Droit privé, droit public, droit mixte : définition, différence

DROIT PUBLIC, DROIT PRIVE ET DROITS MIXTES : définition et distinction

La distinction du droit privé (A) et du droit public (B) est classique. L’opposition n’est cependant pas absolue puisqu’il existe des droits mixtes (C). Cette opposition entre le droit privé et le droit public ne doit pas être surévaluée dans la mesure où elle tend à masquer l’unité du droit.

Il existe, en effet, une profonde unité du droit, lequel n’est que la traduction, sous la forme d’un ensemble de règles, d’un projet politique global.

(J.L. Aubert) Cela conduit beaucoup d’auteurs à dénier à la distinction droit privé-droit public, la valeur d’une vraie summa divisio. Cette distinction ne doit être envisagée que comme un instrument nécessaire de classification.

A – LE DROIT PRIVE

-Le droit privé est celui qui régit les rapports entre particuliers ou avec les collectivités privées, telles que les associations, les sociétés et qui assure prioritairement la sauvegarde des intérêts individuels.

-Le droit privé comprend principalement le droit civil et le droit commercial.

-Le droit civil occupe une place privilégiée : il a une valeur générale et donne les principes généraux. Le droit civil constitue le droit commun. Cela signifie qu’il s’applique, en principe, à tous les rapports de droit privé, sauf si un droit spécial a été édicté pour une matière déterminée. Cette fonction particulière s’explique par le fait que le droit civil est la branche la plus ancienne du droit. Le droit civil régit d’abord la famille (aspects extrapatrimoniaux : mariage-divorce-filiation et aspects patrimoniaux : régimes matrimoniaux-successions, libéralités), ensuite la propriété et enfin le droit des obligations (contrat-responsabilité civile). Les principales règles du droit civil sont regroupées dans le Code civil de 1804. Le droit civil forme le tronc commun et des rameaux en ont été détachés.

-Le droit commercial contient les règles dont l’application est réservée soit aux particuliers qui effectuent des actes de commerce, soit aux commerçants. Il régit donc aussi bien les sociétés constituées pour la réalisation d’opérations commerciales, que le fonds de commerce du simple commerçant ou encore des actes de commerce, ensemble des actes accomplis par un commerçant dans l’exercice et pour les besoins de son commerce. S’il a emprunté au droit civil, un certain nombre de ses techniques, il s’en est détaché pour constituer un corps de règles adaptées à la vie des affaires. Cette autonomie a commencé à se manifester avec les

Ordonnances de Colbert sur le commerce de la terre (mars 1673) et sur la marine (1681). Les règles du droit commercial sont principalement réunies dans un Code de commerce promulgué en 1807 mais qui s’est avéré rapidement dépassé. Il s’est progressivement vidé de toute sa substance puisqu’il ne comptait plus que 150 articles environ. Des lois très importantes régissent la vie des affaires, comme la loi du 24 juillet 1966 sur le droit des sociétés ou la loi du 25 janvier 1985 instituant une procédure de redressement et de liquidation judiciaire des entreprises ne se trouvait pas dans le Code de commerce. Le législateur a remédié à cela en procédant à « une codification à droit constant ». Cela signifie qu’il n’a été apporté aucune modification de fond, autre que celles nécessaire à la cohérence rédactionnelle, au respect de la hiérarchie des normes et à l’harmonisation du droit. Le

Code de commerce a donc été récemment complètement refondu par une ordonnance du 18 septembre 2000. Il se compose de 9 livres consacrés au commerce en général (livre I), aux sociétés commerciales et aux groupements d’intérêt économique (livre II), à certaines formes de vente et aux clauses d’exclusivité (livre III) aux prix et à la concurrence (livre IV) aux effets de commerce et aux garanties (livre V) aux difficultés des entreprises (livre VI), à l’organisation du commerce (livre VII), à quelques professions réglementées (livre VIII) et l’Outre-mer (livre IX). Les textes ainsi codifiés, sont donc abrogés.

-Un certain nombre de règles se sont détachées du droit commercial et du droit civil pour constituer une branche autonome de droit de nature mixte (civil et commercial): le droit de la propriété intellectuelle (propriété industrielle et propriété littéraire et artistique) le droit des assurances, le droit des transports, le droit rural

(Branche du droit civil).

B – LE DROIT PUBLIC

-Le droit public est celui qui régit les rapports de droit dans lesquels interviennent l’Etat (ou une autre collectivité publique) et ses agents. Le droit public régit l’organisation de l’Etat et des collectivités publiques ainsi que leurs rapports avec les particuliers. Ainsi, il contient les règles d’organisation de l’Etat et celles qui régissent les rapports entre les particuliers et l’Administration. Le droit public se subdivise aussi en plusieurs branches. Il comprend principalement le droit constitutionnel qui fixe les règles de base d’organisation de l’Etat, le droit administratif qui réglemente la structure de l’Administration et ses rapports avec les particuliers, les finances publiques et le droit fiscal qui réunissent les règles gouvernant les dépenses et les recettes des collectivités publiques, les libertés publiques qui définissent les divers droits de l’individu dans la société et les modalités de leur protection.

-Le droit public diffère du droit privé par :

-une finalité différente : il vise à satisfaire l’intérêt de la collectivité. Il est au service de l’intérêt public alors que le droit privé est au service des individus. Il convient cependant de ne pas exagérer cette opposition dans la mesure où la complexité croissante de la vie sociale et économique rend de plus en plus perceptible la fonction libératrice, pour l’individu, de l’intervention de l’Etat. On peut ainsi citer, par exemple, la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, qui organise la sauvegarde des libertés individuelles tant à l’encontre des pouvoirs publics que des organismes privés.

-un caractère impératif : le plus souvent le droit public s’impose aux administrés alors que le droit civil est le plus souvent, un droit d’autonomie, c’est-à-dire que les personnes privées sont libres de se placer dans le système juridique de leur choix (mariage ou concubinage ; liberté de conclure ou pas : détermination libre du contenu du contrat, etc…). Là encore, il convient de ne pas exagérer cette opposition. En effet, le droit privé n’est pas toujours un droit d’autonomie. Les exemples sont nombreux tant en droit civil (ordre public découlant du régime primaire du mariage) qu’en droit commercial (mode de constitution et de fonctionnement des sociétés).

-les privilèges reconnus à l’Administration : Par exemple, en droit privé, il est un principe selon lequel « nul ne peut se faire justice à soi-même ». Le droit subjectif ne peut être sanctionné qu’après avoir été reconnu par l’autorité judiciaire. L’Administration, au contraire, jouit du privilège de l’exécution d’office. Cela signifie qu’elle peut faire exécuter ses décisions à l’encontre des particuliers même s’ils en contestent la régularité. Ils devront exécuter d’abord la décision et contester ensuite en recourant à la Justice administrative : le contrôle s’exercera a posteriori. (Ex. en matière d’impôt)

-par les contraintes possibles pour faire exécuter les décisions de Justice. En droit privé, il existe des mesures de contrainte, c’est-à-dire des voies d’exécution pour obliger les particuliers à respecter la décision de Justice (saisies des biens, par ex.). En droit public, il n’existe en principe aucune exécution forcée des décisions de Justice à l’encontre de l’Administration. Mais dans un Etat de droit, « l’Etat, dit-on, est honnête homme » : il paie ses dettes et se conforme au droit. Mais, il n’existe aucune mesure de contrainte sur l’Etat. S’il refuse d’exécuter une condamnation, ses biens sont insaisissables. La seule contrainte est politique. De la même façon, si un particulier, bénéficiaire d’une décision judiciaire favorable, demande au pouvoir exécutif de lui prêter le concours de la force publique, (pour expulser son locataire qui ne paie plus son loyer, par exemple), et se heurte à un refus ; il ne peut contraindre l’Etat. Sa seule ressource est d’obtenir la condamnation de l’Etat à des dommages-intérêts pour réparer le préjudice qu’il subit. Néanmoins, une loi du 16 juillet 1980 a donné la possibilité au Conseil d’Etat de condamner l’Etat au versement d’une astreinte, moyen indirecte de contrainte. Les juridictions judiciaires se reconnaissent le même droit. Ce moyen de pression a démontré son efficacité. Par contre, la contrainte par corps (prison pour dettes) a été supprimée par une loi du 22 juillet 1867 en matière civile et commerciale mais elle demeure pour les dettes vis à vis de l’Etat, notamment les dettes fiscales.

-des juridictions différentes : l’Administration est soumise à un ordre juridictionnel particulier, celui de la juridiction administrative chargée d’appliquer les règles de droit public. Le but, après la Révolution, par une loi du 16-24 août 1790, était de mettre l’action de l’Administration à l’abri du contrôle des tribunaux de l’ordre judiciaire.

C – LES DROIT MIXTES

-Nous l’avons dit, la distinction du droit privé et du droit public n’est pas une division absolue du droit. En réalité, les techniques et les préoccupations se mélangent très souvent. Il est des règles de droit dites mixtes parce qu’elles réalisent une combinaison de règles relevant, pour les une du droit public, et pour les autres, du droit privé.

-Le droit pénal, appelé aussi « droit criminel » est un droit mixte. Il a pour principal objet de définir les comportements constitutifs d’infractions, et de fixer les sanctions applicables à leurs auteurs. Mais le droit pénal ne vise pas que la répression, il cherche aussi à prévenir les attitudes délictueuses, à rééduquer les anciens délinquants. Le droit pénal a un lien étroit avec le droit public puisque les infractions sont définies en considération de l’intérêt général et c’est la puissance publique qui assure l’exécution de la sanction. Le procès n’oppose pas deux particuliers, la victime et le délinquant mais le délinquant et la société. Même si la victime n’intervient pas parce qu’elle est décédée ou ne souhaite pas les poursuites, le procès se déroulera normalement, opposant le délinquant au ministère public, représentant de l’Etat. L’essentiel des règles du droit pénal sont rassemblées dans un Nouveau Code pénal, entré en vigueur le 1er mars 1994. (Abrogeant le Code Pénal de 1810)

Le droit pénal est néanmoins traditionnellement rattaché au droit privé et enseigné dans les facultés par des professeurs de droit privé. En effet, le droit pénal est bien antérieur à l’apparition du droit public qui s’est nettement démarqué de toutes les autres branches du droit.

Cela a eu pour conséquence de rapprocher droit civil, commercial et pénal. Il faut également noter que le droit pénal sauvegarde des intérêts privés. Il protège les individus dans leur vie, leur honneur, leur propriété… et en ce sens, peut être considéré comme la sanction ultime du droit privé. Le droit pénal a donc une nature mixte.

-Le droit processuel regroupe la procédure civile, dite aussi le droit judiciaire privé, la procédure pénale et la procédure administrative. Ces trois branches du droit ont pour objet l’organisation et le fonctionnement des organes de justice civile, pénale et administrative.

Ces règles déterminent la procédure à respecter lors du déroulement du procès. Ces différentes branches du droit ont un lien étroit avec le droit public puisque la procédure a pour objet la mise en place et le fonctionnement d’un service public, celui de la justice. Il n’en demeure pas moins que la procédure pénale et civile sont traditionnellement rattachées au droit privé et enseigné par des professeurs de droit privé, en raison de la nature des juridictions devant lesquelles elles ont vocation à s’appliquer.

-Le droit social regroupe le droit du travail et le droit de la sécurité sociale.

Le droit du travail recouvre l’ensemble des règles qui définissent la condition des travailleurs salariés. Il régit la prestation de travail; sa rémunération, la représentation collective des salariés, le droit de grève, les pouvoirs de l’employeur, le licenciement des salariés, etc…

La sécurité sociale, qui a pris son essor à partir de 1945, s’est détachée du droit du travail. Le droit de la sécurité sociale réunit un ensemble de règles destinées à s’appliquer principalement aux travailleurs pour les garantir contre divers risques sociaux (la maladie, les accidents du travail, le chômage), mais aussi pour jouer un rôle de solidarité par l’octroi de prestations pour charge de famille.

-Le droit social se rattache traditionnellement au droit privé car il régit les rapports entre deux particuliers, l’employeur et le salarié qui, à l’origine étaient soumis au Code civil. Mais, il revêt les caractères d’un droit mixte en raison des nombreux éléments de droit public qui y interviennent : le pouvoir de l’employeur est très encadré par de nombreux règlements, l’inspection du travail est une institution administrative, l’organisation de la Sécurité sociale est administrative, etc…).

Le Cours complet d’Introduction au droit est divisé en plusieurs fiches (notion de droit, biens, acteurs de la vie juridique, sources du droit, preuves, responsabilité…)