L’administration exerçant une activité de service public ou privé

La distinction entre Action administrative et activité privée

La distinction activité publique/privée peut sembler évidente si on assimile l’action des personnes publiques à une action administrative et l’action des personnes privées à une action privée. : mais le critère organiquedoit être relativisé en raison de plusieurs facteurs venant semer la confusion : des personne privée peuvent être associées à l’action administrative tandis que certaines personne publique peuvent exceptionnellement mener une action privée.

Section 1 => les personnes publiques sont présumées poursuivre une action administrative

– une personne publique peut poursuivre une activité politique (notamment législateur), ou mener une action juridictionnelle : hors ces cas, l’activité est a priori administrative se distinguant par hypothèse de l’activité privée

Paragraphe 1 => les personnes publiques exercent le plus souvent des missions de Service Public

I – Approche de l’idée de Service Public

– Service Public peut être défini comme constituant une mission d’intérêt général assurée/assumée par une personne publique et soumise à des degrés divers à un régime juridique spécifique : éléments posés par CE 1963, Narcy

A/ Une activité d’intérêt général

– dimension essentielle : elle seule légitimel’action administrative et les moyens exorbitants confiée à l’Administration

– mais notion difficile à cerner en raison d’un manque d’objectivité lié à un arbitrage entre divers intérêts reflétant l’évolution de la conception ou des mœurs d’une époque (la distribution d’eau potable est devenue d’intérêt général grâce aux moyens techniques)

  1. L’évolution de l’intérêt général

– au 19e : conception de l’État gendarme : les activités d’intérêt général se résument à quelques fonction ayant toutes des lien avec l’activité de police et le maintien de l’ordre public

– avec les grandes lois de la IIIe République (Jules Ferry), interventionnisme économique. et social grandissant de l’État : prend en charge l’équipement d’infrastructure (transport, distribution d’eau et d’électricité) : l’Etat gendarme se transforme en Etat providence

– l’idée de Service Public et donc d’intérêt général sert notamment à partir de la moitié du 20e de vecteur à l’interventionnisme

  1. La tendance libérale actuelle

– depuis les 70s, résurgence libérale due à la crise économique : l’Etat s’est désengagé de plusieurs secteurs pouvant intéresser l’économie. Pour n’assurer qu’un rôle de régulation (et non de prestataire)

B/ La présence d’une personne publique

– notion de Service Public intègre un élément organique relatif à la présence plus/moins directe d’une personne publique derrière l’activité gérée : dans le cas où une mission d’intérêt général est directement gérée par une personne publique en assurant la direction, ce critère est à l’évidence rempli

C/ Un régime juridique spécifique

– notion de Service Public exige également un élément matériel relatif à la soumission de l’activité à un régime juridique spécifique ne se justifiant que par la mission d’intérêt général imparti à tout Service public.

  1. Le critère du Service Public

– fin 19e/ début 20e : régime caractérisé par l’application du droit administratif : l’École de Bordeaux (Duguit) fait du critère de Service Public l’élément déterminant du droit administratif

– à partir des 20’s, apparition des SPIC se rapprochant des entreprises privées avec un but souvent commercial et dont le régime est assez largement soumis au droit privé

il a fallu dès lors revoir le critère du régime spécifique

  1. Le critère de puissance publique

– droit administratif = Service Public est remplacé Service Public = prérogative de puissance publique (conception en vigueur des années) relevant de la compétence du Juge Administratif : DC 1987, Conseil de la Concurrence(reconnaissance Constitutionnelle)

– mais à la fin des 70’s, le Juge Administratif et le Tribunal des conflits ont commencé à dissocier les deux notions et admis la présence d’un Service Public en l’absence de prérogative de puissance publique : TC 1978, Bernardi (une clinique traitant des maladies psychiatriques n’exerçant aucune prérogative de puissance publique assure cependant un Service public)

  1. La conception actuelle

– soit il y présence de prérogative de puissance publique caractérisant le Service Public ; soit il y a absence de prérogative mais présence des certains mécanismesou obligation spécifiques s’avérant nécessaires au bon accomplissement de la mission (obligation de continuité ou d’adaptabilité du service)

II – Le Service Public légitime l’action administrative

– une action, bien que non lucrative (ligne de train non rentable), mais répondant à un besoin de la population, doit être mise en œuvre par l’Administration : c’est la raison même son existence : présomption selon laquelle les activité exercées par les personne publique correspondent a priorià des mission de Service Public

III – Le Service Public légitime les privilèges conférés à l’administration

– parce qu’elle poursuit une mission d’intérêt général, l’Administration se voit dotée de pouvoirs exorbitants : on parle de prérogative de puissance publique facilitant l’action d’intérêt général et protégeant l’Administration de certaines menaces

A/ Les prérogatives d’action

– la prérogative majeure de l’action administrative est le pouvoir d’édicter des décisions unilatérales ; mais d’autres prérogatives facilitent l’action administrative (lever l’impôt pour financer, expropriation, la préemption…)

B/ Prérogatives de protection

– insaisissabilité des biens publics (ou de l’argent de personne publique pour combler une dette)

C/ La prescription quadriennale

– (10 ans pour les personnes privées) la dette due par l’Administration se prescrit au bout de 4 ans

Paragraphe 2 => les personnes publiques peuvent exceptionnellement exercer une action privée

A/ L’activité lucrative

exception circonscrites reconnaissant une activité privée au sein des missions menées par des personne publique : il est possible notamment d’identifier un Service Public alors même que l’action menée a pour objectif essentiel de rapporter de l’argent à l’organisme qui l’exerce (Civ. 1e 1986, Ville de Biarritz : casino (activité génératrice de recette) = Service Public car recettes destinées (lien) à la bibliothèque municipale (mission d’intérêt général)

B/ L’activité commerciale

entreprises publique (+ 50% du capital), ou «entreprise de Service Public » sont gérées par des personne publique relevant du secteur public et n’ont pas d’autres mission d’intérêt général que celle de servir l’économie de la France : elles exercent des missions privée (ce n’est pas une mission de Service Public)

C/ La gestion du domaine privé

– les personnes publiques peuvent être propriétaires de biens appartenant soit au domaine public (Accessible aux administrés), soit au domaine privé (géré comme un particulier) dans lequel les actes de gestion rapportant de l’argent aux collectivités. ne sont pas considérés comme relevant d’une mission de Service Public car ne réalisant pas un apport direct de recettes pour le financement d’une activité précise mais nourrissant son budget général

– ne suffit pas à établir le lien recette/MionIntGén : TC 1984, Loiseleur et CE 1986, Époux Herbelin

Section 2 => la possible association de personnes privées à l’action administrative

– au 19e, l’activité des personnes privées se caractérise nécessairement par son but lucratif (satisfaction d’intérêt privé) la distinguant par nature de l’activité administrative marquée par l’intérêt général : conception largement dépassée notamment en raison de l’attribution fréquente à des personnes privées de mission d’intérêt public ou la gestion de réels Service public.

Paragraphe 1 => les modalités de cette association

– le critère organique du Service Public implique systématiquement la présence d’une personne publique : elle peut être indirecte, auquel cas la personne publique doit garder le contrôle des grandes lignes de l’organisation du service dont elle confie la gestion au quotidien à une personne privée.

– le Service Public répond à un certaines lois, appelées «lois de Rolland» (du nom de l’auteur) : principe d’égalité (d’accès et de traitement) devant le Service Public, de continuité du Service Public (assuré sans rupture abusive) et de mutabilité (d’adaptation) du Service Public (le service évolue avec les besoins)

– la personne publique doit toujours être à même de maîtriser ces principe et de les imposer à la personne privée qui gère le service : une communauté d’agglomération ayant confié la gestion d’un Service Public ne peut pas s’en désintéresser complétement et peut intervenir ; une commune peut imposer une augmentation des dessertes à la Société de transport pour tenir compte du dynamisme urbain

I – L’idée de délégation de Service Public

loi Sapin 1992-1993 permet à une personne publique compétente pour assurer une mission de Service Public de confier sa gestion à une personne privée («délégation de Service Publique« ) souvent par une Convention personne publique/délégataire

– procédé utilisé à la fin du 19e pour réaliser les grandes infrastructures de réseau actuelles (transport en commun)

– la délégation unilatérale de Service Public peut se matérialiser par la décision plus/moins formalisée de la personne publique de charger une structure privée (entreprise, association ou pers. phys.) d’une mission de Service Public : dans cette hypothèse, il s’avère plus difficile d’identifier la présence ou non d’une mission de Service Public : le juge saisi doit se baser sur certains indices pour déterminer si la mission confiée unilatéralement à la personne privée constitue une mission de Service Public (technique du faisceau d’indices)

II – Les indices de la délégation unilatérale

– en l’absence de contrat, le juge doit déterminer si la mission confiée relève ou non d’un Service Publique, et se sert pour cela d’indices faisant apparaître un éventuel rattachement indirect (qui a créé la personne privée ? l’activité menée est-elle d’intérêt général ? les dirigeants sont-ils agréés par la personne publique ? y a t-il un contrôle de gestion ?) et pouvant contribuer à la reconnaissance du SP

  1. Le crtière de prérogatives de puissance publique

– un critère majeur est retenu par le juge : la détention ou non de prérogative de puissance publique (comme la suppression de concurrence en cas de monopôle ; ou la détention de pouvoir de décision unilatérale) ; mais ce critère est non décisif : si la personne privée en détient, elle gère nécessairement un Service Public pouvant seul justifier l’octroi de prérogative de puissance publique ; si elle en est dépourvue, la jurisprudence actuelle n’exclue pas pour autant la présence d’un Service Public (d’autres critères pouvant impliquer cette qualification)

– versement aux 70’s, le critère de P3 n’est plus absolu

  1. Les autres critères

CE 2007, APREI admet le Service Public dès lors que certains éléments sont réunis tendant à montrer que l’Administration a entendu confier une mission de Service Public à un organisme de droit privé : en l’espèce l’activité répond à un besoin d’intérêt général, l’association a été créée par la personne publique délégante, son organisation largement établie par l’autorité administrative qui lui a imposé des obligations et a mis en place des outils de contrôle

Paragraphe 2 => les implications de l’association

– le fait qu’une personne privée puisse être dotée d’une mission de Service Public revient à assimiler son action à celle de l’Administration : elle devient un rouage de l’Administration : dès lors, elle doit bénéficier de certains outils destinés à lui permettre d’exercer au mieux sa mission : elle peut disposer d’un pouvoir unilatéral (édicter des décisions individuelles unilatérales) : CE 1961, Magnier

– le droit qui s’applique alors est le droit administratif: lorsqu’il y a litige, la juridiction administrative est compétente