Le service public

Le service public.

Le service public est une mission remplie par l’administration ou sous sa responsabilité dans le but de satisfaire l’intérêt général. Les activités de service public peuvent revêtir des formes extrêmement variées et la notion d’intérêt général doit être envisagée de manière circonstancielle. En effet, l’intérêt général est souvent fonction de circonstances particulières de temps et de lieu.

La pierre angulaire de l’administration est le service public. C’est une notion évolutive car elle est liée étroitement aux fonctions évolutives de l’état. (état gendarme, puis providence).

Chapitre 1. La construction et la dilution de la notion de service public.

Désormais le rôle de l’état est celui d’un régulateur.

Le droit administratif (DA) commence à se former vers la fin du 19ème siècle, et il faut à l’époque savoir quels sont ses critères.

Quel est le critère de partage, donc à quels actes il faut appliquer le droit privé et à quels autres il faut appliquer le droit public.

  • 1 le critère du droit administratif : le service public

On se rendait compte que l’action administrative ne devait pas être soumise au même droit que celui du droit privé. On s’est demandé quand appliquer un droit dérogatoire du droit commun et quand il fallait au contraire appliquer le droit privé.

Pour Hauriou le droit administratif doit se bâtir autour de la notion de service public. Il voit qu’il y a entre l’état et les individus des rapports inégaux et cela justifie l’application d’un droit dérogatoire qui est le droit administratif.

A partir de là il faut distinguer ce qui est un acte de puissance publique d’un acte de gestion de l’administration. En effet l’administration agit parfois comme un simple particulier et n’utilisant pas alors ses prérogatives de puissance publique, on considérait alors qu’il fallait appliquer le droit privé à ses actes de gestion. Par contre pour les actes qui interdisent, qui réglementent, l’administration et ses actes doivent être soumis à un droit dérogatoire.

Cette distinction pose cependant toujours des problèmes, car il y a des situations où cette distinction est plus difficile à établir. L’état prend en charge de plus en plus de nouvelles activités de service public. A l’époque où l’état était simplement un état gendarme, mais cela va devenir plus complexe lorsque ce rôle de l’état va évoluer. La notion de service public va se substituer à la notion de puissance publique. Pour Duguit, il faut appliquer un droit dérogatoire de droit commun chaque fois qu’il y un service public. La notion de service public devenant ainsi le critère de distinction.

L’autre théorie s’axe sur les buts de l’administration.

Arrêt Blanco Tribunal des Conflits 1873, arrêt Terrier Conseil d’état de 1903, arrêt Fetry 1908 et Therond 1910. Le juge ne fait de distinction entre acte de gestion et acte de puissance public, c’est désormais le service public qui impose que l’administration soit soumise au droit administratif.

  • 2. La crise de la notion de service public.

Cette notion va s’estomper avec la naissance des services publics industriels et commerciaux (SPIC). Cette notion est très importante et elle apparait avec l’arrêt du Tribunal des Conflits de 1921 (Bac d’Eloka). Le Spic s’oppose au Spa (service public administratif). Le SPIC c’est les activités marchandes économiques réalisées par l’administration qui ici fait autre chose qu’assurer le service public. Ceci est dû aux conséquences des guerres mondiales, pour assurer le ravitaillement, les transports, la reconstruction, qui sont des activités économique assurées par l’administration face à la défaillance du secteur privé en la matière. Mais les SPIC restent cependant des services publics. L’arrêt Bak d’Eloka fait apparaitre la notion de SPIC et le Tribunal des conflits dira qu’en cas de SPIC c’est le juge judiciaire qui intervient avec application du droit privé. Il y a donc ici des catégories de service public qui relèvent du droit privé et du juge judiciaire, c’est pourquoi on parle d’une crise, d’une dilution de la notion de service public.

Le juge applique ici le droit privé, car ce sont des activités qui relèvent du secteur privé à la base.

Une autre évolution contribue à cette dilution ; le juge va admettre que des personnes privées gèrent des SPA et dans ce cas c’est le juge judiciaire qui intervient avec parfois la participation du juge administratif (exemple des fédérations sportives qui sont considérées comme gérant un service public administratif, bien qu’étant des structures de droit privé – quand une fédération sportive inflige une sanction à un joueur dopé on considère alors que c’est une prérogative de service public qui sera lors contestable devant le juge administratif).

Le socle du droit administratif est cependant resté celui du service public, qui est la pierre angulaire du droit administratif. Le juge administratif a souvent justifié l’application du droit administratif en raison de la présence d’un service public.

Le juge prend en compte l’évolution de l’administration.

Chapitre 2. La notion classique de service public et sa confrontation à l’économie de marché.

  • 1. La notion classique.

De nos jours, le service public serait, selon un auteur, une invention politique. En effet cette notion est très liée au contexte politique mais aussi économique et social. Le droit administratif doit se voir et s’analyser à travers l’évolution de la société. I suit les évolutions de l’état et de la société (croissance démographique, allongement de la vie, disparition des frontières, déplacement de populations, problèmes environnementaux).

Définition du service public

De nos jours, le service public est définit comme une mission d’intérêt général assuré par une personne publique. C’est aussi l’activité d’intérêt général assurée par une personne privée sous le contrôle de l’administration.

  1. La mission d’intérêt général.

Elle est au centre de la définition du service public.

C’est une notion floue et évolutive, elle n’a pas la même signification au fil du temps, car les missions de l’état évolue et du coup l’intérêt général aussi (ou intérêt public).

A la base, elle correspond aux fonctions régaliennes de l’état au 19ème comme la police, la justice, le fisc, la diplomatie. Ces activités ne peuvent être que le fait de l’état et il est d’intérêt qu’elles existent pour le plus grand nombre.

Avec les nouvelles activités de l’état la notion évolue. Ainsi cette notion de mission d’intérêt général va subir une appréciation subjective de sa définition. Quand l’état devient ravitailleur, cela devient une activité d’intérêt général. C’est en fonction de l’évolution de la société, ce sont les gouvernants qui vont décider ce qui est ou non d’intérêt général. Le juge va aussi avoir une vision subjective de cette notion. Ce sera en fonction des nécessités de la population qu’on va déterminer qu’il y a un intérêt général. Cela fut le cas des questions relatives à la santé ou à l’enseignement ; il est apparu nécessaire que l’état ou les collectivités locales prennent en charge ces activités.

L’activité de marché a été considérée d’intérêt général car il fallait approvisionner les populations en nourriture, or de nos jours cela a disparu, par exemple.

La notion dépend des besoins de la société qui évoluent.

Le père du service public disait que c’était aux gouvernants de décider ce qui était d’intérêt général (pour assurer la cohésion sociale).

  1. Assuré par une personne publique ou sous son contrôle.

Pour qu’il y ait service public il faut un intérêt général, mais il faut autre chose à cette condition nécessaire. Il faut que cette activité soit assurée par une personne publique ou sous son contrôle.

Par une personne publique.

Il faut que l’activité soit réalisée directement par une personne publique. Il faut donc le duo d’intérêt général et de personne publique pour qu’il y ait service public.

Sous contrôle de l’administration

Dans de très nombreux cas l’administration n’a pas voulu assurer directement des activités d’intérêt général, elle a préféré les confier à des personnes privées par contrat. Ainsi, ce contrat a comporté souvent des possibilités de contrôle de l’administration. Dès lors qu’une activité d’intérêt général a été confiée à un particulier sous le contrôle de l’administration, on a alors considéré que c’était un service public.

Il y a les contrats de délégation de service public (concession de service public – construction et gestion d’autoroutes – concession de la distribution de l’eau – construction des parkings).

Dans certains cas le service public existe alors même qu’il n’y a pas de contrat : c’est le législateur qui décide que telle activité dès lors qu’elle est réalisée par un privé est un service public. C’est le cas des fédérations sportives qui se voient confier l’organisation des compétitions sportives.

Dès lors qu’il y a service public, il faut respecter les lois de Roland, qui sont :

  • l’égalité de tous devant le service public
  • la continuité du service public (dépend du service – heures ouvrables).
  • adaptabilité du service public (il doit pouvoir s’adapter aux évolutions de la société – exemple de l’éclairage au gaz qui a dû s’adapter à la modernisation électrique).
  • 2. La confrontation du service public à l’économie de marché.

Depuis 20 à 30 ans, une nouvelle évolution porte sur le fait que l’état a été confronté à la construction de l’Europe, à la suppression des frontières avec en toile de fond le droit de la concurrence, qui a été une lame de fond sur le droit administratif. En effet, les activités de l’état et surtout économique, dès lors qu’elles étaient érigées en service public étaient en même temps exercées sous forme monopolistique. Ces activités (SPA et SPIC) se sont réalisées sans concurrence, car il ne fallait pas que le secteur privée vienne les concurrencer afin d’en assurer le bon fonctionnement.

Ainsi, à l’origine Air France avait le monopole du transport aérien, Les PTT et France Télécom celui des télécommunications, idem pour EDF, SNCF, etc…

Or, quand l’Europe a posé comme fondement le droit de la concurrence, l’état s’est retrouvé en difficulté face à cette évolution, l’ensemble des activités économique devant alors se soumettre aux règles de la concurrence.

Face aux « Low Coasts », Air France s’est donc trouvé en difficulté.

L’état a de plus qualifié d’administratives des activités que le droit européen qualifiait de commerciales (les PTT et les télécommunications étaient des services administratifs, mais le droit européen les a qualifiées de commerciales).

Ceci a posé la question du devenir du service public et de la compétence du juge administratif.

L’Etat doit se soumettre au droit de la concurrence comme n’importe quel acteur économique.

Mais le droit communautaire prend aussi en compte le service public mais s’il n’utilise pas toujours ce terme. Le traité de Rome a ainsi dit que dans certains cas, on pouvait aménager les règles de la concurrence, voire les supprimer. C’est le cas quand certaines activités sont vitales pour les citoyens et que le fait de les abandonner à la concurrence entrainerait leur échec. Ainsi les activités dites d’intérêt économique général ne peuvent être soumises à la concurrence et cela se rapproche de notre notion de service public. Il y a, les arrêts Corbeau 1993, et commune d’Almelo de 1994 (Cour de justice des communautés européennes ou CJUE) qui fondent ce principe d’exception.

Il y a les lois du marché qui peuvent donc être écartées dans certains secteurs, mais cela n’exclue pas tous les services publics du droit de la concurrence. Le droit européen limite les domaines qui peuvent ainsi en être exclu.

Il y a aussi la notion de service universel, introduit en 1992. C’est le service de base offert à tous dans l’union européenne, avec un niveau de qualité standard. C’est un service minimum à qualité moyenne et à prix standard, qui permettrait dans certaines activités que la population européennes puisse y accéder. Cela a été considéré comme un service public au rabais.

Par rapport la conception de Duguit, certains auteurs considèrent que la conception européenne rejoint un peu les idées de Duguit. Il disait que c’était aux gouvernants de décider ce qui relevait du service public pour assurer la cohésion sociale. Duguit disait ainsi que tout ne devait pas relever du service public. Les activités économiques d’intérêt général sont ainsi proches de l’idée de Duguit, car ne seraient alors soustraites de la concurrence que les activités vitales pour les populations et qui nécessitent d’être soustraites de la concurrence du fait que sinon elles disparaitraient.