La IVème République : naissance et chute

La IVème République, une nouvelle République ?

Repères chronologiques (1946-1958)

1946-1951

Ø 20 janvier 1946 : Démission du Général de Gaulle du premier GPRG (Gouvernement Provisoire de la République Française)

Ø 5 mai 1946 : Un premier referendum sur un projet de IVe République prévoyant un parlement monocaméral : il est rejeté par les électeurs (53 % non – 47 % oui).

Ø 16 juin 1946 : Discours de Bayeux du général de Gaulle, appelé « La Constitution de Bayeux »

Ø 13 octobre 1946 : Second referendum sur un second projet de IVe République. Le projet est adopté par 9 millions de voix (36% des inscrits). Le non recueille 8 millions de voix cependant (31% des inscrits).

Ø 27 octobre 1946 : Promulgation de la Constitution : naissance de la IVe République.

Ø 23 novembre 1946 : Début de la guerre d’Indochine.

Ø 16 janvier 1947 : Élu en décembre 1946 par l’Assemblée nationale et le Conseil de la République, Vincent Auriol (SFIO) prend ses fonctions de Président de la République.

Ø 22 janvier 1947 : Paul Ramadier (SFIO) devient président du Conseil.

Ø 18 mars 1947 : Les députés communistes votent contre le gouvernement sur la guerre d’Indochine.

Ø 7 avril 1947 : Création du Rassemblement du peuple français (RPF).

Ø 16 avril 1947 : Les ministres communistes quittent le Conseil des ministres pour protester contre la répression à Madagascar.

Ø 4 mai 1947 : Paul Ramadier révoque les ministres communistes.

Ø 5 juin 1947 : le Général Marshall annonce à Harvard l’octroi d’une aide américaine (Plan Marshall)

Ø 19-26 octobre 1947 : Élections municipales : triomphe du RPF

Ø De novembre 1947 à juin 1951, les présidents du conseil sont : Robert Schuman (MRP), André Marie (radical), Robert Schuman (MRP), Henri Queuille (radical), Georges Bidault (MRP), Henri Queuille (radical), René Pleven (UDSR), Henri Queuille (radical).

Ø 17 juin 1951 : Élections législatives et succès du RPF.

Ø 11 août 1951 : René Pleven (UDSR) devient Président du conseil

1952-1953

Ø De janvier 1952 à fin 1953, les présidents du conseil sont : Edgar Faure (radical), Antoine Pinay (indépendant), René Mayer (radical), Joseph Laniel (indépendant).

Ø 27 mai 1952 : Signature à Paris du traité instituant une Communauté européenne de défense (CED).

Ø 26 avril-3 mai 1953 : Élections municipales qui marquent un revers électoral pour le RPF. Le Général de Gaulle le dissout.

Ø 23 décembre 1953 : René Coty (modéré) est élu Président de la République.

1954-1955

Ø De juin 1954 à fin 1955, les présidents du conseil sont : Pierre Mendès France (radical) et Edgar Faure (radical).

Ø 16 janvier 1954 : René Coty prend ses fonctions de Président de la République.

Ø 7 mai 1954 : Chute de Diên-Biên-Phu.

Ø 18 juin 1954 : Pierre Mendès France est nommé Président du Conseil

Ø 11 juillet 1954 : Début de la conférence de Genève sur l’Indochine. Le 20 juillet, un accord est trouvé sur la cessation des hostilités.

Ø 20 juillet 1954 : Les accords de Genève mettent fin au conflit en Indochine.

Ø 1er novembre 1954 : Série d’attentats en Algérie. Cela signe le début de la lutte armée des nationalistes algériens.

Ø 29 mai 1955 : Accord sur l’autonomie interne de l’État tunisien.

Ø 30 novembre 1955 : Dissolution de l’Assemblée nationale.

1956-1957

Ø 2 janvier 1956 : Succès des partis de centre-gauche (SFIO, radicaux et modérés) aux élections législatives sur un programme de paix en Algérie et de réformes sociales.

Ø 1er février 1956 : Guy Mollet (SFIO) devient président du Conseil.

Ø 6 février 1956 : À Alger, Guy Mollet est conspué par les Français d’Algérie.

Ø 3 mars 1956 et 20 mars 1956 : Indépendance du Maroc puis de la Tunisie.

Ø 9 mars 1956 : Le gouvernement reçoit les pouvoirs spéciaux pour l’Algérie.

Ø 23 mai 1956 : Pierre Mendès France démissionne du gouvernement (il est Ministre d’État) pour protester contre la politique menée en Algérie. Il quitte également la tête du parti radical.

Ø 30 octobre 1956 : Intervention militaire franco-britannique sur le Canal de Suez.

Ø 7 janvier 1957 : Le général Massu est nommé responsable du maintien de l’ordre à Alger.

Ø 25 mars 1957 : Signature du traité de Rome qui donne naissance de la Communauté économique européenne et à l’EURATOM.

Ø De juin à fin 1957, les présidents du conseil sont : Maurice Bourgès-Maunoury (radical) et Félix Gaillard (radical).

1958

Ø 10 mai 1958 : À Alger, manifestations appelant les pouvoirs publics à tout faire pour défendre la présence française en Algérie.

Ø 13 mai 1958 : À Alger, les Français d’Algérie avec l’aide de l’armée se révoltent. Le général Salan, chef des forces françaises en Algérie, déclare prendre en main « les destinées de l’Algérie française ».

Ø 14 mai 1958 : Pierre Pflimlin est investi par l’Assemblée nationale. Appel du général Massu au général de Gaulle qu’il presse de sortir du silence.

Ø 15 mai 1958 : À 12h, à Alger, le général Salan, sous les acclamations, lance « Vive de Gaulle ! ». À 17h, le général de Gaulle déclare dans un communiqué : « Je me tiens prêt à assumer les pouvoirs de la République ».

Ø 24 mai 1958 : Les insurgés d’Alger s’emparent de la Corse. Des rumeurs d’envoi de troupes aéroportées sur Paris et de coup d’État militaire circulent.

Ø 27 mai 1958 : Le général de Gaulle publie un communiqué : « J’ai entamé le processus régulier nécessaire à l’établissement d’un gouvernement républicain ».

Ø 28 mai 1958 : Démission du gouvernement Pflimlin. Les partis de gauche et les syndicats manifestent pour la défense de la République.

Ø 29 mai 1958 : Message au Parlement du Président de la République, René Coty, qui annonce qu’il vient de faire appel au Général de Gaulle.

Ø 1er juin 1958 : Le général de Gaulle reçoit l’investiture de l’Assemblée nationale (329 voix contre 224) pour former un gouvernement disposant des pleins pouvoirs pour six mois avec mission d’établir une nouvelle Constitution.

Ø 4-7 juin 1958 : Premier voyage du général de Gaulle en Algérie. À Alger, il déclare à la foule : « Je vous ai compris ! ». À Mostaganem, pour la première et la dernière fois, il lance : « Vive l’Algérie française ! ».

Ø 12 juin 1958 : Début des travaux de la commission chargée de rédiger une Constitution sous la responsabilité de Michel Debré, Garde des Sceaux.

Ø 4 septembre 1958 : À Paris, place de la République, le général de Gaulle présente le nouveau projet de Constitution.

Ø 24 septembre 1958 : Les partisans du général de Gaulle créent un parti politique : l’Union pour la nouvelle République (UNR).

Ø 28 septembre 1958 : Par référendum, 79 % des électeurs s’étant exprimés approuvent la nouvelle Constitution.

Ø 5 octobre 1958 : Promulgation de la nouvelle Constitution. Naissance de la Ve République.

IVeme république (1944 - 1953) histoire de la vie politique de la IVème république

La IVème République, une nouvelle République ?

    • Restaurer la République
  • De la libération à la naissance de la IVème République, de nouvelles institutions pour restaurer l’autorité de l’Etat ?
  • De l’assemblée tripartite du 21 octobre 1945 à la rupture du tripartisme
    • La troisième force entre communistes et gaullistes
  • Communistes contre la IVème République et gaullistes « contre le système »
  • La France s’ancre à droite
    • La IVème République, expansion et délitements.
  • Le moment Mendès-France (1954-1955)
  • La guerre d’Algérie et la chute de la IVème République
  • Conclusion

La libération en mettant fin à Vichy restaure la république, mais on ne peut pas oublier les évènements de la seconde guerre mondiale, ni sur quoi s’était bâtie la 3ème république.

Elle tiendra compte de la place des catholiques dans la résistance. Ainsi les catholiques se trouvent intégrés dans la république. La hiérarchie des évêques avait pactisé avec Pétain (peur du communiste et intérêts économiques). Mais de nombreux chrétiens des jeunesses catholiques participèrent à la résistance.

L’ancienne légitimité républicaine qui reposait sur l’adhésion aux lois laïques, va désormais se fonder sur la légitimité de la résistance. La résistance va bouleverser le clivage entre républicains et cléricaux.

Dans la résistance et la France libre on ne souhaite pas revenir à la 3ème république, jugée responsable de la défaite et de la collaboration. Il y a ici l’idée qu’il est nécessaire de fonder une 4ème république, qui ne serait plus celle des corrompus et qui romprait avec les jeux parlementaires stériles. Certains souhaitent un parti de la résistance.

Mais ce n’est pas parce qu’on est unis dans le combat passé qu’on est d’accord sur tout.

3 grands vainqueurs s’opposeront.

Les communistes, les socialistes et une nouvelle famille celle des démocrates chrétiens. De Gaulle lui n’est d’aucun parti, car dans une vieille tradition de droite républicaine on préfère parler de rassemblement, et il n’est donc pas considéré comme un fruit de la 3ème république.

On observe un divorce entre ces familles, notamment sur la question de la forme de cette nouvelle république. Quelle place doit-on accorder désormais aux partis et peut-on encore s’accommoder d’un régime d’assemblée.

L’accouchement sera long et douloureux. Dans un premier temps de Gaulle démissionne le 22/01/1946. Socialistes et communistes majoritaires présentent le 05 mai 1946 par référendum un projet de régime d’assemblée. Les électeurs démocrates chrétiens et les gaullistes, comme ceux de droite le repousseront. Un second projet sera adopté le 13/10/946.

Cette constitution est adoptée par une minorité (des inscrits, seulement 36%) et il y a beaucoup d’abstention. Les bases sont ainsi déjà fragiles dès le début.

Ce régime est le résultat d’une coalition centriste entre socialistes, communistes et démocrates-chrétiens et elle trouvera dans le général de Gaulle un ennemi intérieur.

Très semblable à la 3ème république aux niveaux institutionnel, le régime de scrutin favorisera aussi les difficultés, c’est le scrutin à la proportionnelle qui empêche la constitution de majorités stables.

Le défaut principal est l’impossibilité à dégager une majorité. Ce seront 22 gouvernements en 12 ans. Dans ce marasme il y aura 2 présidents du conseil populaires, Antoine Piney (1952 – 10 mois) et Pierre Mendes France (1954 – 8 mois).

Si elle a duré 12 ans c’est sans doute qu’elle avait des soutiens, qui ne viennent pas des coalitions notamment centristes, qui ne sont pas homogènes. Gauche et droite continueront à se diviser sur la laïcité. Cette république est aussi minée par les ambitions personnelles. Mais elle se maintient car elle est aidée de l’extérieur par le plan Marshall (USA ayant intérêt à avoir en Europe des régimes stables contre l’expansion communiste), ainsi la république mettra en place le projet européen (25/03/1957 traité de Rome). Elle bénéficie aussi d’une puissante structure administrative, la longue histoire de la centralisation a profité à cette stabilité (les ministres passent, les hauts fonctionnaires restent). En 1945, date de la création de l’ENA, c’est un projet politique destiné à former des experts de l’état dans un moule commun dédié au service public qui se forgera encore plus dans la résistance ; les instituts d’études politiques (science po) se développeront dans le même sens en 1946, le but étant de créer une république administrative.

La faiblesse structurelle de la 4ème république ne résistera pas à l’épreuve de la guerre d’Algérie. On sera incapable de plaider la solution de l’indépendance programmée de l’Algérie. Les responsables sont poussés par l’armée et la population coloniale dans cette mauvaise voie.

I) Restaurer la République

Le régime parlementaire qui se met en place ressemble à celui de la 3ème république.

Pendant le régime de Vichy les forces de résistance sont diverses et peu organisées, en concurrence on observe une résistance extérieure autour du Général de Gaulle avec la France Libre, il y a déjà là un projet politique.

En 1943 est créé le conseil national de la résistance CNR, qui rassemble aussi des mouvements syndicaux (CFTC, CGT), des partis d’avant-guerre. Sera aussi mis en place le Comité Français de libération Nationale CFLN, qui est le gouvernement de la France Libre. Le 21/04/1944, l’ordonnance du CFLN sur l’organisation des pouvoirs publics accorde le droit de vote aux femmes. Le 02 juin 1944 le CFLN devient le gouvernement provisoire de la république française (GPRF) et précède de 2 mois la libération de Paris, ce n’est pas un hasard.

Après la libération les forces politiques issues de la résistance chercheront à restaurer l’autorité de l’état.

  • De la libération à la naissance de la IVème République, de nouvelles institutions pour restaurer l’autorité de l’Etat ?

Au lendemain de la libération, il existe de fortes rivalités au sein de la résistance. Il y a les communistes et les gaullistes. Dans ce climat on peut très vite basculer vers l’insurrection. Le communisme français est révolutionnaire et on peut imaginer qu’il souhaite profiter du climat pour mettre en place un gouvernement révolutionnaire, mais le grand frère Soviétique ne le souhaite pas, et le PCF se soumettra à de Gaulle. C’est la 2ème fois que le PC s’opposera au soulèvement des travailleurs (1ère en 1936).

L’objectif est la restauration de l’état et la remise en marche de l’économie. On va s’appuyer sur des réformes sociales. Le 15 mars 1944, le CNR adopte de nombreuses mesures pour rétablir la république, elles prévoient le rétablissement des libertés républicaines, l’instauration d’une véritable démocratie économique et sociale impliquant l’éviction des grandes féodalités économiques et financières de la direction de l’économie, une organisation rationnelle de l’économie, une planification démocratique, des nationalisations, la création de coopératives, la participation des travailleurs à la direction de l’économie, le droit du travail, un plan complet de sécurité sociale, la sécurité de l’emploi, la régulation de l’embauche et des licenciements, la retraite des salariés, le droit à l’instruction.

Tout comme pour 1789, il faut ici aussi observer qu’on change de réflexion, on l’organise sur la dimension sociale. Derrière cela il y l’influence du PCF, de la CGT surtout, avec l’idée que l’instauration de la république ne peut se faire sans une réflexion sociale. Ces réformes sont présentes car le mouvement ouvrier jouit d’une grande reconnaissance, les ouvriers ont été utilisés, déportés, l’économie a été ponctionnée et le mouvement ouvrier a été très présent dans la résistance. Il y aussi le discrédit du patronat qui fut très engagé dans la collaboration. Au-delà d’une dimension économique, il y a ainsi dans les nationalisations également ce facteur.

  • De l’assemblée tripartite du 21 octobre 1945 à la rupture du tripartisme

Au sortir de la guerre les premières élections législatives sont organisées le 21/10/1945 en même temps qu’un référendum qui pose la question du régime. Le non l’emporte à 96%, c’est la fin de la IIIème République.

Les législatives vont permettre de former aussi une assemblée constituante. On va constater la victoire de 3 partis, le PCF qui n’est plus interdit, la SFIO et le MRP. Ces 3 partis se sont illustrés pendant la guerre pour leur participation à la résistance. Chacun obtient entre 4,5 et 5 millions de voix sur un corps électoral de 25 millions d’électeurs femmes y compris. Chaque parti obtient entre 150 sièges sur les 586, le plus important est le PCF avec 159 sièges.

De Gaulle dirigera le premier GPRF tripartite (gouvernement provisoire). De Gaulle entre rapidement en conflit avec ses ministres, et l’assemblée nationale et surtout avec les communistes. Il entre en conflit également avec l’assemblée constituante et démissionne le 20/01/1946.

La naissance du tripartisme se produit à la mise en place avec Félix Bouin d’un nouveau gouvernement. Ces 3 partis mettent en place un protocole d’accord sur la solidarité gouvernementale afin de s’assurer de décisions collégiales.

Ces partis sont des forces décisives renforcées par la résistance. Le MRP créé en 1944 est très connu par ses représentant Georges Bidault et Robert Schumann. Ce parti rassemble des résistants catholiques, donc des démocrates chrétiens en décalage avec les positions de l’église et avec lestypes d’actions qu’a mené l’église au cours de la guerre, ils sont aussi pleinement laïques et républicains.

On trouve aussi des socialistes modéré qui ne se retrouvent pas dans les thèses marxistes encore présentent au sein de la SFIO, ils prônent la révolution par la loi.

Le MRP occupe une position de centre gauche mais son électorat est un électorat de droite, car cet électorat au sortir de la guerre n’a guère le choix, du fait que les forces de droite se sont compromises au sein de la guerre. C’est une table rase des partis de droite.

Le 1er projet constitutionnel va voir l’opposition entre le PCF et la SFIO et de l’autre côté le MRP et de Gaulle (défenseurs d’un bicaméralisme). Le 1er projet est rejeté par référendum le 05/05/1946 à 53%.

En juin 1946 la 2ème assemblée constituante est élu avec le MRP qui est en tête devant le PCF et la SFIO est affaiblie. Le nouveau Président du Conseil sera MRP avec Georges Bidault, auquel on associe Félix Bouin de la SFIO et Félix Torres du PCF.

Pendant ce temps de Gaulle se met apparemment en retrait, mais fait une rentrée politique à Bayeux avec un discours prononcé le 16/06/1946. Dans ce discours il expose ses idées constitutionnelles dont il espère qu’elles vont influencer l’assemblée constituante. Il y exprime un bicaméralisme et un pouvoir exécutif fort. Cela ne sera pas entendu, mais ce seront les grands trait de la constitution de la Vème République.

Le 13/10/1946 un nouveau projet sera soumis à référendum, marqué par 31,4% d’abstention. Néanmoins la constitution sera adoptée de justesse. On constate l’expression de 3 blocs, les abstentionnistes par forcément indifférents, un bloc de oui et un bloc de non qui rassemble 1/3 des électeurs.

Cette constitution est inspirée de celle d’avril 1946, mais est élaborée sur un compromis. Il y a 2 chambres, donc un certain bicaméralisme, mais avec un sénat affaiblit. Le rôle du Président de la République devient honorifique au profit d’un exécutif renforcé pour le Président du Conseil. De nouveaux droits économiques et sociaux sont consacrés (égalité hommes/femmes, le droit d’asile, le droit et la liberté syndicale, le droit de grève, le droit à l’emploi et la non-discrimination dans le travail). Ce préambule sera aussi consacré dans la constitution de la Vème République.

Le 16/01/1947, Vincent Auriol de la SFIO est élu Président de la République, il désigne Paul Ramadier (SFIO) Président du Conseil. Mais on constate que plusieurs questions au cours de l’année 1947 vont provoquer des tensions dans le tripartisme.

La question coloniale

C’est d’abord la question coloniale. Le 18/03/1947, les députés communistes votent contre le gouvernement sur la guerre d’Indochine (le Vietnam a déclaré son indépendance le 02/09/1945 et la France a tenté de reconstruire son emprise sur l’Indochine par la suite). Le 16 avril les ministres communistes quittent la séance du conseil des ministres pour protester contre les évènements de répression à Madagascar (révolte indépendantiste réprimée dans le sang par la Légion étrangère et des bataillons sénégalais – on estime les victimes entre 10.000 et 100.000 morts).

La question sociale :

Entre 1945 et 1947 c’est la bataille de la production, il faut reconstruire et reproduire de la richesse économique. De nombreuses grèves vont éclater. Un des premiers lieux où éclatent les grèves est les usines Renault. A la suite de l’indiscipline des communistes, le 05 mai les ministres communistes sont révoqués du gouvernement. En septembre et octobre de nouvelles grèves ont lieu sur des revendications salariales et de ravitaillement. A la fin de 1947 c’est une situation quasi insurrectionnelle.

A côté de ces questions il y a aussi la question internationale, c’est la guerre froide. Le 12/03/1947, la politique de « containment » a pour but de faire barrage au communisme (Président Truman). La stratégie armée ne sera pas légitime et on y préfère le 05 juin par le Général Marshall l’aide économique orientée via le plan Marshall.

Ces tensions vont conduire à la fin du tripartisme et au début d’une forte instabilité.

II) La troisième force entre communistes et gaullistes

La guerre froide et les tensions vont rejeter à partir de 1947 les communistes dans l’opposition. Avec leur départ du gouvernement, les bases politiques du régime vont devenir très instables. Le régime est pris en tenaille par 2 contestations.

A droite :

Le général de Gaulle, qui va fonder le RPF espérant ainsi enterrer le régime sur la bases des propositions du discours de Bayeux.

A gauche :

Le PCF qui va établir une politique d’isolationnisme pro soviétique qui rendra impossible la constitution de majorité à gauche.

C’est dans ce contexte qu’on établi une 3ème force chargée de combattre le communisme et le Gaullisme. Cette 3ème force va placer Guy Mollet et les socialistes dans une situation inconfortable. Mollet ancien partisan des communistes va devenir leur bête noire du fait qu’il accepte l’alliance atlantique, on va lui reprocher de soutenir les gouvernements bourgeois. Ces partisans créent ainsi une 3ème force précaire et minoritaire, qui ne doit sa survie que du fait que ses ennemis sont incapables de s’entendre et de s’associer.

  • Communistes contre la IVème République et gaullistes « contre le système »

Le système va être de plus en plus décrié, car la rationalisation prévue par la constitution (équilibre du pouvoir) va apparaitre comme un échec. Dès 1947, les habitudes de la IIIème République et les règles conventionnelles de 1877 vont l’emporter sur les nouvelles règles juridiques de la constitution de la IVème République.

La Constitution de 1946 avait essayé de corriger les défauts passés, en renforçant le pouvoir exécutif et en rationnalisant le travail parlementaire. Dès janvier 1947 on constate que ce texte est en fait oublié dans la pratique. Le Président du Conseil Paul Ramadier réinstaure la coutume de la double investiture qui détruit la relative autonomie que lui accordait le texte constitutionnel. Après avoir été investi selon la procédure prévue, Ramadier décide de revenir devant les députés pour leur poser la question de confiance sur la composition de son gouvernement. Cette initiative contraire à la constitution, n’est pas une provocation pour Ramadier, c’est un résistant de 60 ans qui a fait toute sa carrière sous la IIIème République et il a du mal à se défaire de ces habitudes. Il signifie ainsi aux députés qu’il n’a pas l’intention de rompre «le pacte des pairs» et qu’il ne souhaite pas gouverner seul. C’est un acte majeur, car cela atteste de la prégnance des règles tacites normatives issues de la IIIème République. Les successeurs de Ramadier se sentiront obligés de procéder de même et vont ainsi perdre toute autorité sur leurs ministres investis par les députés. Les gouvernements vont reprendre l’habitude de démissionner dès leur mise en minorité. Ces usages vont participer à l’instabilité chronique du régime (durée de vie moyenne d’un gouvernement est de 7 mois).

A partir de l’expulsion des communistes, environs 200 députés de l’assemblées nationale deviennent hostiles à la IVème République. Le Président du Conseil doit gouverner en comptant sur un peu moins de 400 députés.

Deux grandes forces sont opposées au régime, le PCF et le Gaullisme. Le PCF au sortir de la guerre exerce une fascination auprès des intellectuels, au cours de la résistance il a opéré une conquête de la CGT qui en 1946 compte 6 millions d’adhérents. Ce binôme permet au PCF de maintenir et de construire des liens étroits avec la classe ouvrière. En 1956 entre 50 et 60% des ouvriers votent pour le PCF le reste pour la SFIO. Le PCF peut aussi compter sur un merveilleux système partisan et dispose du prestige de la résistance, il peut aussi compter sur une légitimité internationale au point que de Gaulle dira que «l’URSS se situe à deux étapes du tour de France».

En 1947 le PCF a pris le tournant de la guerre froide et à l’issue des grèves de 1947 on estimera qu’elles ont été téléguidées par l’URSS («grèves Molotov») ; dès lors il y a l’idée que le PCF n’est plus qu’un satellite de l’URSS.

La scission de la confédération générale du Travail se traduira par la création de Force Ouvrière (anti stalinienne suspectée d’être une création de la CIA). En 1948 auront lieu de nouvelles grèves très violentes. L’armée sera mobilisée et 2.000 syndicalistes seront arrêtés. Le pays parait au bord de l’implosion.

Pendant ce temps-là de Gaulle s’active. Le 07/04/1947 il annonce à Strasbourg la création du RPF (créé le 14 avril). Le but est la mise en œuvre du programme du discours de Bayeux, véritable arme de guerre contre le régime en place que de Gaulle qualifie de «régime de partis».

De Gaulle ne souhaitait pas créer un parti mais un rassemblement (aujourd’hui encore le mot « parti » est surtout utilisé à gauche) du peule français. Les adhésions seront massives, plus d’un demi-million de français s’y rallieront, ce sera la 2ème force derrière le PCF. Ce sont des cadres moyens et des employés.

Ce RPF est regardé avec suspicion par le MRP. La majorité parlementaire évoluera du fait des mouvements d’alliance entre parlementaire et hommes politiques.

  • La France s’ancre à droite

Du fait de la fin du tripartisme on tente de constituer une alliance politique face au PCF et au RPF. Cette 3ème force regroupe le MRP, la SFIO et des radicaux et des socialistes modérés rassemblés au sein de l’UDSR (Union démocratique et socialiste de la résistance, très anti communiste). L’UDSR est présidé entre 1953 et 1965 par Mitterrand (jamais membre de la SFIO).

Contrairement aux prévisions de de Gaulle la cohésion parlementaire va malgré tout se maintenir. Ce mariage n’est pas un mariage d’amour, ces forces sont condamnées à vivre ensemble malgré les oppositions sociales, coloniales et scolaires.

Pour se maintenir au pouvoir on fait une nouvelle loi électorale dite des «apparentements», c’est une subtilité électorale (sous la 5ème république elle est considérée comme assassine).

Du fait de cette nouvelle alliance, le gouvernement va se déplacer lentement sur sa droite. A la fin les gouvernements seront MRP. Le gouvernement prend des positions libérales et signe le pacte atlantique (alliance avec USA et UK).

L’instabilité est limitée par la volonté des acteurs en place de conserver le pouvoir.

III) La IVème République, expansion et délitements.

Les troubles vont se développer en Afrique du Nord alors que la guerre fait rage encore en Indochine.

La position coloniale française est difficile, car tant l’URSS que les USA sont opposés aux politiques coloniales des anciens empires. Avec cynisme ces pays sont favorables à l’auto détermination des peuples.

  • Le moment Mendès-France (1954-1955)

Pierre Mendès-France est atypique car il se veut au-dessus des partis comme de Gaulle. C’est un social-démocrate hostile aux communistes et à l’extrême droite (il aura été le seul à voter contre les JO de Berlin). Il développe un style de gouvernement nouveau, il souhaite s’adresser au français toutes les semaines, chaque samedi, par le biais de la télévision. Il s’agit là de s’appuyer sur l’opinion par-dessus le parlement et les organisations partisanes. Ce style sera repris par de Gaulle.

Ce style est une critique implicite du régime et des calculs politiques. Son idée est de dépoussiérer le régime parlementaire sans le renverser. Son discours d’investiture «gouverner c’est choisir» fournit tous les gages de bonne conduite, mais en fait il s’agit de requalifier le sens d’un soutien parlementaire éventuel. Il indique qu’en votant pour lui, les parlementaires s’engagent à la loyauté : «vous serez engagés, vous devez laisser se développer l’action gouvernementale…».

Il revendique de l’autonomie, il prétend mener une politique personnelle. Mais cela apparait inadmissible pour des députés formés sous la 3ème République.

C’est sur la question coloniale qu’il fera la différence. Dès 1950 il est un opposant à la guerre d’Indochine et s’impose comme un recours pour régler la crise. Le 18/06/1954 il est nommé Président du Conseil avec l’objectif de régler la question d’Indochine par la négociation, il se donnera 30 jours pour régler la paix dans un conflit qui dure déjà depuis 8 ans. Les accords de Genève du 20/07/1954 mettront fin au conflit et il gagne ainsi son pari.

A la suite de ce règlement, il engage des négociations qui aboutissent à l’émancipation de la Tunisie.

En novembre 1954 une nouvelle insurrection apparait en Algérie et Mendès-France contrairement à ce qu’il a fait avant refuse de négocier avec le FLN et la France entre dans une nouvelle phase d’instabilité. Le 05/02/1955 le gouvernement Mendès-France est renversé.

Cette question coloniale est le cancer de la 4ème République. La guerre coute cher économiquement et humainement. La question algérienne affecte l’armée et les colons d’Algérie, qui accusent la République de brader l’empire. Il y a aussi l’idée qu’on brade également un projet républicain car sous la 3ème République la colonisation était ainsi perçue.

  • La guerre d’Algérie et la chute de la IVème République

De Gaulle va revenir au pouvoir et donner à la France une nouvelle Constitution.

Le 13 mai 1958 l’immeuble du gouvernement général à Alger est envahi par la foule et Massu fonde un comité de salut public qui n’obéit plus au pouvoir politique, le but étant d’empêcher la nomination de Pierre Pflimlin favorable aux négociations avec le FLN. Massu souhaite aussi favoriser le retour de Gaulle.

Le 15 mai, De Gaulle déclare par communiqué être prêt à assumer les pouvoirs de la République. Des tractations et des rencontres secrètes vont avoir lieu.

Dans la nuit du 26 mai le Président du Conseil Pflimlin rencontre de Gaulle en secret pour s’assure des conditions de son retour. Cet entretien échoue et de Gaulle choisit de forcer le destin.

Le 27 mai de Gaulle déclare avoir entamé le processus régulier nécessaire à l’établissement d’un gouvernement républicain, et Pflimlin décide de démissionner, alors que de Gaulle s’entretien avec le président du parlement sur les conditions de son retour.

Le 29 mai, René Coty fait appel à de Gaulle pour sortir de l’impasse Algérienne.

Le 1er juin il est investi Président du Conseil, des pleins pouvoirs et d’une dérogation exceptionnelle pour réviser la Constitution.

Le projet sera soumis à un comité consultatif, puis soumis à référendum et approuvé à 82,6% (abstention de 15%). Le 04/10/1895 la constitution est promulguée.

De Gaulle sera élu Président de la République (par 80.000 grands électeurs) le 21/12/1958.

Conclusion :

Le régime de la 4ème République fonctionne comme un repoussoir, sa représentation historique est celle d’un régime très instable. Cette instabilité serait due à la prééminence de l’Assemblée Nationale sur le pouvoir exécutif et le gouvernement, et parce que c’était un régime des partis selon l’expression de de Gaulle. C’est l’assemblée nationale et les partis politiques qui auraient provoqué la chute de ce régime.

Cependant Daniel Gaxie explique que contrairement à l’idée reçue si le régime a chuté c’est du fait que les partis étaient faibles, minés par des tendances rivales ils n’arrivent pas à imposer une discipline de vote (les députés sont des notables locaux intéressés par leurs seuls intérêts). Les marchés politiques sont faiblement unifiés. L’auteur travaillant sur les discours des députés, remarque que les députés votent davantage sur des considérations territoriales plutôt que partisanes. Dès lors, la 4ème République est plutôt un régime de coalition de personnalités appartenant à des partis différents, de plus la filière d’accession à la politique est ascendante pour peu que la personne suive la règle des réseaux. Ce qui domine, ce sont les intérêts individuels et ce régime détermine les choix et la formation de coalition à l’intérieur de l’assemblée nationale. Si les partis ne jouent pas le premier rôle, les électeurs non plus. La situation est donc dépendante du jeu qu’instituent les acteurs politiques.

Bibliographie pour la séance :

Jean-Jacques Becker, Histoire politique de la France depuis 1945, Paris, A. Colin, 1998.

Jacques Chapsal, La vie politique en France de 1940 à 1958, Paris, PUF, 1996.

Eric Duhamel, Histoire politique de la IVè République, Paris, La Découverte, coll. Repères, 2000.

Brigitte Gaïti, De Gaulle, Prophète de la Cinquième République, 1946-1962, Paris, Presses de sciences po, 1998, chapitre 3 « Les règles du jeu politique sous la quatrième république », p. 83-116.

Daniel Gaxie, « Les structures politiques des institutions. L’exemple de la IVème République », Politix, n° 20, 1992.

Bernard Lefort, « Les partis et les groupes sous la Quatrième République », Pouvoirs, n° 76, 1996, p. 61-79.

Jean-Pierre Rioux, La France de la Quatrième République. L’ardeur et la nécessité, 1944-1952, Paris, Seuil, 1980.

Jean-Pierre Rioux, La France de la Quatrième République. L’expansion et l’impuissance, 1952-1958, Paris, Seuil, 1983.

Pierre Rouanet, « L’échec du gouvernement Mendès France », in Jean Pierre Rioux, Pierre Mendès France et le mendésisme, Paris, Fayard, 1985.

Michel Winock, La République se meurt, 1956-1958, Paris, Seuil, 1985.