Le bail commercial

Le bail commercial : définition et élaboration

Le commerçant peut être propriétaire du local dans lequel il exerce son commerce. Dans ce cas, il n’y a pas de bail commercial. Dans cette hypothèse, on estime que les biens meubles corporels affectés à l’activité commerciale (chaises, étagères etc.) deviennent immeubles par destination, car se trouvant incorporés au local, objet du droit de propriété du commerçant.

La vente de fonds de commerce se fera dans cette perspective dans le local commercial et sans le mobilier s’y trouvant incorporé. Ce qui impose une vigilance particulière à l’acquéreur du fonds de commerce. Cependant, dans les cas les plus fréquents, le commerçant est locataire de son local commercial. On parle en cette hypothèse de bail commercial. Ce bail est l’un des éléments les plus importants du fonds de commerce, venant juste derrière la clientèle qui est l’élément le plus important.

Le bail commercial déroge au droit commun du louage et au droit des baux d’immeubles. En effet, à l’issue du bail commercial, le commerçant dispose d’un droit quasi automatique au renouvellement du bail commercial. En cas de refus de renouvellement par le propriétaire, le locataire commerçant bénéficie d’une indemnité d’éviction. C’est ce qu’on appelle la propriété commerciale. En outre, le commerçant peut librement céder son bail à un autre commerçant.

Section 1 : Le particularisme du statut des baux commerciaux

Ce particularisme tient à des considérations économiques à l’origine d’une législation spécifique au bail commercial. Cette législation spécifique procède d’une évolution longue, ayant abouti à des règles faisant une grande place à des dispositions impératives généralement favorables au locataire commerçant.. Nous étudierons la genèse et l’élaboration du bail commercial. L’exécution du bail commercial (son loyer, la durée, les obligations des parties…) et le principe de renouvellement du bail seront étudiés dans un autre chapitre.

  • 1 : La genèse du bail commercial

Avant la première guerre mondiale, le bail consenti à un commerçant pour l’exercice de son commerce ne bénéficiait d’aucun statut particulier. Depuis la loi du 30 juin 1926, la législation a été toujours plus favorable au commerçant. Ils ont obtenu en outre le droit d’exiger une indemnité d’éviction en cas de refus de renouvellement du bail commercial.

Le décret du 30 septembre 1953 : texte modifié à diverses reprises maintient ce statut en posant un régime complet du bail commercial.

Aujourd’hui, les dispositions législatives relatives au droit du bail commercial se trouvent à l’article L. 145-1 du code de commerce.

Dans l’ensemble, le régime du bail commercial est très favorable au commerçants locataires.

  • 2 : Le caractère d’ordre public du statut des baux commerciaux

Une règle est dite d’ordre public quand les sujets de droit ne peuvent y déroger par des conventions particulières. Elles s’opposent aux règles supplétives. La plupart des règles régissant le bail commercial sont d’ordre public.

Un professionnel non commerçant et son propriétaire peuvent par choix, se soumettre au régime du bail commercial. Le bail commercial s’applique de plein droit au bail conclu entre un propriétaire et un commerçant (ou artisan) Un professionnel qui n’est ni un artisan, ni un commerçant (exemple, profession libérale) peut cependant choisir avec son propriétaire de se soumettre au régime du bail commercial.

Arrêt de principe, Cour de cassation, 17 mai 2002.

J’ai trouvé sur internet une fiche qui résumait bien le régime juridique du bail commercial, j’ai trouvé sur un site cette excellente fiche technique « comprendre le bail commercial » que vous trouverez sur le site : http://www.trait-union.info/Comprendre-le-bail-commercial_a1191.html – si le site souhaite sa suppression : cours-de-droit@outlook.com

Section 2 : L’élaboration du bail commercial

Le régime des baux commerciaux est dense. Une ligne directrice traverse la matière : protection assurée au locataire commerçant. Droit au renouvellement du bail que la loi confère au locataire. Le bailleur qui refuse se renouvellement s’expose au payement d’une lourde indemnité d’éviction.

Le bail commercial demeure fondamentalement un contrat (quoique déséquilibré en faveur du locataire et au détriment du propriétaire)

Elaborer un contrat c’est le négocier et le conclure. Les parties qui s’engagent doivent savoir ce qu’elles veulent mettre dans ce contrat. Il en est ainsi du propriétaire et du locataire commerçant dans le bail commercial. Encore faut il qu’il connaisse le champs d’application du statut des baux commerciaux (§1). Après quoi ils s’engageront éventuellement dans la formation d’un bail commercial (§2)

  • 1 : Le champs d’application du statut des baux commerciaux

Pour qu’un contrat de bail immobilier revête la qualification bail commercial.

A) Conditions tenant à l’acte juridique lui-même

Le bail commercial est un véritable bail dans lequel le propriétaire accorde au locataire commerçant ou artisan la jouissance paisible du local destiné au commerce ou à l’artisanat dans une durée déterminée moyennant payement de loyers périodiques.

Ne sont donc pas des baux commerciaux des conventions voisines de longue durée.

B) Conditions tenant à l’affectation de l’immeuble

1- La construction

Dans le cas où l’emplacement serait compris dans un bâtiment fixe et couvert, l’entreprise ainsi abritée ne dispose pas a priori d’une clientèle propre dans la mesure où son activité se trouve incluse dans celle d’un fonds de commerce dit principal.

La jurisprudence a donc refusé le bénéfice du statut de bail commercial aux emplacements utilisés par un agent économique, emplacement situé dans le local servant de fonds de commerce d’un agent économique qui s’en sert à titre principal.

Si l’emplacement est construit et couvert mais complètement enclavé à l’intérieur d’un autre local commercial, l’occupant de l’emplacement doit pouvoir bénéficier d’un véritable bail commercial mais à condition de prouver qu’il dispose d’une autonomie de gestion mais aussi d’une clientèle indépendante.

Dès lors que le propriétaire d’un fonds de commerce exercé dans un local ouvert et fixe situé à l’intérieur d’un local principal utilisé par un autre commerçant veut se prévaloir du statut des baux commerciaux, il faut qu’il prouve deux choses :

  • -Autonomie de gestion
  • -Clientèle indépendante

Exemple : fleuriste occupant à l’intérieur d’un supermarché, un local ouvert et fixe.

2- L’affectation de la construction

Il est nécessaire que l’immeuble ou le local soit affecté, réservé, à l’exercice d’une activité commerciale ou artisanale. Si le local comportait une double affectation commerciale et d’habitation, son régime serait indivisiblement commercial. Le tout relèverait du bail commercial. Quant aux locaux accessoires (hangar, entrepôts, garage etc.) ne sont pas des baux commerciaux tant que la clientèle n’y est pas reçu.

C) Conditions tenant aux locataires

La loi admet au bénéfice du statut des baux commerciaux, l’entreprise commerciale ou artisanale (1) mais exclue les entreprises civiles non artisanales (2)

1- Admission des entreprises commerciales et artisanales

S’agissant du bailleur, la loi n’exige aucune qualité particulière pour être bailleur commercial. Tout propriétaire d’un local susceptible d’accueillir une activité artisanale ou commerciale peut consentir un bail commercial.

Concernant le locataire, il doit revêtir trois caractères :

  • 1e caractère : Il doit être commerçant ou artisan. L’industriel est assimilé au commerçant en fait de bail commercial.
  • 2e caractère : Il faut que ce commerçant ou cet artisan soit propriétaire du fonds de commerce ou propriétaire du fonds artisanal.
  • 3e caractère : Le commerçant ou l’artisan doit exercer son activité dans le local loué.

Le régime du bail commercial s’applique donc pareillement au commerçant, artisan et industriel, peu importe qu’il exerce son activité en entreprise individuelle ou en société. Le régime des baux commerciaux opère de la même manière. Il s’applique également aux EPIC. De même qu’aux locataires gérants de fonds de commerce à condition que ces locataires gérants disposent d’une autonomie de gestion sur le fonds de commerce.

Cependant, la jurisprudence dénie de façon discutable le bénéfice du statut des baux commerciaux aux sociétés commerciales ayant un objet civil, comme les sociétés d’avocats à forme commercial. Ou encore les sociétés commerciales à objet civil, elles sont assimilées par la loi à des entreprises civiles.

2- Exclusion des entreprises civiles non artisanales

L’entreprise civile non artisanale qui est locataire d’un local destiné à l’exercice de son activité relève en principe du statut des baux professionnels. Ces baux professionnels dont le régime est assez proche des baux commerciaux sont régis par 57 A de la loi du 22 décembre 1986. Pour bénéficier de ce statut : il faut être une personne physique ou morale et faire une activité exclusivement professionnelle. S’applique alors le statut très largement d’ordre public, des baux professionnels.

Les activités libérales entrent par exemple dans ce cas de figure. De même, une société civile immobilière par exemple ne bénéficie pas du régime des baux commerciaux car il s’agit d’une personne civile exerçant en principe une activité civile non artisanale.

Cependant, le bailleur et le locataire peuvent abandonner le statut des baux professionnels pour se soumettre par convention au régime des baux commerciaux. Pour se soumettre volontairement au statut des baux commerciaux, bailleurs et professionnels civils non artisans, doivent satisfaire deux conditions :

– Les parties ne doivent pas chercher dans leur convention à éluder l’application d’un autre statut impératif. Exemple : s’agissant d’un fonds rural, le bailleur et le métayer ne peuvent éluder le statut des baux ruraux qui est impératif pour se soumettre au statut des baux commerciaux.

– Les parties doivent extérioriser dans un accord de volonté leur intention de placer leur bail dans le régime du bail commercial. Il faut une expression de volonté expresse des deux parties pour dire qu’elles se soumettent au bail commercial.

Quand les parties décident de soumettre le local au régime des baux commerciaux, peuvent-elles éliminer par convention, les dispositions d’ordre public du statut des baux commerciaux ? Dans un arrêt de principe, la cour de cassation a décidé : en cas de soumission conventionnelle au décret du 30 septembre 1953, relatif au bail commercial : sont nulles les clauses contraires aux dispositions du texte susvisé relatives aux congénères. 17 mai 2002.

Arrêt de principe de la cour de cassation : le contrat litigieux ne peut éluder l’acte extrajudiciaire, c’est à dire l’acte d’huissier, dans la délivrance du congé ce qui revient à dire que la soumission volontaire au statut des baux commerciaux contraint les parties à se plier aux règles d’ordre public des baux commerciaux sans pouvoir y déroger par contrat.

Les auteurs ont critiqué cette solution qui réduirait sans raison valable le champs de la volonté contractante. Il y aurait en effet deux sortes d’ordre public en la matière :

– Ordre public légal s’imposant sans réserve aux personnes soumises impérativement au régime du bail commercial : le commerçant et l’artisan

-Ordre public conventionnel qui permet à celui qui se soumet volontairement au régime du bail commercial de pouvoir déroger aux règles d’ordre public du bail commercial.

  • 2 : La formation des baux commerciaux

A) L’absence de formalisme

Le bail commercial est soumis aux règles applicables au contrat en général mais aussi aux règles régissant les baux en général : 1708 et suivants du code civil. Et à des règles spécifique contenues dans le code de commerce (L. 145-1 et suivants)

Le bail commercial dépasse la distinction faite en droit commun du louage entre le bail écrit et le bail verbal. Le bail commercial est toujours écrit sans qu’une disposition légale l’exige. L’écrit facilite la transmission du bail commercial. L’écrit facilite également la preuve à l’encontre d’un commerçant mais pas d’un artisan qui est une personne civile.

On aborde la question de la nature juridique du bail commercial.

A) Nature juridique du bail commercial

La jurisprudence estime que le bail commercial est un acte de commerce, même si le bailleur n’est pas commerçant. C’est en effet un contrat qui se rattache étroitement à l’exercice de l’activité commercial pour laquelle il est indispensable. C’est donc la théorie de la commercialité par accessoire qui permettrait d’expliquer cette commercialité.