tout ce qui est propre à l’administration, les règles qui lui sont spécifiques.

Section 3 : Les caractères du droit administratif

— Ce droit est essentiellement jurisprudentiel, cela ne favorise pas la détermination d’un critère conceptuel.

§1 : Un droit autonome

La question du caractère dérogatoire est très ancienne. En effet la réponse a des conséquences directes sur la façon dont on perçoit la distinction entre droit public et droit privé.

  • Si on considère qu’il existe un caractère dérogatoire, cela signifie que le droit administratif déroge au principe (ce droit est alors une exception à un droit commun qui par ailleurs demeure), et que la règle de principe est la règle de droit privé. Une telle présentation est très restrictive pour le droit administratif. Cette dérogation est pratiquée dans les pays de Common Law. C’était également la conception en France au 19ème siècle. On voit le droit administratif comme droit subsidiaire.

  • Si on considère que le droit administratif est autonome, cela signifie que ce droit s’applique sans référence à aucun autre. C’est donc affirmer l’existence de deux droits communs, régissant l’un les rapports entre particuliers, l’autre les rapports entre ces derniers et l’administration. Le droit administratif ne peut donc être présenté comme un droit secondaire, chacun des deux droits a sa sphère de compétence. Le droit administratif, conçu ici comme le droit spécifique applicable à l’administration au sens matériel, il ne peut être qu’autonome, même lorsque le juge administratif s’inspire volontairement des règles du droit privé.

§2 : Un droit essentiellement jurisprudentiel

— Il y a certes aujourd’hui de plus en plus de textes; ils peuvent être d’origine internes, peuvent aussi être des règles externes (Règles de droit communautaire, droit du conseil de l’Europe, ou règles de droit international, venant des traités)

MAIS cela ne remet pas en cause que l’essence même de ce droit est jurisprudentielle : C’est la jurisprudence qui a forgé ce droit.

C’est ce qui fait la difficulté pour accéder au droit administratif. On a refusé de codifier le droit administratif en ce qu’il est essentiellement jurisprudentiel (En effet, les règles qui se dégagent de la jurisprudence sont subtiles et nuancées). Pour connaître les différentes notions, il n’y a pas d’autres solutions que de se référer à la jurisprudence.

C’est un droit souple qui s’est formé peu à peu, il est contenu dans deux siècles de jugements des juridictions administratives.

Conséquence : Il n’y a pas de façon unique pour aborder la matière.

Vous trouverez sur cours-de-droit.net d’autres cours de droit administratif :

DROIT ADMINISTRATIF

INSTITUTIONS ADMINISTRATIVES