La nationalité des enfants nés en France de parents étrangers

L’acquisition de la nationalité française par les enfants nés en France de parents étrangers

—> Il s’agit d’enfants qui sont nés en France de parents étrangers étant entendu que par hypothèse, aucun des deux parents n’est lui-même né en France.

—> Il faut supposer aussi que les parents ne sont pas apatrides et qu’ils peuvent transmettre leur nationalité étrangère à l’enfant.

A sa majorité, cet enfant deviendra automatiquement français s’il a résidé en France au moins 5ans pendant sa minorité : c’est la combinaison de la naissance et de la résidence en France qui permet de constituer un lien suffisant avec la France pour que l’enfant devienne français automatiquement à 18ans.

Or, cette automaticité n’est pas imposée à l’enfant car dans les 6 mois qui précède sa majorité ou dans l’année qui la suit, l’enfant peut renoncer à l’acquisition de la nationalité française. L’enfant ne doit pas renoncer à cette acquisition c’est-à-dire qu’il devient français que s’il n’a pas eu la volonté de ne pas le devenir.

Cette question a subi une évolution historique très mouvementée : elle concerne des catégories particulières mais nombreuses de la population et elle obéit à un régime juridique spécifique.

A)L’évolution historique

La règle de l’acquisition automatique de la nationalité française par la combinaison de la naissance et de la résidence en France n’est pas une règle nouvelle. Cette règle remonte à une loi du 26 juin 1889 c’est-à-dire dans les débuts de la IIIe République après la guerre de 1870 – 1871 et dans une période où les relations avec l’empire allemand restent très conflictuelles (incident de frontières graves). Cette loi poursuit alors des objectifs militaires.

A l’époque, la situation démographique de la France est mauvaise, et il s’agit alors de conférer la nationalité française au plus grand nombre possible de jeunes vivants en France notamment pour augmenter le nombre des jeunes appelés sous les drapeaux.

Cette politique est gênée par la règle de l’époque selon laquelle la française qui épouse un étranger devient étrangère et ses enfants aussi. On répond à cette situation par la règle de la double naissance en France en 1851. Mais il reste le cas des jeunes nés en France de parents étrangers mais qui vivent en France pendant leur minorité alors le législateur de 1889 trouve la solution de l’acquisition automatique de la nationalité française à la majorité par la combinaison de la naissance et de la résidence en France. L’objectif est alors militaire avant d’être un objectif d’intégration ou d’assimilation.

Or, avec le temps, la règle a changé de signification car aujourd’hui, les objectifs militaires de 1889 n’ont plus aucun sens mais la règle a un sens civil et qui est de permettre l’intégration totale dans la communauté nationale de jeunes issus de parents immigrés, ce qui laisse penser qu’ils sont français de fait. Cette règle a complètement changé de sens et ses racines ont aussi changé de nature, d’où le fat que cette règle a fait l’objet de débats au cours des dernières décennies qui paraissent aujourd’hui apaisés même leur virulence vers 1980 – 1990.

Cette règle s’est vue reprocher deux points :

—> reproche de ne pas respecter la volonté des jeunes concernés en leur imposant l’acquisition automatique de la nationalité française. Or, il existe une faculté de renonciation d’où une critique peu avouable.

—> reproche selon lequel il vaudrait mieux que l’acquisition de la nationalité française dépende non pas d’un acte négatif c’est-à-dire le fait de ne pas renoncer mais d’un acte positif c’est-à-dire le fait de déclarer vouloir devenir français. C’est ici la mise en avant de la conception dite élective de la nationalité française selon laquelle fondamentalement, la nationalité française devrait résulter d’un choix de la personne et d’un choix positif.

Dans ce débat, la conception élective a un sens que pour ceux qui ne sont pas français de naissance car pour ceux français de naissance, il est théorique de prétendre qu’ils sont français par choix. Elle concerne alors l’acquisition de la nationalité et non l’attribution de la nationalité. Par conséquent, elle finit par être un peu gênante car elle tend à distinguer en réalité entre les français de naissance et ceux qui sont devenus français en cours d’existence.

Au-delà du souhait qui est lui-même légitime, que le jeune exprime une volonté particulière, peut se profiler le souhait qu’il n’y ait pas trop d’acquisition de ce type et que l’accès à notre nationalité reste limité.

Le législateur a pris conscience de ce débat et en 1988, une commission des sages réunie par M. Chirac avait conclu qu’en effet, il vaudrait mieux abandonner l’automaticité de l’acquisition à la majorité pour une acquisition par déclaration mais à condition que cette acquisition par déclaration soit la plus facile et la plus souple possible. C’était une solution de compromis intéressante mise en œuvre par la loi du 22 juillet 1993 et qui a donné des résultats significatifs car entre 1993 et 1998, le nombre de déclarations volontaires a été élevé.

Or la loi du 16 mars 1998 est revenue à l’automaticité del’acquisition sans toutefois reprendre purement et simplement l’état de la législation antérieure à 1993. La loi de 1998 n’a pas totalement effacé la loi de 1993 même si l’acquisition est à nouveau automatique. Depuis 1998, l’état du droit est resté stable, peut être parce que la loi de 1998 a su garder certains aspects de la loi de 1993.

B)Les catégories concernées par ce dispositif

Il s’agit d’enfants nés en France de parents étrangers qui ne sont pas nés en France. Par hypothèse, ces enfants se voient transmettre la nationalité étrangère d’au moins un de deux parents et aucun des deux parents n’est devenu français en cours de minorité de l’enfant car si cela avait été le cas, l’enfant serait lui-même devenu français par effet collectif de l’acquisition de la nationalité française notamment par naturalisation.

Il s’agit d’enfants, du point de vu de l’intégration dans la communauté française, sont dans une situation complexe car concernant l’enfant, son lien avec la France est évident (naissance, résidence pendant au moins 5ans) tandis que s’agissant de sa famille le lien avec la France est plus flou car si ces parents sont installés en France, ils ne sont pas nés en France et ils n’ont pas demandé la nationalité française. Le degré d’intégration est plus élevé du coté de l’enfant que du coté des ses parents.

C’est aussi l’une des raisons de la réforme de 1993 qui demandait à l’enfant un acte positif de volonté car le lien avec la France concerne surtout l’enfant.

C)Le régime juridique actuel

Il y a une règle de principe et une règle corrective.

1 – La règle de principe

C’est une règle à double détente car elle prévoit aussi bien l’acquisition automatique de notre nationalité à la majorité de l’enfant, qu’une possibilité d’acquisition anticipée par déclaration ou par réclamation. On peut se demander si aujourd’hui cette faculté d’acquisition anticipée qui peut paraitre marginale n’est pas le vrai centre de gravité de la règle.

  • a)L’acquisition automatique à la majorité :

Article 21-17 alinéa 1 du Code civil. Selon cet article, l’enfant en France et qui réside encore au jour de sa majorité, acquiert automatiquement la nationalité française à ce jour de sa majorité s’il a résidé sur notre sol au moins 5ans depuis l’âge de 11ans.

Ainsi, jusqu’à 11ans, la résidence de l’enfant n’a pas d’importance pour le dispositif d’acquisition mais dès 11ans, cette résidence devient importante et il faut que dans la période de 7ans, l’enfant ait eu sa résidence habituelle en France pendant 5ans.

Ce dispositif peut surprendre puisqu’il semble ne donner aucune importance à la période de l’enfance alors que c’est la période capitale pour la formation de la personnalité et il semble concentrer l’importance de la réflexion sur l’intégration, à la période de l’adolescence et de la pré-majorité.

Ce qu’il faut comprendre en réalité c’est que le législateur part de l’hypothèse que la très grande majorité des enfants nés en France et ayant résidé en France pendant au moins 5ans en fin de minorité auront passé toute leur minorité en France.

Cela est si vrai que le législateur n’omet pas de traiter la question des enfants qui atteindrait ces 5ans de résidence en France avant les 18ans.

L’acquisition anticipée par déclaration ou par réclamation : on parle d’acquisition par déclaration quand c’est l’enfant qui déclare vouloir devenir français et on parle d’acquisition par réclamation lorsque ce sont les parents qui réclament la nationalité française pour l’enfant.

  • b) l’acquisition anticipée par déclaration :

C’est une demande de l’enfant avant 18ans. Selon l’article 21-11 al1 du Code civil, il est possible à un mineur d’âgé au moins 16ans de déclarer vouloir devenir français sans attendre l’âge de sa majorité dès lors qu’il remplit les conditions de 5ans minimum de résidence en France depuis l’âge de 11ans.

Exemple: à 16ans, il peut remplir une déclaration et il devient alors français et s‘il ne le fait pas alors il deviendra français à 18ans.

  • c) l’acquisition par réclamation :

L’enfant à moins de 16ans mais il réside en France depuis au moins 5ans avec ses parents et il est en France. Les parents vont pouvoir par déclaration réclamer la nationalité française pour leur enfant. Sur ce point c’est-à-dire l’enfant de moins de 16ans, que la loi de 1998 n’est pas revenu à l’état exact du droit antérieur à 1993.

Avant 1993, les parents pouvaient effectuer cette réclamation quel que soit l’âge de l’enfant et ils pouvaient aussi effectuer cette réclamation dès la naissance de l’enfant en France si eux-mêmes avaient au jour de la naissance au moins 5ans de résidence en France. La réclamation des parents n’était pas liée à aucune condition d’âge minimum de l‘enfant et la condition de résidence pouvait être réuni par les parents à la place de l’enfant.

La loi de 1998 est plus restrictive car la réclamation des parents peut être faite que si l’enfant a au moins 13ans et si lui-même réside en France depuis au moins 5ans à partir de 8ème anniversaire. Dans l’état actuel du droit, jusqu’à de 13ans les parents ne peuvent pas faire de réclamation mais ils peuvent faire quelque chose c’est-à-dire demander par naturalisation la nationalité française pour eux et s’ils l’obtiennent alors l’enfant deviendra français par effet collectif.

Où est la vraie réforme de 1993 ? On s’est centré sur acquisition automatique ou pas à la majorité mais le problème n’est-il pas avant la majorité ? La loi de 1998 a imposé un âge limite de 13ans mais cet âge est-il justifié ou pas ? Ce point est très discuté et il ne faut pas négliger la difficulté qu’il peut susciter car des enfants qui résident en France restent étrangers au moins jusqu’à 13ans même s’ils sont scolarisés. Pour que l’enfant devienne français avant 13ans, les parents doivent demander la nationalité française. L’acquisition anticipée doit-elle avoir ou pas un âge minimum ?

2 – La règle corrective

Dans l’hypothèse l’enfant arrive à la majorité sans être encore français, l’article 21-8 du Code civil lui permet de renoncer à l’acquisition automatique de la nationalité française à 18ans dans les 6 mois qui précède sa majorité et dans l’année qui la suit.

La renonciation dans l’année qui suit est absurde car s’il y a acquisition automatique à la majorité et si on souhaite permettre la renonciation, il parait logique que la renonciation ait lieu avant les 18ans. Le

législateur règle le problème en énonçant que si l‘enfant renonce à l’acquisition automatique dans l’année qui suit la majorité, il sera réputé n’avoir jamais été français.

Cette faculté de renonciation exprimé devant le Tribunal d’instance ou l’autorité consulaire n’a pas à être motivée mais il faut que l’enfant ait une autre nationalité c’est-à-dire il doit prouver qu’il a la nationalité d’un autre état étranger et il faut aussi qu’il n’est pas déjà souscrit un engagement dans les rangs de l’armée française, sinon il sera réputé français dès son engagement.