Le statut du salarié gréviste

Quel est le statut du salarié gréviste?

Selon une décision de 17 janvier 1968, « la grève est une cessation collective et concertée du travail en vue d’appuyer des revendications professionnelles déjà déterminées auxquelles l’employeur refuse de donner satisfaction ». Quel est le statut du salarié gréviste?

Section 1 : La protection du salarié gréviste

1) La protection de l’emploi

L’article L522-1 du code du travail stipule que la grève ne rompt pas le contrat de travail sauf faute lourde, imputable au salarié. Il en résulte que durant la grève le salarié gréviste conserve son contrat de travail qui est seulement suspendu durant le temps de la grève.

2) Interdiction de toute sanction et de toute mesure discriminatoire

Lorsqu’une grève se déclenche la réaction première et primaire de l’employeur est de sanctionner subsidiairement de licencier tous les salariés grévistes. Une telle réaction n’est bien évidemment pas autorisée par la loi. Ainsi en présence de l’exercice normal du droit de grève, l’employeur n’est pas autorisé à prendre une quelconque sanction disciplinaire ou mesure de licenciement à l’encontre d’un salarié gréviste. Ceci s’explique par le fait que la cour de cassation considère que la grève entraîne la suspension du contrat de travail qui emporte celle du règlement intérieur et de toute mesure conventionnelle illégale afférente aux sanctions disciplinaires pour tous les faits non constitutifs d’une faute lourde.

Dès lors, le salarié gréviste bénéficie d’une immunité pour tous les faits dont il est l’auteur et qui ne soit pas constitutif d’une faute lourde. De la même manière par application des dispositions de l’article L521-1 du code du travail, l’exercice du droit de grève ne peut pas donner lieu de la part de l’employeur à des mesures discriminatoires en matière de rémunération ou d’avantages sociaux.

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Section 2 : L’incidence de la grève sur le contrat de travail

1) Absence de rupture du contrat de travail

Il résulte de cette disposition légale, que cette grève n’entraîne pas la rupture du contrat de travail mais simplement la suspension de celui-ci. Ceci a pour conséquence que le salarié en grève est dispensé de fournir le travail mais il demeure membre du personnel de l’entreprise. Dès lors, pendant la grève le salarié gréviste n’a pas le droit d’aller travaillé pour un autre employeur. De la même manière, la grève n’a pas pour effet d’interrompre l’exercice des mandats des représentants du personnel qui conserve la liberté de circuler dans l’entreprise pour ou dans le cadre de l’exécution de leur mission de représentant du personnel.

2) L’incidence sur le salaire

La grève a pour conséquence de suspendre l’exécution du travail et par voie de conséquence de suspendre l’obligation pour l’employeur de payer les salaires.

Toutefois la rémunération des salariés grévistes ne peut être diminuée que proportionnellement à durée de la grève. Toute retenue de salaires supérieurs à la durée de la grève est assimilable à une sanction disciplinaire. Mais, dans certaines hypothèses, l’employeur est tout de même tenu de payer les salaires correspondant à la grève aux salariés grévistes. Tel est le cas de la situation selon laquelle la grève a pour objet d’assurer le respect d’un droit essentiel. Ce droit peut être lié à la sécurité des salariés qui est menacée et qui a nécessité la grève, ou alors la grève qui est motivée par l’absence de paiement régulier du salaire ayant un caractère alimentaire pour le salarié. Autre exception, lorsque les salariés grévistes ont assuré à la demande de l’employeur un service minimum ou alors lorsqu’un accord de fin de grève prévoit expressément le paiement total ou partiel des jours de grève.

3) L’incidence sur le paiement des primes

La cour de cassation a considéré que l’employeur est en droit de tenir compte des absences pour raison de grève afin de réduire une prime à la condition expresse que toute absence autorisée ou non, donne lieu à une telle réduction. Tel est le cas de la prime d’assiduité, de la prime de fin d’année, de la prime d’ancienneté avec une nuance pour la prime d’ancienneté la cour de cassation considère discriminatoire la mesure qui consiste à prendre en considération la suspension du contrat de travail résultant de l’exercice du droit de grève pour retarder notamment l’augmentation de salaire liée à l’ancienneté alors que selon la convention collective toutes les périodes d’absence ne suspendent pas le droit à un avancement à l’ancienneté.

S’agissant de la prime d’intéressement, celle-ci peut être suspendue ou réduite si l’accord d’intéressement prévoit une répartition entre les salariés fondés sur la durée de présence au cours de l’exercice, les absences pour grève peuvent être déduite de cette durée à la condition qu’aucune discrimination ne soit opérée à cette occasion.

Enfin il est important de préciser qu’aucune mention spécifique faisant référence à l’exercice du droit de grève ne doit figurer sur le bulletin de salaire.

4) L’incidence sur les congés

La question se pose de savoir si par exceptionnel un jour férié tombait pendant une période de grève, que ce passe-t-il ?

La chambre sociale de la cour de cassation s’est prononcée sur la question et a indiqué que le salarié qui a usé du droit de grève doit être considéré comme salarié gréviste pendant toute la durée de la grève.

En conséquence ce salarié gréviste ne peut pas prétendre au paiement de sa rémunération pendant la période de grève y compris s’agissant du jour férié. Il en est de même du jour du congé inclut dans une période de grève.

Enfin la question est de savoir si la période de grève ouvre droit à congé payé. La réponse est la suivante, on sait que l’exercice du droit de grève suspend l’exécution du contrat de travail pendant toute la durée de l’arrêt de travail. Dès lors les jours de grève ne peuvent pas être assimilé à une période de travail effectif de sorte que la période de grève n’entre pas dans la base de calcul des droits à congé payé. Exemple un mois de travail ouvre droit au profit du salarié à deux jours et demi de congés, le salarié fait grève pendant un mois, il n’aura pas droit à des congés payés puisque la période de grève n’est pas assimilée a une période de travail effectif car seul les périodes de travail effectif ouvrent droit à des congés payés.

5) L’incidence de la grève par rapport à la maladie

Que se passe-t-il si le salarié gréviste tombe malade avant ou pendant la grève ?

Le salarié qui tombe malade pendant la grève n’a pas droit au paiement des indemnités différentiel maladie prévue par la convention collective.

Que se passe-t-il lorsqu’un salarié gréviste est accidenté au cours de la grève ?

S’agit-il d’un accident du travail, d’un accident de trajet ?

Un salarié gréviste victime d’un accident au cours d’une grève ne peut pas bénéficier du régime de l’accident du travail et ne peut pas bénéficier du régime de l’accident de trajet, car, durant la grève, le contrat est suspendu.

Section 3 : L’incidence de la faute lourde du salarié

Les dispositions de l’article L521-1 du code du travail, précisent que seule la faute lourde peut légitimer le licenciement d’un salarié gréviste, à l’exception de tout autre faute.

La cour de cassation est allée encore plus loin en exigeant une faute lourde pour la mise en œuvre du pouvoir disciplinaire de l’employeur. On ne peut pas sanctionner un salarié s’il n’a pas commis de faute lourde.

1) La notion de faute lourde

La faute lourde est une faute grave suffisamment grave, qui ne permet pas le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant le temps du préavis, qui de surcroît caractérise uneintention de nuire à l’employeur ou à l’entreprise. La cour de cassation exige par ailleurs une participation personnelle du salarié au fait illicite.

C’est ainsi qu’elle considère qu’à défaut de participation personnelle au fait illicite, la faute lourde ne peut pas être invoquée à son encontre.

En revanche constitue une faute lourde, l’entrave à la liberté du travail. Autrement dit, un salarié a le droit de faire grève donc a le droit de revendiquer et à l’appui de la revendication de stopper son travail. Mais il lui est interdit de s’opposer au travail d’autrui, autrement dit il n’a pas le droit d’empêcher les salariés de l’entreprise non-grévistes de travailler.

Mais pour que la faute lourde soit retenue il faut prouver que le salarié gréviste a empêché les autres salariés non-grévistes de travail (établissement d’un constat d’huissier). Mais la faute lourde est également retenue a l’encontre du salarié gréviste qui a personnellement participé à la fermeture des accès à l’entreprise et qui par là même a fait obstacle à l’entrée et à la sortie des véhicules ce qui a provoqué la désorganisation de l’entreprise.

Constitue également une faute lourde, le fait d’occuper les locaux de l’entreprise et de s’y maintenir malgré l’existence de trois décisions de justice exécutoires.

Par ailleurs, tous les actes constituant à menacer ou à violenter qq’un est constitutif d’une faute lourde. Dès lors le fait de frapper un salarié qui refuse de faire grève, constitue une faute lourde.

Le fait de proférer des menaces de mort à l’encontre de l’employeur ou d’un directeur de l’entreprise constitue également une faute lourde. De la même manière, la séquestration de l’employeur ou de l’un de ses représentants constitue également une faute lourde.

Mais il y a également faute lourde lorsqu’on entrave l’accès ou la circulation des véhicules de secours.

Enfin tous les actes de rétention ou de dégradation des biens appartenant à l’entreprise constituent des cas de faute lourde ainsi que bien évidement tous les actes tendant à désorganisé ou a nuire une entreprise.

2) Le licenciement du salarié gréviste

Il est évident que la réaction première du chef d’entreprise est de licencié le salarié. Mais on sait que la grève ne constitue pas un motif de licenciement. La faute lourde justifie un licenciement immédiat et sans indemnités aucune, du salarié mais ne dispense pas l’employeur de respecter les dispositions légales en matière de procédure de licenciement. L’employeur convoque le salarié à un entretien, il notifie au salarié sa mise à pied à titre conservatoire durant le temps de la procédure de licenciement.

À l’issue de l’entretien, l’employeur doit respecter un délai de deux jours ouvrables à l’expiration desquels il pourra notifier le licenciement.

Mais la cour de cassation a considéré que la grève étant une période atypique de la vie d’une entreprise, l’employeur pouvait prendre à l’encontre du salarié gréviste fautif une sanction disciplinaire à la place du licenciement.

Toutefois il convient de veiller en tout état de cause à ne pas prononcer une mesure discriminatoire à l’encontre du salarié gréviste. Le licenciement prononcé à l’encontre d’un salarié gréviste en violation des dispositions de l’article L521-1 du code du travail, est tout simplement sanctionné par une nullité de plein . .Autrement dit si le licenciement du salarié gréviste n’est pas fondé sur une faute lourde, il sera déclaré nul et non-avenu. C’est ce qui résulte des dispositions de l’article L521-1 alinéa 3 du code du travail.

La nullité du licenciement doit entraîner la réintégration du salarié dans l’entreprise. Donc ceci implique la poursuite du contrat de travail du salarié.

3) Le cas particulier des représentants du personnel

Les représentants du personnel constituent un cas particulier. Parce que quelque part ils sont les instigateurs du mouvement de grève. Deuxièmement ils peuvent être présumés responsables du comportement des salariés grévistes. Donc on peut éventuellement considérer qu’ils doivent être déclarés responsables de tous les maux que peut provoquer la grève. Et bien non !!

Pour licencier un salarié gréviste représentant du personnel, il faut prouver sa participation personnelle aux actes illicites. Ce qui veut dire qu’ils doivent être instigateur d’actes illicites commis par d’autres, ou alors être soit l’auteur de faits illicites ou soit l’instigateur et l’auteur d’actes illicites. Une foi ces faits prouvé l’employeur ne peut toujours pas licencier le salarié, car il a l’obligation de solliciter l’autorisation de licencier auprès de l’inspecteur du travail. L’inspecteur du travail va avant de prendre sa décision, contrôler le caractère non-discriminatoire du licenciement et le degré de la faute invoquée. Si la mesure est déclarée non-discriminatoire et la faute qualifiée de lourde que l’inspecteur va autoriser le licenciement.