L’histoire de la décentralisation en France

L’histoire de la décentralisation en France

Décentralisation : mouvement du centre vers la périphérie, de la capitale vers des autorités territoriales ou locale : transfert de compétence.

On va distinguer la décentralisation avant et après la loi 1982. Puis l’on évoquera la loi de 2015 (réforme NOTRe). Avant, ces réformes, la décentralisation est le fruit d’une longue histoire :

4 août 1789 : la « Nuit du 4 août » met fin aux privilèges des provinces, principautés, villes et communautés d’habitants désormais confondus dans le droit commun des Français. Cette décision consacre l’unité administrative du royaume.

3 septembre 1791 : la Constitution dispose que : « Le Royaume est un et indivisible : son territoire est distribué en quatre-vingt-trois départements, chaque département en districts, chaque district en cantons ».

17 février 1800 : la loi du 28 pluviôse an VIII institue les préfets, nommés et révoqués par le Premier Consul, puis par l’Empereur. Les préfets sont l’organe exécutif unique du département, ils désignent les maires et les adjoints des communes de moins de 5 000 habitants et proposent au Premier Consul puis à l’Empereur la nomination des autres maires. Ils sont secondés par des sous-préfets dans les arrondissements.

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1) La décentralisation avant 1982

Résumé en une idée : la décentralisation avant 82 vise à émanciper progressivement les collectivités territoriales de l’Etat en leur donnant un fondement populaire.

Première grande réforme date de la monarchie de juillet (1830) :

Loi du 21 mars 1831 et du 22 juin 1833 rétablissent l’élection des organes délibérant de la commune et du département, le conseil municipal et du Conseil Généraux.

Ces lois étaient annoncées par la Charte de 1830

Loi du 21 mars 1831 : Le conseil municipal est élu pour 6 ans au suffrage censitaire et renouvelable par moitié tous les 3 ans.

  • Loi importante dans l’histoire de la démocratie française, en effet, 1/10 de la population pouvait payer le cens et élire ses représentant municipaux
  • Va favoriser le développement d’une vie politique locale et d’accéder à la conscience politique d’un nombre de français plus élevé que ceux pouvant participer à l’élection législative.

Déjà à l’époque, le maire est confirmé dans sa double qualité d’agent local et de représentant de l’Etat

Loi du 26 juillet 1866, 24 juillet 67 : vont accorder une compétence aux conseils généraux et municipaux

  • Optique libérale, contexte de libéralisation du 2nd empire

Ces textes distingues les compétences qui sont celles de ces conseils et celles qui lui sont interdites car restant de la compétence de l’Etat ou du préfet.

IIIe République : 2 grandes réformes

Loi du 10 aout 1871 relatif aux départements

Loi du 5 avril 1884 : loi « municipale » qui est une loi très importante car met en place l’élection des conseillers municipaux au suffrage universel direct, ceux-ci élisent ensuite les maires et les agents au maire => grand tournant

Loi du 10 aout 1871 : Compétence globale pour les affaires d’intérêt départemental, va rester inchangé jusqu’au XXe s.

Consacre l’élection des membres du conseil général au suffrage universelle directe et également au scrutin majoritaire uninominale à 2 tours.

L’élection se déroule au sein du canton et chaque canton désigne un conseiller général.

Mode d’élection perdure jusqu’à aujourd’hui

Le Conseil Général est renouvelé tous les 3 ans par moitié.

Consacre le rôle du préfet, véritable exécutif du département, il prépare le budget, instruit les affaires qui intéressent le département et exécute les décisions du CG sous le contrôle, entre 2 sessions, d’une commission départementale constituée d’élus.

L’Assemblée départementale a son mot à dire sur les affaires départementales, mais son rôle est d’émettre des vœux quant aux questions d’ordre économiques et sociales. Les questions politique sont exclut des délibérations des Assemblée départementales.

Loi du 5 avril 1884 : dite « Grande loi municipale »

Consacre l’élection au suffrage universel direct des conseillers municipaux, ceux-ci élisant ensuite les exécutifs maires et adjoints au maire, maire qui dirige la municipalité.

Dans l’esprit des réformateurs républicains : le maire c’est d’abord un agent local de l’Etat qui publie et exécute les lois, qui prend les règlements de police et est officier d’Etat civil. Mais il reste aux ordres du préfet en tant qu’agent de l’Etat dans la commune.

Consacre un principe général : les affaires communales sont géré par l’organe délibérant de la commune : le conseil municipal.

Le préfet garde a priori un contrôle sur les affaires les plus importantes, c’est à dire financière. Il gère le budget par exemple.

Du point de vue de l’Etat, la IIIe République est le point de départ d’un politique centralisatrice. Mais la question est plus centrée sur la question de l’élection plutôt que sur celle du transfert de compétence.

Constitution du 27 octobre 1946 : consacre la libre administration des collectivités territoriales, on envisage même le transfert de l’exécutif départemental au président du conseil général.

Ve République marquée par l’éclosion de la région.

Tentative au début de la Ve République de lancer de nouveau projet en matière de décentralisation, projet de regroupement des communes.

2 types :

  • Regroupement incité dans le cadre de regroupement intercommunal (ex : ordonnance de 1959, pour les SIVOM : syndicat intercommunal à vocation multiple)

Avant 1982, sous Giscard d’Estaing, réflexion sur la décentralisation, avant Mitterrand. Ce sujet n’est pas objet de clivage droite/gauche.

Rapport Guichard, publié en 1976, c’est le rapport « vivre ensemble » proposant de supprimer le contrôle d’opportunité sur les collectivités territoriales et en outre, proposait d’instituer une répartition des compétences être les autorités centrales et locales fondés sur le principes de subsidiarité => projet de loi discuté au Sénat mais non discuté par l’Assemblée Nationale.

2) La décentralisation depuis 1982

2 grandes étapes :

  • Acte 1 : Réformes législatifs de 1982-83
  • · Acte 2 : réformes de 2003-2004

Acte 1 : réformes législatifs de 1982

Loi du 2 mars 1982, relatif aux droits et libertés des communes, des départements et des régions fonde la décentralisation contemporaine.

  • Apparait pour ses concepteurs, comme un contre-pouvoir de l’influence politique et administrative du pouvoir central.

Loi du 7 janvier et du 22 juillet 1983 : intervient sur la répartition des compétences entre collectivités territoriales.

Cette grande réforme législative intervient dans 3 directions :

  • Contrôle a priori du préfet, lui est substitué un contrôle a posteriori indirect par voie du déféré préfectoral au tribunal administratif => classique dans les pays de l’UE doté d’une juridiction administratif.

=En 1982, le préfet devient le commissaire de la République mais récupère cette désignation en 1988.

Le préfet peut contester un acte devant le TA mais il doit annoncer à la collectivité locale son intention de saisir un juge.

En 2000, pour la simple année, il y a eu 7 millions d’actes locaux, pris par l’ensemble des collectivités locales, dont 174 000 lettres de légalité, càd adressé par les préfets aux collectivités locales et 1713 déférés préfectoraux déposé au Tribunal Administratif

=> limite du contrôle, taux d’observation de seulement 2% des actes

Ils sont obligés de sélectionner les actes : les décisions prises par délégation, qui impliquent un budget importants et ceux ayant un enjeu très importants prises par les marchés publics.

  • Transposition du modèle communal aux institutions départementales et régionale: uniformation des modèles départementaux et régionaux. Ils sont dotés de conseils dont les membres sont élu au suffrage universel direct. Ils élisent leur exécutif et désormais, le président du Conseil Général remplace le préfet dans ses fonctions antérieurs et prends les rênes du département.

Département = collectivité distincte de l’Etat

  • Transfert massif de compétence de l’Etat vers les collectivités territoriales.

Les lois du 83 développent les dispositifs de la loi de 82 en répartissant concrètement les compétences entre régions, départements et communes.

Il n’y a pas de transfert en bloc de compétences mais il y a quelques dominantes qui ressortent :

  • · A la région : responsabilité du dynamisme économique
  • · Au département : responsabilité dans l’action sociale et la responsabilité
  • · A la commune : l’administration de proximité

Les conseils élus gèrent par délibérations les affaires locales, le domaine de celles-ci s’est considérablement étendu.

Ex : l’urbanisme est aujourd’hui la chose de commune, notamment quand il est question de délivrance de permis de construite…

Ex : action sociale, comme la gestion des mineurs en difficultés, des personnes âgées… domaine du département.

Le transfert de compétence // transfert de charges

Loi de 83, Article 5 : les transferts de compétences sont accompagnés du transfert concomitant aux communes, départements et régions des ressources nécessaires au transfert de ces compétences.

Mais en pratique, ce n’est pas vraiment le cas.

Apports :

  • Développement et renforcement du tissu économique local
  • Renouvellement et rajeunissement des bâtiments scolaires
  • Modernisation des transports collectifs, voir construction (ex : tram)
  • Avènement de grandes métropoles régionales rééquilibrant les rapports paris/provence

Echecs :

  • L’Etat transfère les charges mais sans les ressources nécessaires corrélatives
  • Transfert de compétence qui devrait dépendre de l’Etat (région s’occupe des universités, rénovation de commissariat… ça devrait pourtant être de la compétence de l’Etat)

..

Acte 2 : les réformes de 2003-2004

Tournant lié à la réélection de Chirac, dont le premier ministre, Raffarin (très libéral, grand décentralisateur, ancien président de région).

Il était obsédé par la décentralisation, pour lui, les problèmes de la France étaient liés à un défaut de décentralisation.

Très axé politique de proximité dont la décentralisation constitue un volet essentiel.

Il a fait entrer la décentralisation dans la C° de manière bien plus explicite.

Révision constitutionnelle du 28 mars 2003, dès l’Article 1er de la Constitution apparait la disposition selon laquelle l’organisation de la république est décentralisée.

Cette révision ajoute à l’Article 72 relatif aux collectivités territoriales : les régions.

Consacrée par la Constitution :

  • · Les collectivités d’outremer
  • · Les collectivités à statuts particuliers
  • · Régions
  • · Départements
  • · Communes

Pour se garder un peu de souplesse, le constituant a rajouter dans l’Article 72 : « toutes autres collectivités territoriales est crées par la loi, le cas échéants en lieu et place d’une ou plusieurs d’une ou plusieurs collectivités du présent alinéa.

Idée : une marge de manœuvre pour ne pas avoir à nécessairement passer par une révision constitutionnelle si l’Etat souhaite créer ou supprimer des collectivités territoriales en les fusionnants ensembles.

Ce 2e acte ne porte pas seulement sur la constitutionnalisation de la décentralisation, mais aussi sur les nouvelles compétences transférées :

Loi du 13 aout 2004 « libertés et responsabilités locales » : texte majeur et symbolique à l’instar de la loi de 1982

  • Ambition de cette loi de rapprocher l’administration du citoyen
  • Confie de nouvelles responsabilités aux élus locaux.

Les communes sont les grandes oubliées de cette lois, ils n’en sont pas bénéficiaires.

Nouvelles compétences pour les régions : coordination sur le territoire des actions économiques, droit d’accorder des aides aux entreprises locales, nouvelles responsabilités en matière de formation professionnelles, gestions des infrastructures (aéroport…), gestion des écoles de formation aux professions paramédicale, gestion du personnelle TOS (personnel techniques et ouvrier spécialisés) des lycées + inventaire du patrimoine général culturel

Des départements : personnels TOS des collèges, entretiens de routes nationales déclassées, gestion des maisons de retraite…

Pour les affaires intercommunales, possibilité d’en avoir la compétence par le préfet à un groupement de communes

Transfert de compétence compensé financièrement à hauteur de la moyenne des dépenses actualisé sur les 3 ans précédents le transfert. Le coût de la décentralisation a été de 11 milliard d’€, financé en partie par la Taxe Intérieur sur les Produits Pétroliers et sur le Convention d’assurance.

Article 72, alinéa 4 de la Constitution : droit à l’expérimentation normative et dont les modalités ont été définit par une loi organique du 1er aout 2003

En vertu de cela, par délibération motivé, une collectivité ou un groupement de collectivités territoriales, peuvent se porter candidat pour gérer une activité précise par dérogation à la loi ou au décret. Il s’agit là pour les collectivités territoriales d’élaborer les normes juridiques qui vont répondre à leur besoin et spécificités.

  • Recours à l’expérimentation est un moyen pour l’Etat de réformer en regardant ce qui se passe dans une ou plusieurs collectivités témoins l’instrument de l’expérimentation normative dans la perspective d’un éventuel nouveau transfert de compétence

Cette expérimentation doit être faite dans la perspective de respect de l’intérêt général, ne peur remettre en cause une liberté publique, les mesures envisagés sont temporaires (durée max de 5 ans renouvelables 1 fois pour 3 ans par le législateurs)

Procédure :

  • Habilitation initiale
  • Transfert de la demande de la collectivité, elle se porte candidate
  • Requête transmise au préfet, vérifié par le ministre
  • Gouvernement vérifie que les conditions sont réunies avant d’autoriser cela.

La publication de ces actes dérogatoires et assurée au JO (Journal officiel) et soumis à un contrôle de légalité de la part du préfet.

  • Suivie de l’expérimentation, le gouvernement transmettant au Parlement un rapport des collectivités territoriales ayant participé à l’expérimentation. C’est au vu de cette évaluation qu’on décidera de prolonger ou d’abandonner cette expérimentation. Cette évaluation comprend
  • Le coût
  • La qualité des services rendus aux usagers
  • Dimension financière
  • Les conséquences de l’organisation de la collectivité territoriales.

Ex : mise en place du RSA (revenu de solidarité active) après une phase d’expérimentation.

3) Depuis la réforme de 2015 (loi NOTRe)

Le texte ci-dessous est un extrait d’un article du monde : http://www.lemonde.fr/politique/article/2015/07/16/la-loi-notre-pour-les-collectivites-territoriales-definitivement-adoptee_4686095_823448.html

La loi NOTRe confirme la montée en puissance des régions et des intercommunalités, mais sans que cela se fasse au détriment des départements, comme envisagé au départ. Il confie aux régions l’économie et les grandes orientations stratégiques, aux départements la solidarité, et au bloc communal les services de proximité.

  • Concernant les régions et les départements :

– Les treize grandes régions créées en métropole par la loi votée en décembre 2014 auront compétence sur le développement économique, l’aménagement du territoire, la formation professionnelle, la gestion des lycées et les transports, y compris les transports scolaires. Elles pourront jouer un rôle de coordination en matière d’emploi, mais sans toucher aux prérogatives du Pôle emploi, et auront un rôle moteur en matière d’environnement.

– Les départements, dont le projet de loi initial prévoyait la suppression, sont préservés et gardent la gestion des collèges, des routes et de l’action sociale.

– La culture, les sports, le tourisme, l’éducation populaire et les langues régionales relèveront à la fois des régions et des départements. Les ports pourront relever, selon les cas, d’un type ou d’un autre de collectivité territoriale.

– Les deux départements et la région de Corse fusionneront à compter du 1er janvier 2018 dans une collectivité unique.

  • Concernant les communes, les intercommunalités et les métropoles :

– Les intercommunalités devront être d’une taille minimale, fixée à 15 000 habitants, sauf exceptions (notamment en zone de montagne).

– Elles seront obligatoirement chargées de la collecte et du traitement des déchets, de la promotion touristique, des aires d’accueil des gens du voyage, et, à partir de 2020, de l’eau et de l’assainissement. Les autres compétences se répartiront avec les communes.

– La métropole du Grand Paris (MGP), créée comme les autres métropoles par la loi votée en 2014, verra formellement le jour comme prévu au 1er janvier 2016

– Les représentants de Paris au conseil de la MGP ne seront pas désignés par le Conseil de Paris, comme initialement prévu, mais par chaque conseil d’arrondissement.