La pluralité des causes à l’origine du dommage

La pluralité des causes

On envisage ici le cas où plusieurs faits générateurs sont à l’origine du dommage. Pour mieux comprendre, nous allons supposer que plusieurs personnes sont à l’origine de chacun un fait générateur.

A\ Effets dans les rapports entre le victime et les coauteurs

a) Le principe: l’absence d’incidence sur la responsabilité du défendeur

(i) Le principe

Qu’il y ait un plusieurs auteur du dommage, comme nous l’avons dit en introduction, il n’y a pas de causalité partielle par rapport à la victime, i.e. que tous sont solidairement responsables du dommage par rapport à la victime, ce qui veut dire que la victime pourra demander la réparation de l’intégralité de son dommage à une seule personne, à tous, les uns se retournant contre les autres ensuite. La jurisprudence ne fait pas de différence selon que l’un a vu sa responsabilité engagée pour faute (ce qui à priori est plus grave) que du fait des choses ou d’autrui. Les auteurs vont se voir condamner in solidum à réparer le dommage qu’ils ont commis. Cette notion de condamnation in solidum est une création de la jurisprudence. Elle permet de mieux indemniser la victime en lui permettant de demander réparation de son préjudice par exemple à l’un des auteurs uniquement et de préférence le plus solvable. Pour autant, le juge à l’instance partagera les responsabilités mais ce partage n’est pas opposable à la victime.

(ii) Le problème de la conjonction du fait générateur et d’un fait de la nature

Exemple: j’ai un mauvais bateau je le sais et il coule alors que je suis au milieu d’une tempête qui ne constitue pas un cas de force majeure.

Au départ, on pensait que s’il y avait conjonction d’un fait générateur et d’un fait de la nature (non constitutif d’un cas de force majeure), la personne ne saurait supporter seul ce que la nature avait fait. C’est pourquoi on opposait le partage de responsabilité à la victime. Cette solution (Cour de Cassation, Lamoricière, 19/06/1951) me paraissait pour ma part tout à fait logique, il faut bien qu’il y ait des victimes: si une mouette me défèque sur l’œil et que je perds l’œil, qu’est-ce que je peux bien y faire?

Mais, dans ce grand courant de victimisation, on est revenu sur cette position en obligeant la personne qui avait participé à la création du dommage avec la nature à supporter seule tout le poids de la réparation : Cour de Cassation, 20/12/1968.

(iii) Le fait générateur et la prédisposition de la victime

C’est un cas assez fréquent: par exemple, je bouscule quelqu’un qui est cardiaque et qui meurt d’un infarctus. Dois-je réparer alors qu’il avait une prédisposition? La positon de la cour de cassation est logique: le principe est celui de la réparation intégrale; il est mort, je dois réparer. Il n’y a pas partage de responsabilité car la personne n’a pas commis de faute. Si bien sûr la personne était cardiaque et fait du saut en parachute, (sous réserve des précautions qui doivent être prises en la matière) il y aura partage des responsabilités.

Le problème qui se pose actuellement est celui de la preuve: si la personne meurt aussitôt, on pourra facilement faire le lien, mais si elle meurt trois mois plus tard.

b) La faute de la victime

Si la victime a commis une faute:

  • Soit la faute de la victime est constitutive d’un cas de force majeure auquel cas, l’exonération est totale
  • Soit la faute de la victime n’est pas constitutive d’un cas de force majeure, auquel cas l’exonération ne pourra être que partielle.

c) Les dommages distincts

Jusqu’ici nous avons envisagé le cas de plusieurs faits générateurs pour un seul dommage. Ici nous allons envisagé plusieurs faits générateurs pour plusieurs dommages.

Le principe est que l’on apprécie les dommages séparément. On fait une évaluation pour chaque dommage ce qui est logique.

Question: si on aggrave une situation, i.e. si la personne a déjà un dommage et qu’on renforce ce dommage, que répare-t-on? En toute logique, on ne répare en principe que l’aggravation sauf si celle-ci est telle qu’elle a dénaturé le dommage. Nous avons à ce sujet un triste exemple: Cour de Cassation, 1° chambre civile, 28/10/1997. Une personne est borgne mais elle travaille. Suite à une erreur médicale, elle devient aveugle ne peut plus travailler, lire… son dommage est dénaturé.

B\ La responsabilité entre coauteurs

La victime peut ne demander réparation qu’à une personne. Cette personne pourra se retourner contre les coauteurs du dommage. Ce recours s’appelle un recours subrogatoire.

Si le fait générateur n’est pas un fait personnel, il y aura un partage en parts viriles, i.e. une réparation équitable entre les différents auteurs.

Attention: si notre personne unique a été condamnée et a payé. Supposons qu’elle ait deux complices, elle ne peut pas exiger d’eux 1/3, il faut que le juge détermine les parts.