La préparation du projet de loi de finances initiale

La préparation du projet de loi de finances initiale

La préparation du projet de loi de finances initiale a considérablement évolué depuis plusieurs années en raison du développement de la pluri-annualité budgétaire. A côté de l’élaboration de la LFI, le gouvernement fait adopter depuis 2009 des lois de programmation des finances publiques (dit LPFP). La deuxième a été adoptée en décembre 2010 qui couvre la période 2011/2014. On y retrouve pour chaque année des prévisions de dépenses des administrations publiques, et les prévisions de déficits publics. Dans cette LPFP, il y a un autre document qui est le budget triennal pour les années 2011 / 2012 / 2013. On y retrouve la répartition pour chaque année la répartition des crédits entre les missions et les programmes (doc 1, p.11 en annexe). La LPFP et le budget triennal n’ont aucune valeur contraignante à l’égard du gouvernement, c’est-à-dire que les programmations qui sont contenues dans le budget triennal et la LPFP, pour qu’elles soient contraignantes, doivent être incluses dans la LFI de l’année qui est la seule à avoir valeur juridique. Lorsque le gouvernement a préparé la LFI pour 2011 il a dû également préparer la LPFP de 2011 à 2014 et le budget triennal.

Le calendrier en lui-même : Pour préparer la LFI pour 2011 le gouvernement s’y est pris en décembre 2009, où des échanges ont eu lieu entre le ministère des finances et les ministères dépensiers. L’objectif est de connaître les demandes de crédits des ministères dépensiers. C’est également fixer les orientations principales pour 2011 pour la direction du budget. En janvier 2010, un séminaire gouvernemental est organisé pour affiner la stratégie budgétaire 2011. Au cours de l’année 2010, le premier ministre va adresser à chaque ministre une lettre de cadrage pour préparer la LFI 2011. Dans cette lettre on trouve les normes de dépenses à respecter, c’est-à-dire le plafond de dépense que le ministère ne pourra pas dépasser (mais attention ça ne répartie pas les crédits entre les différentes missions). Ces lettres de cadrages concernaient l’année 2011, mais prévoyaient également les normes de dépenses pour chaque ministère pour les années 2012 / 2013. Au printemps, le ministère des finances va organiser de nombreuses réunions avec les ministres dépensiers. Il y a les conférences de budgétisations, c’est-à-dire que, durant ces conférences, le ministère des finances va examiner précisément les demandes de crédits de chaque ministère pour chaque année de la programmation triennale. S’en suit un échange entre ministère des dépenses et ministères dépensiers. A côté de ces conférences, il y a les conférences de performances (organisées par le ministère des finances) qui ont pour objectif de donner à chaque politique publique des objectifs à atteindre. Vers le mois de juin, le premier ministre va trancher et va envoyer des lettres plafond à chaque ministère. Ces lettres répartissent les crédits entre les missions. Ces lettres s’inscrivent dans la pluri-annualité. Ces lettres sont envoyées après que le débat d’orientation budgétaire (DOB) ai été organisé, car ce DOB va peut permettre de modifier la répartition des crédits entre les missions. Les ministères, aidés par la direction du budget, vont répartir les crédits de chaque mission entre les différents programmes. La répartition est effectuée au cours des réunions de répartitions et de finalisations des documents budgétaires. Une fois le PLFI est terminé, il est soumis au Conseil d’Etat, puis ce PLFI est adopté en conseil des ministres à la fin du mois de septembre.

En général c’est le premier ministre qui va arbitrer les conflits entre le ministère des dépenses et les ministères dépensiers au sujet de l’octroi ou non d’un crédit. Mais le Président de la République peut s’en mêler (cas actuellement), c’est-à-dire qu’il peut faire pression sur le premier ministre et le ministre des finances pour qu’il accepte ou refuse un crédit.

La LOLF précise que les crédits ouverts dans une loi de finance initiale sont mis à la disposition des ministres et ces crédits ne peuvent être modifiés que par une loi de finance rectificative mais la LOLF précise qu’à titre exceptionnel les crédits ouvert par une loi de finance initiale, pourront faire l’objet de modification par le pouvoir règlementaire, c’est-à-dire par le biais d’acte administratif. La LOLF, précise les différentes modifications que le pouvoir réglementaire peut apporter aux crédits votés en LFI. Bien entendu, ces prérogatives du pouvoir réglementaire, sont rigoureusement encadrées afin de préserver la portée de l’autorisation parlementaire matérialisée par le vote de la LFI. La LOLF, par rapport à l’ordonnance de 1959, la LOLF va encadrer de façon beaucoup plus rigoureuse les prérogatives du pouvoir réglementaire et va renforcer, l’obligation qui est faite au gouvernement d’informer les commissions des finances des deux assemblées des modifications effectuées par voies réglementaire. Ces prérogatives du pouvoir réglementaire ont pour objectif de mieux gérer en cours d’exercice de la loi de finance, les crédits. Par exemple le pouvoir réglementaire, grâce aux prérogatives que la LOLF lui donne, va pouvoir, empêcher l’utilisation de certains crédits pour réduire le déficit budgétaire. 2ème exemple : pendant l’exécution budgétaire, s’il y a urgence à faire une dépense non prévue en LFI, et bien le pouvoir réglementaire va pouvoir ouvrir des crédits budgétaires en prenant un simple acte administratif sans faire voter une loi de finance rectificative, donc sans passer par le parlement. Autrement dit, ce pouvoir réglementaire en matière budgétaire permet de faciliter la tâche du gouvernement pendant l’exécution budgétaire sans avoir à faire voter une loi de finance rectificative par les parlementaires, donc gain de temps.

§ 1 La modification de la répartition des crédits

Les crédits budgétaires sont spécialisés par programme, c’est-à-dire que le gouvernement, une fois la loi de finance votée, doit respecter le vote des parlementaires, il ne peut pas transférer les crédits d’un programme sur un autre programme.

Dérogation au principe de spécialité : par le biais d’acte administratif à valeur réglementaire, le gouvernement peut modifier la répartition du crédit entre les programmes. Ce sont les procédures de transfert et de virement de crédit qui seront alors utilisés.

§ 2 La modification du montant des crédits

A-La règle de limitation du montant des crédits

Les crédits sont spécialisés par programme, c’est-à-dire que les crédits affectés à chaque programme constituent un plafond que le gouvernement ne peut pas dépasser lors de l’exécution budgétaire. Ça veut dire donc que ces plafonds votés par le parlement sont contraignants, on dit que les crédits sont limitatifs.

Il y a des crédits qui ne sont pas limitatifs, ce sont les crédits évaluatifs. Ces crédits, leur montant contenu dans la loi de finance n’est qu’indicatif c’est à dire que le gouvernement, pendant l’exécution de la loi budgétaire, pourra dépasser le montant. C’est crédits, prévus à l’article 10 de la LOLF concernent certaines dépenses bien précises de l’état.

Tout d’abord les crédits évaluatifs sont contenus dans des programmes différents des programmes contenant des crédits limitatifs. Les crédits évaluatif concernent quelques dépenses, par exemple les charges de la dette de l’état, ce sont les dépenses qui sont constituées par le paiement des intérêts des emprunts que l’état a souscrit. L’état peut emprunter de l’argent, mais quand il y a des intérêts qui seront financés par les crédits évaluatifs. Le remboursement du prêt en lui-même n’est pas considéré comme une dépense budgétaire, ça veut dire que cette dépense ne figure pas dans les dépenses prévues par la loi de finance.

Dans l’hypothèse où des prévisions de crédit évaluatifs, prévus en LFI, sont dépassées, et bien le gouvernement doit informer les commissions des finances. Le ministre des finances, doit expliquer aux commissions, les causes des dépassements. Et le ministre doit également fournir aux commissions les perspectives d’exécution jusqu’à la fin de l’année budgétaire.

Les dépassements de crédits évaluatifs doivent être en quelque sorte régularisés par une loi de finance, c’est-à-dire que les crédits ouverts par le gouvernement, alors qu’il n’était pas prévu dans la LFI, devront être ratifiés, régularisés dans une LFR ou alors dans la loi de règlement relative à l’exercice budgétaire concerné.

B-Les décrets d’avance

Article 13 de la LOLF. Ce mécanisme est ancien, et il est très critiqué parce qu’il permettrait au gouvernement de présenter des lois de finance insincère. Le gouvernement va pouvoir prendre des décrets d’avance dans deux hypothèses pendant l’exécution budgétaire :

  • Lorsqu’il y a urgence, le gouvernement va pouvoir ouvrir des crédits par décret d’avance sans passer par une LFR. Cette mise à l’écart du parlement est assez choquante. Il faut savoir que bien entendu, ce super pouvoir donné au gouvernement s’explique par la situation d’urgence, on ne peut attendre que le parlement adopte de nouveau crédit par le biais d’une LFR. Cette prérogative est donc très forte, et très encadrée par la LOLF. Tout d’abord le gouvernement doit recueillir l’avis du CE et des commissions de finance. L‘ouverture de nouveaux crédits par le bais de décret d’avance ne doit pas conduire à affecter l’équilibre budgétaire prévu par la loi de finance (il y aura plus de dépense que dans la LFI). Pour éviter une modification de l’équilibre budgétaire, le gouvernement devra prendre des mesures de compensation qui sont au nombre de deux. Après avoir ouvert de nouveaux crédits, le gouvernement devra supprimer des crédits contenus dans la loi de finance pas encore consommés et d’un montant équivalent aux nouveaux crédits ouvert en décret d’avance. Deuxième possibilité : il y a ouverture de nouveaux crédits par décret d’avance, et bien le gouvernement pourra constater l’existence de ressources supplémentaire qui viennent financer ces crédits. Objectif : ne pas aboutir à plus de dépense. Autre encadrement, la LOLF prévoit une limite quantitative à l’utilisation de ces décrets d’avance, c’est-à-dire que le montant de tous les crédits ouvert par le biais de crédit d’avance ne pourra dépasser 1% des crédits ouverts par la LFI. Ces décrets d’avance devront être ratifiés dans la prochaine LF.
  • 2ème hypothèse : des décrets d’avance peuvent être adopté par le gouvernement lorsqu’il y a urgence et nécessité impérieuse d’intérêt national. Dans ce cas-là on se trouve dans le cadre de circonstances exceptionnelles, il y a la possibilité d’ouvrir des décrets d’avance, mais la procédure et les conditions exigées sont allégées car extrême urgence. En effet le gouvernement n’a plus à recueillir l’avis des commissions de finance, mais seulement l’avis du CE et à informer les commissions qui vont utiliser les décrets d’avance.

Le gouvernement, lorsqu’il ouvrira des crédits dans cette hypothèse, le gouvernement n’aura plus à respecter l’équilibre budgétaire fixé en loi de finance. C’est-à-dire qu’il n’aura plus obligation à compenser les ouvertures de crédit décidées en décret d’avance. Ces décrets d’avance devront toutefois être ratifiés par le prochain projet de loi de finance.

Le gouvernement a tendance à utiliser les décrets d’avance abusivement pour ouvrir des crédits. L’utilisation des décrets d’avance est subordonnée à l’existence d’une situation d’urgence. Mais qu’est-ce que l’urgence ? C’est un terme indéfinissable. Seul le JA peut le dire. Le gouvernement pourra invoquer l’urgence pour ouvrir des crédits qui auraient pu être ouverts en LFI, dans ce cas-là, les dépenses relatives à ces crédits n’étaient pas imprévisibles lors du vote de la LFI en décembre. L’intérêt qu’a le gouvernement, c’est qu’il pourra présenter des prévisions de dépenses insincères en LFI, sous évaluées, et ces dépenses volontairement absentes de la LFI feront l’objet d’ouverture de crédit pendant l’exécution budgétaire par le biais de décret d’avance. Cela est très critiqué par la cours des comptes. C’est souvent le ministère de la défense qui bénéficie de ces décrets d’avance abusifs.

C-Les crédits globaux

Contenus dans une mission particulière : la mission provision, ils ne sont pas répartis par programme. Il y a deux dotations : la première est la dotation pour dépense accidentelles qui contient des crédits globaux destinés à faire face à certaine calamités : financement pour des catastrophes naturelles. Ces crédits sont globaux car ils ne sont pas affectés au financement d’un programme. C’est lorsqu’il y aura une dépense accidentelle à finance au cours de l’exercice, que ces crédits seront affectés par décrets à un programme. Par conséquent l’affectation des crédits globaux pendant l’exercice budgétaire va permettre d’augmenter les crédits d’un ou plusieurs programmes.

§ 3 Les modifications des crédits dans le temps : le cas des annulations de crédits

Il existe une autre possibilité pour le gouvernement de modifier les crédits dans le temps, c’est ce que l’on appelle les reports de crédits. Par acte administratif à valeur réglementaire le gouvernement a la possibilité de ne pas consommer un crédit au cours de l’année budgétaire et de le reporter sur l’exercice suivant afin qu’il soit utilisé.

A côté il y le pouvoir d’annulation budgétaire, pouvoir prévu à l’article 14 de la LOLF, le gouvernement peut par décret annuler des crédits pourtant votés en loi de finance. Ce système est inspiré du droit américain puisque cette technique se trouve depuis longtemps en Amérique c’est la technique de l’impoudment. La LOLF, là encore va encadrer cette prérogative gouvernementale qui porte atteinte aux prérogatives parlementaires.

Les crédits selon la LOF, peuvent être annulés que dans deux cas :

  • Lorsque le crédit est devenu sans objet : c’est-à-dire lorsque la dépense qui était permise par le vote de ce crédit est devenu inutile. Dans ce cas on annule pour que la dépense ne soit pas effectuée.
  • Le gouvernement peut annuler des crédits pour prévenir la détérioration de l’équilibre budgétaire votée en loi de finance. Dans ce cas-là, c’est assez intéressant, on se trouve dans la période d’exécution, et le gouvernement peut craindre que les recettes soient moins importantes que prévues. Le risque c’est de voir le déficit de l’état se creuser. Le déficit c’est une différence négative entre les dépenses et les recettes. Pendant l’exécution budgétaire on va utiliser les crédits, et on va recouvrer les recettes prévues en LFI, et on peut s’apercevoir qu’il y aura moins de recette que prévue, donc trop d’optimisme et il faut revoir à la baisse, et le déficit augmente. Si c’est le cas, le gouvernement pour éviter une aggravation du déficit va pouvoir annuler les crédits pour diminuer le montant des dépenses.

Le gouvernement est limité quantitativement, c’est-à-dire que les annulations de crédits par le biais de décrets ne peuvent dépasser 1,5% des crédits initialement ouverts aux lois de finance. Si le gouvernement veut dépasser ce plafond que doit-il faire ? Il doit faire voter une LFR. Depuis la LOLF le gouvernement doit informer des commissions des finances de sa volonté d’annuler par décret des crédits.

Conclusion : des prérogatives pouvant être au service de la régulation budgétaire :

L’objectif de la régulation budgétaire c’est d’éviter une aggravation du déficit de l’état au cours de l’exercice budgétaire. La régulation budgétaire est pratique aux mains du gouvernement. Le gouvernement pour réaliser cette régulation budgétaire va utiliser son pouvoir réglementaire en matière budgétaire, il va pouvoir utiliser notamment la procédure d’annulation de crédit, et également la procédure des reports de crédit.

La régulation budgétaire peut s’effectuer par une autre technique, c’est ce que l’on appelle le gel des crédits ou la mise en réserve des crédits. Pendant l’exécution budgétaire où on applique la loi de finance, le gouvernement peut craindre une augmentation du déficit. Dans ce cas-là il va utiliser un principe de précaution budgétaire, c’est-à-dire qu’il va mettre en réserve certains crédits. Ça veut dire que ces crédits ne pourront pas être utilisés pour faire des dépenses pendant un laps de temps donné. Les crédits sont donc indisponibles temporairement. A la fin de cette période, si les craintes du gouvernement sont justifiées, c’est-à-dire que si le gouvernement est sûr qu’il y aura augmentation du déficit, et bien dans ce cas-là les crédits mis en réserve pourront être annulés. Si les craintes du gouvernement sont injustifiées, c’est-à-dire s’il n’y a pas de risque d’augmentation du déficit, et bien dans cas là on dit que les crédits seront dégelés et qu’ils pourront être utilisés.

Depuis le début des années 2000, il faut savoir que le gouvernement dans un souci de sincérité et de transparence, fait figurer en LFI, les crédits qu’ils souhaitent mettre en réserve pendant l’exécution budgétaire. Cette pratique a été saluée par le conseil constitutionnel.