La mise en danger d’autrui par commission

La mise en danger d’autrui par commission

Ces infractions sont consommées alors même que le danger ne s’est pas forcement produit. Il s’agit pour l’essentiel d’infraction à but préventif.

Parmi ces infractions, on distingue celles qui nécessitent, pour être consommées, un acte positif de l’agent (la mise en danger d’autrui par commission) de celles qui répriment le fait pour l’agent de n’avoir rien fait alors que son devoir était d’agir ( (la mise en danger d’autrui par abstention ou omission, exemple : la non assistance à personne en danger). On étudie ici uniquement la mise en danger d’autrui par commission. Seront étudiés :

  • Le délit de provocation au suicide : Article 223-13 Le fait de provoquer au suicide d’autrui est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende lorsque la provocation a été suivie du suicide ou d’une tentative de suicide. Les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende lorsque la victime de l’infraction définie à l’alinéa précédent est un mineur de quinze ans. Les personnes physiques ou morales coupables du délit prévu à la présente section encourent également la peine complémentaire suivante : interdiction de l’activité de prestataire de formation professionnelle continue au sens de l’article L. 6313-1 du code du travail pour une durée de cinq ans.
  • Le délit de mise en péril de la personne d’autrui : Article 223-1e fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.
  • De l’entrave aux mesures d’assistance. Article 223-5Le fait d’entraver volontairement l’arrivée de secours destinés à faire échapper une personne à un péril imminent ou à combattre un sinistre présentant un danger pour la sécurité des personnes est puni de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende.
  • De l’expérimentation sur la personne humaine sans le consentement : Article 223-8, le fait de pratiquer ou de faire pratiquer sur une personne une recherche biomédicale sans avoir recueilli le consentement libre, éclairé et exprès de l’intéressé (…) est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende.

Paragraphe 1 – Le délit de risque causé à autrui – Article 223-1 et 223-2

Il s’agit d’un comportement volontaire de mise en péril de la personne d’autrui. On sanctionne l’auteur d’une infraction dans laquelle il n’y a ni mort ni atteinte physique mais seulement un risque. C’est entre d’une part l’individu qui viole intentionnellement la loi pénale avec le plus souvent l’intention de parvenir à un résultat donné et celui qui cause un dommage sans en avoir eu conscience par pur imprudence et négligence, il existe une hypothèse intermédiaire ; celle de la personne qui va prendre un risque délibéré tout en espérant que le risque ne provoque aucun dommage. Jusqu’en 1994, ce type de comportement intermédiaire ne faisait l’objet d’aucune répression mais sensible au nombre important de nombre de personnes tuées et lors des accidents du travail, le législateur a crée une nouvelle faute, la faute de mise en danger délibérée de mise en danger d’autrui. Si le risque se réalise, la qualification change, et elle devient plus grave.

Ce délit de risque causé à autrui – article 223-1 est la seule infraction non-intentionnelle qui soit punis d’une peine d’emprisonnement en l’absence de tout résultat. 1 an d’emprisonnement et 15 000 € d’amende.

  • Un résultat : la création d’un risque

Ce délit est une infraction de résultat dans le sens où le résultat consiste dans la création d’un risque (et non d’un préjudice) ce risque est défini comme « un risque immédiat de mort ou de blessure de nature à entrainer une mutilation ou une infirmité permanente. A partir de cette définition, 3 exigences sont posées par le législateur :

  • 1. Il faut établir que la personne d’autrui a été exposée à un risque i.e. on ne va pas prendre en considération le risque pour soi-même. Par définition il y a absence de préjudice. Par contre, il existe bien un dommage au sens pénal du terme i.e. que ce dommage est le mépris une valeur protégée pénalement.

Ce résultat de risque doit être prouvé i.e. le risque doit être constaté ex. Il a été considéré qu’il n’y avait pas de risque immédiat de mort ou de blessure dans le fait pour le gérant d’une société de transport de faire monter sur le troisième essieu de plusieurs camions des pneumatiques recycles dont l’utilisation était limitée selon le fabricant à une vitesse de 30 km/h. La CA a considéré qu’il n’y avait pas de risque pour 2 raisons : d’une part parce que l’avis technique du fabricant ne faisait pas que « de troubles de conduite et non pas de perte de contrôle du véhicule en cas de conduite supérieure à 30 km/h. Puis, si un des pneus éclatait, il restait quand même 2 essieux.

  • 2. Il faut démontrer et vérifier la nature du risque invoqué. Il faut toujours qu’il s’agisse d’un risque grave i.e. un risque de mort ou de nature à entrainer une infirmité permanente. Par hypothèse ici, il ne s’est rien passé. Ainsi, c’est au juge d’apprécier ce qui se serait passé si le risque s’était finalement réalisé.

Cass. crim. Déc., 2005, Revue de Chambre Criminelle, p. 68 « il a été jugé que ne constitue pas un risque de mort ou de blessure l’émission par une raffinerie de pétrole d’un taux de dioxyde de souffre supérieur à seul s’alerte de la population dès lors qu’une enquête ultérieure a conclu à l’absence d’impact mesurable de l’incident sur la population. Le droit de l’environnement est donc propice à l’application de ce genre de délits.

  • 3. Il faut établir un lien de causalité entre l’agissement poursuivi et ce résultat (le risque). Le lien de causalité doit être immédiat et direct. Ces 2 termes renvoient à une stricte exigence de causalité. Ce qui est visé, c’est la rupture d’une succession d’évènement à un moment in extremis par le fait du hasard.

  • La mise en œuvre d’un moyen

Ce moyen consiste en la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement.

Il faut une violation, ceci implique qu’il s’agit d’une décision consciente de ne pas respecter une obligation mais la violation dont il est question doit concerner une obligation particulière puisqu’il s’agit d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité. Le juge ne va pouvoir faire jouer ce texte que lorsque la loi ou le règlement prévoit une obligation spécifique imposée à un tel individu, tel un professionnel dans le cadre d’une activité particulière. Ainsi, si l’on arrive à prouver que l’obligation de sécurité est une obligation générale, la qualification tombe. Ex. Cass. Crim. 18 mars 2008, JCP 2008, n 27 p. 37, il a été jugé que ne font pas des obligations particulières de sécurité des obligations particulières de sécurité les articles R. 4127-32 et R. 4127-33 CSP faisant obligation au médecin de garde de faire preuve de diligence.

De la même manière, ont été considérées comme des obligations particulières les obligations du Code de la route.

  1. Les intentions coupables

Il faut une violation manifestement délibérée de l’obligation. On renvoie ici à l’hypothèse du dol éventuel (ne s’est pas passé mais aurait pu).

Une violation délibérée est qu’une simple négligence (la conscience de ne pas respecter une obligation). Seules les conséquences éventuelles de ce manquement ne sont pas voulues. C’est une violation manifestement délibérée. La violation doit être apparente aux yeux du juge à partir de seul examen des faits.

Illustration – Il n’y a pas de mise en danger d’autrui dans le fait de rouler à 200 km/h sur une voie fréquentée à une heure de grande circulation dès lors que la course n’a pas caractérisé un comportement particulier exposant directement quelqu’un à un risque.

Paragraphe 2 – La provocation au suicide.

Cela recouvre 2 types d’infractions :

La première prévue à l’article 223-13 du Code Pénal qui est l’hypothèse de l’acte de provocation direct qui doit être un acte accompli à l’égard d’une personne déterminée soit en l’incitant à passer à l’acte (au suicide) soit en lui fournissant les moyens d’accomplir son geste (ex. fournir l’arme). L’infraction est consommée lorsque la provocation a été suivie soit du suicide soit d’une tentative de suicide. La provocation doit être distinguée de la contrainte ex. la remise d’un couteau à une personne dont on connait le comportement suicidaire, en la défiant de s’en servir, a été jugé comme ne comportant aucun caractère contraignant de nature à paralyser la volonté de la personne.

Aussi l’hypothèse de la propagande ou de la publicité en faveur de produits, d’objets ou de méthodes préconisées comme moyens de se donner la mort. C’est une infraction formelle i.e. ce qui compte c’est la fourniture du moyen et il n’est pas nécessaire que la fourniture de moyens ait été suivie es faits pour que le délit soit caractérisé.

La peine encourue dans ces 2 cas est de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000€ d’amende, et une circonstance aggravante tenant à l’âge de la victime lorsqu’elle est un mineur de 15 ans, la peine grimpe à 5 ans d’emprisonnement et 75 000€ d’amende et des peines complémentaires prévues à 223-13.

Paragraphe 3 – L’entrave au secours

C’est le fait d’empêcher les secours d’arriver. Article 223-5 du Code pénal. C’est un délit intentionnel. Les secours doivent à être destinés à faire échapper une personne à un péril imminent ou à combattre un sinistre présentant un danger pour les personnes. Cette incrimination a pour objectif de mettre un terme aux actes de malveillance qui consistaient à passer de faux d’appels téléphoniques aux policiers ou attaquer les pompiers à leur arrivée. La peine est de 7 ans d’emprisonnement et 10 000€ d’amende.

Paragraphe 4 – Le délit d’expérimentation illégale sur une personne humaine

Article 223-8 et s su Code pénal. C’est le fait de pratiquer soi-même ou de faire pratiquer par autrui (auteur physique ou intellectuel) une recherche biomédicale en dehors des dispositions prévues par le CSP relatives aux recherches biomédicales. Décision Cass crim 23 fev 2009 JCP 2009 No 15, IV No 1609. Il s’agissait d’une personne admise dans une clinique pour une pneumonie et la personne ne pouvait pas s’exprimer. On lui a admis des médicaments à l’essai et la culpabilité de la clinique a été retenue.

Peine encourue – 3 ans d’emprisonnement et 45 000€.