Introduction au droit civil

DROIT CIVIL

Le droit civil une branche du droit privé, c’est le droit commun car il est applicable à tous, sauf dans les cas où il y a des dispositions spéciales. Ceci est dû au fait qu’au départ (1804, date de l’arrivé du code civil), le droit civil était le droit privé. Puis, des besoins nouveaux ont fait naître de nouvelles branches.

Le droit civil est toujours le tronc commun: c’est le droit que les particuliers peuvent exercer dans leurs relations entre eux. En effet, « civil » vient du latincivilis dérivé decivis, qui signifie « citoyen ».

Le droit civil regroupe sous son appellation plusieurs thématique :

– Il est d’abord le droit des identités en ce qu’il institue et garantit l’état des personnes.

– Il permet aussi de régler les relations entre les citoyens (c’est dans ce sens que Montesquieu, dansL’Esprit des lois, livre I, chapitre 3, définit le droit civil comme « les lois dans le rapport que tous les citoyens ont entre eux ») : il regroupe le droit des contrats et de la responsabilité.

– Le droit civil est aussi le garant des principales lois du sujet : loi des filiations (droit des personnes et de la amille) et loi des échanges (droit de la propriété et droit des obligations).

Ce cours est un cours d’introduction au droit civil, il présentera par conséquent le droit objectif, le droit subjectif, la preuve, les sources du droit civil…

Voici le plan du cours de droit civil sur www.cours-de-droit.net :

  • Introduction.
  • Partie 1: Le droit Objectif.
  • Titre 1: La notion de règle de droit.
  • Chapitre 1. Les caractéristiques de la règle de droit.
  • Section 1. Les caractères généraux de la règle de droit.
  • §1: Les caractères généraux et impersonnels de la règle de droit.
  • §2: La finalité sociale de la règle de droit.
  • §3: Caractère extérieur de la règle de droit.
  • Section 2: Le caractère spécial de la règle de droit: la coercition étatique.
  • §1: La notion de coercition étatique.
  • §2: Les conséquences du caractère coercitif de la règle de droit.
  • A. Caractère obligatoire de la règle de droit.
  • B. La sanction à la règle de droit.
  • §3: Le fondement du caractère coercitif de la règle de droit.
  • Partie 2 : Les différentes branches du droit objectif ou la spécialité de la règle de droit.
  • → Le droit public
  • → Le droit privé
  • Titre 2: Les sources du droit objectif.
  • Chapitre 1: Les sources écrites du droit objectif.
  • Section 1: Présentation des sources écrites du droit objectif.
  • §1: Les sources internationales ou communautaires.
  • A. Les traités internationaux.
  • B. Le droit communautaire.
  • §2: Les sources internes.
  • A. Les différents types de loi (au sens formel).
  • B. Les différents types de règlements.
  • C. Les textes spéciaux.
  • Section 2: La hiérarchie des normes
  • §1. L’ordre de hiérarchie.
  • §2 : Les mécanismes de sauvegarde du respect de la hiérarchie des normes.
  • A. Les contrôles de constitutionnalité.
  • 1) Comment contrôler la conformité d’un traité à la Constitution.
  • 2) Respect de la conformité des règlements européens à la Constitution française.
  • 3) Conformité d’une loi à la Constitution.
  • B. Le contrôle de la conformité des loi aux traités internationaux et au droit communautaire.
  • C. Le contrôle de la conformité des règlements à toute norme d’autorité supérieure.
  • 1) L’exception d’illégalité.
  • 2) Le recours pour excès de pouvoir
  • Section 3 : Application des lois et des règlements dans le temps et dans l’espace.
  • Sous-section 1 : Application des lois et des règlements dans le temps.
  • §1 : La durée de validité des lois et des règlements.
  • A. L’entrée en vigueur des lois et des règlements.
  • 1) La promulgation.
  • 2) La publication.
  • 3) Date d’entrée en vigueur.
  • B. L’abrogation des lois et des règlements.
  • §2 : Les conflits de loi ou de règlements dans le temps.
  • A. Les principe régissant le traitement des conflits de loi dans le temps.
  • 1) Le principe de la non rétroactivité des lois.
  • a) Signification des principes
  • b) La valeur du principe de non rétroactivité des lois.
  • 1) Principe de l’effet immédiat de la loi nouvelle.
  • a) signification du principe.
  • b) la valeur du principe.
  • B. La mise en œuvre des principes régissant les conflits de loi
  • 1) Pour les lois concernant la création ou l’extinction d’une situation juridique.
  • 2) Pour les lois concernant les effets d’une situation juridique.
  • Sous section 2 : Application des règlements et des lois dans l’espace.
  • A. Le champ d’application territorial des lois et règlements.
  • B. Les conflits de loi dans l’espace.
  • Chapitre 2 : Les sources non écrites du droit objectif.
  • Section 1 : La coutume.
  • §1 : La notion de coutume.
  • A. L’élément matériel de la coutume
  • B. L’élément psychologique de la coutume.
  • §2 : Le rôle de la coutume.
  • Section 2 : La jurisprudence.
  • Sous section 1 : La formation de la jurisprudence.
  • §1 : Le rôle du pouvoir d’interprétation de la règle de droit par le juge dans la formation de la jurisprudence.
  • A. Généralités sur l’interprétation.
  • B. Les différents aspects de l’interprétation judiciaire.
  • §2 : Le rôle de l’organisation judiciaire dans la formation de la jurisprudence.
  • Sous-section 2 : la jurisprudence, source contestée de droit objectif.
  • §1 : Les arguments pour exclure la jurisprudence des sources du droit objectif.
  • §2 : Les arguments pour admettre que la jurisprudence est une source de droit objectif.
  • Section 3 : La doctrine.
  • Partie II : Les droits subjectifs.
  • Chapitre 1 : Le titulaire du droit subjectif, le sujet de droit.
  • Section 1 : Personnes physiques et personnes morales.
  • Section 2 : L’acquisition de la personnalité juridique pour les personnes physique.
  • §1 : Le principe de l’acquisition de la personnalité juridique à la naissance.
  • §2 : Le tempérament au principe : l’acquisition exceptionnelle de la personnalité juridique dès la conception.
  • SECTION 3. LA PERTE DE LA PERSONNALITE JURIDIQUE PAR LA PERSONNE PHYSIQUE.
  • §1. L’hypothèse de la mort certaine.
  • §2. Les hypothèses de doute sur la mort.
  • A. L’absence.
  • B. La disparition.
  • Chapitre 2 – Les différentes catégories du droit subjectif.
  • SECTION 1 – LA DISTINCTION DES DROIT PATRIMONIAUX ET DES DROITS EXTRA-PATRIMONIAUX.
  • SECTION 2 – LES DROITS PATRIMONIAUX.
  • §1. Les droits réels.
  • A. Les droits réels principaux.
  • B. Les droits réels accessoires.
  • §2 : Les droits de créance ou droits personnels.
  • §3 : Les droits intellectuels.
  • Section 3 : Les droits extra-patrimoniaux.
  • Chapitre 3 : Les sources du droit subjectif.
  • Section 1 : Les actes juridiques.
  • §1 : Les conventions.
  • §2 : Les actes juridiques unilatéraux.
  • Section 2 : Les faits juridiques.
  • CHAPITRE 3 – LA PREUVE DES DROITS SUBJECTIFS.
  • SECTION 1 – OBJET ET CHARGE DE LA PREUVE.
  • §1. l’objet de la preuve.
  • §2. La charge de la preuve.
  • SECTION 2 – LES MOYENS DE PREUVE.
  • §1. La preuve littérale.
  • A. Les écrits pré-constitués.
  • 1). L’acte authentique.
  • a). Définition
  • .
  • b). La force probante de l’acte authentique.
  • 2). L’acte sous-seing privé.
  • a). Définition.
  • b). La force probante de l’acte sous-seing privé.
  • B. Les autres écrits.
  • §2. La preuve testimoniale.
  • A. Définition.
  • B. Force probante.
  • §3. La preuve par présomption.
  • A. Définition.
  • B. La force probante.
  • §4. L’aveu.
  • A. L’aveu judiciaire. Article 1356 Code Civil.
  • B. L’aveu extra-judiciaire. Article 1355 Code Civil.
  • §5. Le serment. 1357 du Code Civil.
  • A. Le serment décisoire. Article 1358 Code Civil.
  • B. Le serment supplétoire. Articles 1366 et suivants Code Civil.
  • Section 3 : L’admissibilité des modes de preuve.
  • §1. Les matières soumises au système de la preuve morale.
  • 1). En matière pénale.
  • 2) En matière commerciale.
  • 3) En matière administrative.
  • §2 : La preuve en matière civile : un système mixte.
  • A. La preuve des faits juridiques.
  • B. La preuve des actes juridiques.
  • 1) Le principe pour la preuve des actes juridiques.
  • a) L’obligation de prouver un acte juridique par écrit.
  • b) Interdiction de prouver par témoin contre et outre le contenu d’un écrit.
  • 2) Les limites au principe de l’exigence d’un écrit.

Ci-dessous, un autre cours d’Introduction au droit civil est divisé en plusieurs fiches (sources, droit objectif, droit subjectif, preuves,

Autres Cours complet de Droit civil divisé en plusieurs fiches :

Introduction.

En quoi consistent les études du droit?

Le droit est une science, pour les romains, c’est la science du juste, considérée comme un art. C’est une science molle, une science humaine.

Quel est l’objet de l’étude du droit?

C’est une science humaine dont l’objet est l’étude de l’homme en tant qu’être social.

Définition scientifique du droit:

La science du droit est définie comme la connaissance approfondie et méthodique du droit englobant non seulement celle de ces règles mais la maîtrise de l’ensemble des ressources de la pensée juridique: le raisonnement juridique, la qualification, l’interprétation. C’est également le savoir pratique qui gouverne l’application du droit, c’est-à-dire l’apprentissage de la rédaction des textes ou de la rédaction des actes (un contrat par exemple). Tous les rapports de la société sont règlementés.

Qu’est-ce qu’une règle de droit?

→ Faire concorder les faits et savoir les appliquer: c’est la qualification.

→ Interprétation de la loi stricte (ex: loi des remboursements des accidents d’appareils à moteur). On s’approprie les règles pour bien les appliquer.

→ Esprit critique: penser par soi-même, refuser que l’on nous impose une idée.

Comme toutes les sciences, la science du droit a son langage, son « jargon ».

→ Le langage juridique a deux caractéristiques qui ne facilitent pas son apprentissage:

– Langage conservateur, c’est à dire figé, qui n’est pas parlé (ex: mots: seing, nonobstant).

– Langage technique: usage de mots savant, exclusivement juridiques que le langage usuel n’a pas repris parce il n’en a pas besoin. (ex: mot « hypothèque »)

Il se manifeste par la rigueur du langage.

Ex:L’action de prendre une décision n’est pas désignée en droit par le même verbe selon si cette décision est prise par le législateur, le juge ou par le contractant.

Législateur: énoncer, disposer, proclamer

Juge: décider

Contractant: stipuler.

Le langage juridique est plein de pièges en raison de nombreux polysèmes (mots à significations multiples). Ils peuvent avoir un sens différent dans le langage courant et dans le langage juridique.

Ex:Fruit: revenu d’un bien.

Ex:Meuble: quelque chose qui peut être déplacé.

Un mot peut aussi avoir plusieurs sens juridiques différents.

Ex:Loi: Sens large: toutes les règles de droit écrites.

Sens strict: règles de droit qui émanent du parlement: pouvoir législatif.

C’est un vocabulaire difficile.

– En quoi consiste un cours d’introduction au droit civil?

→ Poser les repères et aborder les notions fondamentales autours desquelles s’orientent les études du droit.

Le droit civil est une branche du droit privé qui est l’ensemble des règles gouvernant les rapports entre particuliers en opposition au droit public qui est l’ensemble des règles sur l’organisation de l’État et des collectivités publiques et régissant leur action et leur rapport avec les particuliers.

Le droit civil a plus précisément pour objet d’édicter les règles qui assurent l’individualisation de la personne dans la société et celle qui organise les principaux rapports de la vie en société: rapports de famille, droit des personnes, relations contractuelles, responsabilité civile (infraction: contravention, délit: tribunal, correctionnel).

– Qu’est-ce que le droit?

Question essentielle à laquelle nous allons répondre au premier semestre.

Le mot droit est un polysème double car il a des sens multiples dans le langage courant et dans le langage juridique. En matière juridique, le droit est en premier lieu l’ensemble des règles de conduite destiné à organiser les rapports entre les hommes dans une société donnée. C’est l’ensemble des règles qui nous gouverne, pour qui s’applique le droit objectif: « j’étudie le droit ». Deuxièmement, une autre signification du mot droit: il désigne les prérogatives reconnues pour le droit objectif à un individu ou a un groupe d’individus. Ces droits reconnus aux individus sont le droit subjectif: « c’est mon droit de faire cela ».


Partie 1: Le droit Objectif.

 

Le droit objectif est l’ensemble des règles de droit qui régissent la vie en société. La notion de règle de droit: Comment sont-elles organisées, divisées? D’où viennent-elles?

Titre 1: La notion de règle de droit.

 Toutes ces règles de droit ont pour objectif d’organiser la vie en société et les relations entre les membres qui la composent. Il y a aussi d’autres règles de conduite: des règles religieuses, morales, de bienséance.

Comment reconnaître, distinguer une règle de droit des autres règles qui ont également une vocation sociale?

Il faut étudier les caractères de la règle de droit pour trouver celui qui la distingue des autres règles.

Chapitre 1. Les caractéristiques de la règle de droit.

 Il y a deux types de caractères: certains sont généraux: ils aident à décrire ce qu’est une règle de droit mais ils ne sont pas spécifiques à une règle de droit. On peut les retrouver également dans les autres règles de la société. Puis, il y a le caractère spécifique de la règle de droit qui est celui qui permet de la distinguer de toutes les autres règles de la société: la coercition étatique.

Section 1. Les caractères généraux de la règle de droit.

  • 1: Les caractères généraux et impersonnels de la règle de droit.

La règle de droit est généraleparce qu’elle s’applique sur tout le territoire français et pour tous les faits qui s’y produisent. Elle est en outre impersonnelle (« abstraite ») dans le sens qu’elle n’est pas faite pour un cas particulier. Elle vaut pour tout ceux qui se trouvent ou se trouveront dans une situation objectivement déterminée et elle définit la conduite à adopter.

Le caractère général de la règle de droit n’est pas absolu, certaines parties du territoire français sont soumises à des règles spécifiques qui ne s’appliquent qu’à cette partie de la France. (ex: trois départements en Alsace et en Lorraine ont des lois spéciales et locales). Il n’est lui aussi pas absolu car la règle de droit vise toujours une situation précise et ne concerne donc souvent qu’une catégorie limitée de personnes.

Ce caractère général et impersonnel n’est pas propre à la règle de droit. Toute mesure qui prétend s’appliquer à un ensemble d’individus doit nécessairement être générale et impersonnelle. Si une mesure ne concerne qu’une personne déterminée, ce n’est plus une règle mais une décision. (ex: un décret qui porte la nomination d’un fonctionnaire n’est pas une règle de droit, c’est une décision administrative).

Les règles issues de la morale ou de la religion sont aussi impersonnelles. Ce caractère est nécessaire pour définir la règle de droit mais il est insuffisant pour la distinguer des autres règles.

  • 2: La finalité sociale de la règle de droit.

Personne n’aurait besoin de règle de droit dans le cas où elle serait seule. Le but de la règle de droit est d’organiser la vie sociale, de faire en sorte que tous les ressortissants d’un État vivent selon les valeurs communes du plus grand nombre et dans la plus grande harmonie. Cette finalité la distingue en principe des autres règles. Au premier abord, la règle morale n’a pas de finalité sociale, elle tend en principe au perfectionnement intérieur de l’individu, à l’épanouissement de sa conscience. La règle religieuse tend au salut de l’âme.

Ce n’est pas pour autant sans nuance car la règle de droit a plus que les autres une finalité sociale parce que c’est la raison d’être et parce que cette finalité sociale prime. La règle de droit n’hésitera pas à prendre des mesures en contradiction à la morale ou à la religion. Ex: Pour la religion, le droit du mariage est sacré et donc on ne peut lui mettre fin. Il était donc pendant longtemps interdit de divorcer. En remettant en cause le danger du mariage, en considérant la finalité sociale, le droit au divorce a été mis en place (mais sans abus). Ex: Selon la morale, toute personne doit payer une dette. Pourtant, pour un meilleur fonctionnement de la société, des règles de droit ont admis que passé un certain délai, une dette pouvait être prescrite et que dès lors, le débiteur pouvait refuser de payer car il ne pourra plus être poursuivi (facteur de paix sociale).

Si la finalité sociale est primordiale dans la règle de droit, cela n’empêche pas la règle de droit d’intégrer parfois des règles morales ou religieuses : ne pas mentir est un comportement dicté par la morale. La traduction juridique de cette règle morale est que les faux témoignages sont interdits. On intègre cette règle morale dans le domaine du procès.

Il est important de dire que les autres règles de conduite n’ont pas non plus de finalité sociale mais elles ont d’autres fins. Accessoirement, la religion n’ignore pas la finalité sociale et ses règles tiennent aussi compte des devoirs de chacun à l’égard de la société. Surtout, de plus en plus à l’époque contemporaine, on retrouve la finalité sociale dans la morale sociale: rôle et attitude à adopter avec les autres dans la société. Serait-ce la citoyenneté? Sans société, pas besoin de règles de droit.

  • 3: Caractère extérieur de la règle de droit.

La règle de droit est extérieure, on entend par là qu’elle ne dépend pas de la volonté de celui qui y est soumis. C’est n’est pas une contrainte que l’individu s’impose à lui même. C’est un ordre, une suggestion imposée à chaque membre du corps social. Pour Kant, c’est là la différence avec la règle morale parce que la règle morale est intérieure. Elle est le produit de sa conscience, c’est le sujet lui même qui se l’impose. La règle de droit n’est pas la seule à avoir une source extérieure à la volonté de l’homme. C’est aussi le cas de la règle religieuse: ce n’est pas le croyant s’impose les coutumes mais l’autorité religieuse.

Section 2: Le caractère spécial de la règle de droit: la coercition étatique.

  • 1: La notion de coercition étatique.

On entend par coercition étatique une contrainte émanant de l’État. Ce qui caractérise la règle de droit c’est d’être la seule règle rendue obligatoire et sanctionnée par l’État. Ce caractère fait sa distinction. La frontière entre les règles de droit et les obligations naturelles n’est parfois pas très nette. Une obligation naturelle est un devoir de conscience en tant que tel et elle ne peut être l’objet d’une exécution forcée. Mais si ce devoir de conscience est exécuté volontairement, il devient juridique. L’obligation naturelle se transforme en obligation juridique, ce qui n’était qu’une obligation naturelle sera désormais imposée par le droit.

Ex: devoir d’alimentation de sa famille.

La règle de droit est la seule règle posée et sanctionnée par l’État.

  • 2: Les conséquences du caractère coercitif de la règle de droit.

  1. Caractère obligatoire de la règle de droit.

La règle de droit est destinée à la société et au rapport entre ses membres. Il est nécessaire qu’elle soit respectée et elle doit donc être imposée, c’est à dire rendue obligatoire. Toutefois, le caractère obligatoire de la règle de droit est susceptible de degrés. Toutes les règles de droit n’ont pas le même degré de caractère obligatoire. On distingue des règles de droit impératives et des règles de droit supplétives.

Les règles de droit impératives sont celles qui ordonnent ou interdisent une conduite sans que le sujet puisse s’y soustraire.

Ex: Les lois qui fixent des conditions de validité du mariage posent des règles de droit impératives comme le consentement des deux époux.

Lorsque l’État décide qu’une règle de droit soit impérative, c’est souvent parce que le principe que défend cette règle de droit est jugé fondamental. Ainsi, les règles de l’ordre public sont constituées de valeurs fondamentales qui sont protégées par l’édiction impérative. Cette notion d’ordre public a bien évolué parce qu’elle reposait à la base sur le droit classique: la famille, l’État, la personne.

→ La règle de droit peut être supplétive (de volonté) ne s’applique que si le sujet de droit n’a pas exprimé de volonté particulière pour l’organisation de sa situation. Dans ce cas, la règle de droit supplée sa volonté c’est-à-dire remplace l’absence de volonté exprimée.

Ex: Régime matrimonial (se sont les règles de droit qui régissent les rapports patrimoniaux entre époux) choisit par l’administration si aucun choix n’est exprimé. L’article 1609 du code civil prévoit que quand une chose est vendue, elle doit être livrée à l’acheteur à l’endroit ou elle se trouvait au moment du contrat. Cette règle de droit est supplétive car les cocontractants peuvent tout à fait prévoir un autre lieu de livraison. Dans ce cas là, si rien n’est choisit, l’article 1909 s’applique.

  1. La sanction à la règle de droit.

La règle de droit telle quelle soit est toujours assortie d’une sanction émanant de l’État. Les sanctions qui émanent peuvent être variées et cumulées dans certains cas.

Le premier type de sanction est une exécution contrainte de la règle de droit non respectée. L’autorité chargée de faire respecter la règle en question en demande directement l’exécution en ayant recours à la force publique.

→ Le deuxième type de sanction est la sanction réparatrice qui oblige celui qui n’a pas respecté la règle de droit à réparer les conséquences de son non respect de la règle de droit.

Ex: Dommages et intérêts versés à une victime pour réparer les préjudices subit dans le non respect de la règle de droit.

Ex: Contrats interdits entre mineurs et tuteurs.

→ Chacun doit réparer ses méfaits.

→ Le dernier type de sanction est la sanction punitive qui relève du droit pénal. Il s’agit des peines destinées à punir le manquement à la règle de droit instituant une infraction. Cela consiste en des amendes, ou à l’emprisonnement. Il existe aussi des peines privées qui, elles relèvent du droit civil.

Ex: Recel successoral: l’héritier qui détourne un bien doit le rendre et perd tout droit sur le bien.

  • 3: Le fondement du caractère coercitif de la règle de droit.

Les philosophes s’interrogent depuis toujours sur le fondement coercitif de la règle de droit. On distingue deux grandes écoles:

– Ceux qui croient en l’existence d’un droit naturel, appelés les naturalistes ou idéalistes. Pour eux, le fondement de la règle de droit est le droit naturel, c’est à dire un ensemble de règles de conduite auxquelles le droit positif doit être soumis. La règle de droit si elle est conforme au droit naturel doit être coercitive. Dans le cas contraire, elle est injuste donc on peut lui désobéir.

Il existe différentes conceptions du droit naturel. Pour certains, le droit naturel est un principe supérieur de justice inscrit dans la nature des choses (Aristote). Pour d’autres, le droit naturel est inspiré par Dieu (Saint Thomas d’Aquin). Enfin, certains considèrent que le droit naturel doit se déduire de la nature de l’Homme.

– Opposés aux idéalistes, on trouve desthéories positivistesqui nient l’existence du droit naturel. Pour les uns, le caractère coercitif de la règle de droit vient de l’autorité de l’État qui confère à la règle de droit son caractère contraignant: c’est le positivisme juridique ou étatique.

– Pour les autres, la règle de droit est un moyen de défense sociale et c’est cette finalité qui lui donne son caractère coercitif: on appelle ça le positivisme sociologique.

– Pour le marxisme, la règle de droit est un moyen d’oppression des classes dominantes et c’est pour cela qu’elle est coercitive. Selon eux, elle est vouée à la disparition quand la lutte des classes cessera.

Partie 2 : Les différentes branches du droit objectif ou la spécialité de la règle de droit.

Le droit objectif doit prendre en considération la particularité des différentes situations sociales pour adapter des règles de droit aux nécessités propres à chaque domaine. C’est pourquoi le droit objectif connaît différentes spécialités et les règles de droit sont regroupées en fonction des domaines qu’elles ont vocations à régir.

Trois ensembles, trois ordres juridiques:

Ordre juridique communautaire: ensemble des règles de droit qui émanent des institutions communautaires.

Ordre juridique international: composé de l’ensemble des règles de droit qui s’intéressent aux relations entre États ou entre leurs ressortissants. On y distingue deux grandes spécialités: le droit international privé qui est l’ensemble des règles de droit qui règlemente les rapports entre les individus appartenant à des États différents et le droit international public qui est l’ensemble des règles de droit qui règlementent les rapports entre États. (Ce sont les disciplines des conflits de loi dans l’espace).

o Ordre juridique interne: ensemble des règles de droit qui s’intéressent aux relations entre ressortissant d’un même État ou entre ses ressortissants et leur État. Il est traditionnellement divisé en deux domaines: le droit public et le droit privé mais cette distinction n’est pas absolue.

→ Le droit public

Il regroupe l’ensemble des règles de droit qui régissent les rapports entre l’État et les particuliers. On y trouve différents domaines:

Le droit constitutionnel qui est l’ensemble des règles de droit relatives à l’organisation générale de l’État.

Le droit administratif qui regroupe l’ensemble des règles de droit concernant l’organisation des collectivités publiques et du service public ainsi que les rapports avec l’administré.

Le droit de liberté publique qui est la discipline dont l’objet est l’étude des pouvoirs et libertés accordés aux particuliers face à l’État.

Le droit des finances publiquesqui fixe l’ensemble des règles de gestion des finances de l’État et des collectivités publiques.

Le droit privé

Le droit privé est l’ensemble des règles de droit qui régissent les rapports entre particuliers. On y trouve deux branches:

– Le droit civil

– Le droit commercial.

Le droit civil est l’ensemble des règles de droit applicables entre personnes privées en l’absence de droits spécifiques. C’est pourquoi on parle aussi de droit privé commun. Le droit civil se divise en différentes disciplines: le droit des personnes et des biens, le droit de la famille, le droit des obligations (droit des contrats, de la responsabilité civile), le droit commercial.

Il existe aussi des disciplines mixtes qui sont une combinaison entre le droit privé et le droit public: le droit pénal qui regroupe les règles de droit qui ont pour objet la défense et la sanction dans les infractions. Le droit pénal est un droit privé parce qu’il vise à protéger les particuliers contre les infractions commises à leur encontre par d’autres particuliers mais il appartient également au droit public parce que d’une part il sanctionne aussi les infractions commises par les particuliers contre la nation, l’État.

Le droit social est une discipline mixte qui regroupe:

Le droit du travail: ensemble des règles régissant les relations juridiques liés au travail salarié.

– Le droit de la sécurité sociale.

→ Le droit social relève du droit privé parce qu’il garantit un certain nombre de prérogatives essentielles mais il intègre aussi le droit public comme dans l’inspection du travail ou dans les administrations de la sécurité sociale.

→ Le droit judiciaire privére groupe l’ensemble des règles de droit relatives à l’organisation judiciaire et à la procédure civile. Il relève du droit privé parce qu’il a pour objet de définir les moyens pars lesquels les parties peuvent défendre leur droit en justice mais il relève également du droit public car il décrit le mode de fonctionnement et d’organisation du service public de la justice.

Titre 2: Les sources du droit objectif.

En entend par source du droit objectif les origines de ce droit, les différentes manières dont les règles de droit sont établies. Elles ont des origines multiples.

Les règles de droit sont rangées dans un ordre hiérarchique. Une règle d’autorité inférieure ne peut contredire une règle de droit inférieure.

D’où viennent les règles de droit qui nous régissent?

Elles ont des origines variées, la plupart sont des règles écrites qui ont leurs origines dans un texte qui a été rédigé dans le but était de poser ces règles de droit.

On trouve deux catégories: les règles écrites que l’on trouve dans un texte qui émanent d’une autorité et les règles qui ne trouvent pas leur origine dans un texte, des coutumes (la jurisprudence a reconnu le droit coutumier).

Chapitre 1: Les sources écrites du droit objectif.

Les règles de droit écrites sont au-dessus des règles non-écrites, elles sont plus nombreuses.

Question de hiérarchie, comment font-elles pour ne pas se contredire? Comment faire quand une règle change?

→ La société change et les règles changent avec elle, elles s’adaptent.

Section 1: Présentation des sources écrites du droit objectif.

Il y a des textes qui posent les règles de droit dont l’ensemble forme le droit objectif.

3 origines principales:

Origine internationales

Origine communautaire

– Origine de l’ordre juridique interne, des institutions françaises compétentes pour éditer des règles de droit.

  • 1: Les sources internationales ou communautaires.
  1. Les traités internationaux.

Ce sont des écrits susceptibles de contenir des règles de droit. Il s’agit d’accords conclus par la France avec un ou plusieurs pays étrangers ou avec une organisation internationale, accords qui à côté des clauses concernant les relations entre États contiennent souvent des règles de droit privé dans un nombre très varié de domaines comme le commerce, l’industrie, les droits de l’homme, adoption, contrats internationaux.

La procédure d’adoption d’un traité commence toujours par des négociations entre les pays parties au traité (ou convention internationale). En France, ce pouvoir est dévolu au président de la République (pour des traités de moindre importance, il peut déléguer au ministre des affaires étrangères). Il faut signer le traité après l’avoir rédigé ce qui permet de fixer les termes de l’accord. S’il s’agit d’un accord en forme simplifiée (mini traité), sa signature suffit en général à le rendre applicable.

Pour les autres, il faut encore que le traité soit ratifié ou approuvé, pouvoir qui appartient en principe au Président de la République.

Une fois ratifié, le traité entre en vigueur dans les pays signataires et donc que les règles de droit qu’il contient deviennent applicables (cela peut prendre beaucoup de temps).

Lorsque le traité porte sur des matières très importantes énumérées par la Constitution ou lorsqu’il modifie une loi, le Président de la République ne peut l’approuver ou le ratifier qu’après y avoir été autorisé par une loi votée par le Parlement ou adoptée par le référendum (ex: traité de Maastricht). Les traités sont ensuite publiés au journal officiel (journal dont le seul but est de porter à la connaissance des citoyens les nouvelles règles de droits, arrêtés municipaux). Les traités internationaux peuvent soit créer des obligations entre États et dans ce cas ils ne peuvent pas être invoqués par des particuliers soit créer des droits et des obligations pour les individus, et ils peuvent alors être invoqués par des particuliers devant les juridictions nationales. On dit qu’ils sont des faits directs ou d’applicabilité directe.
Par exemple, la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales signée à Rome le 4 novembre 1950 est ratifiée en France en 1974 et d’applicabilité directe. Cela signifie que n’importe quel français peut revendiquer les règles de droit contenues dans cette convention devant les juridictions nationales. Une procédure permet aux français de soumettre leur cause à la Cour Européenne des Droits de l’Homme qui siège à Strasbourg une fois que les recours offerts par le droit interne sont épuisés. Ce recours est formé contre l’État à qui l’on impute une violation des principes posés par la Convention et peut conduire à une condamnation de cet État à verser au plaignant une indemnité. Cette Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales est une Convention du Conseil de l’Europe qu’il ne faut pas confondre avec le Conseil de l’Union Européenne qui lui, est un organe communautaire. Conseil de l’Europe est une organisation internationale institué en 1949 pour promouvoir et sauvegardes les idéaux de la quarantaine de pays membres.
Autre exemple, la convention des Nations Unis relative aux droits de l’enfant qui a été signée et ratifiée par la France en 1990. Cette convention a justement donné lieu à une discussion sur son applicabilité directe qui a entrainé une divergence entre Cour de Cassation et Conseil d’État. Le Conseil d’État acceptait de juger l’applicabilité directe de cette convention article par article en décidant par exemple que si tel article de la Convention était suffisamment clair, il pouvait être directement appliqué. La Cour de Cassation elle, n’acceptait de juger de l’applicabilité directe de la Convention que de manière globale et avait conclu qu’elle n’était pas suffisamment précise pour être d’application directe. La Cour de Cassation est revenue sur sa position lors d’une décision du 14 juin 2005 et admet désormais l’applicabilité directe de certaines dispositions de cette convention comme par exemple l’article 3-1 relatif à l’intérêt de l’enfant.

  1. Le droit communautaire.

Le droit communautaire a pour origine trois traités constitutifs: le traité de Paris entré en vigueur le 23 juillet 1952 et qui a institué la CECA qui a pris fin en 2002, puis les deux traités de Rome, du 25 mars 1957 instituant la CEE et la Communauté Européenne de l’Énergie Atomique EURATOM. Ces traités constitutifs ont mis en place des institutions communautaires qui sont le Parlement Européen, le Conseil de l’Union Européenne, la Commission et la Cour de Justice Européenne. Certaines de ces institutions peuvent éditer des règles de droit communautaires. On distingue donc deux types de règle de droit communautaire:

– celles qui constituent le droit communautaire originaire, c’est à dire, les règles de droit énoncées dans les traités constitutifs et dans les traités intervenus depuis pour compléter, modifier ou étendre ces textes;

– celles qui constituent le droit communautaire dérivé qui est l’ensemble des règles de droit (normes) édicté par les institutions communautaires (directives européennes). Le principe est que toute règle de droit communautaire est directement applicable dans les États membres dès lors qu’elle est claire, inconditionnelle et qu’elle ne nécessite pas de mesures d’exécution. Pour le droit communautaire dérivé, il faut distinguer deux types de normes: les directives européennes et les règlements européens. Le règlement est une règle générale et abstraite qui s’intègre directement dans le droit interne et qui peut être invoqué directement par un particulier. Les directives européennes, elles, ont pour but de fixer des objectifs que les États membres de l’Union Européenne doivent s’efforcer d’atteindre en étant libre du choix des moyens utilisés pour atteindre ses objectifs. Donc en principe, une directive européenne ne peut pas être directement applicable dans les pays de l’union européenne, elle doit être transposée en droit interne ce qui signifie que ce sont les institutions de chaque pays qui doivent prendre les règles de droit qui permettront d’atteindre les objectifs fixés et les transposent chacun dans leur système national.
Cependant, la Cour de Justice Européenne a admis qu’exceptionnellement, lorsqu’une directive était suffisamment précise, elle pouvait être invoquée par un particulier à l’encontre de son État si ce dernier s’abstient de transposer la directive dans le délai imparti ou s’il la transpose de manière incorrecte.

Les normes de droit communautaire originaires ou dérivées ont une autorité supérieure aux règles écrites d’origine interne.

  • 2: Les sources internes.

Les sources internes du droit sont tous les textes émanant des institutions françaises contenant des règles de droit. Le mot loi est un polysème au double sens:

Loi au sens matériel est défini largement ce qui permet de qualifier de loi toutes les règles de droit écrites ou formulées par un organe compétent dans l’exercice du pouvoir législatif ou exécutif et qui présente un caractère général, impersonnel et obligatoire. Si l’on retient ces définitions, toutes les sources écrites internes sont des lois (d’origine nationale).

Au sens formel du terme, la loi désigne de manière plus stricte toutes les dispositions émanant du pouvoir législatif c’est à dire du parlement. Les règles de droit écrites émanant du pouvoir exécutif et d’autorités administratives sont appelées dans un sens strict des règlements.

Les articles 34 et 37 de la Constitution définissent les domaines d’intervention respectifs de la loi et des règlements. Ils énumèrent tous les domaines qui relèvent de la compétence du pouvoir législatif comme les libertés publiques. L’article 37 définit que tout le reste est de la compétence du règlement.

  1. Les différents types de loi (au sens formel).

On distingue trois catégories:

Les lois constitutionnellesaussi appelées « Constitution ». Elle peut être définie comme un ensemble de règles suprêmes fondant l’autorité étatique, organisant ses institutions, lui donnant ses pouvoirs et souvent aussi lui imposant des limitations en particulier en garantissant des libertés au sujet ou au citoyen. La Constitution actuelle de la France est celle qui a été adoptée par référendum le 23 septembre 1958 et promulguée le 4 octobre 1958. C’est le 15ème texte fondamental de la France depuis la révolution française ou le 22ème si on compte les textes qui n’ont jamais été appliqués. La Constitution a été modifiée à plusieurs reprises notamment par deux lois constitutionnelles du 1 mars 2005: révision du titre de la Constitution consacrée à l’Union européenne et l’autre intégrant la charte de l’environnement dans le bloc constitutionnel. Enfin, le 28 juillet 2008, une loi a apporté des modifications sur le contrôle du pouvoir exécutif et a renforcé le pouvoir du Parlement. Elle a également permis aux particuliers de soulever l’inconstitutionnalité des lois.

Par une décision du 16 juillet 1971, le conseil constitutionnel a rattaché à la constitution le préambule de la constitution de 1958, la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 aout 1789, le préambule de la constitution de 1946 ainsi que ce qu’il a désigné comme les principes fondamentaux. Ceci constitue le bloc constitutionnel.

→ La deuxième catégorie est composée delois organiquesqui ont pour objet de fixer les modalités d’organisation et de fonctionnement des pouvoirs publics. La Constitution énumère elle-même les matières dans lesquelles peuvent intervenir les lois organiques.

→ La troisième catégorie comprend leslois ordinaires qui sont toutes les autres lois codées tout au long de l’année par le parlement.

  1. Les différents types de règlements.

On trouve trois variétés de règlements: les traités, les arrêtés et les circulaires.

Le décret: il relève en principe de la compétence du Premier Ministre mais le Président de la République se voit reconnaître une compétence d’exception. On distingue plusieurs catégories de décrets: les décrets simples, signés par le Premier Ministre ou par le Président avec le contreseing des ministres qui ont la charge de leur exécution. Puis, il y a le décret pris en conseil des ministres signé par le Président avec le contreseing de tous les ministres. Enfin, il y a les décrets pris en Conseil d’État qui sont spontanément adoptés par le Conseil exécutif, soit on émet une demande au législateur après avis d’une section du Conseil d’État.

On distingue également selon l’objet du décret ceux que l’on appelle «décrets autonomes» car ils sont pris par la seule initiative du pouvoir exécutif et les décrets dit « d’application » pris pour préciser les conditions de mise en œuvre d’une loi.

Les Arrêtés: On les distingue selon l’autorité administrative qui les a pris:

Ministériels ou interministériels;

Préfectoraux: pris par un préfet;

Municipaux: pris par les maires.

Les Circulaires: C’est un acte par lequel un ministre donne des instructions à des fonctionnaires pour le fonctionnement d’un service. Ces circulaires n’ont pas en principe de valeur règlementaire mais elles peuvent sous certaines conditions acquérir cette valeur. Dans ce cas, elles ont la même valeur qu’un arrêté ministériel.

  1. Les textes spéciaux.

On trouve d’abord les prescriptions de l’article 16 de la Constitution. Il reconnaît en effet que le président de la République dans des circonstances exceptionnelles, le peut exercer un pouvoir de prendre lui-même les mesures. Il exerce alors les fonction exécutives et législatives. Par exemple, le général de Gaulle a eu recours à cette procédure pendant la guerre d’Algérie.

Article 38: Il permet au gouvernement de demander au Parlement pour l’exécution de son programme l’autorisation de prendre par ordonnance, pendant un temps limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la compétence de la loi au sens formel du terme.

Face à cette diversité des sources écrites, comment éviter qu’elles se contredisent?

Plusieurs moyens existent pour éviter que la diversité des sources du droit objectif ne conduisent paradoxalement à bloquer la société. L’un de ces moyens est de répartir les compétences. L’autre moyen pour éviter cette contradiction c’est de placer toutes ces règles écrites dans une hiérarchie.

Section 2: La hiérarchie des normes.

Les règles de droit écrites, qu’elles soient communautaires, internationales ou nationales s’ordonnent selon une hiérarchie. Le principe étant qu’un texte de catégorie inférieure est toujours subordonné au texte de catégorie supérieure et ne peut donc y déroger. Pour que cette pyramide des textes ne reste pas un agencement purement théorique, il existe plusieurs mécanismes destinés à rendre effective, à faire respecter cette hiérarchie.

  • 1. L’ordre de hiérarchie.

BLOC DE CONSTITUTIONNALITE

 TRAITES INTERNATIONAUX RATIFIES ET PUBLIES

DROIT COMMUNAUTAIRE

Ž LOIS ORGANIQUES

 LOIS ORDINAIRES

DECISIONS DE L’ARTICLE 16 AYANT UN OBJET LEGISLATIF

ET

ORDONNANCES DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE RATIFIEES

 DECRETS AUTONOMES

ARTICLE 16 AYANT OBJET REGLEMENTAIRE

DECRETS D’APPLICATION

TRAITES MINISTERIELS OU INTERMINISTERIELS

CIRCULAIRES REGLEMENTAIRES

ARRETES PREFECTORAUX

ARRETES MUNICIPAUX

Cet ordre de hiérarchie a été un temps contesté, ainsi les auteurs estimaient que les traités internationaux étaient supérieurs à la Constitution. Ils prenaient comme argument qu’un traité contraire à la Constitution ne peut être ratifié qu’après révision de la Constitution. Pour eux, si le traité entraine la révision de la Constitution, c’est bien qu’il lui est supérieur. Le Conseil d’État par un arrêt Sarran de 1998 a affirmé la supériorité de la Constitution par rapport aux traités internationaux. Le même débat a eu lieu a propos du droit communautaire. Le Conseil d’État a à plusieurs reprises affirmé la supériorité de la Constitution sur le droit communautaire. Décision de 1961, arrêt Costa et Arrêt « syndicat national des industries pharmaceutiques » de 2001. Mais par la Cour de Justice Européenne, le droit communautaire a une autorité supérieure aux normes de droits internes quel que soit le rang de la norme nationale y compris la Constitution.

  • 2 : Les mécanismes de sauvegarde du respect de la hiérarchie des normes.

La sauvegarde de cette hiérarchie n’est pas absolue.

  1. Les contrôles de constitutionnalité.

Comme son nom l’indique, ce sont les procédures destinées à assurer la conformité des normes inférieures à la norme supérieure qu’est la constitution. Sauf pour les règlements qui ont une procédure spéciale, ces procédures relèvent de la compétence exclusive du Conseil Constitutionnel.


1) Comment contrôler la conformité d’un traité à la Constitution.

L’article 54 de la Constitution permet au président de la République, au Premier ministre, au président de chacune des assemblées (Président de l’Assemblée Nationale ou Sénat) ou à 60 députés ou sénateurs de saisir le Conseil Constitutionnel avant la ratification d’un traité pour juger si une ou plusieurs clauses de ce traité ne sont pas contraires à la Constitution. Si le Conseil Constitutionnel saisi considère en effet qu’une atteinte est portée à la Constitution, il n’autorise la ratification du traité qu’à condition de préalablement modifier la Constitution. Si les personnes attachées au pouvoir de saisir le Conseil Constitutionnel ne le saisissent pas, le traité peut être ratifié tout en étant contraire à la Constitution.

2) Respect de la conformité des règlements européens à la Constitution française.

Il n’existe pas de procédure spécifique permettant de veiller à la conformité des règlements européens à la Constitution française. La Cour de Justice Européenne affirme en effet que les actes pris par les institutions communautaires sont une source totalement autonome du droit objectif et ne sauraient donc être appréciés qu’en fonction du droit communautaire. Elles ne peuvent donc se voir opposer des règles de droit nationales telles qu’elles soient. Toutefois, le respect des principes fondamentaux fait partie intégrante des principes généraux du droit communautaire dont la Cour Européenne assure le respect. Or la Cour Européenne de Justice est tenue dans cette mission de s’inspirer des traditions constitutionnelles communes aux États membres pour éviter que ne soient admises dans l’union européenne des mesures incompatibles avec les droits fondamentaux reconnus par les Constitutions de ces États. (On arrive au même résultat mais ce que veut la CJE c’est qu’on tienne compte du caractère autonome du droit communautaire). En revanche par une décision de 2004, le Conseil Constitutionnel a envisagé l’éventualité de contrôler la conformité d’une directive européenne à la Constitution française à l’occasion d’une saisine pour contrôle de la Constitutionnalité de la loi transposant cette directive européenne en droit interne.

3) Conformité d’une loi à la Constitution.

Pour les lois organiques la saisine du Conseil Constitutionnel est automatique. Pour les lois ordinaires, jusqu’à la dernière révision de la Constitution du 23 juillet 2008, il n’existait qu’une procédure de contrôle de la constitutionnalité des lois, un contrôle préventif confié au Conseil Constitutionnel. Depuis la réforme, une autre procédure de contrôle a été instaurée qui présente deux particularités: tout d’abord, si elle reste dans la compétence du Conseil Constitutionnel, elle peut pour la première fois être initiée par un simple particulier. D’autre part, cette nouvelle procédure de contrôle intervient cette fois non pas à priori mais à postériori après l’entrée en vigueur de la loi.

  1. a) Le contrôle a priori de la constitutionnalité des lois par le Conseil Constitutionnel.

Le Conseil Constitutionnel peut être saisi pour juger de la conformité d’une loi à la Constitution. Il n’y a que pour les lois organiques que la saisine du Conseil Constitutionnel est systématique. La saisine peut être faite après le vote de la loi mais avant sa promulgation par le Président de la République (qui peut être saisi par le président de la République, le premier ministre, le président d’une assemblée ou les 60 députés ou sénateurs). Si cette procédure n’a pas été lancée dans les délais (ce qui arrive fréquemment), une loi contraire à la Constitution ne peut plus être écartée. Au contraire, si le Conseil Constitutionnel a été saisi et qu’une partie ou la totalité de la loi ont été jugés contraire à la Constitution (on appelle cela une loi inconstitutionnelle), elle ne pourra être ni promulguée, ni mise en application. Cette procédure est depuis longtemps critiquée. L’argument principal étant que au motif que s’il existe un consensus politique pour ne pas déférer une loi dont on aurait pu discuter la conformité à la Constitution, alors elle échappe au contrôle. C’est ce qu’il se serait produit prorogeant l’état d’urgence en 2005 ainsi que pour la loi du 31 Janvier 2007 sur la modernisation du dialogue social. Pour éviter ce genre de situation il était régulièrement suggéré d’autoriser le simple particulier à saisir lui-même le Conseil Constitutionnel. Ces critiques ont été entendues avec la réforme de la Constitution du 23 Juillet 2008 qui met en place une nouvelle procédure que l’on appelle la « Question Prioritaire de Constitutionnalité ».

  1. b) le contrôle à postériori de la constitutionnalité des lois par le Conseil Constitutionnel: La question prioritaire de Constitutionnalité (QPC).

Depuis la réforme du 23 juillet 2008 le nouvel article 61-1 dispose: « lorsqu’à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction il est soutenu qu’une disposition législative (disposition d’une loi) porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil Constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’État ou de la Cour de Cassation qui se prononce dans un délai déterminé ». Il s’agit donc de critiquer la conformité d’une loi à la Constitution à l’occasion d’un procès portant sur l’application de cette loi. On notera que le texte ne limite pas cette procédure à certaines dispositions législatives, toutes les lois sont donc concernées quelle que soit son ancienneté. La saisine du Conseil Constitutionnel ne se fait pas directement par le justiciable mais par la Cour de Cassation si la (QPC) est soulevée à l’occasion d’une instance (procès) en cours devant une juridiction judiciaire ou par le Conseil d’État si l’instance est en cours devant une juridiction administrative. Les juridictions suprêmes jouent un rôle essentiel en filtrant les contestations. Elles apprécient en effet l’opportunité de saisir le Conseil Constitutionnel, elles se demandent s’il y a véritablement lieu à contester la conformité de cette loi à la Constitution. Elles peuvent s’abstenir de le faire si elles considèrent que la disposition contestée n’est pas contraire à la Constitution. Dans une certaine mesure, elles deviennent donc également des juges de la constitutionnalité. Pour ne pas trop retarder le procès en cours, une loi organique du 10/12/2009 est venue fixer le délai dans lequel les juridictions seront amenées à se prononcer. Une fois qu’ils sont saisis, Cour de Cassation et Conseil d’État ont trois mois pour renvoyer ou non la décision devant le Conseil Constitutionnel et le Conseil Constitutionnel a lui-même trois mois pour se prononcer à compter de sa saisine. La nouvelle rédaction de l’article 62 de la Constitution prévoit que si à l’issue de la procédure, le Conseil Constitutionnel conclut à l’inconstitutionnalité d’une disposition, cette dernière se trouve ipso facto abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil Constitutionnel et dans les éventuelles conditions et limites qu’ils fixent.

  1. c) Conformité d’un règlement à la Constitution.

Il n’existe pas de procédure devant le Conseil Constitutionnel pour vérifier la conformité des règlements à la Constitution. Toutefois, un règlement contraire à toute norme d’autorité supérieure peut être attaquée.

  1. Le contrôle de la conformité des loi aux traités internationaux et au droit communautaire.

L’article 55 de la Constitution consacre la supériorité des traités ratifiés sur les lois internes sous réserve de leur application par l’autre partie. (Condition de réciprocité). De même, les normes communautaires ont une autorité supérieure à la loi interne. Dès lors, si les dispositions d’un traité ou d’une norme communautaire (en général un règlement européen) sont manifestement incompatibles avec celles d’une loi interne, il convient de faire primer l’application du traité ou de la norme communautaire sur celle de la loi. Contradiction entre la loi interne et le traité communautaire: Il n’y a pas de contrôle préventif donc rien n’est fait pour s’assurer que ces contradictions ne surviennent pas. A quel moment va être réglé ce conflit?→ La contradiction entre les deux règles va donc se révéler à l’occasion, en général, d’un procès. C’est le juge saisi du procès à l’occasion duquel cette contradiction se manifeste qui va veiller au respect de la hiérarchie des normes en appliquant la règle d’autorité supérieure et en écartant la règle d’autorité inférieure. Cette solution n’a pas posé de difficulté quand le traité ou le règlement communautaire était postérieur à la loi. Dans ce cas, on a considéré que la loi était implicitement abrogée par le traité ou le règlement communautaire pour tout ce qui entrait dans le champ d’application de celui ci. En revanche, lorsque la loi nationale est postérieure au traité ou à la norme communautaire, les juridictions françaises ont pendant longtemps été réticentes pour l’écarter. Ce n’est que par un arrêt Nicolo du 20 octobre 1989 que le Conseil d’État a accepté de contrôler la conformité d’une loi à un traité et d’écarter la loi au profit du traité. Les juridictions judiciaires font de même depuis plus longtemps parce que c’est par un arrêt de la Cour de Cassation rendu en chambre mixte le 24 mai 1975 (arrêt Jacques Vabre) qui accepte de faire prévaloir le traité de Rome sur une loi postérieure contraire. Le Conseil Constitutionnel a toujours refusé de contrôler la conformité des lois aux traités sauf quand il statue en tant que juge de l’élection. (…) En revanche il accepte de sanctionner les atteintes portées par une loi à l’article 55 de la Constitution. Exemple: Si une loi contredisait les termes de l’article 55 telle que cette loi affirmerait qu’un traité serait applicable même sans condition de réciprocité. Aujourd’hui, si une loi contredit la disposition d’un traité international ou une règle de droit issue d’une norme communautaire, c’est le juge qui devra écarter la règle issue de la loi au bénéfice de la règle issue du traité ou de la norme communautaire.

  1. Le contrôle de la conformité des règlements à toute norme d’autorité supérieure.

Que se passe-t-il si un règlement quel qu’il soit contredit une norme d’autorité supérieure quelle qu’elle soit?

Quand un règlement contredit une norme d’autorité supérieure, deux procédures peuvent être utilisées pour dénoncer ce règlement: la procédure de l’exception d’illégalité et le recours pour excès de pouvoir.

1) L’exception d’illégalité.

L’exception d’illégalité permet à un particulier de se défendre à l’occasion d’un procès en faisant valoir que le règlement que l’on invoque contre lui contredit une norme d’autorité supérieure et qu’il ne saurait donc recevoir application. Si cette illégalité est retenue, le règlement est écarté (mais ne disparaît pas), il n’est pas appliqué et toutes les décisions prises contre celui qui a invoqué l’exception sur la base de ce règlement sont privées d’effets. Mais le règlement lui, n’est pas annulé. Il demeure valable et restera appliqué. En cas de nouveau litige, il faudra que la nouvelle personne poursuivie invoque à nouveau l’exception d’illégalité.

  1. Est-ce que toutes les juridictions sont qualifiées pour juger de la légalité ou non d’un règlement?
  2. Il faut ensuite distinguer selon la juridiction devant laquelle est soulevée la question de l’illégalité: si elle est soulevée devant une juridiction administrative, il n’y a aucun problème car le juge administratif peut lui-même apprécier l’illégalité ou non du règlement. En revanche, pour les juridictions judiciaires, il faut distinguer les juridictions civiles et les juridictions pénales (ou aussi appelées « répressives »). Les juridictions pénales sont compétentes pour apprécier la légalité d’un règlement. Elles peuvent donc retenir l’exception d’illégalité et écarter l’application d’un règlement. En revanche les juridictions civiles n’ont pas cette compétence, elles ne peuvent pas apprécier la légalité d’un règlement (à cause de la séparation des pouvoirs). Elles ne peuvent pas apprécier elles-mêmes si le règlement invoqué est légal. Dans ce cas, le juge civil, s’il existe une contestation sur la légalité du règlement dont il est demandé l’application doit sursoir à statuer et renvoie la question d’illégalité aux juridictions administratives. Une fois que le juge administratif aura rendu sa décision sur ce point, le juge civil pourra sur la base de cette décision reprendre le procès et décider soit d’écarter le règlement s’il est jugé illégal soit d’appliquer le règlement s’il est légal. Il y a toutefois une exception dans laquelle le juge civil peut lui-même se prononcer sur l’illégalité d’un règlement, c’est lorsque le règlement prétendu illégal intéresse la liberté des particuliers, l’inviolabilité de leur domicile ou le droit de propriété.

2) Le recours pour excès de pouvoir

A la différence de l’exception d’illégalité, le recours pour excès de pouvoir a pour but d’annuler le texte incriminé. La nullité du texte, si elle est prononcée bénéficiera à tous, elle joue erga-omnes ce qui signifie qu’elle pourra être invoquée par tous ceux à qui l’on viendra opposer ce règlement par la suite. Cette procédure doit être menée devant les juridictions administratives dans les deux mois suivant la publication de l’acte litigieux. Ce recours n’est pas perpétuel à la différence de l’exception d’illégalité.

Si dans le cadre d’une des deux procédures, c’est la conformité d’un règlement à la constitution qui est invoquée, le contrôle est soumis à une règle particulière. On distingue deux situations: soit entre le règlement et la Constitution il n’existe aucune loi ayant le même domaine d’application, il est alors possible de contrôler directement la conformité du règlement à la Constitution, soit en revanche il existe une loi écran c’est-à-dire une loi intercalée entre la Constitution et le règlement et dont les dispositions traitent de la même matière. Dans ce cas là, les juges ne peuvent que contrôler la conformité du règlement à la loi ainsi peu importe que le règlement ne soit pas conforme à la Constitution, il n’est pas illégal si il est conforme à la loi. Cette particularité s’explique par le souci de ne pas permettre au simple juge de contrôler de manière indirecte la Constitutionnalité des lois.

Exemple : Un décret ou un arrêté qui interdit les filles de sortir le soir, il est contraire à la Constitution. Mais une loi autorise d’astreindre les personnes fragiles à sortir. La Constitution dit quelque chose et une loi, passée à travers les mailles du filet lui est contradictoire. Mais ce règlement est conforme à la loi donc il est légal. Une loi écran est conforme au règlement mais pas à la Constitution donc, le règlement est légal.

Section 3 : Application des lois et des règlements dans le temps et dans l’espace.

Sous-section 1 : Application des lois et des règlements dans le temps.

S’intéresser à l’application des lois et des règlements dans le temps revient à se poser deux questions:

Quelle est la durée de vie et de validité de ces règles? Comment se succèdent-elles dans le temps, c’est à dire comment régler les conflits éventuels qui peuvent exister entre des textes successifs ?

  • 1 : La durée de validité des lois et des règlements.

Les lois et les règlements sont applicables et deviennent obligatoires dès leur entrée en vigueur et jusqu’à leur abrogation.

  1. L’entrée en vigueur des lois et des règlements.

Chaque normes est soumis à une suite de procédures. L’entrée en vigueur des lois nécessite leur promulgation et leur publication alors que celle des règlements n’est subordonnée qu’à la publication.

1) La promulgation.

C’est au Président de la République qu’il appartient de promulguer les lois dans les 15 jours qui suivent la transmission au gouvernement de la loi définitivement adoptée. A cette fin, le Président de la République prend un décret de promulgation qui rend la loi exécutoire. La loi porte la date du décret de promulgation qui n’est pas celle de son entrée en vigueur parce qu’il lui manque, pour entrer en vigueur qu’elle soit publiée.

2) La publication.

La publication est un acte essentiel car c’est de cette formalité que dépend la présomption de connaissance de la loi énoncée par l’adage traditionnel « nul n’est censé ignorer la loi ». Cet adage ne signifie pas que tout le monde connait la loi mais que personne ne peut invoquer son ignorance pour en écarter l’application. Cette présomption est irréfragable c’est à dire qu’il est impossible d’apporter la preuve contraire. Ce principe est justifié d’une part par le soucis d’éviter des discussions permanentes sur la connaissance ou non de la loi et d’autre part, par le principe de l’égalité des citoyens devant la loi. Il existe une seule exception où l’on peut se défendre devant le juge en invoquant l’ignorance de la loi : l’article 4 du décret du 5 novembre 1870 prévoit que lorsqu’une contravention a été commise dans un délais de cinq jours francs à compter de la publication de la loi créant l’incrimination, les tribunaux peuvent écarter la peine encourue si le contrevenant démontre son ignorance.

En matière de droit civil et en particulier en droit des contrats, exceptionnellement, une erreur de droit peut être prise en compte et permettre l’annulation du contrat. La publication se fait obligatoirement au journal officiel pour les lois et les décrets, les arrêtés eux peuvent être publié par d’autres procédés. Ce n’est que cette formalité accomplie que la loi et les règlements entre en vigueur.

3) Date d’entrée en vigueur.

Les lois et les règlements lorsqu’ils sont publiés au journal officiel de la république française, entrent en vigueur soit à la date qu’ils fixent ou à défaut de date fixée, le lendemain de leur publication (article 1 du Code civil) Dans certains cas d’urgence, l’entrée en vigueur peut être avancé au jour de la publication. La date d’entrée en vigueur peut également être reculée soit parce que le législateur ou le pouvoir exécutif a considéré qu’un temps d’adaptation était nécessaire pour appliquer le texte soit parce que le législateur subordonne expressément ou implicitement cette entrée en vigueur à la publication d’un décret d’application et dans ce cas là, la loi entre en vigueur au jour de la publication du décret d’application.

  1. L’abrogation des lois et des règlements.

Exceptionnellement, les lois et les règlements peuvent fixer eux même le terme de leur application. Il s’agit alors de textes temporaires qui cesseront d’être en vigueur au jour du terme fixé. Hormis cette hypothèse particulière, les lois et les règlements ne cessent de s’appliquer que le jour de leur abrogation c’est-à-dire le jour où leurs dispositions ont été supprimées. Le pouvoir d’abroger un texte n’appartient qu’à l’autorité compétente pour régler la matière concernée (seule une loi peut abroger une loi, seul un règlement peut abroger un règlement). Dans chaque catégorie, il faut également respecter la hiérarchie interne entre les lois et les règlements. Un texte d’autorité inférieure ne peut pas abroger un texte de catégorie supérieure. (Ex : une loi ordinaire ne peut pas abroger de lois constitutionnelles, un arrêté ne peux pas abroger une loi). L’abrogation peut être expresse ou tacite. Elle est expresse lorsque le nouveau texte précise que le texte antérieur est abrogé. Elle est tacite lorsqu’elle résulte de l’incompatibilité entre le nouveau texte et l’ancien texte.

Ci-dessous, un autre cours d’Introduction au droit civil est divisé en plusieurs fiches (sources, droit objectif, droit subjectif, preuves,

Autres Cours complet de Droit civil divisé en plusieurs fiches :

  • 2 : Les conflits de loi ou de règlements dans le temps.

Les lois et les règlements changent avec la société. Le problème nait lorsque qu’une question juridique est soumise a un texte nouveau qui abroge le précédent. Avant une loi du 18 février 1938, les femmes mariées étaient soumise à l’autorité de leur mari. Elles étaient juridiquement incapable de contracter et devaient obéissance à leur mari. Cette loi supprime la puissance maritale et l’incapacité de la femme mariée. La question qui s’est alors posée est de savoir quelles étaient les femmes qui allaient profiter de cette loi nouvelle. Pour celles mariées avant l’entrée en vigueur de cette loi, faut-il leur appliquer la loi ancienne ou la loi nouvelle? C’est ce que l’on appelle une hypothèse de conflit de lois dans le temps. Pour résoudre ce type de conflit, il faut déterminer le domaine d’application dans le temps des deux lois successives. Lorsqu’un législateur prend une loi nouvelle ou un nouveau règlement, il insère parfois dans celle-ci des dispositions transitoires c’est-à-dire des dispositions qui précisent comment doit s’opérer le passage de la loi ancienne à la loi nouvelle et qui permettent donc de déterminer le champ d’application respectif des deux lois. En l’absence de dispositions transitoires, on a très vite cherché à poser des principes de solutions: le problème est que ni le législateur ni le pouvoir exécutif ne se sont réellement penché sur la question. En droit privé, on ne trouve que 2 textes qui présentent une utilité pour répondre à la difficulté : le premier texte est l’article 2 du Code Civil qui dispose : « la loi ne dispose que pour l’avenir, elle n’a point d’effet rétroactif » et l’article 112-1 du Code Pénal qui dispose que « sont seuls punissables les faits constitutifs d’une infraction à la date à laquelle ils ont été commis. Peuvent seules être prononcées les peines légalement applicables à la même date. Toutefois les dispositions nouvelles s’appliquent aux infractions commises avant leur entrée en vigueur et n’ayant pas donné lieu à une condamnation passée en force de chose jugée lorsqu’elles sont moins sévères que les dispositions anciennes ».

Ces deux textes se sont vite révélés insuffisants pour régler tous les problèmes d’application de la loi dans le temps susceptibles de s’opposer. La doctrine a pallié cette insuffisance en proposant différentes théories, différents systèmes. Ainsi, une théorie classique dite des droits acquis proposait de distinguer entre les droits acquits et les simples expectatives le principe étant qu’une loi nouvelle ne peut pas remettre en cause un droit d’ores et déjà acquit mais en revanche qu’elle peut remettre en cause une simple expectative. Selon cette théorie, la loi nouvelle ne pourrait pas s’appliquer aux adoptions déjà réalisées parce que ce serait remettre en cause les droits acquits par les adoptants et l’adopté. Au contraire, ceux qui au jour de la loi nouvelle avaient simplement entamé des démarches dans l’espoir d’adopter un enfant étranger se verront désormais interdire ce genre d’adoptions car ils n’avaient pas encore de droits acquis mais une simple expectative. Cette théorie des droits acquits a ensuite été critiquée en raison de l’imprécision de ses critères et pour son impuissance à régler tous les types de conflits de loi dans le temps. Elle a donc peu à peu été abandonnée même si les juges y font encore parfois référence. Les auteurs modernes et en premier lieu Paul Roubier ont proposé un nouveau système, plus simple, pour régler les conflits de loi dans le temps. Ce système repose sur l’affirmation de deux principes : celui de la non-rétroactivité des lois et celui de l’effet immédiat de la loi nouvelle. Ces deux principes ont le même but: définir le domaine respectif de la loi ancienne et de la loi nouvelle. Une fois encore, il s’agit d’éviter que la multiplicité des règles ne conduise pas au désordre, ne compromette pas la sécurité juridique. Le principe de la non-rétroactivité des lois a vocation à gérer la période antérieure à la loi nouvelle. Pour répondre à la question «la loi nouvelle peut-elle s’appliquer à des situations antérieures à son entrée en vigueur?» Le principe de l’effet immédiat de la loi nouvelle a vocation lui à gérer la période postérieure à la loi nouvelle pour répondre à la question : «la loi nouvelle s’applique-t-elle toujours aux situations postérieures à son entrée en vigueur ou doit-elle parfois s’effacer au bénéfice de la loi ancienne qui alors survit?».

 Loi nouvelle

Sur la base de ces deux principes, les auteurs modernes ont construit tout un système de règlement des conflits.

  1. Les principe régissant le traitement des conflits de loi dans le temps.

1) Le principe de la non rétroactivité des lois.

Il a vocation à gérer la période des conflits entre loi nouvelle et loi ancienne pour la période avant la loi nouvelle.


  1. a) Signification des principes

Dire qu’une loi ou un règlement ne doit pas avoir d’effet rétroactif signifie qu’il ne faut pas appliquer une loi nouvelle à des actes ou des faits juridiques avant son entrée en vigueur dans le but de modifier les effets juridiques produits par la loi ancienne.
Ex : en 1916, Mme Dupont meurt en 1916 et ne laisse qu’en héritier un parent au 8ème degrés. Il recueille donc toute la succession. Le 31 décembre 1917, une loi modifie ce qui était à l’époque l’article 755 du Code Civil prévoyant désormais que les collatéraux au delà du 6ème degrés ne sont plus admis à succéder. Cette loi n’a pas d’effet rétroactif et ne peut donc pas remettre en cause la succession de Mme Dupons. Il semble injuste que des sujets de droit se soumettent à des règles qu’ils ne pouvaient pas connaître.

Cette règle de la non rétroactivité des lois s’explique aussi par la nécessité de garantir à chacun la sécurité juridique c’est-à-dire une stabilité minimale des situations juridiques. Comment admettre qu’une situation juridique créée dans le respect de la loi puisse être remise en cause par un changement de loi? Il faut toutefois nuancer: la rétroactivité n’est pas toujours synonyme d’injustice, la justice, c’est la rétroactivité. En droit civil, quand le législateur a reconnu la validité de la reconnaissance d’enfant naturel. …

  1. b) La valeur du principe de non rétroactivité des lois.

La valeur juridique du principe de non rétroactivité des lois varie selon la place dans la hiérarchie des normes qu’occupe le texte qui pose ce principe. Il faut distinguer :

– Pour les règlements, quelle est la valeur du principe de non rétroactivité? La doctrine considère que l’article 2 du code civil ne s’adresse pas au pouvoir règlementaire. En effet, le principe de non-rétroactivité est ce que l’on nomme en droit administratif un principe général du droit (PGD), c’est-à-dire un principe dégagé par la jurisprudence administrative et qui s’impose au pouvoir règlementaire et à l’administration même en l’absence de textes. C’est donc en vertu de ce principe général du droit que les règlements ne peuvent pas avoir de valeur rétroactive. Un principe général du droit a une valeur juridique égale à la loi, donc une valeur juridique toujours supérieure à celle des règlements quels qu’ils soient. Donc, un règlement ne peut jamais contredire ce principe qui ne connait donc pour les règlements aucune exception. Il ne peut pas y avoir de règlements rétroactifs.

Pour les lois pénales: il faut distinguer selon que la loi pénale est plus sévère ou plus douce. Pour les lois pénales plus sévères, le principe de non-rétroactivité de ces lois est énoncé dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (DDHC). Cette déclaration faisant parti du bloc de constitutionnalité, pour les lois pénales plus sévères, le principe de non rétroactivité a une valeur constitutionnelle. Puisque que ce principe a une valeur constitutionnelle et donc ne peut aller à l’encontre de la constitution et peut encourir une censure.

Pour les lois plus douces, le principe est au contraire leur rétroactivité: elles sont obligatoirement rétroactives et ce principe a également valeur constitutionnelle. Elles s’appliquent aux délinquants qui ont commis une infraction avant l’entrée en vigueur de la loi lais qui n’ont pas encore reçu de condamnation définitive au jour de son entrée en vigueur. C’est ainsi que lorsque la peine de mort a été abolie en 1981 et remplacée par la réclusion à perpétuité, la loi pénale plus douce qui abrogeait la peine de mort a été appliquée à toutes les infractions passibles de cette peine commise avant l’entrée en vigueur de cette loi nouvelle. Les délinquants qui n’étaient pas encore condamnés de manière définitive ont vu leur peine de mort transformée en réclusion à perpétuité. Pour ceux qui avaient été condamnés à la peine de mort de façon définitive, ils n’ont pas pu bénéficié de cette loi et ont obtenu la grâce présidentielle pour transformer leur peine de mort en réclusion à perpétuité.

Pour les lois civiles, le principe de non rétroactivité est annoncé à l’article 2 du Code Civil et donc sa valeur juridique est celle d’une loi. Or, ce qu’une loi dit peut être contredit par une autre loi. Il est possible pour les lois civiles d’être rétroactives; le législateur quand il prend une loi peut contredire la règle de l’article 2 (qui a également valeur de loi) en décidant que cette loi sera rétroactive. Il faut toutefois impérativement que le législateur le prévoit expressément. La rétroactivité d’une loi ne se présume pas. C’est parce qu’une loi civile peut être rétroactive que la loi du 3 janvier 1972 dans son article 12 a validé rétroactivement la reconnaissance d’enfants adultérins antérieurs à la loi. Les lois interprétatives dont le but est de préciser le sens d’une loi antérieure sont par nature rétroactives. Elles rétroagissent au jour où la loi qu’elle viennent interpréter est entrée en vigueur sans qu’il soit besoin de préciser ce caractère rétroactif. Le caractère interprétatif d’une loi peut avoir été expressément conféré par le législateur, mais ce n’est pas toujours le cas et si ce n’est pas le cas, c’est au juge de rechercher si la loi présente ou non un caractère interprétatif. Si il décide que oui, alors la loi est rétroactive, s’il décide que non, elle n’est pas rétroactive. Une partie de la doctrine soutien que déclarer une loi rétroactive n’est pas une décision anodine et que pour porter ainsi attente à la sécurité juridique il faut pouvoir justifier d’un intérêt supérieur.

La question qui se pose aujourd’hui et qui fait débat en matière de droit civil est: est-ce que le fait le législateur peut rendre des lois civiles rétroactives entraine pour autant la liberté totale pour lui de décider qu’une loi sera rétroactive?Ne faudrait-il pas poser des limites à cette possibilité de lois rétroactives et ne considérer que l’atteinte que cette rétroactivité porte à la sécurité juridique ne devrait pas être justifiée que par un intérêt supérieur?

1) Principe de l’effet immédiat de la loi nouvelle.

  1. a) signification du principe.

Dire que la loi nouvelle a un effet immédiat signifie que dès son entrée en vigueur elle s’applique à tous les faits qui lui sont postérieurs. On estime en effet que si le législateur décide de mettre en place de nouvelles règles c’est certainement qu’il estime que la loi antérieure présente des défauts. Il est donc logique que la loi nouvelle présumée meilleure soit d’application immédiate. Ce principe est également justifié par la préservation de la sécurité juridique. Il apparaît en effet comme le moyen d’éviter la confusion et le désordre en uniformisant les situations juridiques. Cela ne serait pas le cas si au lendemain de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle on décidait que certaines situations seraient immédiatement soumise à la loi nouvelle mais d’autres resteraient soumise à la loi ancienne. On évite ainsi la coexistence de régimes juridiques (ensemble des règles qui…) différents qui s’appliqueraient ou non selon la date de création de situation juridique. Si ce principe semble imposé par la logique de notre système juridique, il n’en reste pas moins qu’il est difficile de trouver un texte dans lequel il puiserait sa valeur juridique.

  1. b) la valeur du principe.

Quel texte pourrait donner sa valeur juridique au principe de l’effet immédiat de la loi nouvelle?

Certains ont essayé de mettre en avant l’article 2 du Code Civil mais c’est peu pertinent car dire qu’une loi ne dispose que pour l’avenir ne signifie pas forcément qu’elle est la seule à pouvoir disposer pour l’avenir. On pourrait songer également à fonder ce principe sur l’article 1 du Code Civil mais encore si ce texte n’exclut pas la survie de la loi ancienne. Il faut donc se résoudre à ne pas pouvoir définir la valeur juridique de ce principe faute de textes contenant expressément ce principe. Si aucun texte ne formule se principe, il est pourtant largement appliqué. Les hypothèses de survie de la loi ancienne après l’entrée en vigueur de la loi nouvelle qui sont donc des exceptions à ce principe sont rares. La plus importante de ces exceptions est celle retenue en matière de contrats qui s’expliquent par les règles applicables. Le contrat est un accord de volonté par lequel une partie ou chacune des parties s’engage envers la ou les autres à faire, à ne pas faire ou à donner quelque chose. On s’oblige parce qu’on la voulu et on organise la relation contractuelle en fonction du contexte qui existe au moment où on conclut le contrat. En effet, les effets du contrat même après l’entrée en vigueur d’une loi nouvelle reste soumis jusqu’au terme du contrat à la loi ancienne applicable au moment de la conclusion du contrat.

Ex : Contrat 1/01/07 qui porte sur un emprunt conclut à 15% d’intérêts jusqu’à 2017. En 2010, une loi nouvelle intervient qui interdit les taux d’intérêts supérieurs à 10%. Si on applique le principe de l’effet immédiat, le taux de remboursement doit être recalculé en fonction des 10% d’intérêts. En vertu du principe de non rétroactivité du 1/01/07 au 1/01/10 le taux d’intérêts appliqué ne peut pas être remis en cause. Selon le principe de l’effet immédiat, à partir du 01/01/10 l’emprunteur ne rembourserai plus qu’un taux de 10% mais exceptionnellement comme s’agit des effets d’un contrat, il y a survie de la loi ancienne et jusqu’au terme du contrat, le taux d’intérêt de 15% pourra être pratiqué.

Pourtant, la règle en matière de contrat dit que les effets du contrats restent soumis à la loi ancienne, en vigueur lors de la mise en place du contrat. Lorsqu’un contrat s’étend dans le temps, les effets de ce contrat restent soumis à la loi ancienne, loi en vigueur au jour du contrat et donc échappent à la loi nouvelle jusqu’au terme de ce contrat. Il existe toutefois des exceptions à cette exception. Ce principe retenu en matière contractuelle n’est pas absolu, le législateur peut décider qu’exceptionnellement une loi nouvelle sera immédiatement applicable au contrat en cours lorsqu’il estime par exemple que l’ordre public est en cause: c’est une question de mesure.

Ex : Une loi modifiant le montant du salaire minimum sera toujours déclarée applicable au contrat en cours. Même si le législateur ne le précise pas, le juge peut décider qu’une loi nouvelle sera exceptionnellement applicable au contrat en cours lorsque cette loi exprime un intérêt social impérieux justifiant de porter atteinte à la stabilité des conventions.

  1. La mise en œuvre des principes régissant les conflits de loi

Le principe de non rétroactivité de la loi nouvelle et l’effet immédiat de la loi nouvelle ne sont pas difficiles à mettre en œuvre lorsqu’il s’agit de les appliquer à des situations instantanées. Les difficultés apparaissent lorsqu’une situation juridique débute sous l’empire de la loi ancienne et perdure sous l’empire de la loi nouvelle. (Ex: un bail s’étend dans le temps et produit ses effets juridiques sur la durée de même que le mariage s’il est conclut à un instant T, il produit en revanche des effets juridiques qui s’étendent dans le temps. Si la loi change au cours du mariage – ou du bail, il faut alors appliquer les principes de règlement du conflit mais Roubier propose de distinguer selon que la loi en cause concerne la constitution ou l’extinction d’une situation juridique, ou qu’elle concerne les effets d’une situation juridique.

1) Pour les lois concernant la création ou l’extinction d’une situation juridique.

Il s’agit des lois qui déclarent à quelles conditions certains actes ou certains faits sont susceptibles d’entrainer valablement la création ou l’extinction d’une situation juridique. Une loi qui pose les conditions de validité d’une vente d’immeuble ou des effets d’un testament ou encore une loi qui pose les conditions de la responsabilité d’un auteur de dommage. Ce peut être aussi une loi qui dit à quelle conditions une situation juridique disparaît comme par exemple, une loi relative à la prescription (perte du droit d’agir en justice passé un certain délais).

– Lorsque la création ou l’extinction de la situation juridique c’est entièrement réalisée sous la loi ancienne (au moment de la loi nouvelle, la situation juridique était déjà établie ou déjà éteinte). Conformément au principe de la non rétroactivité de la loi nouvelle, ces situations ne devront donc pas être remises en cause par la loi nouvelle et resteront soumises à la loi ancienne sauf si exceptionnellement, la loi était déclarée rétroactive. Ex : un jeune adulte de 20 ans, en 1973 cause un dommage à autrui, le code civil prévoit que les parents sont responsables des dommages causés par leur enfant mineur. C’est au jour du dommage que nait la responsabilité des parents et donc c’est à ce jour que doit s’apprécier les conditions de cette responsabilité. Les parents arrivent devant le tribunal en 1975 alors que la majorité a été abaissée à 18 ans, ils ne peuvent pas se défendre en disant que leur enfant est majeur parce qu’au moment de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle en 1974, la responsabilité est déjà établie parce que la situation juridique est née avant cette loi. Dans une deuxième hypothèse, la création ou dans l’extinction d’une situation juridique implique une certaine durée. Pour le délais de prescription, il faut l’écoulement de ce délais soit écoulé pour que la situation juridique disparaisse. Le principe est que la loi nouvelle s’applique immédiatement mais la période ou les éléments antérieurs gardent la valeur que leur reconnaissait la loi ancienne.
Ex : Délais de prescription :

Situation Si la loi nouvelle raccourcis le délais : (…)
Juridique

Si la loi nouvelle prévoit un délais plus long, de 5 ans, il passe à 10. Si cette loi intervient au bout de 4 ans, alors le nouveau délais commence à courir à compter de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle mais on tient compte des années déjà écoulées. (il reste donc 6 ans avant la prescription)

Une loi du 17 juin 2008 a opéré une réforme très important de la prescription, elle a réduit les délais de prescription elle passe de 10 ans à 5 ans sauf pour les dommages corporels où le délais reste 10 ans.

2) Pour les lois concernant les effets d’une situation juridique.

Il s’agit de lois qui vient poser ou modifier les effets d’une situation juridique une fois que celle ci est née. Ex : une fois que le mariage est proclamé, il va produire les effets définis pas la loi. Les effets d’une situation juridique peuvent s’étendre dans le temps. Si la loi change alors que la situation est en train de produire ses effets, quelle est la règle ? La règle est que les effets passés restent soumis à la loi ancienne car si on les soumettais à la loi nouvelle, se serait la faire rétroagir. En revanche, les effets futurs sont soumis à la loi nouvelle sauf dans l’hypothèse particulière du contrat.
Ex : Le mariage : le mariage n’est pas un contrat.

Le mariage a lieu en 1930, un des effets de ce mariage était de soumettre l’épouse à la puissance de son mari. 18 février 1938, la loi change.

Mariage 1930 Loi Nouvelle – 1938

1935, Ginette vend un bois.

Le contrat qu’elle a conclut est nul car il a été conclut à une période où le mariage avait pour effet de rendre la femme mariée juridiquement incapable.

Sous section 2 : Application des règlements et des lois dans l’espace.

Quel est le champ d’application territorial des lois et des règlements français et comment gérer les conflits de loi dans l’espace ?

  1. Le champ d’application territorial des lois et règlements.

Les lois et règlements ont pour vocation s’appliquer sur l’ensemble du territoire sur lequel s’exerce la souveraineté française. Toutefois, certaines régions sont soumises à des lois qui leur sont propres. Ainsi les départements d’Alsace et de Lorraine (Haut Rhin, Bas Rhin et Moselle), depuis leur retour à la France en 1918, sont soumis dans certains domaines à un droit local, droit issu de lois françaises antérieures à 1871 et de lois allemandes antérieures à 1918. De même, la France non métropolitaine fait l’objet de règles spécifiques (Polynésie adoption) et elle donc soumise en partie à des règles qui ne sont applicables que sur ce territoire.

  1. Les conflits de loi dans l’espace.

Les lois et les règlements français peuvent entrer en conflit avec des règles de droit émanant d’un État différent. Un tel conflit se produit lorsqu’une situation juridique est susceptible d’être régie par des règles de droit émanant d’États différents (exemple un Anglais possède un immeuble en Chine qu’il désire vendre, se réfère-t-il à la loi Chinoise ou Anglaise?). Pour régler ce genre de problème, le droit international privé pose des règles de conflit qui permettent déterminer la loi applicable.

Chapitre 2 : Les sources non écrites du droit objectif.

Tout le monde s’accorde pour reconnaitre que la coutume est une source non écrite du droit objectif. En revanche, l’admission de la jurisprudence comme source du droit objectif est beaucoup plus controversée même si aujourd’hui on peut difficilement nier qu’à tort ou à raison, elle est devenue l’une des sources du droit objectif.

Section 1 : La coutume.

Certaines règles de droit ne sont le fruit d’aucun texte mais se sont établies peu à peu avec le temps et ont puisé leur autorité dans la tradition. Il s’agit des règles coutumières. « On appelle coutume », écrivait Pothier, « des lois que l’usage a établi et qui se sont conservées sans écrits par une longue tradition. » (loi au sens le plus large du terme). A la différence des règles écrites que nous avons étudiées, la coutume n’émane pas de l’État mais s’est élaborée de manière lente, spontanée et populaire, ce sont les gens qui créent les coutumes. Si la coutume ne trouve pas sa source dans un écrit, rien n’interdit une fois que la coutume est née qu’elle soit portée par écrit. Ainsi l’ordonnance de Montil-Les-Tours de 1453 a prescrit la rédaction des nombreuses coutumes de France pour mieux les connaître. Il est vrai que sous l’ancien régime, les coutumes étaient très nombreuses. Avant la révolution, la France était en effet divisée en deux : au nord, les pays dits « de coutume » dans lesquels un droit coutumier s’ajoutait au droit monarchique (qui n’était pas très développé) et au sud, les pays dits « de droit écrit » dans lesquels ont appliquait, en plus du droit monarchique, les règles écrites d’origine romaine. Avant le code civil, la coutume était donc une source essentielle du droit objectif. Le code napoléonien va bouleverser cet ordre des choses en donnant la suprématie à la loi. Cette suprématie de la loi est justifiée par différents arguments : tout d’abord, la loi écrite est plus précise et plus certaine par la présence du texte alors que la coutume peut être une source d’insécurité en raison de sa plus grande incertitude. Surtout, la loi est générale et s’applique à tout le territoire alors que la coutume varie d’une région à l’autre et parfois même d’une profession à l’autre. Enfin, la loi réagit plus vite aux besoins de la société que la coutume dont l’élaboration est particulièrement longue (il faut que ce soit une tradition). Ainsi, la loi du 21 mars 1804 (30 ventôse an XII) ne s’est pas contenté de codifier le droit nouveau en réunissant sous l’appellation « code civil français » toutes les réformes opérées, les lois prises. Parallèlement, Son article 7 prévoit qu’à compter du jour où ces lois sont obligatoires, les lois romaines, les ordonnances, les coutumes générales ou locales, les statuts, les règlements de l’époque cessent d’avoir force de loi générale ou particulière dans les matières qui sont l’objet des « dites lois composant le présent code ». Cette loi ne signifie pas que la coutume a disparu, une lecture a contrario de l’article 7 permet de déduire que pour les matières où il n’existe pas de dispositions légales, de règles posées par le code civil, la coutume peut survivre. On voit tout de même qu’à partir de ce moment là, elle était condamnée à n’avoir qu’un rôle secondaire. En droit civil et en droit social, le rôle de la coutume reste aujourd’hui très secondaire.

En revanche, en droit commercial elle joue un rôle important, en droit international public, elle joue même un rôle essentiel en tant que source de droit et d’obligation pour les états et en droit administratif, sa place en tant que source du droit est également très secondaire.

  • 1 : La notion de coutume.

Le terme coutume a aujourd’hui plusieurs significations: dans un sens très large, il désigne toutes les sources non écrites du droit objectif. Dans un sens plus restreint, on assimile parfois coutume et usage mais la coutume au sens classique du terme (sens strict) est une notion plus restrictive qu’il faut distinguer de notions voisines comme les usages et les pratiques. Traditionnellement, pour qu’il y ait coutume au sens classique du terme, deux éléments doivent être réunis : un élément matériel et un élément psychologique.

  1. L’élément matériel de la coutume

L’élément matériel de la coutume consiste en un comportement suivi de manière habituelle c’est à dire un usage. Mais il ne faut pas confondre usage et coutume car si c’est à partir d’un usage que se forme la coutume, tous les usages ne deviennent pas coutume, et surtout, la coutume étant elle même une règle de droit alors que le simple usage n’a que la valeur juridique que la loi lui accorde. Pour qu’un usage puisse devenir coutume, il faut différentes conditions :

– il faut tout d’abord qu’il soit ancien, qu’il ait une certaine durée comme dit l’adage « Une fois n’est pas coutume ».

– Il faut ensuite qu’il soit constant, c’est à dire qu’il soit régulièrement et généralement suivit durant la période considérée.

– Il faut aussi qu’il soit notoire c’est à dire très largement connu de ceux qu’il concerne.
– Il faut enfin que l’usage soit général c’est à dire qu’il soit appliqué largement de manière générale sur un territoire ou dans une profession. On admet qu’une coutume soit locale mais il faut que dans tout ce territoire, les personnes appliquent cette coutume.
Si ces conditions sont remplies, l’élément matériel de la coutume existe, il faut encore que l’usage présente également l’élément psychologique de la coutume.

  1. L’élément psychologique de la coutume.

C’est de suivre la règle coutumière avec la conviction d’agir en vertu d’agir une règle obligatoire. Toute règle de droit a un caractère obligatoire. Le sentiment du caractère obligatoire de la règle coutumière apparaît comme son élément matériel, c’est à dire de manière spontanée. Un jour, les individus ont la conviction que suivre la coutume est obligatoire : c’est l’élément psychologique de la coutume. Les personnes qui suivent cet usage doivent avoir le sentiment qu’il s’impose à elle avec la force d’une règle de droit. L’usage est alors devenu coutume et une véritable règle de droit est apparue. Il faut enfin dire qu’elle est sa place en droit interne, dans notre système juridique actuel.

  • 2 : Le rôle de la coutume.

La coutume est une source du droit objectif. Elle est à l’origine de règles de droit qui composent le droit objectif. C’est toutefois une source secondaire pour deux raisons : secondaire d’un point de vue quantitatif car dans l’ensemble des règles qui composent le droit objectif, les règles coutumières sont extrêmement minoritaires et secondaires également d’un point de vue qualitatif car l’autorité d’une règle de droit coutumière est inférieure à cette de la règle de droit écrite. En dépit de ce caractère secondaire, on distingue trois rôles possibles de la coutume :

– C’est la loi qui renvoie à la coutume. On parle alors de coutume « secundum legem » (qui seconde la loi). Dans ce cas, c’est le législateur ou le pouvoir exécutif qui délègue leur pouvoir à la coutume. Ex : L’article 671 du code civil prévoit qu’il faut se référer aux usages pour déterminer à quelle distance de la ligne séparant deux propriétés peuvent être faites les plantations. Cet article prévoit à titre supplétif une distance de 2 mètres. Ex: L’article 1736 du code civil prévoit que lorsqu’un bail n’est pas délimité dans le temps, le bailleur ou le locataire peut donner congés à conditions d’observer les délais fixés par l’usage des lieux. Dans ce cas, la règle coutumière a l’autorité que lui confère le texte, elle peut être impérative ou supplétive selon ce que prévoit le texte.

– Dans certains cas, la coutume vise à combler une lacune législative ou règlementaire. On parle de coutume « praeter legem » en l’absence de la loi. Dans son discours préliminaire au code civil, Portalis s’était exprimé en faveur de la reconnaissance de la force obligatoire de la coutume indépendamment d’un renvoi de la loi en cas de silence de cette dernière sur un point précis. La coutume quand elle est praeter legem est alors une source du droit objectif complètement autonome. Il existe des cas assez rares où la coutume a pour but de régler une situation que le législateur ou le pouvoir règlementaire n’a pas prévu. Ces cas sont rares car il faut que l’inaction du législateur soit assez longue pour qu’une coutume ait le temps de s’installer et puisse pallier le manque législatif. En général, le législateur finit toujours pas intervenir et si ce n’est pas le cas, c’est la jurisprudence qui plus vite que la coutume, aura poser la règle manquante.

Il existe cependant différents exemples en droit civil notamment de coutume praeter legem.

Ex 1: En matière notariale, la règle selon laquelle la qualité d’héritier peut être prouvée par des actes de notoriétés a d’abord été une règle coutumière, avant d’être reprise seulement par une loi du 3 décembre 2001, on la trouve désormais à l’article 730 du code civil.

Ex 2 : La règle selon laquelle la femme mariée peut porter le nom de son mari car aucun texte lui attribue expressément ce droit. Toutefois, une telle analyse est discutée car certains estiment que cette pratique a une base légale et résulterait d’une loi du 6 février 1893 reprise aujourd’hui à l’article 264 du code civil. Et l’article dit qu’après le divorce, chacun des époux perd l’usage du nom de son conjoint.

Ex 3: la coutume prétend parfois contredire une loi ou un règlement, on parle alors de coutume contralegem. Si le texte de loi que contredit la coutume est un texte supplétif, il est tout à fait admissible que la coutume puisse contredire cette règle En revanche, on considère qu’une coutume ne peut s’opposer à une loi ou à un règlement impératif car le principe est que la loi ou le règlement est supérieur à la coutume. C’est d’ailleurs parce qu’on considère que la loi ou le règlement est supérieur à la coutume que la jurisprudence refuse d’admettre qu’une coutume ou un usage puisse abroger une loi tombée en désuétude. En dépit de tous ces principes, il existe tout de même des coutumes contraires à la loi appliquées par la jurisprudence et qui ont une valeur de règle de droit. Par exemple, l’article 931 du code civil exige que toute donation soit faite par acte notarié et pourtant la pratique du don manuel est validée par la coutume en ce qui concerne le mobilier. Autre exemple: l’article 1202 du code civil dispose que, sauf exceptions légales, la solidarité ne se présume pas. Pourtant, en matière commerciale, la coutume consacre le principe selon lequel la solidarité peut être présumée.

Section 2 : La jurisprudence.

Le terme « jurisprudence » a plusieurs significations. Dans un sens large, elle peut être définie comme l’ensemble des décisions rendues par les juridictions soit dans une matière, soit dans une branche du droit, soit dans l’ensemble du droit. Dans un sens strict, on qualifie de jurisprudence une solution donnée par les juridictions à un problème posé, solution qui se répète et se maintient de telle sorte qu’il est fort probable que le même problème sera, à l’avenir, réglé conformément aux principes dégagés par les décisions antérieures. Lorsque l’on se demande si la jurisprudence est une source de droit, on parle de la jurisprudence au sens strict. Avant de voir les discussions qui existent sur l’admission ou non de la jurisprudence au sein des sources du droit objectif, il convient d’abord d’étudier les conditions et les circonstances de sa formation.

Sous section 1 : La formation de la jurisprudence.

La jurisprudence émane du juge, elle est liée à la fonction juridictionnelle. La mission du juge consiste à apporter une solution à un litige en appliquant la règle de droit adéquat. Il assure le passage de la règle abstraite (qui est la règle de droit) au cas concret rencontré par les justiciables. Le juge tranche la question qui lui est posée en disant le droit. L’article 4 du code civil lui impose même de trancher le litige qui lui est soumis : « le juge qui refusera de juger sous prétexte du silence, de l’obscurité ou de l’insuffisance de la loi pourra être poursuivi, être coupable de déni de justice ». Lorsque la règle de droit existe et qu’elle est claire et précise, la mission du juge est simple et se limite à appliquer fidèlement la règle de droit. Mais la règle de droit est par nature générale et ne peut pas envisager toutes les situations présentes et futures. Pour exercer sa mission, le juge doit très souvent interpréter la loi c’est à dire lui donner une signification exacte et définir sa portée. C’est par l’exercice de ce pouvoir d’interprétation de la règle de droit que la jurisprudence prend corps et c’est grâce à l’organisation judiciaire, et en particulier à la hiérarchie judiciaire qu’elle achève ce se former.

  • 1 : Le rôle du pouvoir d’interprétation de la règle de droit par le juge dans la formation de la jurisprudence.

Pour comprendre l’importance du pouvoir d’interprétation de la règle de droit par la juge dans la formation de la jurisprudence, il faut tout d’abord préciser cette notion d’interprétation puis distinguer les différents aspects que peut prendre l’interprétation judiciaire.

  1. Généralités sur l’interprétation.

Ce sont principalement les magistrats qui ont le pouvoir en France (du moins actuellement, ça n’a pas toujours été le cas) d’interpréter la loi. Les juges ont pour mission d’appliquer la loi dans les cas litigieux (cadre du procès, du litige) et à cette occasion de donner l’interprétation de la loi quand elle est nécessaire, lorsque la loi pose une difficulté).

Rôle n°1 : Interpréter la loi

La première fonction des juges est l’interprétation de la loi: un texte de loi ne peut que très rarement s’appliquer sans qu’il soit nécessaire d’en définir les termes; (ex ; en matière de Responsabilité civile Délictuelle les articles 1382, 1383 et 1384 ne font qu’énoncer de grands principes et le juge les interprètes).


Exemple : art 1382 « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Ce sont les juges qui ont définis, à partir de ce texte, la notion de faute, de dommage moral, de dommage physique, de dommage par ricochet, de réparation, de préjudice, etc.

Exemple: en 1972 importante réforme de la succession, l’article 760 n’était pas clair et son interprétation a été donnée peu à peu au fil des procès. Problème entre l’enfant adultérin, l’enfant légitime et l’enfant naturel.

On a déjà rencontré la saisine pour avis qui permet d’obtenir rapidement la réponse de l’interprétation de la haute juridiction qu’est la Cour de cassation à une question de droit nouvelle. Elle permettra donc d’obtenir rapidement l’interprétation de la haute juridiction. En toute hypothèse l’interprétation est donnée au cours d’un litige, on ne peut s’adresser au juge ou a la Cour de cassation directement pour le cas ou un jour il y aurait un litige sur la question.

Pour obtenir cet avis de la Cour de cassation, il faut un procès : contrôle concret. La saisine pour avis ne peut pas intervenir de manière abstraite. Le juge qui demande l’avis soit saisis d’un litige.


Rôle n° 2 : la suppléance de la loi par le juge : l’interdiction du « déni de justice ».


Deuxième fonction des juges, selon l’art 4 du Code Civil, la suppléance de la loi. Cet article pose l’obligation de juger sous peine de poursuite pour « déni de justice », même en cas de silence de la loi. Le rôle créateur de la jurisprudence est alors accentué.


Il n’invente pas pour autant les règles, il s’appui sur les textes qui visent des cas voisins, ou de grands principes de notre droit ou qui relève de la coutume.


Rôle n° 3 : l’adaptation de 1a loi à l’évolution des moeurs.


Sa troisième fonction est l’adaptation de 1a loi à l’évolution des moeurs. L’exemple le plus frappant est celui de l’interprétation de l’article 1384 (responsabilité du fait des choses) ayant permis aux juges de faire face aux accidents du travail dans une société nouvellement industrialisée au début du 20ème siècle ainsi qu’aux accidents de la circulation avec le développement de l’automobile.

  1. Les différents aspects de l’interprétation judiciaire.

Le juge doit trancher les litiges, c’est une obligation qui lui est soumise sous peine de déni de justice. Il tranche le litige en appliquant la loi, il est le serviteur de la loi, il doit la respecter si bien que si cette loi est claire et précise, il lui suffit pour juger de dire le droit et d’en tirer les conséquences mais lorsque la règle de droit nécessite une interprétation parce qu’elle est obscure, démodée, absente, le juge doit obligatoirement juger et trancher le litige. Dans sa mission d’interpréter, le juge bénéficie d’un certain rôle créateur puisqu’il doit choisir entre toutes les différentes interprétations possibles d’un même texte laquelle est la plus opportune. Ce rôle créateur se manifeste de différentes manières.

Première hypothèse : l’interprétation de la loi par le juge peut tout d’abord l’obliger à préciser la loi. Si on demande au juge d’appliquer une loi qui n’est pas précise ou obscure, il devra commencer par l’interpréter pour préciser son contenu. Par exemple, l’article 1382 du code civil : « tout fait quelconque de l’homme qui cause un dommage à autrui oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Cette règle juridique pose des conditions à la responsabilité civile du fait personne. Elle indique qu’il faut pour que la victime obtienne des dommages et intérêts qu’elle prouve qu’elle a subi un dommage, que le responsable a commis une faute et qu’il y a bien eu lieu de cause à effet mais à aucun moment cette règle de droit ne donne la différence de qu’est-ce qu’un dommage ou du lien de cause à effet. C’est donc au juge à qui l’on demande d’appliquer l’article 1382 du code civil qu’il est revenu de préciser ces notions, des définitions manquantes puisqu’il ne pourra pas appliquer les règles de droit sans ce préalable.

– Deuxième hypothèse : l’interprétation de la loi par le juge peut obliger à adapter la loi. Les règles de responsabilité civile édictées en 1804 sont très vite apparues dépassées.

En effet en 1804 les possibilités d’accident étaient très différentes de celles qui existent aujourd’hui. L’évolution de la société moderne, le développement du machinisme ont vu apparaître des accidents inimaginables en 1804. Les juges se sont trouvés vite démunis pour appliquer à ces nouveaux accidents des règles édictées à une époque ou tout ces progrès n’existaient pas. La Cour de Cassation a alors eu l’idée d’utiliser l’article 1384 alinéa 1 du code civil qui a l’origine en 1804 n’était conçu que comme une transition entre l’article 1383 et 1385 et d’utiliser ces termes généraux pour proclamer l’existence d’un principe général de responsabilité du fait des choses. Sur la base de ce texte, les juges ont créé de toute pièce un régime général de responsabilité du fait des choses non fondé sur la faute, pour adapter le texte du Code Civil aux nouveaux besoins de la société. En 1991, la Cour de cassation a utilisé ce même article pour énoncer cette fois le principe général de responsabilité au fait d’autrui.

Troisième hypothèse : Elle correspond au cas où le pouvoir d’interprétation du juge l’oblige à combler les lacunes de la loi. On soumet un litige au juge, la loi ne dit rien à propos de cette situation, le juge pour trancher ce litige, va créer une règle. L’exemple d’un tel rôle du juge peut être trouvé dans le principe général d’enrichissement sans cause consacrée par la jurisprudence. Avec l’arrêt Bourdier de la Cour de Cassation du 15 juin 1892 du principe général d’enrichissement sans cause.

Sur la base de disposition éparses du code civil sanctionnant l’hypothèse d’enrichissement sans cause d’une personne au détriment d’une autre, le juge a consacré un principe général d’enrichissement sans cause sur la base duquel, quand les conditions sont remplies, l’appauvri peut réclamer à l’enrichi un dédommagement qui ne peut pas être supérieur à son appauvrissement ni excéder l’enrichissement. Un tel principe a notamment permis au juge en l’absence de règles spécifiques d’allouer à la concubine ou au concubin délaissé de sommes d’argent à titre de dédommagement en l’absence de règles de droit régissant la rupture de concubinage.

  • 2 : Le rôle de l’organisation judiciaire dans la formation de la jurisprudence.

Le devoir et le pouvoir d’interprétation du juge le conduit à poser des règles. Ces règles vont devenir jurisprudence par la répétition de leur application. On dit en effet qu’une jurisprudence est fixée lorsque les juges sur un problème donné répètent tous la solution la retenue. De sorte que le principe qui a été dégagé a vocation a être perpétuée. C’est cette répétition qui installe la jurisprudence et cette répétition est rendue possible par la hiérarchie judiciaire.

Pourquoi une solution donnée par un juge se répète-t-elle parfois pour devenir jurisprudence. La première raison est un souci de cohérence. Lorsque le juge doit à l’occasion d’un nouveau procès interpréter le même texte, il a logiquement tendance à se référer au raisonnement qui l’a déjà tenu. Il conserve en général la même interprétation de la loi et reprend les motifs de sa précédente décision c’est-à-dire le raisonnement juridique par lequel il justifie la solution apportée au litige. Le risque c’est que si chaque juge est cohérent avec lui-même il n’est pas évident qu’ils le soient entre eux. C’est grâce à l’organisation judiciaire et plus précisément à la hiérarchie qui existe entre les juridictions du fond et et la Cour de Cassation (droit privé) et le Conseil d’État (droit public) que la solution va être unifiée pour pouvoir alors se répéter. En matière de droit privé la Cour de Cassation joue un rôle primordial. Tout d’abord elle contrôle le respect de la loi par les juridictions du fond. En effet, elle n’est pas un troisième degré du juridiction car elle ne réexamine pas les faits et ne juge qu’en droit. A l’occasion d’un pourvoi en Cassation, elle vérifie que les règles de droit ont bien été appliquées aux faits établis et appréciés souverainement par les juges du fond. En jouant ce rôle, la Cour de Cassation va favoriser l’apparition d’une jurisprudence uniforme. En effet, en examinant les décisions attaquées, pour vérifier la correcte application de la loi, elle donne son point de vue sur le sens de la règle de droit et sur l’interprétation qu’il convient de lui donner. Ainsi, elle va peu à peu imposer une interprétation uniforme de la règle de droit. Certes, en principe les juridictions du fond sont libres de juger en fonction de leur propre interprétation de la loi. Mais si cette interprétation diffère de celle de la Cour de Cassation, elles verront en cas de pourvoi leur décision cassée, annulée. L’organisation judiciaire est telle que la Cour de Cassation finira toujours par imposer son interprétation. Le procédé le plus marquant de ce rôle de la Cour de Cassation c’est la procédure applicable en cas de second pourvoi. Lorsqu’une affaire est jugée une première fois par les juges du fond, et qu’un premier pourvoi a été formé. Le Cour de Cassation contrôle la bonne application du droit par les juges du fond. Si elle estime que la loi n’a pas été respectée, elle casse, annule, la décision soumise à son contrôle. Annuler ça veut dire anéantir rétroactivement la décision, faire comme si elle n’avait jamais existé et donc la Cour de Cassation renvoi l’affaire devant une autre Cour d’Appel, l’affaire et de nouveau jugée en faits et en droit. Le juge peut se plier à la décision de la Cour de Cassation et retient une solution conforme à cette décision. Dans ces cas là, il n’y pas certainement pas un second pourvoi et donc l’affaire prend fin. Soit la juridiction de renvoi persiste à retenir une solution différente de celle de la Cour de Cassation, dans ce cas il y aura à coup sûr un second pourvoi. L’affaire retourne devant la Cour de Cassation et est alors examinée par l’assemblée plénière de la Cour de Cassation. Il s’offre a elle deux possibilités, soit elle revient sur sa première analyse et rejette le pourvoi, soit elle maintient l’interprétation qu’elle a faite lors du premier pourvoi, elle prononce une nouvelle cassation, elle annule encore une fois la décision du juge du fond et renvoi l’affaire une dernière fois à une autre juridiction de même degré et de même nature. Cette fois-ci, la juridiction de renvoi doit obligatoirement se plier, appliquer, la solution retenue par la Cour de Cassation. Au final, par ce procédé, la Cour de Cassation pourra imposer une interprétation de la loi, son interprétation de la loi et permettre l’apparition d’une jurisprudence. Lorsqu’une question de droit pose un problème de principe dès le premier pourvoi, la Cour de Cassation peut également décider de se réunir en assemblée plénière. Pour donner plus d’autorité à la solution qu’elle retient et obtenir plus rapidement le ralliement des juges du fond à cette solution. Comme la Cour de Cassation est divisée en Chambre, il arrive parfois qu’une même question de droit ait été soumise à différentes chambres de la Cour de Cassation, et qu’elles n’aient pas toute retenu la même solution. Pour mettre fin à une telle divergence entre ces propres chambres, La Cour de Cassation décidera de se réunir en chambre mixte, c’est-à-dire composée de magistrats issus des deux chambres qui s’opposent pour que cette divergence soit réglée et que les chambres s’entendent sur une solution unique. Il existe d’autres procédures qui permettent à la Cour de Cassation de jouer son rôle d’unification de jurisprudence, c’est la cas par exemple de la saisine pour avis de la Cour de Cassation, introduite par une loi du 15 Mai 1991.

Elle permet aux juridictions de l’ordre judiciaire de saisir la Cour de Cassation lorsqu’une nouvelle question de droit se pose pour solliciter son avis avant même avoir à statuer. L’avis donné par la Cour de Cassation ne lie pas le juge qui le demande. C’est toujours dans le même souci qu’une loi du 3 Juillet 1967 a prévu une autre procédure, le pourvoi dans l’intérêt de la loi.

Le pourvoi dans l’intérêt de la loi permet au procureur près la Cour de Cassation, lorsqu’il apprend l’existence d’une décision jugée contraire à la loi et contre laquelle aucun pourvoi n’a été formé par l’une des parties au procès, si elle prononce la cassation, la cassation n’aura aucun effet sur les parties. C’est une cassation de principe qui permet à la Cour de Cassation de contester le principe de cette décision et donc de dissuader les juges du fond de retenir une telle solution. Quand on parle de cassation, on parle de la jurisprudence de la Cour de Cassation dont on parle. Pour autant, les décisions des juridictions d’appel sont importantes. Tout d’abord, elles sont les premières à se prononcer sur les nouveaux textes. Parfois même, comme les Cour d’Appel peuvent proposer des décisions différentes, c’est en lisant ces décisions qu’on prend conscience des différentes interprétations possibles de la loi avant que la Cour de Cassation impose la sienne. Ce sont les arrêts de la Cour de Cassation qui fixent avec autorité une jurisprudence mais attention, tous les arrêts rendus par la Cour de Cassation n’ont pas la même autorité. Il faut en effet distinguer les arrêts d’espèce et les arrêts de principe. Les arrêts de principe sont ceux par lesquels la Cour de Cassation tranche en son principe une question de droit en général controversée, par cette décision, la Cour de Cassation pose une règle, pose un principe. En général, ces arrêts se caractérisent par une motivation générale, de nature à leur procurer une autorité morale en dehors de l’espèce jugée. Christian Atias qui a consacré une étude à ce type d’arrêts, les définit comme « Des décisions univoques dénuées d’ambiguïté, tranchant nettement et solennellement, c’est-à-dire durablement, le débat entre deux opinions à valeur générale, soutenues ou soutenables ». Ce sont ces principes généraux qui sont amenés à régir d’autres cas analogues. Ce n’est pas le cas des arrêts d’espèce qui peuvent être définis comme les arrêts qui quelle que soit la motivation juridique sur laquelle ils s’appuient, ont été rendu en considération des circonstances particulières de l’affaire en cause et n’ont donc pas de portée générale. La question qui se pose maintenant est de savoir quelle est la valeur des principes, des règles, dégagés par la jurisprudence. Est-ce que ces règles appliquées de manière répétée par les juridictions sont de véritables règles de droit? En d’autres termes, la jurisprudence a-t-elle un pouvoir normatif? Ou encore, est-elle l’une des sources du droit objectif?

Grâce au mécanisme du pourvoi en cassation et notamment par le rôle fondamental joué par l’assemblée plénière, elle est systématiquement saisie en cas de second pourvoi mais aussi parfois dès le premier pourvoi lorsque la question qui fait l’objet du pourvoi est une question de principe ou une question susceptible de diviser les différentes chambres de la cour de cassation (impose une interprétation unique). Ce rôle d’unification que joue la cour de cassation se trouve renforcé par la possibilité de saisir cette cour suprême dans la cadre de procédures particulières. Ainsi, la procédure de saisine de la cour de cassation pour avis a été introduite par une loi du 15 mais 1992. Elle permet aux juridiction de l’ordre judiciaire (du fond) de saisir la cour de cassation lorsqu’une question de droit nouvelle se pose pour solliciter son avis avant de statuer. L’avis donné par la cour de cassation ne lie pas le juge à la cour de cassation, il n’est pas obligé de le suivre.

Une autre procédure favorise également ce rôle d’unification de la jurisprudence par la cour de cassation. Celle-ci a été introduite par une loi du 3 juillet 1967 et s’appelle « le pourvoi dans l’intérêt de la loi. » Cette procédure permet au procureur près la cour de cassation de saisir lui même la cour de cassation lorsqu’il apprend l’existence d’une décision jugée contraire à la loi et contre laquelle un pourvoi n’a pas été formé par l’une des parties au procès. Si la cassation est prononcée, elle n’a aucun effet sur les parties. C’est une cassation de principe dont le seul but est dans l’intérêt de la loi de proclamer quelle est la bonne interprétation qu’il faut en faire.
La jurisprudence la plus importante est bien sûr celle de la cour de cassation. Les décisions rendues par les cour d’appel car ce sont les premières à se pencher sur les nouveaux textes. Elles peuvent parfois proposer des interprétations différentes et ce sera alors à la cour de cassation de trancher. C’est pourquoi l’étude de la jurisprudence implique fondamentalement et essentiellement l’étude des arrêts de la cour de cassation. Il faut distinguer parmi les arrêts rendus par la cour de cassation les arrêts de principe et les arrêts d’espèce. Les arrêts de principe sont ceux par lesquels la cour de cassation tranche en son principe une question de droit en général controversée. Ils se caractérisent en principe par leur motivation générale de nature à leur procurer une autorité morale en dehors de l’espèce jugée. Christian Atias, qui a consacré une étude à ce type d’arrêts les définit comme des décisions univoques, dénués d’ambiguïté, tranchant nettement et solennellement c’est à dire durablement le débat entre deux opinions à valeur générale soutenues ou soutenables. Ce sont ces décisions là de la cour de cassation qui contiennent un principe d’application générale appelé à régir d’autres cas analogues qui fondent une jurisprudence. Et c’est pour cette raison que la portée de ces arrêts est supérieure à la portée d’un simple arrêt d’espèce. Les arrêts d’espèce sont ceux qui quelque soit la motivation juridique sur laquelle ils s’appuient ont été rendus en considération de circonstances particulières de l’affaire, sans rechercher à avoir une portée générale au delà de cette affaire, sans dégager de principes.


Dans certaines situations, le juge ne se contente pas de trancher un litige, il doit pour appliquer la loi l’interpréter, pouvoir à l’occasion de l’exercice duquel il peut être amené à poser un principe de solution, une « règle » qui pourra avoir vocation à se répéter si elle est consacrée par la cour de cassation qui veillera alors à ce que toutes les juridictions du fond appliquent ce même principe de solution dans une situation similaire. Un principe, une règle est nés par l’exercice par la juge de sa fonction. La question qui reste à se poser est si cette règle peut être qualifiée de règle de droit, si la jurisprudence peut se voir reconnaître un pouvoir normatif, en d’autres termes, si la jurisprudence peut être considérée comme l’une des sources de droit objectif.

Sous-section 2 : la jurisprudence, source contestée de droit objectif.

Dans les pays du « commom law », la jurisprudence joue un rôle de premier plan. En Angleterre par exemple, on applique la règle du précédent. Chaque juge est lié par le précédent des juridictions supérieures. En France, la place de la jurisprudence suscite quelques controverses.

  • 1 : Les arguments pour exclure la jurisprudence des sources du droit objectif.

Si l’on entend par source du droit objectif la source d’une règle obligatoire, il existe différents arguments classiques pour refuser à la jurisprudence la qualité de source du droit.

Premier argument : principe de la séparation des pouvoirs. Ce principe interdit au juge de s’immiscer dans la fonction législative en posant des règles générales et obligatoires. L’article 5 du code civil tire les conséquences de ce principe en énonçant en effet qu’il est défendu au juge de se prononcer par voie de disposition générale et règlementaire sur les causes qui leur sont soumises. C’est ce que l’on appelle l’interdiction des arrêts de règlement c’est à dire qu’il ne peut pas poser de règle générale et abstraite applicable à tous les cas analogues mais seulement énoncer une règle applicable uniquement au cas qui lui est soumis.

Le deuxième argument est d’invoquer le principe de l’autorité relative de la chose jugée. Ce principe énoncé à l’article 1351 du code civil signifie qu’une fois les recours prévus par la loi épuisés, une décision judiciaire ne peut pas être remise en cause par les parties. Elles ne peuvent plus se faire un autre procès à propos du même objet, pour la même cause. La décision de justice a donc une autorité mais cette autorité est relative car elle n’existe que pour les parties. Les tiers ne sont absolument pas liés par la décision rendue lors du procès. Selon ce principe, il ne peut donc y avoir que des décisions particulières. Dès lors, même si dans les faits la jurisprudence se généralise, ce n’est pas pour autant que la règle posée a un caractère obligatoire pour tous. Le juge est toujours maitre de sa décision et peut par la suite changer d’interprétation.

A côté de cet argument juridique il faut ajouter des critiques de la jurisprudence en raison de son caractère aléatoire.

Le troisième argument contre la jurisprudence est son incertitude, son caractère aléatoire. On fait valoir qu’il n’y a pas toujours unité de la jurisprudence. Il est en effet fréquent de voir des oppositions entre la jurisprudence du Conseil d’Etat et celle de la cour de cassation ou en matière civile entre les différentes chambres de la Cour de Cassation. L’incertitude de la jurisprudence résulte également de son caractère rétroactif. En effet, au moment où le juge statue et dégage la règle destinée à solutionner le litige, les faits se sont déjà passés. Dès lors, si la règle posée est nouvelle, si elle inaugure une nouvelle jurisprudence, cette jurisprudence rétroagit nécessairement pour se substituer à la règle antérieure.

Et pourtant, ca va être à l’occasion de son affaire que la jurisprudence va dégager un nouveau principe et lui appliquer. Cette rétroactivité est un élément d’insécurité car l’usager du droit est toujours exposé à un revirement de jurisprudence qu’il n’a pas vu venir.

Ex : par un arrêt en date du 27 novembre 1984, la première chambre civile de la Cour de Cassation décide que la clientèle médicale est incessible car elle est attachée à la personne du praticien et donc, comme la personne humaine, elle est hors du commerce. Par un arrêt du 7 novembre 2000, la même chambre civile a changé sa jurisprudence (a opéré un revirement de jurisprudence) en décidant que la clientèle médicale pouvait être cédée à condition que soit sauvegardée la liberté de choix du patient. La Cour de Cassation a fait une nouvelle interprétation de l’article 1128 en estimant que la clientèle médicale n’était pas une des choses considérées par l’article 1128 comme hors du commerce. L’affaire qui a donné lieu à cet arrêt de 2000 c’est nécessairement produite avant le 7 novembre 2000. On peut imaginer qu’entre 1995 et 1999, un médecin ait cédé sa clientèle à un jeune confrère et que ce jeune confrère, ne voyant pas les clients arriver, a regretté d’avoir payé pour rien et souhaiter obtenir la nullité du contrat surtout que la jurisprudence était de son côté.

Le revirement de jurisprudence consiste pour les juges à rompre à l’occasion d’un nouveau procès avec le principe de solution admis jusque là en adoptant une nouvelle position, un nouveau principe différent, parfois même radicalement opposé. Ce revirement de jurisprudence et son caractère rétroactif sont invoqués comme étant des obstacles à l’admission de la jurisprudence comme source du droit objectif. Le problème du caractère rétroactif du revirement de jurisprudence a déjà fait l’objet d’un rapport commandé par le premier président de la cour de cassation (Guy Canivet à l’époque) qui a confié à un groupe de travail présidé par le professeur Nicolas Bolfessi le soin de rédiger ce rapport. Ce rapport a été remis le 30 novembre 2004 puis publié. Il propose essentiellement de moduler dans le temps les effets des revirements de jurisprudence en n’appliquant pas immédiatement la règle nouvelle pour éviter qu’elle rétroagisse et qu’elle vienne donc régler des faits nés avant son apparition. Ce rapport propose également le caractère normatif de la jurisprudence et de mettre définitivement un terme au débat en admettant que la jurisprudence est bien une source non écrite du droit objectif.

  • 2 : Les arguments pour admettre que la jurisprudence est une source de droit objectif.

En dépit de tous les arguments évoqués, certains auteurs considèrent que la jurisprudence est la source de règles de droit obligatoire et donc une source de droit objectif. Jestaz résume cette position en affirmant que « les auteurs raisonnent trop souvent en fonction de ce qui doit être et non de ce qui est. A propos de la jurisprudence, on se demande toujours si elle a le droit d’être une source du droit et non si elle en est une qu’elle en ait ou non ne droit. La jurisprudence est appliquée comme droit en vigueur et est enseignée à ce titre ce qui en fait réellement une source en dépit de ce que la constitution ou l’article 1351 du code civil lui interdisent de jouer ce rôle ». Jestaz se place dans une position de réalisme. Pour ces auteurs, la jurisprudence a un pouvoir créateur de normes, pouvoir qui découle du pouvoir d’interprétation du juge. Les règles dégagées par la jurisprudence ont un caractère obligatoire. Pour preuve, lorsqu’une jurisprudence est constante, le justiciable doit s’y conformer tant qu’il n’y aura pas eu de revirement de jurisprudence, c’est celle solution qui lui sera proposé. Les règles ainsi dégagées par la jurisprudence sont de la première importance. A la différence de la coutume, ces règles qui seraient issues de la jurisprudence sont très nombreuses. Ainsi, en matière de responsabilité civile, la grande majorité des règles sont issues de la jurisprudence et personne ne songerait à les remettre en cause. Donc, la jurisprudence aurait un pouvoir normatif, elle crée des règles de droit mais on peut encore s’interroger sur le fondement du caractère obligatoire de la règle issue de la jurisprudence. Certains ont essayé de justifier ce caractère de la règle jurisprudentielle en assimilant la création d’une jurisprudence à celle d’une coutume mais cette analyse est ouvertement critiquée parce qu’il y a une différence de taille entre jurisprudence et coutume : c’est que la coutume est spontanée, elle vient du peuple; la jurisprudence elle résulte d’une lecture de la loi par le juge.

On a également essayé de justifier le caractère obligatoire de la règle jurisprudentielle par l’autorisation de la loi. Si le législateur ne condamne pas la jurisprudence, c’est qu’il l’approuve et donc on peut considérer implicitement, par cette approbation, il lui donne un caractère obligatoire. Si on retient cette analyse, il faut alors considérer que la jurisprudence ne créerait dans règles que par délégation de la loi (comme la coutume segundum legem). Or, de nombreux auteurs ne veulent pas d’une telle explication car ils considèrent que non seulement, la jurisprudence est une source du droit objectif mais une source autonome c’est à dire indépendante de la loi, ce qui ne signifie pas pour autant que son pouvoir est similaire à une loi. Si la jurisprudence est une source autonome, elle a nécessairement une autorité inférieure à la loi (en droit privé tout au moins), le juge ne peut pas s’opposer à une règle de droit écrite. Tout les auteurs qui reconnaissent à la jurisprudence la qualité de source de droit objectif écartent également les reproches traditionnels qui lui sont fait comme son caractère changeant dont la réponse est que la jurisprudence ne change pas plus souvent que la loi.

D’autre part, elle présente l’immense avantage de sa souplesse. La règle jurisprudentielle est un droit vivant qui évolue et s’adapte plus vite aux bouleversements de la société. On ne peut pas aujourd’hui apporter une réponse certaine et unanime à la réponse du statut de la jurisprudence. Il y a toujours des auteurs qui considèrent qu’elle ne peut pas être une source de droit objectif, il y a toujours des textes fondamentaux qui ne sont pas compatibles avec cette réalité et pourtant, la grande majorité des juristes, dans la réalité, ne peuvent pas nier que la jurisprudence crée des règles. Pour mettre fin à ce paradoxe, il faudrait une intervention du législateur.

Section 3 : La doctrine.

La doctrine n’est pas une source de droit objectif. Le terme doctrine désigne l’ensemble des opinions juridiques et des travaux consacrés à l’étude du droit. Ce terme désigne également les auteurs de ces travaux qui sont pour l’essentiel des universitaires mais aussi beaucoup de praticiens (magistrats, notaires). La doctrine a pour objet de faire connaître le droit, de mettre en évidence les défaillances du système juridique, interpréter la loi et la jurisprudence. La doctrine joue un rôle fondamental car elle peut exercer une influence aussi bien sur le législateur que sur le juge; Elle ne fait toutefois que donner des opinions et non poser des règles et c’est pour cela que l’on doit qualifier la doctrine d’autorité et non pas de source de droit objectif.

Partie II : Les droits subjectifs.

Les droits subjectifs sont les prérogatives, les pouvoirs que les particuliers possèdent à l’égard de certains liens ou à de certaines personnes. Ces prérogatives reconnues par le droit objectif qui en détermine la nature et l’étendue. Paul Roubier est l’un des premiers à avoir énoncé l’existence des droits subjectifs. Ex : Le droit de propriété est un droit subjectif, c’est le pouvoir qui donne le pouvoir à une personne le plus absolu sur une chose et c’est le droit objectif qui donne la définition du droit de propriété, qui pose les conditions auxquelles ce droit peut être acquis, qui organise sa protection et détaille son étendue précise en énonçant quel pouvoirs ce droit donne à un individu sur sa chose. On les appelle droits subjectifs parce qu’ils appartiennent à une personne déterminée, à un sujet. Il ne peut y avoir de droit subjectif que dans le cadre posé par le droit objectif puisque c’est lui qui pose les conditions de leurs existences et leur régime de protection.

Pour totalement comprendre la notion de droits subjectifs, on va commencer par s’intéresser aux titulaires de ces droits: qui peut être titulaire de droits subjectifs? Puis nous verrons quelles sont les catégories de droits subjectifs. Ensuite, on s’intéressera également à la source de droit subjectif. Enfin, nous terminerons avec comment prouver le droit subjectif.

Chapitre 1 : Le titulaire du droit subjectif, le sujet de droit.

On appelle sujet de droit tout être susceptible d’être titulaire de droits subjectifs et d’obligations. Dans le monde juridique, il n’existe grossièrement que deux catégories : les objets de droit (les choses) et les sujets de droit (les personnes). Lorsqu’on envisage les personnes juridiques, les sujets de droit, on pense tout de suite aux êtres humains. Les êtres humains ne sont pas les seuls à être sujets de droit, à avoir la personnalité juridique. En effet, la personnalité juridique est également reconnue à des groupements d’individus comme les sociétés commerciales ou les associations, on les appelle des personnes morales. Parmi les choses, il y a différentes distinctions, on distingue notamment les meubles (objets pouvant être déplacés) et les immeubles (qui ne peuvent pas être déplacés). Il est vrai qu’au sein de la grande catégorie des choses, toutes les choses ne sont pas soumises au même régime. Il y a des choses qui en raison de leur nature particulière comme les animaux qui bénéficient de nombreuses dispositions juridiques visant à assurer leur protection et même à leur reconnaître des droits tant sur le plan pénal que sur le plan civil. Les sujets de droit sont également appelés « personnes juridiques » car ils ont la personnalité juridique c’est à dire l’aptitude générale à être titulaire de droits et d’obligations. Lorsqu’on envisage des personnes juridiques, on pense tout d’abord aux être humains qui sont tous des sujets de droits. Mais les être humains ne sont pas les seuls sujets de droit, ils ne sont pas les seuls à être dotés de la personnalité juridique.

En effet, le droit objectif reconnaît également la personnalité juridique à des groupements d’individus comme les sociétés commerciales ou les associations. Il y a donc deux types de sujets de droit : les personnes physiques et les personnes morales.

Section 1 : Personnes physiques et personnes morales.

Il s’agit des deux catégories de sujets de droit: les personnes physique, les êtres humains et, les personnes morales, les groupements auxquels le droit objectif reconnaît la personnalité juridique, c’est-à-dire ayant l’aptitude générale à être titulaire de droits et d’obligations. Reconnaître la qualité de sujet de droit aux personnes physiques ne peut pas par principe soulever de controverses. Cette qualité semble aller de soi. En admettant l’existence de droits subjectifs, le droit objectif qui est une construction humaine a bien sûr avant tout entendu consacrer et sauvegarder les intérêts des individus, des êtres humains. Il faut toutefois préciser qu’à travers l’Histoire, le principe selon lequel tous les êtres humains étaient des sujets de droit n’a pas toujours semblé lui aussi évident. Il y a tout d’abord eu l’esclavage, la mort civile. Aujourd’hui en revanche, le principe est posé que tout humain est un sujet de droit (à condition qu’il soit né). Depuis longtemps, on admet également qu’un groupement d’individus puisse être doté de la personnalité juridique: il est alors un sujet de droit distinct des sujets qui le compose avec son propre patrimoine et ses propres droits. Tous les associés d’une société sont des sujets de droit mais la société est un sujet distinct. Il existe des personnes morales de droit public comme l’État, les collectivités locales, les établissement publics et des personnes morales de droit privé comme les sociétés commerciales, les société civiles, les associations.

26/11/09

Il faut enfin préciser que toutes les personnes morales n’ont pas une pleine capacité juridique (ex : les associations d’utilité publique ne peuvent pas recevoir de dons) et surtout, tous les groupements n’ont pas la personnalité juridique. Les personnes morales n’ont pas un statut unique et leur étude est dispersée entre différentes disciplines.

En droit civil (en première année), il est d’usage de se concentrer sur l’étude de l’autre catégorie de sujets de droit, la personne physique. C’est ce que nous allons faire en nous demandant quelles sont les conditions d’acquisition et quelles sont les circonstances de la perte de cette qualité de sujet de droit pour un être humain, à partir de quand et jusqu’à quand sommes nous des sujets de droit dotés de la personnalité juridique.

Section 2 : L’acquisition de la personnalité juridique pour les personnes physique.

La personnalité juridique de tout être humain l’est du moment de sa naissance au moment de sa mort.

  • 1 : Le principe de l’acquisition de la personnalité juridique à la naissance.

Tout individu devient un sujet de droit et accède à la personnalité juridique dès l’instant où il nait (ce principe est très ancien). En effet, le choix de l’instant de la naissance a été fait à une époque où la majorité des gens pensaient que la naissance correspondait au début de la vie et donc décider que ce serait aussi le point de départ de la personnalité juridique permettait de faire coïncider l’existence physique et l’existence juridique. En effet, longtemps les connaissances scientifiques n’ont pas permis d’être certain de la vie avant la naissance, d’où le choix de ce point de départ de la personnalité juridique. Dans cette conception traditionnelle, avant la naissance, l’enfant ne peut pas être distingué de sa mère dont il n’est pas autonome. Les romains disaient qu’il était « pars viceris matris ». Aujourd’hui encore, si on sait que la vie commence avant la naissance, beaucoup pensent que la vraie vie doit s’entendre d’une vie autonome et donc continue de ce fait à défendre la naissance comme point de départ idéal de la personnalité juridique. L’importance donnée par le droit objectif à la naissance explique qu’une déclaration de naissance doit être effectuée auprès des services de l’état civil de la mairie du lieu où elle est intervenue dans les trois jours qui suivent l’accouchement. Mais, pour devenir un sujet de droit, il ne suffit pas de naitre. Pour acquérir à la naissance la personnalité juridique, il faut être né vivant et viable. L’enfant mort-né n’a jamais été et ne sera jamais une sujet de droit. De même, l’enfant non viable, c’est à dire celui qui ne dispose pas des aptitudes suffisantes pour survivre à sa naissance en raison d’une malformation ou parce qu’il est né trop tôt ne sera lui non plus jamais un sujet de droit. Le droit a préféré ne pas tenir compte d’une vie aussi brève qui n’était pas faite pour durer. Prendre comme point de départ de la personnalité juridique la naissance implique a contrario que l’enfant qui n’est pas encore né n’est pas un sujet de droit et donc il n’est titulaire d’aucun droit et bien sur d’aucune obligation.

C’est pour cette raison que la Cour de Cassation a refusé en cas de mort d’un embryon ou d’un fœtus à la suite de l’erreur ou de la violence d’un tiers de retenir la qualification d’homicide involontaire. Elle fait valoir que le régime juridique de l’enfant à naitre relève des textes particuliers que les embryons et les fœtus. Cette analyse traditionnelle qui fait commencer la vie et la personnalité juridique à la naissance est de plus en plus critiquée à l’époque moderne avec les grandes avancées de la médecine. Aujourd’hui, les progrès de la science ont en effet montré qu’il existe une vie intra-utérine, une vie avant la naissance et donc logiquement, la question s’est posée avec plus de force de savoir s’il ne fallait pas faire démarrer la personnalité juridique au jour de l’apparition de la vie et donc, dès la conception. Si on considère en effet que la vie commence avant la naissance, il faut conclure que notre système juridique ne fait pas coïncider début de la vie et début de la personnalité juridique. On peut même aller plus loin et dire qu’il y a des être humains qui ne sont pas sujets de droit. Tous les être vivants ne bénéficient pas des mêmes droits. L’article 16 du code civil dispose que la loi assure le respect de l’être humain dès le commencement de la vie. Cet article dispose donc que l’enfant à naitre a droit au respect en tant qu’être vivant mais il ne lui reconnaît pas pour autant la qualité de sujet de droit. Le débat est envenimé par la question de l’avortement. Peut-on reconnaître la personnalité juridique de l’enfant à naitre et dans le même temps autoriser l’avortement ?

Théoriquement oui, mais cela pose une difficulté éthique. Pour la contourner, certains ont proposé de retenir comme date du début de la vie et date du début de la personnalité juridique la date au delà de laquelle l’avortement est interdit, à savoir, plus de 12 semaines. L2212-1 et L2213-1. L’article L 2151-5 du code de la santé publique en 2004, pour une durée de 5 ans, les recherches peuvent être faites sur un embryon fécondé in vitro. Dans un avis du 23 mai 1984, le comité national d’éthique a proposé une solution intermédiaire en affirmant que l’embryon devait être reconnus comme une personne potentielle dont le respect s’impose à tous. Mais il ne peut en la matière y avoir de demi mesure. Pour l’instant, notre droit objectif persiste à retenir comme de point de départ de principe de la personnalité juridique la naissance. Et parallèlement, si la personnalité juridique n’est pas reconnue à l’enfant à naitre, il dispose toutefois qu’une protection spécifique de la loi. C’est essentiellement le développement de la procréation assistée et la question des embryons surnuméraires qui sont à l’origine du débat sur le statut de l’enfant à naitre. Le législateur a considéré qu’il était urgent de prendre pour les embryons et les fœtus des mesures de protection, c’est ainsi qu’une première loi du 29 juillet 1994 (Loi bio-éthique) suivie par une loi du 6 aout 2004 sont intervenues pour poser des règles très protectrices de l’embryon. Par exemple, ces lois posent le principe de l’interdiction de la recherche sur l’embryon, condamne le clonage, interdit l’utilisation des embryons à des fins commerciales ou industrielles. Toutefois, depuis la loi de 2004, on admet à titre exceptionnel des expérimentations sur des embryons conçus in vitro a des conditions très strictes posées par un décret du 4 mai 2005. La cour européenne des droits de l’homme reconnaît que le fœtus est titulaire d’un droit à la vie mais que ce droit peut être écarté au bénéfice de celui de sa mère dont l’intérêt peut commander l’IVG.

  • 2 : Le tempérament au principe : l’acquisition exceptionnelle de la personnalité juridique dès la conception.

Certains textes du code civil comme les articles 725 et 906 reconnaissent à l’enfant conçu le droit d’hériter en présence ou non d’un testament ou encore de bénéficier d’une donation. Cette possibilité a été érigée en principe général par la jurisprudence qui considère que l’enfant conçu mais non encore né doit être tenu pour né chaque fois qu’il y va de son intérêt : « infans conceptus pro nato habetur quoties de commodis ejus agitur ». → « L’enfant conçu mais non encore né doit être tenu pour né chaque fois qu’il y va de son intérêt ». L’enfant peut donc acquérir des droits et au delà, la personnalité juridique, avant même sa naissance. Toutefois, cette personnalité juridique reconnue à l’enfant par exception avant sa naissance est à la fois partielle et conditionnelle. Elle est partielle parce qu’elle ne joue uniquement que si c’est dans l’intérêt de l’enfant. La jurisprudence a utilisé cet adage pour faire bénéficier aux enfants non encore nés, de la rente allouée aux enfants du défunt en cas de mort par accident du travail. L’application de cette règle a par exemple permis d’autoriser les reconnaissances prénatales de paternité ou de maternité dès lors que l’on considère que c’est dans l’intérêt de l’enfant de pouvoir s’assurer dès la conception des droits découlant de l’établissement de cette filiation. La Cour de Cassation a aussi considéré par exemple que la rente allouée aux enfants du défunt en cas d’accident mortel du travail était du à l’enfant conçu dès le décès de son parent. La référence à l’intérêt de l’enfant ne l’interdit pas d’être débiteur d’une obligation à condition que cette obligation soit l’accessoire d’une créance. Par exemple, parce que c’est dans son intérêt, l’enfant dont le père est mort avant la naissance peut hériter de son père et dans ce cas, il hérite de l’actif et du passif. La personnalité juridique reconnu exceptionnellement à l’enfant conçu est également conditionnelle, seuls les enfants qui vont naitre vivants et viables pourront revendiquer grâce à cette règle l’acquisition de la personnalité juridique dès la conception. Si on reprend le même exemple, en principe, la qualité d’héritier s’apprécie au jour du décès. Or, au jour du décès, l’enfant n’est pas un sujet de droit puisqu’il n’est pas né. Toutefois, il peut grâce à la règle infans conceptus et parce que c’est dans son intérêt revendiquer l’acquisition de la personnalité juridique et dans ce cas là, au moment du décès, il était bien un sujet de droit et donc peut être titulaire du droit d’hériter. La dernière question qui se pose est de savoir quelle est la date de la conception. Pour faciliter la détermination de la date de la conception l’article 311 alinéa 2 du Code Civil prévoit que la conception est présumée avoir eu lieu à un moment quelconque de la période qui s’étend du 300eme au 190eme jour inclus avant la date de la naissance.

SECTION 3. LA PERTE DE LA PERSONNALITE JURIDIQUE PAR LA PERSONNE PHYSIQUE.

C’est la mort qui met fin à la qualité de sujet de droit des personnes physiques. Le moment de la mort est donc fondamental car il marque le passage du sujet au cadavre, le cadavre entrant dans la catégorie des choses.

  • 1. L’hypothèse de la mort certaine.

La mort est certaine lorsque l’arrêt complet irréversible des fonctions vitales a été constaté. Il faut qu’un acte de décès soit dressé par un officier de l’état civil, acte précisant la date et l’heure du décès. Faut-il encore que la mort ait pu être constatée et qu’on l’on s’entende bien sur quoi on définit la mort. La définition de la mort a posé pendant un certain temps une difficulté parce qu’il n’y avait pas de réelle définition. C’est une circulaire du 3 Avril 1978 qui a défini ce qu’est la mort. Ce n’est que la réglementation des prélèvements d’organes pour les dons postmortem qu’un décret du 2 Aout 2005 a précisé quand exactement il y avait mort dans la mesure où le prélèvement d’organes ne peut avoir lieu que si la mort a été constatée, article R1232-1 du code de la santé publique: « Si la personne présente un arrêt cardiaque et respiratoire persistant, le constat de la mort ne peut être établi que si les trois critères cliniques suivants sont simultanément présents. Premièrement, absence totale de conscience et d’activité motrice spontanée, deuxièmement, abolition de tous les réflexes du tronc cérébral, troisièmement absence totale de ventilation spontanée ». Au jour du décès la personne physique cesse d’être un sujet de droit, elle devient un cadavre. Le cadavre est une chose mais le sujet de droit a pu de son vivant exprimer sa volonté sur le sort de son corps après sa mort, par exemple, l’article 16-11 alinéa 2 du code civil, prévoit que sauf accord exprès de la personne manifesté de son vivant, aucune identification par empreinte génétique ne peut être réalisée après sa mort. De même le sujet vivant peut refuser des prélèvements d’organes après sa mort, article L1232-6 du Code de la Santé Publique. Si le cadavre n’est plus un sujet de droit, il reste humain et pour respecter la dignité de la personne humaine il fait protéger le cadavre. C’est pourquoi l’article 16-1-1 du Code Civil, dispose que « le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort, les restes de la personnes décédée, y compris les cendres de celle dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités avec respect, dignité et décence ». De même, le Code Pénal, article 225-17, sanctionne toute atteinte à l’intégrité du cadavre, et l’article 16 du code civil autorise le juge à prendre toutes les mesures nécessaires pour faire cesser une attaque illicite au corps humain y compris après la mort.

  • 2. Les hypothèses de doute sur la mort.

Pour que la mort puisse produire ses effets, pour que le sujet cesse d’être un sujet, que ses bien soient transmis à ses héritiers, il faut encore pouvoir établir avec certitude la mort du sujet. Or, dans certains cas, on ne sait pas si une personne est morte ou vivante. La famille est sans nouvelle, personne n’a vu le sujet depuis plusieurs années de sorte qu’il existe une incertitude sur la vie ou la mort du sujet. Le Code Civil organise deux régimes pour les cas d’incertitude sur l’existence de la personne, la procédure de l’absence et la procédure de la disparition.

  1. L’absence.

Au sens juridique du terme, l’absence est l’état d’une personne dont on ne sait pas si elle est morte ou vivante. Cette situation est envisagée aux articles 112 et suivants, du Code Civil. Deux périodes se succèdent. Dans un premier temps on présume que l’absent est en vie, puis dans un second temps on va présumer qu’il est mort. Donc la première phase de la procédure est celle de la présomption d’absence. Selon l’article 112 du code civil, lorsqu’une personne a cessé de paraître au lieu de son domicile ou de sa résidence sans que l’on ait eu de ses nouvelles. Toute personne qui y a intérêt peut saisir le juge des tutelles pour que soit déclarée la présomption d’absence. Dans le jugement prononçant la présomption d’absence le juge désigne un membre de la famille ou un tiers qu’il charge de veiller sur les intérêts du présumé absent. Si l’intéressé revient, la procédure s’arrête. Si on apprend qu’il est mort de manière certaine, la procédure s’arrête. Si aucun de ces deux événements ne survient, on peut passer à la deuxième phase de la procédure. La deuxième phase consiste à déposer une requête en déclaration d’absence auprès du Tribunal de Grande Instance du lieu de la dernière résidence de l’intéressé afin que celui-ci soit déclaré absent. Cette requête ne peut être déposée que 9 ans après le jugement de présomption d’absence. Cette requête doit être publiée afin que l’intéressé puisse être prévenu. Le jugement déclaratif d’absence ne peut intervenir qu’un an après cette requête soit 10 ans après le jugement après le jugement prononçant la présomption d’absence. Ce jugement doit être publié. Il a la même valeur qu’un acte de décès. A partir de ce jugement on considère que le sujet est mort, son mariage est dissout etc… Si après ce jugement déclaratif d’absence revient, le jugement déclaratif peut être annulé.

  1. La disparition.

La disparition est l’état d’une personne dont on a la quasi certitude qu’elle est morte. Cependant son cadavre n’a pas pu être retrouvé et donc un acte de décès n’a pas pu être dressé. L’article 88 du code civil prévoit que la procédure de la disparition s’applique aux personnes disparues dans des circonstances de nature à mettre leur vie en danger lorsque leur corps n’a pas pu être retrouvé. Il faut dresser une requête au Tribunal de Grande Instance du lieu de la disparition pour faire constater cette disparition. Après enquête le Tribunal rend un jugement déclaratif de décès qui tient lieu d’acte de décès. En cas de réapparition de l’individu, on applique les même dispositions que pour l’absent.

Chapitre 2 – Les différentes catégories du droit subjectif.

Les droits subjectifs peuvent être divisés en deux catégories, d’un coté les droit patrimoniaux et de l’autre les droits extra-patrimoniaux.

SECTION 1 – LA DISTINCTION DES DROIT PATRIMONIAUX ET DES DROITS EXTRA-PATRIMONIAUX.

Les droits patrimoniaux sont ceux qui entrent dans le patrimoine, à l’inverse, les droits extra-patrimoniaux n’entre pas dans le patrimoine. Le patrimoine c’est l’ensemble des biens et des obligations d’une personne. Il comporte donc un actif, tous les droits qui ont une valeur économique, et il est aussi composé d’un passif constitué de toutes les dettes de cette personne. On dit que le patrimoine est une universalité juridique, c’est-à-dire une réunion d’éléments qui constitue une unité juridique. Le patrimoine reste lié aussi longtemps que l’on a la personnalité juridique, on ne peut transmettre de son vivant l’ensemble de son patrimoine. Ce n’est qu’au décès d’une personne physique ou à la dissolution d’une personne morale que le patrimoine peut être transmis. On n’est pas obligé d’accepter un héritage.

En France, on considère qu’un sujet de droit ne peut avoir qu’un patrimoine. Même si une personne affecte certains biens à une activité particulière, ses biens demeurent dans son patrimoine et dans le patrimoine, l’ensemble de l’actif répond de l’ensemble du passif. En pratique cela implique que les créanciers d’un commerçant individuel peuvent exiger la vente de tous les biens du commerçant et pas seulement des biens affectés à son commerce. D’où l’intérêt lorsque veut exercer le commerce de créer un autre sujet de droit avec son propre patrimoine. L’associé est une personne distincte de la société, si la société commerciales a des dettes les créanciers ne peuvent être payer qu’avec les biens de la société. Certains droits étrangers, comme le droit allemand, ont une conception différente du patrimoine et admettent qu’une même personne puisse avoir plusieurs patrimoines. C’est la théorie du patrimoine d’affectation. Si les droits subjectifs peuvent être classés en fonction du patrimoine c’est que certains entre dans le patrimoine et d’autres ni entre pas. Les droits patrimoniaux sont les droits évaluables en argent, ils correspondent à une valeur marchande et peut être transmis à titre onéreux. En revanche d’autres droits, les droits extrapatrimoniaux, présentent pour le sujet un intérêt d’ordre moral et non pas patrimonial. Ces droits sont extrêmement liés au sujet et ne peuvent donc être transmis et ne peuvent pas faire l’objet d’une évaluation en argent (ex : le droit à l’honneur, le droit moral de l’auteur sur son œuvre, le droit des grands parents d’entretenir des relations personnelles avec ses petits enfants). Le droit objectif dit à quelles conditions on peut devenir titulaire d’un droit subjectif et les pouvoirs qu’il nous donne.

SECTION 2 – LES DROITS PATRIMONIAUX.

  • 1. Les droits réels.

Les droits réels sont les droits qui confèrent à leurs titulaires un pouvoir direct et immédiat sur une chose. Le droit réel suppose donc la réunion de deux éléments, une personne qui est le titulaire du droit, et une chose, qui est l’objet du droit.

Le sujet de droit réel bénéficie de certains pouvoirs qu’il peut exercer sur la chose objet de son droit. L’exemple type du droit réel, c’est l droit de propriété. Tous les droits réels ont pour particularité d’être opposable à tous, ce qui implique pour le titulaire de droit réel, deux types de pouvoirs particuliers, le droit de suite, et le droit de préférence

Le droit de suite permet au titulaire du droit réel d’exercer son droit sur la chose en quelque main qu’elle se trouve. Par exemple, le propriétaire d’une chose perdue ou volée, peut la revendiquer contre n’importe quelle autre personne. Autre exemple, celui qui a une hypothèque sur un immeuble, peut toujours faire valoir ce droit même si le propriétaire de l’immeuble a changé. ( Le droit suit la chose )

Le droit de préférence, lui, permet au titulaire d’un droit réel de passer en priorité devant le titulaire d’un droit autre que le droit réel comme par exemple un droit de créance. Par exemple si une maison est vendue aux enchères, parce que son propriétaire a beaucoup de dettes, et tous les créanciers n’ont qu’un simple droit de créance. Ils ne seront donc payés qu’après celui qui a en plus de son droit de créance, un droit réel, comme par exemple un droit d’hypothèque.

  1. Les droits réels principaux.

Le droit de propriété, art 544, c’est le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par la loi ou les règlements. C’est un lien entre une personne et une chose sur lequel elle exerce son autorité. Les romains avaient précisé quels sont les attributs que le droit de propriété confère à son titulaire et ils en avaient distingué trois :

– l’usus, droit d’utiliser la chose.

– le fructus c’est à dire le droit d’en percevoir les fruits (les revenus).

– l’abusus c’est à dire le droit de disposer de la chose à titre onéreux ou à titre gratuit.

Les droits réels démembrés de la propriétés que l’on appelle aussi les démembrements de la propriétés sont des droits subjectifs qui ne confèrent à leur titulaires qu’une partie seulement des prérogatives attachées au droit de propriété. Il s’agit tout d’abord de l’usufruit qui est un droit viager c’est à dire que c’est un droit qui s’éteint à la mort de son titulaire et qui confèrent à leur titulaire deux attributs de la propriété : l’usus et le fructus. Cela veut dire que celui qui a un usufruit sur la chose à ces deux pouvoirs : s’en servir et percevoir les fruits. C’est le nu-propriétaire qui conserve l’abusus. Autre démembrements du droit de propriété : les servitudes qui sont des droits permettant au propriétaire d’un immeuble, que l’on appelle le fonds dominant, de retirer à perpétuité certains services d’un immeuble voisin (que l’on appelle le fonds servant) comme par exemple le droit de passer ou le droit de puiser de l’eau.

  1. Les droits réels accessoires.

On les appelle ainsi parce qu’ils sont l’accessoire d’une créance dont ils garantissent le paiement. Il s’agit d’affecter un bien déterminé au paiement d’une dette. Le créancier, celui à qui on doit de l’argent, obtient sur ce bien un droit réel qui garantit le paiement de sa dette (on parle de sûreté réelle). Les principaux droits réels accessoires sont l’hypothèque et le gage. L’hypothèque consiste à affecter un immeuble en garantit d’une créance. Celui qui va bénéficier du droit réel, c’est le créancier, que l’on appelle dès lors créancier hypothécaire, il ne peut pas utiliser l’immeuble. Le pouvoir que lui donne son droit réel est que si sa créance n’est pas réglée, il peut faire saisir l’immeuble et de le faire vendre aux enchères. Comme il dispose d’un droit réel, il bénéficie d’un droit de préférence et quand l’immeuble sera vendu, il sera payé par préférence, en priorité sur les autres créancier qui n’ont pas de droit réel. Comme le créancier hypothécaire a aussi un droit de suite, si son débiteur vend la maison, le banquier pourra tout de même la saisir et la faire vendre au détriment du nouveau propriétaire. Le gage fonctionne quasiment de la même manière sauf qu’ici, c’est un meuble qui vient garantir la créance.

  • 2 : Les droits de créance ou droits personnels.

Le droit de créance est le droit qu’a une personne appelée le créancier, d’exiger une certaine prestation d’une autre personne appelée le débiteur. Alors que le droit réel est un rapport de droit entre une personne et un bien, le droit de créance (ou droit personnel) est un rapport de droit entre deux personnes. On retrouve trois éléments dans le droit personnel : le sujet actif du droit qui est le créancier, le sujet passif qui est le débiteur et la prestation qui est l’objet du droit.

Prenons l’exemple d’un contrat passé avec un garagiste. Le contrat a pour effet de faire naitre des droits de créance ainsi que plusieurs obligations : pour le garagiste, réparer la voiture et pour le client, payer. Le client a le droit d’exiger la réparation prévue, il est créancier et le garagiste débiteur de l’obligation de réparer. Le garagiste a lui, le droit d’exiger le paiement de son travail, il est créancier de cette obligation, le client est débiteur et l’objet du droit est le paiement d’une somme d’argent.
Le droit de créance peut avoir trois objets : donner, faire ou ne pas faire quelque chose.
L’obligation de donner consiste en l’obligation de transférer la propriété d’un bien.
Exemple : un contrat de vente d’un ordinateur : l’acheteur est créancier de l’obligation de donner l’ordinateur contre l’argent et le vendeur est créancier de l’obligation de donner une somme d’argent dont l’acheteur est débiteur. L’obligation de faire consiste à exécuter une prestation déterminée. Exemple: je conclue un contrat avec un architecte, il propose de faire les plans de ma maison contre 5000€. Je suis obligée de payer, il est obligé de faire quelque chose pour moi. Il est donc débiteur.
L’obligation à laquelle peut être tenu un débiteur à l’égard de son créancier peut enfin être une obligation de ne pas faire. Exemple : je suis fleuriste, je décide de vendre mon magasin. La personne qui l’achète a peur que lors que l’ouverture de mon nouveau magasin, la clientèle lui fasse défaut. Elle prévoit donc une clause de non concurrence dans le contrat que nous allons passer. Je suis débiteur de l’obligation.
A la différence du titulaire d’un droit réel, le titulaire d’un droit personnel n’a ni droit de suite, ni droit de préférence. Ainsi, lorsque le débiteur vend ses biens, le créancier ne peut pas les saisir entre les mains de son nouvel acquéreur car il n’a pas de droit spécifiques sur ces biens. De même, si le débiteur à plusieurs créancier et que ses bien ne suffisent pas à payer ses dettes, les biens vendus serviront en priorité à payer les créancier qui avaient un droit réel sur ces biens. Les autres sont tous à égalité sans aucun droit de préférence quelque soit l’importance et l’ancienneté de leur créance, ils devront se partager ce qui reste une fois des titulaires de droit réel payés, et en proportion du montant de leur créance.

  • 3 : Les droits intellectuels.

Les droits intellectuels peuvent être définis comme des prérogatives conférant à leurs titulaires un monopole d’exploitation sur une chose incorporelle qui résulte de l’activité intellectuelle du sujet. L’exemple type est celui du propriété littéraire et artistique qui accorde à son titulaire le monopole pour exploiter une œuvre littéraire ou artistique. On trouve aussi l’exemple de la propriété industrielle qui permet d’exploitation sur un brevet d’invention.

Section 3 : Les droits extra-patrimoniaux.

Les droits extra-patrimoniaux sont les droits qui ne sont pas susceptibles d’être évalués en argent et qui échappent donc à toute commercialisation. Cette distinction peut sembler parfois artificielle car paradoxalement, si ces droits ne peuvent en principe être évalués en argent, si il sont méconnus ou pas respectés, la sanction prévue par le droit objectif consiste à exiger de l’auteur de l’atteinte qu’il paie à la victime des dommages et intérêts. Par exemple, le droit au respect de la vie privée est un droit de la personnalité et en principe un droit extra-patrimonial est souvent à l’origine de la fortune de quelques pseudo-célébrités. Les principales catégories de droit extra-patrimoniaux sont :

– les droits politiques, c’est-à-dire le droit de participer à la vie publique comme le droit de vote ou l’éligibilité.

– les droits de famille, c’est-à-dire les droits destinés à organiser les relations non patrimoniales entre membres d’une même famille. Par exemple dans le mariage, le droit qu’a une épouse de demander le secours et l’assistance de son conjoint, ou d’exiger sa fidélité mais aussi dans les relations parent-enfant, le droit qu’ont les parents d’exercer l’autorité parentale sur les enfants ou encore les droits pour les grands parents d’entretenir des relations avec leurs petits enfants.

– les droits de la personnalité qui regroupent l’ensemble des prérogatives destinées à préserver l’individualité d’une personne. On range dans cette catégorie les droits d’une personne sur son propre corps. C’est également des droits relatifs à l’intégrité morale telle que le droit au nom, le droit de défendre son honneur, le droit au respect de la vie privée, le droit à l’image. Ces droits extra-patrimoniaux sont fortement à la personne de leur titulaire ce qui justifie qu’ils soient imprescriptibles (même si on nie un certain droit pendant une personne, il ne peut pas y avoir prescription) et indisponibles, c’est à dire qu’ils ne peuvent être ni saisis ni transmis, ni cédés.

Chapitre 3 : Les sources du droit subjectif.

Dans un certain sens, les droits subjectifs trouvent tous leur source dans la règle de droit objectif qui les définit et les sanctionne. Mais quand on s’y intéresse de manière plus précise en réinterrogeant sur les circonstances que prend en considération le droit objectif pour donner naissance à des droits subjectifs. Or, ces circonstances peuvent être classées en deux catégories selon le rôle que joue la volonté dans la réalisation de l’évènement générateur du droit. On distingue ainsi les faits et les actes juridiques.

L’acte juridique est une manifestation de volonté accomplie en vue produire des effets de droit. Exemple, le contrat de vente est un acte juridique. Le vendeur comme l’acheteur manifestent leur volonté, consentent à la vente dans le but d’obtenir les effets de droit attachés par le droit objectif à ce type de contrat. Ces effets sont les suivants : l’acheteur devient le propriétaire de la chose vendue, c’est lui qui a un droit réel sur la chose et le vendeur bénéficie d’une créance d’une somme d’argent.

Le fait juridique engendre lui aussi des effets de droit mais ceux-ci n’ont pas été recherchés pas le sujet. Le fait juridique est un événement volontaire ou non qui engendre des effets de droit qui n’ont pas été voulus mais qui sont imposés par la loi. Exemple: Une personne blesse une autre personne volontairement ou non, c’est un fait juridique parce que cet événement va produire des effets de droit. Le droit objectif prévoit en effet qu’à certaines conditions la victime a un droit de créance contre le responsable, elle peut exiger du responsable le paiement d’une somme d’argent destinée à réparer les effets du préjudice: dommages et intérêts. Autre exemple, la naissances est également un fait juridique car c’est un événement auquel le droit objectif attache des effets de droit.

Section 1 : Les actes juridiques.

Les actes juridiques sont des actes volontaires spécialement accomplis par une personne pour produire dans le cadre et les conditions du droit objectif des effets de droit. Les effets de droit ainsi recherchés ne sont pas nécessairement la création d’un droit subjectif. Certains actes juridiques ont pour objet de constater l’existence d’un acte juridique, d’autres, de le modifier, d’autres, de le transmettre. Enfin, certains actes juridiques peuvent avoir pour but d’éteindre un droit subjectif (si par un acte je renonce à mon droit de succession ou de créance, j’exprime ma volonté de ne plus pouvoir exiger de mon débiteur la prestation qu’il me doit, cet acte juridique fait disparaître mon droit de créance). Un acte juridique peut avoir pour effet de transmettre des droits subjectifs: le testament, celui qui le rédige exprime sa volonté de transmettre la propriété de ses biens à telle ou telle personne. Il existe deux catégories d’actes juridiques : les conventions et les actes juridiques unilatéraux.

  • 1 : Les conventions.

La convention est un accord de volonté entre deux personnes ou plus dans le but de produire des effets de droit. Sa validité est soumise à des conditions posées par le droit objectif. Certaines conventions sont créatrices de droit subjectif. Par exemple, deux parties peuvent s’entendre pour créer un droit réel, un propriétaire conclut avec un tiers une convention usufruit. Chaque partie donne son accord, le propriétaire accepte de conférer à l’autre partie deux attributs de son droit de propriété (usus et fructus), il lui transfère donc un droit réel sur sa chose. Et l’autre partie accepte soit de payer une contrepartie soit, en cas de contrat à titre gratuit, il se contente d’accepter ce transfert de droit réel. Ou comme une pour une convention d’hypothèque passée entre un emprunteur et son banquier. Les deux partis à cette convention expriment leur volonté afin d’accorder au banquier un droit réel sur un immeuble appartenant à l’emprunteur. Une convention peut également être créatrice d’obligations, c’est-à-dire d’un droit personnel, un droit de créance et de la dette correspondante. Dans ce cas précis, la convention s’appelle un contrat. Le contrat est un accord de volonté entre deux personnes ou plus en vue de créer des obligations. Par exemple, un contrat de vente fait naitre une obligation de donner la chose dont le vendeur est débiteur et l’acheteur le créancier. Mais il fait naitre aussi une obligation de payer dont l’acheteur est débiteur et le vendeur créancier : c’est un contrat synallagmatique. Il s’oppose au contrat unilatéral qui implique la rencontre de deux volontés au moins mais qui ne fait naitre qu’une obligation à la charge d’une partie (exemple, une donation, il faut le consentement du donateur, et du donataire, mais c’est un contrat unilatéral parce que de cet accord de volonté il ne nait qu’un seul droit de créance au bénéfice du donataire). Certaines conventions encore portent sur un droit subjectif déjà existant soit pour le transmettre comme par exemple une cession de créance (convention par laquelle une partie cède à l’autre la créance qu’elle a contre un tiers), soit pour l’éteindre comme par exemple, une remise de dette (convention par laquelle le créancier renonce à sa créance et le donateur accepte de ne pas devoir sa dette).

  • 2 : Les actes juridiques unilatéraux.

L’acte juridique unilatéral est toujours une manifestation de volonté dans le but de produire des effets de droit mais à la différence des convention, il n’y a pas rencontre de plusieurs volontés mais l’expression d’une seule volonté. L’acte juridique unilatéral peu lui aussi avoir pour objet la création de droit subjectif comme la reconnaissance de paternité: acte juridique par lequel une personne reconnaît être le père d’un enfant. Il peut aussi avoir pour objet de transmettre un droit subjectif comme par exemple le testament, enfin un acte juridique unilatéral peut avoir pour effet d’éteindre un droit subjectif dont on est titulaire c’est le cas par exemple de l’acte par lequel on renonce à une succession.

Section 2 : Les faits juridiques.

Les faits juridiques sont des évènements ou des actions qui engendrent des effets de droit indépendamment de la volonté des intéressés mais du seul fait de la loi. Par leur existence même, ils entrainent la création, la transmission ou l’extinction d’un droit subjectif. Ces faits juridiques sont très nombreux et très divers. Il peut s’agir de faits naturels comme par exemple, la naissance. C’est également le cas du simple écoulement du temps : il permet, par le jeu de la prescription, l’acquisition ou l’extinction d’un droit. Le fait juridique peut également être un fait de l’homme, une action de l’individu, c’est la cas par exemple des délits et des quasi-délits. Le délit par exemple est un fait volontaire et illicite qui consiste à causer intentionnellement à autrui. Quand on dit que c’est un fait volontaire, on entend par là que l’auteur a voulu les conséquences dommageables, exemple, je roule exprès pour écraser. Le droit objectif attache des effets de droits au délit, le délit fait naitre à la charge de l’auteur du dommage, le responsable, une obligation de réparer les préjudices causés dont la victime est créancière et le responsable débiteur. Le quasi-délit est un fait involontaire et illicite. C’est le fait de causer par négligence ou prudence, le droit objectif attache les mêmes conséquences au quasi-délit qu’au délit, le responsable est débiteur d’une obligation en réparation dont la victime est créancière, quasi-délit et délit relèvent du droit de la responsabilité civile. Enfin, il y a aussi les quasi-contrats que sont la gestion d’affaire, le paiement de l’indu, l’enrichissement sans cause, et depuis quelques années les loteries publicitaires.

CHAPITRE 3 – LA PREUVE DES DROITS SUBJECTIFS.

Art 1315 à 1369 du Code Civil.

Pour pouvoir invoquer un droit subjectif, il faut pouvoir démontrer son existence et dire qu’on en est bien titulaire car être titulaire d’un droit sans pouvoir le prouver revient à la même situation que de ne pas avoir ce droit. Si nul ne conteste l’existence d’un droit, la preuve de ce droit est inutile. Mais si une personne conteste l’existence d’un droit dont une autre se déclare titulaire, elle exigera que le prétendu titulaire en rapporte la preuve en justice. La question de la preuve des droits subjectifs est donc une question essentielle, il faut noter que cette matière a fait l’objet d’une réforme par une loi du 13 Mars 2000 dont l’objet a été d’adapter le droit de la preuve aux nouvelles technologies en admettant notamment la validité de la signature électronique. Pour étudier le droit de la preuve, quel est l’objet de la preuve et sur qui pèse la charge de la preuve, puis étudier les différents moyens de preuve qui existent et enfin s’interroger sur leur admissibilité.

SECTION 1 – OBJET ET CHARGE DE LA PREUVE.

Que doit-on prouver, qui doit prouver?

  • 1. l’objet de la preuve.

L’objet de la preuve se limite aux questions de faits. En effet, les parties n’ont pas à établir, à prouver, l’existence de la règle de droit car le juge est sensé connaitre la loi. Une seule exception si une partie se prévaut d’une loi étrangère, il lui appartient de prouver son contenu. Les faits qui font l’objet de la preuve sont tous les éléments qui ont une portée juridique, c’est-à-dire ceux qui sont susceptibles de constituer un acte ou un fait juridique. La partie qui a la charge de la preuve ne doit prouver que les éléments dont dépend la solution du litige, c’est ce qu’on appelle les faits pertinents.

  • 2. La charge de la preuve.

La question de la charge de la preuve est déterminante parce que lorsqu’en fin de compte la vérité n’a pas pu être établi c’est la partie qui devait rapporter la preuve de ses prétentions qui supportera les conséquences de cet échec. On dit que c’est sur elle que pèse le risque de la preuve ou à l’inverse que le doute profite à son adversaire. Le principe est posé à l’article 1315 du Code Civil qui dit que la preuve incombe au demandeur : « Actori incombit probatio ». On entend par là tout personne qui formule une prétention nouvelle. Exemple: je prétends devant le juge que Mme. Dupont me doit 5,000€, je dois prouver cette prétention. Si Mme. Dupont prétend m’avoir déjà remboursé, c’est une prétention nouvelle, elle doit donc l’approuver. Il existe toute fois des exceptions au principe posé à l’article 1315, parfois, c’est la loi qui attribue la charge de la preuve. Par exemple, l’article 2268 dispose que la bonne foi est toujours présumée. En d’autres termes, celui qui invoque sa bonne foi n’a pas à la prouver, c’est à son adversaire de prouver le contraire. De même, les parties à un contrat peuvent s’entendre dans leur contrat pour modifier les règles d’attribution de la charge de la preuve. Enfin la jurisprudence a parfois consacré un renversement de la charge de la preuve. Exemple: en matière médicale. En effet, le médecin est tenu à l’égard de son patient à une obligation d’information relative aux risques découlant de l’acte pratiqué. Imaginons qu’un incident se produise, un de ces risques se réalise. Le patient peut obtenir réparation du préjudice résultant du défaut d’information. Le demandeur c’est la patient, c’est lui qui prétend que l’obligation d’information n’a pas été remplie, donc en principe c’est lui qui doit prouver que le médecin ne l’a pas informé. Mais la Cour de Cassation a opéré un renversement de la charge de la preuve en obligeant le médecin à prouver qu’il avait bien rempli son obligation d’information.

Ci-dessous, un autre cours d’Introduction au droit civil est divisé en plusieurs fiches (sources, droit objectif, droit subjectif, preuves,

Autres Cours complet de Droit civil divisé en plusieurs fiches :

SECTION 2 – LES MOYENS DE PREUVE.

Le Code Civil prévoit 5 modes de preuve.

  • 1. La preuve littérale.

Avant la loi du 13 Mars 2000 ce type de preuve n’était pas défini par le Code civil, on considérait qu’il s’agissait de toutes les sortes de preuves qui avaient en commun d’être fixées par écrit sur un support papier. Pour permettre l’admission des écrits électroniques, la loi du 13 Mars 2000 a retenu une définition plus large de la preuve littérale. Désormais, l’article 1316 du Code Civil dispose que la preuve littérale ou preuve par écrit, résulte d’une suite de lettres, de caractères, de chiffres, ou de tous aux signes ou symboles dotés d’une signification intelligible quelque soit leur support et leur modalité de transmission. L’article 1316-1 précise que l’écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l’écrit sur support papier sous réserve que puisse être dument identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité.

Dans la catégorie des preuves littérales on trouve des écrits très variés qui n’auront pas tous la même force probante. Parmi tous ces écrits, on distingue deux catégories:les écrits pré-constitués et les autres écrits.

  1. Les écrits pré-constitués.

Il s’agit d’écrits spécialement rédigés dans le but de constater un acte juridique ou un fait juridique et d’en rapporter la preuve. On dit que la preuve est pré-constituée car elle est établie avant tout litige, avant tout contentieux. Ces écrits constitués sont qualifiés d’actes, mais le terme acte doit être pris dans un autre sens que « acte juridique ». Il a le sens, ici, d’acte instrumentaire, il désigne l’écrit. Il existe deux types d’écrits pré-constitués: l’acte authentique et l’acte de sous-seing privé.

1). L’acte authentique.

a). Définition.

L’acte authentique peut être défini comme l’acte dressé par un officier public auquel la loi attribue compétence pour le faire. L’acte authentique est en principe rédigé en minute (acte original) et conservé par l’officier public qui en délivre des copies aux particuliers. L’acte authentique est assorti de la formule exécutoire, c’est-à-dire d’un ordre du pouvoir exécutif en joignant tous les représentants de la force publique d’assurer l’exécution forcée de l’acte si le débiteur ne s’exécute pas spontanément. Il existe différentes catégories d’officiers publics pouvant prendre des actes authentiques et c’est la loi qui définit la mission de chacun d’eux. Ainsi, c’est l’officier d’état civil, qui a seule compétence pour dresser un acte de l’état civil. L’huissier est également un officier public à qui la loi donne le pouvoir de prendre des actes authentiques dans le cadre de sa mission. Les notaires sont des officiers particulièrement importants car la loi leur accorde le monopole pour conférer l’authenticité à des actes faits par des particuliers et notamment aux contrats. Ainsi pour certains contrats, la forme notariée est d’ailleurs obligatoire, exemple, les donations. Mais même si la loi n’impose pas le recours au notaire les particuliers peuvent toujours choisir de passer leur contrat devant un notaire pour lui donner la forme d’un acte. Les actes authentiques sont toujours soumis pour leur validité à de nombreuses formalités qui si elles ne sont pas respectées entrainent la nullité de l’acte en tant qu’actes authentiques. Par exemple pour l’acte notarié, la loi impose s’il n’est pas entièrement rédigé à la main que chaque page soit paraphée. Si une de ces formalités n’est pas remplie l’acte est nul est tant qu’acte authentique mais il peut valoir comme acte sous-seing privé. Il faut préciser que depuis la loi du 13 Mars 2000, l’article 1317 prévoit qu’un acte authentique peut être fait sur support électronique dans des conditions prévues par décret.

b). La force probante de l’acte authentique.

Elle est fixée par la loi, elle est particulièrement grande puisqu’on dit que les actes authentiques font foi jusqu’à inscription en faux. Celui qui conteste l’exactitude d’un acte authentique ne peut le faire qu’en prouvant que c’est un faux, c’est-à-dire en engageant une procédure d’inscription en faux, c’est une procédure complexe qui en cas d’échec expose le demandeur à une amende civile et au paiement de dommages et intérêts. Il faut toutefois être précis. Cette force probante accordée à l’acte authentique ne s’applique qu’aux mentions que l’officier public a pu directement constaté, la date, la présence des parties, les signatures… En revanche si l’acte mentionne des circonstances ou reprend des déclarations que le notaire n’a pas pu constater alors cette partie de l’acte ne fait foi que jusqu’à preuve contraire (preuve par écrit).

2). L’acte sous-seing privé.

a). Définition.

L’acte sous-seing privé est rédigé par les parties elles-mêmes ou le représentant et n’est soumis à aucun formalisme. Les parties jouissent d’une liberté totale. La seule exigence de validité est la signature des parties. Cette signature permet d’authentifier l’auteur de l’acte et de déduire son adhésion totale au contenu de cet acte. Avant la loi du 13 Mars 2000, la Code Civil ne définissait pas la signature. Il s’agissait d’un graphisme personnel par lequel une personne manifeste son consentement. A l’époque, on n’envisageait une signature que comme un signe posé sur un papier à l’aide d’un outil d’écriture. Une telle compréhension de la notion de signature empêchait d’admettre qu’un acte sous-seing privé puisse être formé sous forme électronique. C’est pourquoi la loi du 13 Mars 2000 a pour la première introduit dans le Code Civil une définition de la signature. Cette définition est définie à l’article 1316-4 du Code Civil. La signature nécessaire à la perfection d’un acte juridique (écrit pré-constitué, instrumentum), identifie celui qui la pose, elle manifeste le consentement des parties aux obligations qui découlent de cet acte. Quand elle est apposée par un officier public, elle confère l’authenticité à l’acte. Lorsqu’elle est électronique, elle consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée jusqu’à preuve contraire lorsque la signature est créée, l’identité du signataire assurée, et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. Un décret est intervenu le 30 Mars 2001, pour énoncer à quelles conditions la signature électronique peut être considérée comme sécurisée. Aujourd’hui donc un acte sous seing-privé peut être établi soit sur support papier sois sous support électronique. Dans tous les cas, l’acte sous seing-privé doit émaner de la personne à qui on l’oppose. Ce n’est pas une exigence propre à l’acte sous-seing privé, c’est une exigence commune à tous les modes de preuve qui reprend un principe essentiel selon lequel nul ne peut se constituer de preuves à lui-même. Dans deux hypothèses particulières, la signature ne suffit pas. Une formalité supplémentaire doit être accomplie.

La première hypothèse concerne les contrats synallagmatiques, c’est-à-dire les contrats qui font naitre des obligations réciproques à chacune des parties, l’article 1325 du Code Civil exige en plus de la signature de leurs auteurs, qu’il soit rédigé en autant d’originaux qu’il y a d’intérêts distincts. En effet dans ce type de contrat chaque partie étant à la fois créancière et débitrice de l’autre, chacune doit pouvoir adopter la preuve de ses droits en cas de difficulté et donc avoir à sa disposition un original de l’acte sous-seing privé. Si cette formalité n’est pas respectée, l’écrit n’est pas considéré comme un acte sous-seing privé, cependant il pourra valoir comme commencement de preuve par écrit (CPE). La jurisprudence adoucit l’exigence de l’article 1325 du Code Civil en acceptant que l’acte ne soit rédigé en un seul exemplaire si il est déposé entre les mains d’un tiers qui peut le produire à la demande de l’une ou l’autre des parties.

La deuxième hypothèse est pour les promesses unilatérales de somme d’argent ou pour les livraisons de bien fongibles, c’est-à-dire l’acte par lequel une personne s’engage à verser à une autre une somme d’argent (reconnaissance de dette), ou des biens que se consomment. Pour ces actes, l’article 1326 du Code Civil exige que celui qui souscrit l’engagement porte sur l’acte en plus de la signature la mention de la somme ou de la quantité si ce sont des biens en toutes lettres en chiffres. S’il y a une différence entre la somme indiquée en chiffre et la somme en lettres, on fait prévaloir la somme en lettres. En principe si l’acte ne porte pas cette mention particulière, il ne peut pas être considéré comme un acte sous seing-privé. Il peut en revanche valoir commencement de preuve par écrit.

b). La force probante de l’acte sous-seing privé.

Elle est également prévue par la loi. Cette force probante est moins forte que celle de l’acte authentique. En effet l’acte sous-seing privé ne fait pas foi de son origine. Ainsi, la personne à qui on l’oppose peut affirmer ne pas en être l’auteur, si elle désavoue l’écriture ou la signature de cet acte c’est à son adversaire de saisir le juge pour procéder à une vérification d’écriture. Si le juge confirme que c’est la signature ou l’écriture de l’auteur de l’acte, l’acte ainsi vérifié acquiert la même foi qu’un acte authentique. De même l’acte sous seing-privé ne fait foi de son contenu que jusqu’à preuve contraire. On peut toujours contester l’exactitude des faits que relate un acte sous seing-privé à condition d’en rapporter la preuve contraire, attention, elle ne peut être rapportée que d’un autre écrit pré-constitué, d’un aveu, ou d’un serment. Enfin, la date de l’acte sous seing-privé fait foi entre les parties jusqu’à preuve contraire mais en revanche elle ne fait pas foi à l’égard des tiers car les parties peuvent toujours s’être entendues pour antidater l’acte et frauder les droits des tiers. Il existe toutefois des moyens énumérés à l’article 1328 du Code Civil pour donner à un acte sous seing-privé une date certaine et donc, une date indiscutable. Il acquiert date certaine s’il est enregistré, ou lorsqu’il est constaté dans un acte dressé par un officier public, ou bien, en cas de la mort de l’une des parties, l’acte sous seing-privé a une date certaine car on sait que l’acte a été conclu au plus tard à la veille de sa mort. Attention, l’article 13116-3 précise qu’il ne doit pas y avoir de différence entre un acte sous seing-privé passé par écrit et un acte sous-seing privé électronique.

  1. Les autres écrits.

Les autres écrits n’ont en commun avec l’acte authentique et l’acte sous-seing privé que d’être issus du même procédé: l’écriture au sens large du terme. Ces écrits là n’ont pas été établis en vue d’apporter la preuve future d’un fait ou d’un acte juridique. Ils peuvent toutefois être utilisés à cette fin. Ces écrits sont aussi variés que peut l’être l’utilisation de l’écriture. Le CodeIl suffit pour qu’il puisse avoir une valeur en tant que preuve …. Selon leurs caractéristiques ils pourront se voir reconnaître une force probante plus ou moins forte. Par exemple une lettre missive par laquelle son auteur reconnaissait un droit contesté a pu être qualifié d’aveu extra-judiciaire. On a également pu considéré qu’une lettre pouvait valoir commencement de preuve par écrit. Ou encore, être une simple présomption.

  • 2. La preuve testimoniale.
  1. Définition.

Le témoignage est une déclaration faite par une personne sur des faits dont elle a eu personnellement connaissance. Il peut s’agir de faits qu’elle a elle même vécus ou des faits qu’une personne déterminée a relatés en sa présence. Le témoignage peut s’effectuer de manière orale en cours d’audience ou par attestation. Pendant longtemps ce mode de preuve a été privilégié mais peu à peu il a été écarté dans certains domaines en raison des risques d’imprécision, il reste toutefois très important dans les litiges familiaux et surtout en affaire de divorce.

  1. Force probante.

Lorsque ce mode de preuve est admissible, ce n’est pas la loi qui fixe sa force probante mais c’est le juge qui apprécie au cas par cas en fonction de sa conviction la foi qu’il convient de donner à un témoignage.

  • 3. La preuve par présomption.
  1. Définition

Elles sont prévues à l’article 1349 qui les définit comme les conséquences que la loi ou le magistrat tire d’un fait connu à un fait inconnu. Il existe donc deux types de présomption, les présomptions légales, faites par la loi et les présomptions judiciaires faites par le magistrat. Dans les deux cas, il s’agit une fois un fait prouvé d’en déduire l’existence d’un autre fait. On dit qu’il y a déplacement du fait de la preuve. Exemple: pour prouver la vitesse excessive d’un automobiliste on mesure les traces de freinage ce qui permet de trouver un fait inconnu: la vitesse.

Les présomptions légales peuvent être simple ou irréfragables. Elles sont simple quand il est possible d’apporter la preuve contraire, par exemple l’article 312 alinéa 1 du Code Civil énonce que l’enfant d’une femme mariée est présumé avoir été conçu par le mari de celle-ci. D’un fait connu, le mariage, on déduit un fait inconnu, la paternité. La mari qui conteste sa paternité peut prouver le contraire, certes il est la mari, mais il n’est pas le père. La présomption est irréfragable quand la preuve contraire n’est pas admise. Ainsi, l’article 1350 du Code Civil énumère différentes présomptions irréfragables pour lesquelles il n’est pas possible de prouver le contraire. Les présomptions judiciaires elles, sont toujours des présomptions simples et donc, il est toujours possible d’apporter la preuve contraire. Le juge se fonde sur un indice, un fait connu pour en déduire un fait inconnu. Ces indices sont extrêmement variés, il suffit que les parties aient été en mesure de les discuter et qu’ils ne soient pas contestés.

  1. La force probante.

Comme pour les témoignages, cette force probante n’est pas prévue par la loi sauf pour les présomptions légales irréfragables qui lient le juge qui ne pourra pas porter une appréciation différente de celle posée par la loi. Les présomptions légales simples doivent être appliquées si la preuve contraire n’a pas été rapportée. Enfin, pour les présomptions judiciaires c’est le juge qui apprécie en toute liberté et en fonction de sa conviction la force probante qu’il convient de leur attribuer, un seul indice peut lui sembler suffisant pour former sa conviction et sur la base de cet indice il peut corroborer ou non par des témoignages. Civil fait par exemple référence aux registres et papiers domestiques.

  • 4. L’aveu.

Déclaration par laquelle l’une des parties reconnait l’exactitude d’un fait qui lui est défavorable et qui est allégué par son adversaire. Le principe c’est que l’homme n’est pas censé mentir contre ses intérêts. On distingue deux types d’aveu qui n’ont pas la même force probante: l’aveu judiciaire et l’aveu extra judiciaire.

  1. L’aveu judiciaire. Article 1356 Code Civil.

On dit que l’aveu est judiciaire lorsqu’il est fait en justice devant un juge. Dans ce cas, il est irrévocable et indivisible (doit être indivisible). Il a une force probante absolue, la loi prévoit que le juge est obligé de le tenir pour vrai en matière civil. Si A avoue être débiteur de B mais qu’il ajoute tout de suite qu’il a payé sa dette, B ne peut pas diviser l’aveu de A en ne retenant la première partie. L’aveu judiciaire a une force probante absolue, la loi prévoit que le juge est obligé de le tenir pour vrai.

  1. L’aveu extra-judiciaire. Article 1355 Code Civil.

Comme son nom l’indique, c’est l’aveu qui est fait hors de la présence du juge. Il peut être contenu dans tout document écrit émanant d’une des parties et dont le juge viendrait à prendre connaissance. Par exemple: une lettre missive. L’aveu extra-judiciaire n’a pas la même force probante, il ne lie pas le juge qui comme pour le témoignage ou la présomption judiciaire est libre de déterminer le crédit qu’il convient d’octroyer à cet aveu.

  • 5. Le serment. 1357 du Code Civil.

Le serment est l’affirmation solennelle par une partie d’un fait qui lui est favorable. Exemple: Une personne jure qu’elle n’a pas de dettes. L’admission d’un tel mode de preuve peut surprendre car si longtemps on pouvait présumer qu’en jurant l’auteur du serment disait la vérité en raison du sentiment religieux. Aujourd’hui ce mode de preuve peut sembler naïf mais il reste tout de même que l’auteur d’un faux serment s’expose à des sanctions pénales. Le serment est le mode de preuve utilisé en ultime recours quand il n’existe plus aucun autre mode de preuve. Il existe deux types de serments, le serment décisoire et le serment supplétoire.

  1. Le serment décisoire. Article 1358 Code Civil.

Il s’agit du serment déféré par l’un des plaideurs à son adversaire. En d’autres termes, il lui demande de jurer que ce qu’il dit est vrai. Trois attitudes sont alors possibles:

soit il prête serment et il gagne son procès;

soit il refuse de prêter serment et il perd son procès;

soit il refuse de prêter serment mais demande à son adversaire de prêter serment de la réalité de sa prétention.

La force probante du serment décisoire est absolue, le juge est lié, il doit donner raison à celui qui a prêté serment.

  1. Le serment supplétoire. Articles 1366 et suivants Code Civil.

C’est le juge qui demande à une partie de prêter serment de la réalité de sa prétention lorsqu’il estime que les éléments de preuve rapportés par les parties ne sont pas suffisant pour remporter son intime conviction. On ne peut avoir ce recours qu’en complément d’enquête. Ce serment ne lie pas le juge.

Section 3 : L’admissibilité des modes de preuve.

Peut-on quelque soit le litige avoir recours à un quelconque des 5 moyens de preuve envisagés par le Code Civil. La réponse à cette question dépend du système de preuve retenue. Il existe en effet deux systèmes de preuve:

Système de preuve morale;

Système de preuve légale.

Le système de la preuve morale est un système dans laquelle la preuve est libre, dire que la preuve est libre signifie retrouver cette liberté à deux niveaux:

  1. Tous les modes de preuves sont admissibles;
  2. Liberté pour le juge d’apprécier la force probante qui convient de reconnaître à chaque moyen de preuve.

→ Il n’y a donc pas de hiérarchie entre les différents modes de preuve dans un tel système puisque c’est le juge qui apprécie en fonction de son intime conviction la force probante des preuves débattues devant lui.

Dans un système de preuve légale, c’est la loi qui détermine tout d’abord les modes de preuves qui sont admissibles et la loi opère un choix, ce faisant, elle établit une hiérarchie entre les différents procédés de preuve. C’est également la loi qui fixe de manière impérative la force probante des moyens de preuve. Le juge n’a pas de pouvoir d’appréciation, il doit reconnaître aux moyens de preuve la force probante que leur accorde la loi. Le droit français consacre selon les matières tel ou tel système, ou parfois, un mélange des deux.

  • 1. Les matières soumises au système de la preuve morale.

1). En matière pénale.

Le principe est celui de la liberté de la preuve. Le juge se prononce en fonction de son intime conviction après avoir étudié les différents moyens de preuve débattus devant lui. Il n’est lié par aucune preuve. En revanche, le choix des procédés de preuve n’est pas totalement libre. Ainsi en matière pénale, le serment décisoire est exclu. De plus, il existe comme en matière civile mais plus fortement, un principe général de loyauté dans l’administration de la preuve qui interdit le recours à certains procédés.

2) En matière commerciale.

Les besoins de souplesse et de rapidité propre à l’activité commerciale ont conduit à retenir le système de la preuve morale. En matière commerciale, la preuve est libre Art. 109 Code de Commerce. Cela signifie qu’entre commerçants, les actes juridiques comme les faits juridiques peuvent être prouvés par tout moyen. C’est le juge qui décide seul de la force probante des éléments qui lui sont soumis sans avoir à respecter une hiérarchie entre les différents modes de preuve. Par exemple, il peut accepter en matière commerciale que soit prouvé contre le contenu d’un écrit par témoignage ou par présomption. En présence d’un acte mixte, c’est à dire d’un acte passé entre un commerçant et un non commerçant, la liberté des preuves ne joue qu’à l’encontre de la partie à l’égard de laquelle l’opération est commerciale, c’est à dire qu’à l’encontre du commerçant. Exemple : une vente est conclue entre un commerçant et un non commerçant, le contrat peut être prouvé librement par l’acheteur contre le vendeur si c’est le non commerçant qui attaque le commerçant, la liberté de la preuve s’applique. Au contraire, si l’action est dirigée par le vendeur contre l’acheteur, ce sont les règles du droit civil qui s’appliquent (article 1341 au dessus de 1500€).

3) En matière administrative.

Tous les modes de preuve sont également admis, c’est le juge qui en fonction de son intime conviction apprécie la force probante qu’il convient de leur donner.

  • 2 : La preuve en matière civile : un système mixte.

Le système retenu en matière civile est mixte à deux égards.

Tout d’abord, on a pu constater qu’au regard de détermination de la force probante reconnue au moyen de preuve, certains moyens de preuves voient leur force probante déterminés par la loi (preuves parfaites, écrits pré-constitués, aveu judiciaire, serment décisoire). D’autres au contraire n’ont pas une force probante qui s’impose au juge qui peut apprécier, en fonction de son intime conviction, au cas par cas, la force probante qu’il convient de leur donner. C’est le cas des témoignages, des présomptions, de l’aveu extra judiciaire, ce sont les preuves imparfaites. Mais le système en droit civil est également mixte en ce qui concerne l’admissibilité des modes de preuve car pour les faits juridiques, la preuve peut être faite par tout moyen alors que pour les actes juridiques, un mode de preuve est imposé au delà d’un certain montant, il faut un écrit (au sens strict).

  1. La preuve des faits juridiques.

Les faits juridiques sont soumis à un régime spécifique, ils peuvent être prouvés par tout moyen d’où l’importance de distinguer acte et fait juridique. Il faut toutefois que le procédé de preuve soit légalement admissible, qu’il soit loyal. Par exemple, le juge devra écarter un élément de preuve s’il porte atteinte au respect de la vie privée ou s’il entraine la violation d’un secret médical ou professionnel. L’importance de certains faits juridiques a conduit le législateur à écarter parfois le principe de la liberté de la preuve. Par exemple, la naissance ou le décès ont une telle importance que le législateur exige qu’il soit obligatoirement prouvé par un acte authentique et plus précisément par un acte de l’état civil. Attention, la liberté est moins grande que dans un système de preuve morale comme en droit commercial. En effet, elle ne joue ici que pour le choix du mode de preuve, pas pour la détermination de la force probante.

  1. La preuve des actes juridiques.

Pour les actes juridiques, un mode de preuve est imposé, mais il existe des exceptions et des tempéraments à ce principe.

1) Le principe pour la preuve des actes juridiques.

Ce principe est énoncé àl’article 1341 du Code civil qui exige non seulement que la preuve de l’acte juridique se fasse par écrit mais qui interdit également de prouver outre ou contre un écrit par témoignage.

  1. a) L’obligation de prouver un acte juridique par écrit.

L’écrit exigé par cet article est un écrit préconstitué (acte authentique ou acte sous seing privé). L’écrit n’est pas exigé ad validitatem, comme condition de validité de l’acte juridique. Probationnel. L’article 1341 impose que la preuve de tout acte juridique se fasse par écrit lorsque l’acte porte sur une somme excédent un seuil fixé par décret. L’écrit exigé par cet article n’est pas n’importe lequel : c’est un écrit pré-constitué, et le seuil d’exigence de ce décret est fixé depuis le 24 aout 2004 à 1500€. Cela signifie que de si un acte juridique porte sur un acte inférieur, la preuve est libre alors que si il porte sur une somme supérieure, elle doit nécessairement être apportée par écrit. L’écrit ici n’est pas une condition de validité de l’acte juridique, il est valable dans si il n’y a pas d’écrit, il ne peut pas être prouvé.

Quelle est la place de l’écrit en droit de la preuve?Il fait partie des preuves parfaite et c’est aussi le seul mode de preuve possible pour les actes juridiques.

  1. b) Interdiction de prouver par témoin contre et outre le contenu d’un écrit.

Prouver contre un écrit, c’est prouver que l’une de ses dispositions est inexacte. Prouver outre un écrit, c’est prouver qu’une disposition aurait été omise. Qu’il s’agisse de prouver outre ou contre, on peut le faire en ayant recours ni au témoignage, ni aux présomptions judiciaires. Cela montre bien que la loi pose une hiérarchie entre les écrits d’une part, et les témoignages et présomptions d’autre part. En revanche, elle ne mentionne si l’aveu ni le serment. On devrait donc pouvoir en déduire que l’on peut prouver contre ou outre un écrit par aveu ou serment. Ainsi, si l’on conteste le contenu d’un écrit ou si l’on pense qu’une disposition fait défaut, on ne peut le prouver qu’en invoquant un autre écrit, un aveu ou un serment.

2) Les limites au principe de l’exigence d’un écrit.

Tout d’abord, la règle de l’article 1341 n’a pas à être appliquée lorsque l’acte intervient dans un domaine où la preuve est libre comme en matière commerciale ou encore lorsque l’acte juridique porte sur une valeur inférieurs à 1500€.
– La règle de l’article 1341 n’est qu’une règle supplétive se qui signifie que les parties ont très bien pu dans leur contrat écarter son implication en cas de litige.
– La troisième exception est prévue à l’article 1347 du Code civil qui prévoit qu’un acte juridique peut être prouvé par tout moyen si il existe un commencement de preuve par écrit. Selon cet article, le commencement de preuve par écrit est un document écrit qui émane de la personne contre qui la demande est formée et qui rend vraisemblables les faits allégués. Ce peut être un écrit quelconque, signé ou non, et pas nécessairement rédigé dans le but de servir d’élément de preuve. Par exemple, les juges peuvent considérer qu’une simple lettre missive envoyée par la personne est un commencement de preuve par écrit ou encore qu’un contrat signé qui ne respectait pas les exigences de l’article 1325 ou 1326 pouvaient être un commencement de preuve par écrit. En fait, c’est un écrit qui ne peut pas être qualifié d’authentique ou d’acte sous seing privé mais qui tend à démontrer que les allégations de celui qui l’invoque sont vraisemblables. La jurisprudence interprète largement cette notion et une loi du 9 juillet 1975 l’a également étendue en admettant que soit considéré comme commencement de preuve par écrit les déclarations que fait la personne lors d’une comparution personnelle devant le juge et même son refus de répondre ou son absence de comparution. Ainsi, si l’acte juridique ne peut pas être prouvé par un écrit mais qu’il existe un commencement de preuve par écrit, alors, la partie qui produit ce commencement de preuve par écrit est autorisée à avoir recours aux témoignages et aux présomptions pour compléter sa preuve car comme son nom l’indique, ce n’est qu’un début de preuve. Il n’est pas à lui seul suffisant, il doit obligatoirement être complété par des témoignages ou des présomptions pour suppléer l’absence de preuve écrite.

– L’article 1348 alinéa 1 du Code Civil prévoit une autre exception, l’exigence d’un écrit est écartée lorsqu’on peut établir l’impossibilité dans la quelle se trouve la partie de se procurer un écrit. Cette impossibilité peut être initiale lorsque l’écrit n’a jamais pu être dressé ou elle peut être ultérieure lorsqu’un écrit a été dressé mais qu’il a été perdu à la suite d’un événement de force majeure (c’est un événement qui présente 3 caractéristiques: il est imprévisible, irrésistible et extérieur). Cette impossibilité peut être matérielle ou morale (conclure un contrat avec quelqu’un qui ne peut pas écrire) lorsque par exemple, c’est l’existence de liens de famille ou affectifs forts qui ont empêchés les demandeurs d’établir un écrit. En cas de telle impossibilité, il est possible alors de prouver l’acte juridique par tout moyen.

– Il faut envisager le problème des copies d’écrits (actes authentiques ou actes sous seing privé). L’article 1335 du Code Civil pose le principe que certaines copies d’actes authentiques remplissant certaines conditions ont la même foi que l’original. Pour les autres, comme les copies d’acte sous seing privé, on a toujours admis qu’il était possible de les produire à condition d’être en mesure de produire l’original à la demande de son adversaire. La copie n’avait donc pas initialement de force probante autonome, elle n’avait de valeur que si l’original existait. Mais si la seule façon de copier un document qui était de le recopier à la main, de nombreuses techniques de reproduction ont été crées. La question s’est alors posée si il fallait reconnaître à ces nouvelles copies un certain crédit même si le risque de fraude existe toujours. La jurisprudence a ainsi admis qu’une copie dont l’original n’avait pas été conservé pouvait être considéré comme un commencement de preuve par écrit. Puis, une loi du 12 juillet 1980 a modifié article 1348 Alinéa 2 pour reconnaître à certaines copies une force probante autonome. Il s’agit des copies qui sont la reproduction non seulement fidèle mais aussi durable de l’original. Même si il n’existe plus d’original, cette copie fidèle et durable pourra être produite. Mais alors, quelle est la force probante de ces copies? Cette question soulève encore des divergences d’interprétation. Certains estiment que la copie fidèle et durable doit se voir reconnaître la même force probante que l’original. Cette interprétation peut être critiquée en raison de la place de l’article 1348. Certains considèrent qu’à défaut d’écrit pré-constitué, elle peut par exception fournir la preuve d’un acte juridique mais qu’elle doit alors être complétée par des présomptions et des témoignages. Mais une telle interprétation reviendrait à assimiler la copie fidèle et durable à des commencement de preuve par écrit. Il semblerait qu’il faille faire prévaloir une autre analyse et admettre que la copie fidèle et durable peut permettre de prouver un acte juridique sans être complétée, donc supérieure à un acte commencement de preuve par écrit, mais qu’à la différence de l’écrit original il est possible d’apporter contre elle la preuve contraire par tout moyen.

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