La création des lois par le parlement et le gouvernement

La production de la loi par le parlement et le gouvernement : Le déclin de la loi ?

Après l’instabilité ministérielle des 3ème et 4ème République, la 5ème République a un objectif : Rendre le Parlement à la raison. Mais cet objectif signifie t il abaisser la fonction parlementaire ?
Sous les IIIème et IVème républiques le rôle du parlement est double : faire et défaire les gouvernements. Plus définir et exprimer la volonté générale.
DDHC « la loi est l’expression de la volonté générale »
Idée que seul l’organe élu au suffrage universel est apte à définir les contours de ce que doit être l’intérêt général. D’où la reconnaissance au parlement d’une souveraineté absolue.
Le parlement sous les IIIème et IVème dispose d’un monopole de production de la règle de droit.
Cette hyper souveraineté parlementaire, combinée au multipartisme, va entrainer l’instabilité gouvernementale et c’est contre ceci que le constituant de 1958 réagit, en développant le parlementarisme rationnalisé, c’est-à-dire en fixant dans la constitution elle-même, les règles juridiques du jeu politique.
= Parlementarisme rationnalisé + développement du fait majoritaire (gouvernement et président peuvent s’appuyer sur une majorité forte)
= transfert de la réalité du pouvoir politique du Parlement vers le gouvernement.
Question : dénonciation d’un abaissement de la fonction parlementaire par Mitterrand en 1964. On peut dire que c’est un rééquilibrage du partage des pouvoirs en faveur de l’exécutif, plutôt que d’un abaissement de la fonction parlementaire. Rééquilibrage obtenu de deux manières : paragraphe 1 et 2 =encadrement de la fonction de contrôle exercée par le parlement sur le gouvernement et reformulation de la loi.

Parlement placé dans une situation concurrentielle, fin du monopole de production de la loi.
Il n’est plus le seul à pouvoir déterminer les contours de l’intérêt général.
= par le gouvernement, la décentralisation et droit communautaire.


Certains parlent de révolution juridique mais est ce que ça a réellement été le cas ?

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I ) La délimitation constitutionnelle du domaine de la loi

Entraine la remise en cause du dogme de la souveraineté parlementaire :
En 1958 on revisite la conception même de la loi telle qu’elle avait été développée sous les IIIème et IVème Républiques.
Sous la IIIème république, la loi est définie exclusivement comme l’œuvre du parlement, son domaine et illimité. Certaines matières lui sont réservées mais aucunes ne lui sont interdites.
Donc sous la IIIème république la définition de la loi est purement formelle, organique, peu importe le contenu, la loi est la loi uniquement parce qu’elle est l’œuvre du Parlement.
Cette loi parce qu’elle est l’œuvre du souverain ne peut faire objet d’un contrôle du souverain (article 6 DDHC) dans cette logique là, d’où le rejet du conseil constitutionnel qui pourrait contrôler la constitutionnalité des lois.
A partir de la notion d’exécution des lois, à la fin de cette république, on voit se développer la pratique des décrets-lois non prévus par la constitution. (=parlement qui délègue son pouvoir au gouvernement). Se faisant, le Parlement remet en cause la souveraineté parlementaire, et c’est pour lutter contre cette pratique qui remet en cause la souveraineté parlementaire que le constituant de la IVème république interdit la pratique des décrets-lois.
IVème république > article 13 de la Constitution de 1946 : « L’assemblée nationale vote seule la loi, elle ne peut déléguer ce droit »
Mais pour contourner cette règle : loi du 17 aout 1948 introduit une notion nouvelle, celle des matières ayant par leur nature un caractère règlementaire.
C’est l’origine de la notion de domaine règlementaire, consacré par l’article 37 de la Constitution.
En 1948 c’est la loi et non la constitution qui détermine l’étendue des matières règlementaires. En conséquence, le parlement ne perd plus le droit d’intervenir dans les matières règlementaires, il peut modifier l’étendue des matières règlementaires par une loi. Ceci n’est plus possible en 1958.
Autre différence : la loi de 1948 énumère limitativement les matières qui sont du domaine règlementaire, alors qu’en 1958 on délimite les matières (article 34) qui sont du domaine de la loi.
C’est le législateur qui dispose de la compétence d’attribution, et le pouvoir exécutif à la compétence de droit commun.
Le pouvoir règlementaire est dit subordonné quand il intervient pour exécuter la loi, dans le respect de la loi. Si le parlement ne respecte pas cela alors le recours devant le juge administratif est possible.
Pouvoir règlementaire autonome lorsqu’il intervient sur le fondement de l’article 37, en dehors des matières listées à l’article 34.
La loi n’est plus définie par un critère exclusivement formel, mais par la combinaison de deux critères. Un critère formel : la loi reste votée par le parlement, mais aussi un critère matériel : la loi fixe les règles concernant telle ou telle matière.
La loi ne peut plus intervenir dans n’importe quel domaine : problème de délimitation, de frontières juridiques entre les deux domaines.
C’est pour l’essentiel le conseil constitutionnel qui va être appelé à jouer ce rôle de gardien avec le contrôle de constitutionnalité des lois.


II) Un déclin de la loi sous la Vème république ?

Le législateur dispose désormais d’une compétence d’attribution. Son champ d’action limité par l’article 34, mais délimitation ne signifie pas forcément déclin.
En pratique, la délimitation est très difficile à établir. La frontière entre les articles 34 et 37 est assez floue. C’est le conseil constitutionnel qui devra clarifier les choses.
La jurisprudence de ce conseil démontre que le domaine du législatif reste large, et que l’empiètement sur le domaine règlementaire reste possible. De plus l’autonomie du pouvoir règlementaire prétendue doit être fortement relativisée. Depuis la réforme constitutionnelle de 2008 semble émerger un droit parlementaire déclaratoire. Tout cela vient ainsi nuancer le déclin.

a) Un domaine législatif qui reste très large

A de nombreuses reprises le conseil constitutionnel a censuré le législateur dans « une matière qui n’est pas au nombre de celles réservées à sa compétence par l’article 34 de la Constitution ». Mais il faut dépasser le texte constitutionnel et regarder la jurisprudence après plus de 50 ans de pratique.
Cette jurisprudence montre que le conseil constitutionnel ne s’est pas laissé enfermer par le dispositif des articles 34 et 37 de la Constitution. Ceci n’a pas empêché le Conseil Constitutionnel d’étendre matière par matière le domaine de la loi.
Ce n’est qu’à moitié surprenant, René Capitant l’avait déjà remarqué possible en 1948.

Le Conseil Constitutionnel va étendre le domaine législatif par 3 techniques :

– Extension à d’autres articles de la constitution ; Décision du 2 juillet 1955, le Conseil Constitutionnel accepte de définir le domaine de la loi par rapport à l’article 34 de la Constitution et aussi par rapport à des articles de DDHC 1789.

– Elargissement du contenu de l’article 34 de la constitution ; par exemple le Conseil Constitutionnel va donner une interprétation particulière de l’article 37 al 2 de la Constitution pour les textes de forme législative intervenus en matière règlementaire. Le gouvernement peut modifier les textes de forme législative qui sont du domaine règlementaire. Technique essentielle de délimitation du domaine législatif et règlementaire, mais en réalité le Conseil Constitutionnel ne va pas interpréter les choses dans ce sens là. Il va faire prévaloir le fait majoritaire sur une lecture stricte de la répartition constitutionnelle des matières : dans la logique du fait majoritaire le législateur peut sortir de l’enclos de l’article 34 de la Constitution et intervenir dans le domaine règlementaire avec la complicité de l’exécutif.

– Approfondissement des matières de l’article 34 de la constitution; depuis 1958 le texte de l’article 34 fut modifié à de nombreuses reprises, des nouvelles matières sont apparues, tirées de la réforme de juillet 2008 où l’on a ajouté dans la liste des matières prévues à l’article la liberté, le pluralisme et l’indépendance des médias, qui constituent aussi une compétence du législateur.

b) Un empiètement possible sur le domaine règlementaire

Le Conseil Constitutionnel a été amené à prendre position sur le problème de l’inconstitutionnalité d’une loi empiétant sur le domaine règlementaire à propos d’une amende pénale à fixer.
Le juge a clairement affirmé dans une décision du 30 juillet 1982 qu’une loi peut statuer dans le domaine du règlement sans être nécessairement entachée d’inconstitutionnalité dès lors que le gouvernement ne s’y oppose pas par les procédures prévues par la constitution (cf. article 41 de la Constitution le gouvernement peut s’opposer à des amendements).
La conséquence est qu’avec une telle position le Conseil Constitutionnel ruine définitivement la thèse de la définition matérielle de la loi. Si une loi peut comporter des dispositions règlementaires sans être pour autant inconstitutionnelle, c’est que la loi se définie simplement comme l’acte voté par le Parlement selon certaines formes mais sans prendre en considération la matière sur laquelle porte cet acte.

c) L’autonomie relative du pouvoir règlementaire

Evolution de la jurisprudence du Conseil Constitutionnel tend vers une réduction du pouvoir règlementaire fondé sur l’article 37 de la Constitution.
Il faut cependant constater pour nuancer cela que le recours aux ordonnances de l’article 38 de la Constitution, permet dans une certaine mesure de compenser cette évolution. Compensation très relative car il faut l’accord du parlement même avec article 38 de la Constitution.
Conséquences, il existe toujours un pouvoir règlementaire autonome mais c’est cette autonomie qu’il faut relativiser.

– La réduction progressive du pouvoir règlementaire fondé sur l’article 37 de la Constitution :
Problème entre délimitation article 34 et 37 de la Constitution : ce n’est pas juste une distinction entre deux domaines, c’est la question de la nature des rapports enter la norme législative d’un côté et norme règlementaire de l’autre > hiérarchie au profit du législatif ou rapport d’autonomie au profit du pouvoir règlementaire ?
Existe-t-il vraiment un pouvoir règlementaire autonome ?
Après 50 ans de pratique il semble bien que le mécanisme des articles 34 et 37 de la Constitution n’était pas aussi novateur avec le droit positif antérieur.
Les matières listées à l’article 34 de la Constitution constituent l’essentiel des matières qui touchent à la vie de l’Etat. Rares sont les matières qui échappent à toute intervention législative.
Deux matières : la répartition des compétences entre les diverses autorités gouvernementales et la procédure civile et administrative contentieuse.

– Ordonnances de l’article 38 de la constitution :
(Al.1) mesures normalement du domaine de la loi : constitutionnalisation des décrets lois que l’on trouvait avant. Cette possibilité constitue une extension du champ d’intervention du pouvoir règlementaire. Mais ce n’est possible que s’il y a l’accord du parlement. Loi juillet 2008 prévoit que les ordonnances prises par le gouvernement doivent être ratifiées de manière expresse pour avoir valeur de loi.

d) Vers un « droit déclaratoire » ? Les résolutions parlementaires

Autre innovation de la réforme de 2008 avec un droit déclaratoire : article 34-1. Résolutions parlementaires, nouveau moyen d’action des sénateurs et députés.
Les résolutions parlementaires ont une histoire compliquée, elles ont été utilisées sous les IIIème et IVème républiques mais elles servaient à mettre en cause la responsabilité du Parlement, entrainant une instabilité ministérielle dont on ne veut plus en 1958. Donc le constituant de 1958 décide de refuses le principe des résolutions car on s’en méfie.
Il faudra attendre 1992 pour qu’une première réforme constitutionnelle permette au Parlement de prendre des résolutions concernant la politique de l’union européenne.
Réforme de juillet 2008 donne aux résolutions des nouvelles dimensions, article 34 -1 de la Constitution : les assemblées peuvent voter des résolutions pour exprimer des avis, recommandations, des vœux sur tel ou tel sujet, mais le dispositif est bien encadré > idée qu’il ne faudrait pas retomber dans les travers des IIIème et IVème républiques.
Pas de caractère contraignant des résolutions.