La crise du droit commercial

La crise du droit commercial

Plusieurs aspects à cette crise du droit commercial ou droit des affaires. D’abord l’importance croissante de la notion d’entreprise dont on va voir qu’elle supplante dans les faits de plus en plus celle de commerçant. Ensuite une brève division des disciplines qui relèvent classiquement du droit commercial avec en même temps une extension du droit commercial à toute sorte d’activités professionnelles.

A. Le dépassement de la notion de commerçant par la notion d’entreprise

Le droit commercial était principalement construit sur la notion d’acte de commerce et la notion de commerçant. Et en particulier le commerçant est la personne juridique, le sujet de droit de ce droit commercial. Progressivement on va voir l’entreprise apparaitre comme le sujet de cette branche du droit. Notion d’entreprise qui apparait sous la plume de la doctrine et du législateur (d’abord législateur communautaire). Dès le traité de Rome de 1957 le sujet du droit communautaire de la concurrence est l’entreprise. Mais on va trouver cette notion dans des textes français de plus en plus nombreux. C’est une tendance qui va apparaitre dès la fin de la guerre et s’accentuer dès les années 80.

Ordonnance du 22 février 1945: notion de comité d’entreprise.

En 1961 on introduit la notion d’entreprise dans le code civil. On adopte une loi qui vise « les entreprises commerciales ».

Article 832 du Code civil: évoque toute entreprise commerciale, industrielle ou artisanale.

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La notion d’entreprise est au cœur de la réforme des procédures collectives de 1967. On distingue l’homme de l’entreprise, elle devient un agent économique qui se distingue de l’homme qui en tient les rênes. En 1967 ce terme d’entreprise figure d’abord dans le titre de la loi, elle n’est pas définie et on trouve très peu le terme dans les dispositions de la loi. Ce mouvement qui vise à intégrer de plus en plus cette notion d’entreprise va s’amplifier dans les années 80 à l’occasion de la loi de 1984 qui va compléter le droit des entreprises en difficulté en prévoyant des prévention et règlements amiables des entreprises en difficulté.

A chaque fois ces textes font référence à l’entreprise. L’entreprise est désormais le sujet de ce droit des procédures collectives. On a aussi utilisé cette notion d’entreprise pour tout ce qui relève des exploitations individuelles. On connait l’EURL : entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée. C’est une société qui n’est composée que d’une personne. A l’époque en 1985 on vivait toujours sur l’idée que la société était un contrat et donc on ne voulait pas utiliser le terme de société qui implique qu’il y ait deux personnes. On connait aussi l’EIRL : entreprise individuelle à responsabilité limitée.

Toutes les lois postérieures à la loi de 1985 reprenaient ce vocable d’entreprise. Aujourd’hui nous disposons d’un corps de règles non négligeables dans lequel c’est l’entreprise qui est visée, et non pas le commerçant ou la société. C’est la raison pour laquelle un certain nombre d’auteurs se sont prononcés en faveur d’un droit de l’entreprise qui dépasse le droit commercial.

Mais on ne peut pas dire que le droit de l’entreprise ait été consacré à l’heure actuelle car c’est une perspective qui n’est pas adoptée par tous. La notion d’entreprise est une notion d’abord économique qui ne constitue pas à ce jour une catégorie juridique à part entière et donc qui ne peut justifier que l’on fonde une véritable branche du droit autour de ce terme. Il est vrai que cette notion d’entreprise nous vient de l’économie. Ce qui est plus embêtant est que dans les règles de droit interne existantes l’entreprise n’est pas entendue toujours de la même manière. On pourra désigner la collectivité humaine en droit du travail. En droit de procédure collective on a plus une approche comptable. En droit des sociétés l’entreprise est une personne sujet de droit alors même que quand on regarde l’article 832 du code civil l’entreprise est une chose et non plus un sujet de droit, que l’on transmet. Tantôt l’entreprise est une personne, tantôt un groupe, tantôt une chose qui se transmet voir patrimoine.

Tout cela pour dire qu’on est quand même un peu gêné à l’idée de consacrer cette notion d’entreprise comme s’il s’agissait d’une catégorie juridique à part entière. Ces définitions ne sont pas transposables à d’autres branches du droit. Il faut convenir qu’il est délicat de vouloir construire le droit commercial à partir de cette notion. Il n’en reste pas moins que beaucoup de notions de droit privé sont aujourd’hui très difficile à définir.

On s’achemine petit à petit vers un droit professionnel. Ce n’est pas vraiment la notion d’entreprise qui est la plus appropriée. Peut être que l’appellation droit des affaires permet d’appréhender de manière plus vaste l’ensemble de ces règles.

Il y a un autre aspect de l’évolution du droit commercial : il a une tendance au fil du temps à se diviser.

Le Cours complet de droit des affaires est divisé en plusieurs fiches :

B. La division du droit commercial / droit des affaires

Division car lorsque le code de commerce a été adopté en 1807 il était conçu comme regroupant l’ensemble de cette discipline appelée droit commercial. On y trouvait des dispositions dans cette partie un peu four tout, des dispositions relatives au transport maritime. Il y avait des lacunes mais tout ce qui existait y figurait. Autrement dit, en 1807 le code de commerce avait vocation à régir la totalité des activités commerciales. Au fil du temps ce droit commercial a souffert d’un véritable morcellement.

La loi bancaire de 1984 qui est codifié dans le code monétaire et financier. Ici cette discipline du droit bancaire a pris une certaine forme d’autonomie par rapport au droit commercial traditionnel alors même que les règles traditionnelles figuraient dans le code de commerce.

Autre exemple :le droit des sociétés avec la loi de 1867, loi de 1966. Ce sont des textes qui ont pu être intégrés dans le code de commerce mais il n’en reste pas moins qu’aujourd’hui le droit des sociétés a pris une certaine forme d’autonomie par rapport au droit commercial classique. Il y a un code des sociétés mais il n’y a pas eu de loi adoptant de code des sociétés.

Autre exemple :le droit des transports terrestres n’était pas évoqué dans le code de commerce mais il y avait un droit des transports maritimes. On trouve aujourd’hui un droit des transports qui inclus le transport maritime, terrestre et aérien.

Même si à l’origine on pouvait imaginer qu’il existait des règles communes au droit commercial, elles ont disparues pour voir apparaitre des règles spéciales, des règles propres à chacune des branches que nous avons évoquées. On a des lois spéciales, des codes spécifiques, comme le code des assurances, et des règles qui ont pris leur totale indépendance par rapport au droit commercial. On peut se demander si le droit commercial comporte encore de véritables règles générales. Dans le même temps ce droit commercial s’est dispersé.

C. L’éparpillement des règles du droit commercial / droit des affaires

Certaines de ses règles traditionnelles ont eu tendance à se disperser en droit civil. L’idée est que ces règles du droit commercial sont de plus en plus étendus à d’autres personnes que les commerçants au sens strictes, à des professionnels exerçant une activité civile par exemple, voir à des particuliers.

Premier exemple qui relève du droit des sociétés :le droit commercial règlemente le droit des sociétés commerciales, loi de 1867 et 1967 sur les sociétés commerciales. On connait en droit positif des sociétés qui ne sont pas commerciales mais civiles. Autrement dit il existe un droit des sociétés civiles qui a été remanié par une loi du 4 janvier 1978, qui intervient 12 ans après la réforme de 1966 et qui va être très influencé par la loi du 22 juillet 1966 sur les sociétés commerciales. Droit commun des sociétés qui traite à la fois des sociétés commerciales et civiles. Avant 1978 on ne parlait pas de droit commun des sociétés.

Cette tendance s’est accentuée au cours des 30 dernières années puisqu’on a vu ce droit des sociétés civiles être réformé de telle manière qu’on l’a rapproché de plus en plus du droit commercial. On est allé jusqu’à rapprocher les sociétés civiles traditionnelles des sociétés commerciales en créant des sociétés hybrides : création des sociétés d’exercice libéral en 1990 : ce sont des sociétés ou on a une activité libérale mais ce sont des sociétés bien que permettant l’exercice d’activité libérale vont pouvoir prendre la forme commerciale. On a ainsi permis à un certain nombre d’activité libérale qui relève de la société civile de prendre la forme commerciale comme société d’exercice libérale à responsabilité limité (SELRL).

Deuxième exemple :la dispersion des règles applicable aux commerçants individuels. C’est le cas des artisans. L’artisan n’est pas un commerçant mais quelqu’un qui vie de son travail manuel et qui exerce une activité civile. C’est une opposition traditionnelle entre commerçants et artisans. Autrement dit l’artisan n’a pas de fonds de commerce traditionnellement. Ce qui s’est produit est que petit à petit toutes ces règles applicables aux commerçants se sont trouvées applicables aux artisans. Arrêt 2000 valide la cession de clientèle civile. Même chose en matière comptable et fiscale où l’on a soumis de plus en plus les artisans aux règles des commerçants.

Troisième exemple :le droit des entreprises en difficulté. Petit à petit on a admis qu’il s’applique à d’autres que les strictes commerçants. Cette évolution a commencé en 1967. Cette loi a prévu qu’elle s’appliquait à toute personne morale de droit privé même non commerçante, ce qui était pour l’époque une très grosse innovation. Et depuis, et à la faveur de l’évolution législative successive, ce droit des entreprises en difficulté a été appliqué non seulement aux sociétés commerciales mais aussi aux sociétés civiles, aux groupements d’intérêt économique voir même aux associations. On a songé appliquer des règles analogues aux personnes physiques et aujourd’hui les particuliers peuvent se voir appliquer des règles certes spéciales mais bâties sur l’exemple fourni par le droit des entreprises en difficulté (par exemple le droit du surendettement).

Aujourd’hui on se trouve face à un droit des entreprises en difficulté voir un droit des personnes physique en difficulté dont le champ d’application est très vaste puisqu’il s’agit de s’adresser à n’importe quel agent économique qui a des difficulté de paiement. Le code de commerce prévoit que les procédures collective est applicable à toute personne exerçant une activité professionnelle indépendante y compris les activités libérales.

On ne pourrait pas parler de droit des professionnel en tout cas pour certains aspect du droit positif et cette appellation « droit des affaires » en ce qu’elle est très large, est la plus appropriée pour évoquer ce corps de règle. C’est la raison pour laquelle on parle de moins en moins de droit commercial aujourd’hui pour lui préférer le droit des affaires, voir le droit des entreprises.

Conclusion :ce droit des affaires était à l’origine international puisqu’il a été développé par ces marchands italiens qui ont innovés dans les techniques qu’ils utilisaient, mais par la suite ce droit des affaires est devenu un droit national avec la codification. Il y a une certaine tendance de la discipline à redevenir internationale car nous subissons la pression européenne en permanence et parce que le législateur français est tenu de tenir de compte de la situation économique du pays et des mouvements qui affecte l’économie globale avec la mondialisation, la globalisation.

Premier rapport de la Banque mondiale :très défavorable à la France.

Deuxième rapport de la Banque mondiale :Le droit français était tel qu’il constituait un obstacle à la croissance économique. Elle considérait que notre système juridique n’était pas approprié lorsqu’on envisageait de faire des affaires et de stimuler les investissements.

Les experts de la banque mondiale sont principalement des experts anglophones, qui ne connaissent pas bien notre système, qui sont imprégnés d’un néolibéralisme. On est dans un système juridique où certaines activités juridiques sont très encadrées. Le législateur français est un peu obsédé par notre classe dans le classement et par le fait qu’on doit promouvoir l’image du droit français, inciter les investisseurs à venir chez nous et ne pas dire que notre droit serait trop rigide et qui constituerait un obstacle à la croissance économique.

Ce droit est devenu international car il inclut les normes internationales et aussi parce que l’on ne peut plus l’envisager d’une manière purement interne, il faut tenir compte du contexte de libre échange, il faut convaincre nos partenaire de notre droit.

Exemple :aux EU il n’existe pas un droit unifié sur l’ensemble du territoire, c’est une fédération. Le droit des sociétés de l’Etat de NY n’est pas le droit des sociétés de la Californie. Effet Delaware : si on enregistre une société dans l’Etat du Delaware on sera très peu contraint par le droit applicable, on pourra mettre à peu près ce qu’on veut dans les statuts de la société.