Le pouvoir règlementaire : quels titulaires? quelles mesures?

Les titulaires du pouvoir règlementaire et les mesures du pouvoir règlementaire?

Lorsqu’on emploi «pouvoir réglementaire» on entend évidemment la capacité à user du pouvoir réglementaire c’est-à-dire du pouvoir dont disposent les autorités exécutives pour édicter des actes exécutoires, de portée générale et impersonnelle. Ce pouvoir réglementaire est opposable au pouvoir législatif puisqu’il permet d’imposer des textes ayant une valeur légale sans toutefois passer par le Parlement.

Le pouvoir réglementaire s’entend de l’édiction de règles de caractère général et impersonnelles destinées à régir une situation donnée. En ce sens les actes réglementaires s’opposent aux décisions de caractère individuel quant à leurs destinataires et aux lois quant à leur nature. La question fondamentale demeure donc de savoir quelles sont les autorités qui ont compétence pour édicter de telles normes. Si il n’existe qu’un seul législateur, il existe en revanche une pluralité de détenteurs du pouvoir règlementaire.

Paragraphe 1 – le pouvoir réglementaire de source constitutionnelle

– avec la Révolution et ses principe (notamment la séparation des pouvoir), il est inconcevable de donner à l’exécutif les moyens de produire le droit (la loi est la volonté général s’exprimant à travers l’Assemblée Nationale), mais l’impossibilité du législateur de prévoir toutes les situations nécessitent un aménagement => Constitution 22 Frimaire an VIII officialise un pouvoir réglementaire qui sera repris par les régimes successifs et dont le domaine sera élargi par la Constitution 1958

I – Les détenteurs du pouvoir réglementaire général

– généralement confié à une seule autorité (IIIe & IVe République), le pouvoir réglementaire est partagé sous la Ve République

A/ Le partage constitutionnel de la compétence réglementaire générale entre Premier Ministre et Président de la République

– le Premier Ministre détient une compétence de principe en vertu de 21 Constitution

– le Président de la République signe quant à lui en vertu de 13 Constitution les décrets pris en Conseil des Ministres

  1. Les décrets délibérés en Conseil des Ministres

– un décret peut être délibéré en Conseil des Ministres en raison de la Constitution/loi/par opportunité politique : Conseil d’Etat ne distingue pas ces cas : seul le Président de la République est compétent pour signer un décret en Conseil des Ministres (CE 1992, Méyet), pour le modifier ou l’abroger (mais CE 1996, Collas admet qu’un tel déc. puisse prévoir qu’un décret simple pourra le modifier)

  1. Les décrets non délibérés en Conseil des Ministres

– le Premier Ministre est l’autorité compte, mais le Président de la République peut apposer sa signature (considérée surabondante et non illégale), seule le contreseing du Premier Ministre étant regardé comme la signature officielle : CE 1962, Sicard

B/ L’exclusion des ministres

– traditionnellement, aucun pouvoir réglementaire général n’est confié aux ministres <= dans le cas contraire, la procédure de contreseing du Premier Ministre ne lui permettrait plus d’assurer la cohérence de l’action du Gouvernement => si un texte ne donne pas permission au ministre, il y a incompétence

– exemples jurisprudentiels censurant des mesures général prises par un min. sans qu’un texte le lui autorise sont variés : CE 1961, UNAPEL (ministre de l’éducation fixe des conditions de remboursement des frais de scolarité), CE 1969, Société distillerie Brabant, CE 1989, Halbwax (ministre de l’intérieur réglemente l’accès aux réunions syndicales)

II – Les trois grands types de mesures réglementaires générales

A/ Les règlements d’exécution des lois

– une loi peut ne prévoir que des règles général /principe généraux<= exécutif vient en préciser les détails (fion tradition du pouvoir réglementaire) => l’application d’une loi peut donc dépendre d’un règlement d’application

– avant ce règlement, le juge peut être amené à déterminer si les dispositions législatives se suffisent à elles-mêmes ou non => CE 2003, Creton

– si le pouvoir réglementaire ne prend pas un règlement d’application, il ferait implicitement obstacle au fonctionnement du pouvoir législateur (atteinte à la séparation des pouvoir) : CE 1951, Union des anciens militaires…, pose un principe d’obligation pour le pouvoir réglementaire de prendre les mesures nécessaires à l’application de la loi, mais ne prévoit pas de sanction <= CE 1962, Dame Kevers-Pascalis annule le refus du Premier Ministre d’édicter un règlement nécessaire à l’application d’une loi et un refus injustifié sera sanctionné

CE 1964, Dame veuve Renard accepte le principe de réparation d’un préjudice occasionné par le retard abusif de l’Etat (faute) pour prendre des mesures d’application

– la jurisprudence considère maintenant que les mesures doivent être prises dans un «délai raisonnable» => les services ministériels élaborent à la fois le projet et le règlement d’application

– le Juge Administratif se reconnaît en plus de son pouvoir d’annulation de l’acte illégal, un pouvoir d’injonction à l’Administration de prendre les mesures qu’impose l’annulation de l’acte dans le délai qu’il fixe : CE 1996, Association lyonnaise de protection des locataires

– Conseil d’Etat et Conseil Constitutionnel ne font pas la distinction posée à 34 Constitution entre les lois posant des règles dans les matières définies et les lois énonçant des principe fondamentaux : CE 1961, Daunizeau et DC 1961, droits civiques

B/ Les règlements dits « autonomes »

DC 1982, Blocage des prix et des revenus => l’empiètement de la loi de 34 Constitution dans le domaine réglementaire de 37 Constitution n’est pas inconstitutionnel

– la place des règlements autonomes est moindre que celle prévue à l’origine par les constituants de 1958

C/ Les ordonnances de l’article 38 de la Constitution

– sous la IIIe République, des décrets-lois permettent au législateur d’autoriser temporairement le Gouvernement à prendre des mesures législateur (pratique interdite sous la IVe mais quand même utilisée)

– Article 38 Constitution 1958 prévoit une habilitation parlementaire du Gouvernement pour prendre par ordonnance des mesures visées à article 34 Constitution <= la loi d’habilitation prévoit un délai au cours duquel le Gouvernement peut édicter des ordonnances, et à l’issu duquel il doit déposer un projet de ratification des ord. (Sinon, les ordonnances sont caduques) => S’il y a un dépôt sans adoption du projet, les ordonnances gardent une nature réglementaire ; s’il est adopté, les ordonnances deviennent une loi (nature législateur et non réglementaire)

– la loi d’habilitation doit définir, selon le Conseil Constitutionnel, de manière relativement précise le champ d’application des ordonnances à venir (elle ne doit pas être très général)

– durant le délai imparti, les ordonnances doivent être prises en Conseil des Ministres après avis du Conseil d’Etat : elles sont signées par le Président de la République et contresignées par le Premier Ministre et les min. concernés ; en vigueur dès leur publication au Journal officiel

– avant la révision Constitutionnelle 23 juil. 2008, Conseil d’état et Conseil Constitutionnel admettaient une ratification implicite (une loi modifiant une disposion d’une ordonnance était considérée ratifier toute l’ordonnance) ; après, seule une ratification explicite peut transformer une ordonnance en loi => soit le projet de loi est voté par le Parlement (ratification explicite) ; soit à l’occasion d’une loi, le législateur manifeste clairement sa volonté de ratifier l’ordonnance

III – Le caractère administratif reconnu par hypothèse à l’action réglementaire

– les règlements autonomes et les ordonnances peuvent être assimilés à des lois en raison de leur caractère général et en raison de leur caractère initial (ne viennent pas appliquer mais poser/produire des règles)

– ces actes émanent généralement d’autorités en partie politique (Président de la République (élu au Suffrage Universel Direct) et/ou Personne Morale)

– ces actes devraient alors échapper au contrôle du JA, mais la tradition.fr accorde un traitement législif à la seule loi Parlementaire <= tradition combinée avec le souci du Juge Administratif de soumettre au droit l’essentiel de l’action exécutive=> les règlements Autonomes /ordonnance sont donc soumises au contrôle du Juge Administratif.

A/ Les règlements autonomes

– prévus à 37 Constitution => pour le Conseil constitutionnel, une loi de 34 Constitution peut intervenir dans domaine de 37 Constitution auquel cas, le pouvoir réglementaire est dans l’obligation de respecter cette loi (CE, 27 fév. 1970, Dautan)

– le gouvernement. voulant écarté cette disposition doit délégaliser la loi

– le Juge Administratif est compétent pour contrôler un règlement autonome et lui appliquer le droit Administratif, tant qu’une loi n’est pas intervenue dans la matière qu’il régit (CE, 26 juin 1959, Syndicat général des ingénieurs conseils)

B/ Les ordonnances

– interviennent dans les domaines de 34 Constitution (<= situation complexe) => CE retient ici le caractère organique (et non matériel) de l’auteur : autorité exécutive, donc acte administratif, du moins tant qu’elles sont appliquées en tant qu’ordonnance. (CE 24 nov. 1961, Fédération Nationale des Syndicats de Police)

jurisprudence d’opportunité du Conseil d’Etat dans la mesure où si il ne contrôlait pas les ordonnances, aucun juge ne pourrait le faire <= vide de la Constitution => le Conseil Constitutionnel contrôle la Constitutionnalité d’une loi (compétence d’attribution)

– le contrôle du Juge Administratif s’arrête avec la transformation d’une ordonnance en loi

Paragraphe 2 => les autres sources du pouvoir réglementaire

I – le pouvoir réglementaire de source législative

– la loi peut décider de confier un pouvoir réglementaire à une autorité administrative (AA) : l’habilitation doit être limitée et n’est pas jugée inconstitutionnelle : DC 17 janv. 1989, CSA vient rétroactivement avaliser la pratique de l’attribution de prérogative de réglementation et de sanction à des Autorité Administrative classiques (pouvoir réglementaire accordé à de nombreuses autorités locales)

– un décision peut habiliter un ministre d’un pouvoir réglementaire de précision des dispositions qu’il contient

– un pouvoir réglementaire peut être accordé à des personnes privées (fédération sportives nation)

– l’autorité doit respecter le champ de l’habilitation donnée : elle entacherait sa décision d’une incompétence

II – Les sources jurisprudentielles du pouvoir réglementaire

CE 1936, Jamart reconnaît aux différents chefs de service un pouvoir réglementaire pour prendre les mesures nécessaires au bon fonctionnement de son action => c’est un pouvoir d’organisation pouvant exister sans texte et inhérent à la fonction de chef de service

– ces mesures ont souvent un caractère purement interne au service : création d’organismes consultatifs aidant à la prise de décision ; mesures venant compléter le statut des agents ; organisation du droit de grève pour assurer notamment un service mini. (CE 1950, Dehaene)

– certaines mesures peuvent intéresser directement les usagers : interdiction d’accès aux locaux du service à toute personne qui pourrait en troubler le fonctionnement (Jamart)