Le détournement de gage ou d’objet saisi

Le détournement de gage et d’objet saisi

Le détournement de gage ou d’objet saisi est une appropriation frauduleuse qui consiste à empêcher volontairement la représentation d’un objet donné en gage ou placé sous main de justice en garantie de la créance d’un tiers.

CODE PÉNAL ; ARTICLE 314-5 et -6 : Le fait, par un débiteur, un emprunteur ou un tiers donneur de gage, de détruire ou de détourner l’objet constitué en gage est puni de trois ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende. La tentative de l’infraction prévue au présent article est punie des mêmes peines.

Ces infractions peuvent être considérées comme participant de la catégorie des détournements, puisque en principe l’atteinte va être portée par une personne qui a le bien entre ces mains, constituant le caractère commun du détournement.

A)- Les éléments constitutifs du détournement de gage et d’objet saisi :

1°)- Les éléments matériels du détournement de gage et d’objet saisi

Une destruction ou un détournement, la seule différence porte sur leur objet.

a)-L’objet de l’élément matériel :

Pour le détournement de gage, cet objet doit être un bien donné en gage.

Ce qui suppose l’existence d’un contrat de gage.

Hypothèque de la nullité du contrat de gage :

Nullité constatée après le détournement, caractère rétroactif.

L’effet sur les qualifications pénales de la nullité des actes juridiques pris en compte au titre de la qualification de l’infraction pénale.

La jurisprudence est constante dans ce domaine, se prononçant pour l’indifférence de la nullité quant à la qualification pénale : le détournement s’apprécie au moment où il est commis, ce qui importe est que l’auteur ait détourné le bien, alors que le contrat n’avait pas encore été reconnu comme nul par la jurisprudence.

Crim : l’interprétation du contrat peut être valablement faite par les juges du fond.

Le gage :

Initialement, le délit avait été conçu pour s’appliquer au gage avec dépossession, se justifiant par le fait que le débiteur qui reprenait la chose entre les mains du créancier, reprenait sa propre chose, le délit se rapprochait plus du vol que de l’abus de confiance.

Puis apparition du gage sans dépossession, la Crim a considéré que le délit s’appliquait au gage sans dépossession, et punissait à ce titre le débiteur qui détériorait ou détruisait le bien. Crim ; 1/03/1909.

Ce délit ne s’applique pas aux privilèges légaux.

Ex : le locataire déménage ses meubles de l’immeuble donné en location, alors même que selon le droit ces meubles garantissent le paiement des loyers, et le bailleur a la possibilité de se payer sur les meubles.

La Crim a exclu du champ légal ce privilège, juste fondement contractuel.

L’objet saisi :

CODE PÉNAL 314-6.

Le délit suppose une procédure de saisie, qui porte exactement sur le bien qui va être délivré.

Crim : le placement sous main de justice en vertu d’un acte de l’autorité publique.

Le délit va s’appliquer indistinctement à tous les types de saisies.

Saisies exécution, arrêt, conservatoire, et même étendu aux séquestres judiciaires : une juridiction confie une chose à la garde d’une personne, en l’attente d’une décision qui va se prononcer définitivement sur son attribution.

En revanche il n’y a pas application du délit pour un bien qui fait l’objet d’une saisie par un JI dans le cadre de son information judiciaire, au motif que cette saisie a pour objet la manifestation de la vérité, et non la protection des intérêts du créancier.

Même indifférence aux causes éventuelles de nullité de la saisie.

b)- Les actes matériels :

Deux actes matériels alternatifs : destruction ou détournement.

La destruction n’a posé aucune difficulté d’interprétation, elle réalise matériellement l’infraction, sous a seule réserve qu’elle soit complète. Une simple détérioration n’est pas suffisante.

Le détournement : même définition que dans l’abus de confiance, il ne correspond pas à un acte déterminé, mais plutôt à un résultat entendu comme une atteinte aux droits du créancier.

C’est la constatation de ce résultat : l’acte commis par l’auteur porte atteinte aux droits du créancier.

Ex : défaut de représentation, refus de restitution, abandon de la chose. Le contentieux le plus abondant est celui des gages automobiles quand l’achat d’une voiture à crédit, détournement lorsque abandon du véhicule surla voie publique MANQUE

Omission d’informer le vendeur de son changement de domicile.

La caractérisation de cet élément matériel, va toujours se faire sous la condition de l’élément intentionnel. Ce qui prédomine toujours est l’élément intentionnel, l’élément matériel semble plus avoir une fonction probatoire que constitutive.

Saisie

Crim : détournement constitué par tout acte qui a pour effet d’anéantir ou d’entraver le contrat privatif qu’un créancier tient de la saisie.

Ex : vente du bien, le déplacement, abandon, sa mise en gage auprès d’un tiers.

Il va être nécessaire que le détournement soit postérieur à la saisie.

2°)- L’élément intentionnel du détournement de gage et d’objet saisi :

Les intentions ont un contenu identique, sous la réserve qu’elles ne s’établissent pas de la même façon.

Intention : le fait pour l’auteur d’avoir agi en connaissance du gage et de la saisie, et d’avoir eu conscience de la matérialité de l’acte qu’il a accomplissait. Elle va s’établir a priori à partir de la matérialité du fait, suffisant pour le détournement du gage.

Dès lors qu’il accompli un acte qui matériellement fait obstacle au droit du créancier.

Le détournement de l’objet saisi: connaissance de la saisie. Elle doit être impérativement constatée par les juges du fond, pouvant s’appuyer sur la notification de la saisie, elle vaut connaissance de la saisie, permettant de caractériser l’élément matériel.

Mais le juge peut aussi établir une connaissance implicite de la saisie, en l’absence de notification, tous les éléments implicites qui établissent la connaissance de la saisie (exécution volontaire.

B)- La répression du détournement de gage et d’objet saisi :

Les peines :

Dans les deux cas, elles sont identiques : 3 ans d’emprisonnement, et 375 000€ amende.

Pas de circonstance aggravante.

Mais la tentative est punissable (gage avec dépossession).

Régime répressif :

Les deux infractions suivent le même régime dans la mesure où elles ne peuvent être commises que par la propriétaire du gage ou le propriétaire de l’objet saisi.

Les tiers qui les commettent sont coupables de vol s’ils s’en emparent, ou d’abus de confiance s’ils les détenaient.

Dans le gage avec dépossession, le créancier qui va détenir le gage ne commet pas un délit de détournement, mais un abus de confiance. Alors que dans la même situation, le créancier qui reprend sa chose, commet un détournement : on ne vole pas sa propre chose.

Le délit ne s’applique pas si le détournement est le fait d’une personne qui n’est propriétaire de l’objet saisi.

Personne morale : traditionnellement, la jurisprudence décide que l’infraction devait être attribuée au représentant de la personne morale, mais la personne morale peut se voir imputer l’infraction. Le représentant de la personne morale commettra l’acte matériel.