La procédure d’alerte et le mandat ad hoc

Mandat ad hoc et procédure d’alerte

S1) Les procédures d’alerte

Elles Ont pour objet d’attirer l’attention des dirigeants sur les difficultés objectivement décelables de l’entreprise. Ne remettent pas en cause le pouvoir décisionnel du dirigeant. Peut avoir une origine interne ou externe à l’entreprise.

SS1) Alerte interne
A) Déclenchée par le commissaire au compte

Mise en œuvre améliorée depuis L. 2005. Alerte plus rapide et on informe au plus tot le président du tribunal des difficultés. L’alerte ne concerne que les groupements dotés d’un commissaire au compte. Lorsqu’il s’agit d’une société commerciale, le déclenchement de cette procédure constitue un devoir pour les commissaires aux comptes. Lorsqu’il s’agit des autres personnes morales de droit privé ayant une activité éco (GIE, Asso), il ne s’agit que d’une simple faculté.
L. 10/6/1994 : il ne s’agit plus seulement d’une procédure interne, car le commissaire peut être tenu d’informer le président du tribunal.

1) les faits justifiant le déclenchement de l’alerte

Procédure déclenchée lorsque les commissaires relèvent des faits de nature à compromettre la continuité de l’exploitation. Les commissaires aux comptes ont la responsabilité d’apprécier souverainement la situation. Un fait est de cette nature lorsque l’on peut raisonnablement prévoir qu’il va entraîner un déséquilibre financier, et donc un arrêt d’activité. Ex : perte d’un marché, résiliation d’un contrat de concession exclusive, le départ d’une équipe de cadre. Parce que le commissaire au compte ne peut pas s’immiscer dans la gestion de l’entreprise, son obligation de déclencher l’alerte est cantonné à des faits précis relevés à l’occasion de l’accomplissement de sa mission : qui ont un lien avec son activité de contrôle comptable.
Le commissaire a le droit de se tromper : il n’engage pas sa responsabilité s’il déclenche à tort une alerte, mia sn’a pas le droit de rien faire s’il sait que la continuité de l’exploitation est compromise.

2) Le déclenchement de la procédure d’alerte dans les SA

Volonté de mettre en garde les dirigeants pour provoquer une décision, puis alerter le président du tribunal de commerce voire les actionnaires. Art. L. 234-1 Code de Commerce, 4 étapes successives sont possibles :

– Quand le commissaire au compte a connaissance de faits de nature à compromettre la continuité de l’exploitation, il en informe le président du CA ou du directoire. Le président doit alors répondre pour lettre recommandée dans les 15 jrs qui suivent la réception de l’info. Alerte prend fin si le commissaire au compte est satisfait de la réponse du président.
– Si pas de réponse sous les 15 jours, ou non satisfaction de la réponse, le CAC doit inviter par écrit le président du CA ou directoire à faire délibérer le conseil sur les faits relevés. Les résultats devront être communiqués au CE. L. 10/6/1994, a le commissaire doit informer le président du tribunal de commerce de la délibération : l’alerte cesse donc d’être confidentielle. L. 26/7/2005, le magistrat recevra une copie de la lettre qui invite a la délibération + la délibération. Si pas de CE, il est prévu que cette délibération devra également être communiquée au délégué du personnel.
– Avant l’entrée en vigueur de L. 26/7/2005, si inobservation des dispo. prévues dans la 2ème étape, ou si malgré les mesures adoptées par les organes de la société la continuité de l’entreprise demeure compromise, le commissaire au compte doit en informer les associés lors de la prochaine AG par l’établissement d’un rapport spécial. Ce rapport est aussi communiqué au président du tribunal dans les 15 jours de la délibération. Doit aussi être transmis au CE. Art. L. 234-1 Code de Commerce prévoit dans les même hypothèses qu’une AG est convoquée dans les conditions des délais fixés par décret en CE. Il n’est plus nécessaire d’attendre la prochaine AG des actionnaires.
– Si les décisions prises en AG demeurent insuffisantes, le président du tib de commerce est saisi et ce dernier peut placer la société en observation.

3) Le déroulement de la procédure dans les autres groupements de droit privé

SI l’entreprise n’est pas une SA, déroulement simplifié : ne comprend plus que 3 étapes. Les modifications de L. 26/7/2005 sont voisines que pour les SA.

– le commissaire au compte qui a constaté des faits de nature à compromettre la continuité de l’entreprise sollicite des explications du gérant ou des administrateur Ceux ci ont alors 15 jours pour faire part de leur analyse et des mesures qu’il compte prendre. Doivent en informer le CE, ou les délégués du personnel. Le président du tribunal est informé de l’existence d’une procédure d’alerte par la commissaire au compte et ce dès son déclenchement
– Faute de réponse ou de mesure appropriée, le commissaire au compte établit un rapport spécial et invite par écrit les administrateur ou gérants à faire délibérer une AG sur les faits relevés. Cette AG devra être convoquée dans les conditions et délais fixé par décret en CEtat. Le président du tribunal comm. en est informé.
– Si à l’issu de l’AG aucune solution appropriée n’est adoptée, le commissaire au compte en informe le président du tribunal et lui communique la délib. de cette assemblée. Il existe certaines personnes morales de droit privé pour lesquelles la désignation d’un commissaire au compte peut être obligatoire : Art. L. 612-3 Code de Commerce, une seule procédure d’alerte.

4) Absence de devoir d’alerte par le commissaire au compte en cas de procédure de sauvegarde engagée

Pour les SA et autres commerciales, l’art. L. 234-4 Code de Commerce, « la procédure d’alerte du commissaire au compte n’ a pas lieu d’être lorsqu’une procédure de conciliation ou de sauvegarde a été engagée par les dirigeants ».
Se justifie logiquement. Si procédure de conciliation, il y a déjà cessation des paiements. Et la sauvegarde implique qu’une procédure destinée à surmonter les difficultés est déjà engagée. C’est la demande d’ouverture et non le jugement d’ouverture qui fait cesser l’obligation d’alerte.

B) Déclenchée par le CE

La loi l’a érigé au rang d’organe de contrôle des dirigeants. Dispose également du droit d’alerte. N’est que facultative. Ne peut être source de responsabilité en cas d’inaction du CE.

1) Faits justifiant le déclenchement de l’alerte.

Quand il a connaissance de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l’entreprise (art. L. 432-5 Code de Commerce). Le critère de déclenchement de l’alerte est donc plus large que pour les commissaires aux comptes. En réalité, il doit s’agir de faits de nature à susciter une inquiétude sur l’évolution de l’entreprise et ses csq sur l’emploi. Les faits doivent présenter une certaine gravité.

2) Le déroulement de la procédure

Ce droit d’alerte a pour vocation de déclencher une discussion avec la direction, en 3 étapes :

– Le CE adresse à la direction une demande d’explication. Inscrite à l’ordre du jour de la prochaine réunion du CE. Communiquée au commissaire au compte. ss peine de délit d’entrave, l’employeur a obligation de fournir des informations.
– Faute d’explication ou si celles ci s’avèrent insatisfaisantes, le CE établit un rapport d’alerte transmis à l’employeur et au commissaire au compte. Si plus de 1000 salariés, rapport établi par commission économique. Pour sa rédaction, le CE peut se faire aider par un expert comptable rémunéré par l’entreprise.
– Le rapport d’alerte est communiqué à l’organe collégial de l’administrateur ou de surveillance, devant répondre dans un délai d’un mois, ou aux associés. Le ce ne peut convoquer une AG des actionnaires. le CE peut communiquer au président du tribunal de commerce tout fait révélant la cessation des paiements.

C) Déclenchée par les associés

Disposent d’un droit d’alerte. Complète leur droit de demander la désignation d’un administrateur provisoire si paralysie des organes sociaux, ou nominatino d’un expert de gestion.
Le droit d’alerte est réservé à certains associés seulement : Les associés non gérants d’une SARL, peu important le nombre de parts sociales détenues, et les actionnaires d’une SA ou SCA qui détiennent ensemble 5 % du capital social.
Les associés peuvent, 2 fois par ex, poser par écrit des questions au dirigeant sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l’exploitation. Sa réponse est transmise au commissaire au compte.
Les associés n’ont pas de moyen d’action particulier si réponse n’est pas satisfaisante. Ne peuvent que s’en remettre à la diligence du commissaire au compte.

SS2) Alertes externes et le renforcement des pouvoirs du tribunal de commerce

L. 1/3/1984 avait réservé l’exercice d’un droit d’alerte externe au président du tribunal commerce ou TGI.
Mais L. 10/6/1994 a pris le parti d’élargir ce droit d’alerte pour renforcer la prévention des difficultés : groupements de prévention agréés. Si L. 2005 n’a pas modifié ce dernier point, a accru l’information et les pouvoirs du président du trib.

A) L’information et les pouvoirs accrus du président du tribunal

bénéficie de nouvelles informations. Ces pouvoirs sont renforcés lorsqu’un dirigeant ne répond pas à sa convocation, ou lorsque les comptes de la société commerciale ne sont pas déposés dans les délais.
Le non paiement de créance : indice des difficultés. Le président du tribunal pourra convoquer le débiteur concerné. Art. 175 L. 26/72005 impose la pub. des créances fiscales impayées dès lors que les sommes dues au titre d’un semestre civil par un redevable à un même poste comptable demeurent impayées. Il n’y a plus, comme avant, un seuil minimal de 12 200 euros à atteindre pour bénéficier de cette publicité. Un mécanisme de radiation est prévu dès que le débiteur paye sa dette. Art. 184 L. 26/72005 modifie art. L. 234-5 CSécuS. Il impose sans seuil quantitatif l’inscription obligatoire sur un registre public tenu au greffe du tribunal de commerce des cotisations et des majorations et pénalités de retard. radiation du débiteur une fois cotisation payée.
Art. 379 bis CDouanes est instaurés pour publicité des créances douanières impayées. Radiation si paiement.

B) Le pouvoir de convocation du dirigeant par le président du tribunal

Il a un pouvoir d’alerte individuel. Vise tte entreprise, société commerciale, GIE, qui a des difficultés de nature à compromettre la continuité de l’exploitation. Le président peut convoque les dirigeants des entreprises pour examiner avec eux les mesures propres à redresser la situation. Mais il ne dispose alors d’aucune pouvoir coercitif, et aucune sanction n’est prévue contre le débiteur dirigeant si ne se présente pas à la convocation. Le président peut obtenir après entretien tout renseignement de nature à lui donner une exacte information sur la situation économique et financière du débiteur de la part des commissaires aux comptes. A contrario, si le dirigeant ne se rendait pas à la convoc, le président ne pouvait pas poursuivre ses investigations. L. 2005 a donc modifié l’art. L. 611-2 Code de Commerce. SI le dirigeant n’est toujours pas obligé de se rendre à la convocation du président du trib, le président pourra bénéficier des même pouvoir d’investigation auprès du commissaire au compte, mbe du personnel, administrateur publique, organisme de sécurité et de prévoyance sociale, et des services chargés de la centralisation des risques bancaires et incidents de paiements.
En cas d’absence de dépôt des comptes annuels dans les délais, le président peut enjoindre de faire sous astreinte au dirigeant.

C) Le droit d’alerte des groupements de prévention agréés

Mis en place par L. 1984, Art. L. 611-1 Code de Commerce le droit d’alerte de ces groupements est cité pour mémoire car inefficacité pratique.



S2) Renforcement du mandat ad hoc

En 2004, 1400 mandats ad hoc ont été ouverts devant les tribunal de commerce alors qu’ils ont prononcé 39 000 et plus procédures de redressement : le mécanisme de prévention que constitue le mandat ad hoc reste peu utilisé.
Mais le législateur a voulu encourager cette procédure spécifique. L. 26/7/2005 consacre un article spécifique au mandat ad hoc. Art. L. 111-3 Code de Commerce dispose : le président du tribunal de commerce / TGI peut, à la demande du représentant de l’entreprise, désigner un mandataire ad hoc dont il détermine la mission. Les modifs de la loi de 2005 sont finalement minces : mise en place d’une ébauche de statut pour les mandataires ad hoc + détermination de leurs modes de rémunération.

1) La demande de l’ouverture d’un mandat ad hoc par le débiteur connaissant des difficultés

Ce dispositif est ouvert à tout débiteur, quelque nature et forme de l’activité qu’il exerce. Suivant que la personne physique / morale relève ou non du tribunal de commerce, ou TGI.
Le texte ne donne pas de précisions sur l’événement de nature à déclencher la saisine par le débiteur afin d’obtenir la nomination d’un mandataire ad hoc. Il doit s’agir de difficultés pouvant encore faire l’objet de préventions : on devrait se trouver bien en amont de difficultés qui compromettent gravement la pérennité de l’entreprise. La plupart du temps, le mandat ad hoc est utilisé lorsque les difficultés sont réelles, impossibles à résoudre facilement et rapidement. C’est le premier volet d’une négociation longue qui se poursuivra dans le cadre d’une procédure de conciliation. La durée de 4 mois + 1 mois apparaît trop courte pour aboutir dans de nombreuses hypothèses. Si le seul représentant de l’entreprise ou débiteur personne physique a qualité pour réclamer un mandataire, la demande doit être présentée par écrit, exposer les raisons. Le requérrant sera convoqué par le greffier pour que le président du tribunal recueille ses observations. La loi ne lui donne pas officiellement la possibilité de solliciter la nomination de la personne qu’elle souhaite. La nomination devra intervenir dans un délai d’un mois a compter de l’entretien devant le magistrat. A défaut, la demande sera réputée rejetée.
Contrairement au conciliateur, ne fait pas l’objet d’une communication au ministère public. Le débiteur peut demander à ce qu’il soit mis fin à sa fonction. Le président du tribunal n’a aucun pouvoir d’appréciation.

2) L’objet du mandat ad hoc

Art. L. 661-3 Code de Commerce, c’est le président qui détermine sa mission. Dépendra de la spécificité des difficultés rencontrées. Restera similaire avec ce qui se pratiquait antérieurement à la réforme de 2005. Le mandataire ad hoc se rapprochera de l’actionnaire unique, fera voter une augmentation de capital, se rapprochera des distrib / fournisseurs, voire des organismes publics, pour négocier des délais de paiement ou remises de dette. En aucun cas le mandataire ad hoc ne devra s’immiscer dans la gestion de l’entreprise. Sa mission n’est pas enfermée dans des délais légaux. Il appt à chaque président de fixer le délai de sa mission. Le mandataire ad hoc, comme le conciliateur est tenu à la confidentialité.

3) L’ébauche de statut du mandataire ad hoc

Des contraintes déontologiques ont été mises à la charge du mandataire ad hoc. Il s’agit de règles identiques à celles imposées en cas de désignation d’un conciliateur. Les personnes ayant au cours des 24 mois précédents perçu à quelque titre que ce soit directement ou indirectement une rémunération ou un paiement de la part du débiteur, de tout créancier du débiteur ou de toute personne qui en détient le contrôle, ou de l’un de ses créanciers, ne pourront prétendre être nommés mandataire ad hoc. IL en ira autrement que si la rémunération a été perçue au titre d’un mandat ad hoc ou d’une mission de règlement amiable ou de conciliation réalisée pour le même débiteur ou le même créancier. Il serait dommage de ne pas recourir à une personne qui connaît déjà l’entreprise.
La mission du mandataire ad hoc ne peut être confiée à un juge consulaire en fonction ou ayant quitté ses fonctions depuis moins de 5 ans.
Si une procédure de sauvegarde ou redressement est ouverte à l’encontre du débiteur, le ministère public pourra s’opposer à la désignation du mandataire ad hoc aux fonctions de liquidateur ou administrateur.
De même, ce mandataire ne pourra pas exercer les fonctions de mandataire judiciaire pour ce débiteur avant l’expiration d’un délai d’un an.
La décision de nomination du mandataire ad hoc fixera les conditions de sa rémunération en accord avec le débiteur et en f/ des diligences nécessaires à l’accomplissement de sa mission. Sa rémunération sera arrêtée à l’issue de la procédure par ordonnance du président du tribunal.
Les recours contre cette décision sont portées devant le premier président de la CA.
Si le mandataire accepte ou refuse sa mission, le fait connaître sans délai au président. Doit fournir une attestation d’honneur de ne pas être frappé des incompatibilités ci-dessus (art. L. 611-13 Code de Commerce) ;