Les 3 causes d’exonération de responsabilité

Quelles sont les causes d’exonération de responsabilité du fait personnel

Il y a en trois conditions pour engager la responsabilité civile délictuelle du fait personnel de quelqu’un, ces conditions sont assez « générales » dans le sens où l’on retrouvera la notion de faute et celle de dommage ailleurs que dans la responsabilité du fait personnel, ces trois conditions sont :une faute, un dommage, un lien de causalité.

Le lien de causalité est important car il va permettre de contester la mise en œuvre de la responsabilité.

On va pouvoir prouver que l’on a fait aucune faute, que la « prétendue victime » n’a pas subi de préjudice direct et certain, mais c’est surtout à l’occasion du lien de causalité que l’on va rencontrer non des moyens d’exonérations ou des moyens de « défense » qui sont la force majeure, le fait de la victime, le fait d’un tiers

La force majeure

La force majeure est une cause d’exonération de responsabilité parce que la force majeure va rompre le lien de causalité : il n’y a pas de lien de causalité entre la faute et le dommage. C’est donc une rupture du lien de causalité.

En droit la définition de la force majeure est très précise et très rigoureuse. Pour qu’il y ait cas de force majeure au sens du droit il faut que l’évènement présente trois conditions cumulatives. Ça peut être un fait de la nature, comme un cyclone ou une tempête. En général on appelle ça le « cas fortuit ». Mais le cas de force majeure ca peut être aussi le fait d’un tiers.

Trois caractères de la force majeure :

  • Imprévisibilité
  • Irrésistibilité
  • Extériorité

Imprévisible : ça signifie qu’on ne pouvait pas prévoir l’événement, on ne pouvait pas s’y attendre.

Irrésistibilité : un événement irrésistible est un événement impossible à éviter.

Extériorité : c’est-à-dire que l’événement doit être extérieur à la sphère du débiteur qui l’invoque. Extérieur à la personne ou aux biens de celui qui l’invoque. Sinon on doit assumer. Par exemple la grève d’une entreprise n’est pas extérieure à l’entreprise. Si c’était une grève nationale, ça échappait à l’employeur et donc il peut dire que c’est un cas de force majeure.

Il y a eu des évolutions sur l’ensemble de ces conditions.

D’abord il y a eu une tendance de la jurisprudence à fusionner les deux premières conditions d’irrésistibilité et d’imprévisibilité. En effet, dans certaines affaires le dommage avait été prévu parce qu’il était prévisible mais le défendeur/débiteur avait fait tout ce qui était en son possible pour éviter le dommage mais il n’avait pas pu l’éviter quand même. Par exemple on prévoit un tremblement de terre ou une tempête exceptionnelle. Une personne défait son chapiteau, il le range bien mais le vente arrache tout. Les juges ont dit que ce qui compte est l’inévitabilité. Si la prévision n’a pas empêché la réalisation du dommage malgré toutes les précautions prises, on peut invoquer un cas de force majeure.

Arrêt du 1er octobre 1997 : l’irrésistibilité de l’événement est à elle seule constitutif de la force majeure lorsque sa prévision ne saurait lui permettre d’en empêcher les effets…

Il y avait une divergence entre plusieurs chambres de la cour de cassation et donc on a saisi l’assemblée plénière de la cour de cassation. Il y a eu deux arrêts, un en matière contractuelle et un en matière délictuelle.

Arrêt page 48: la RATP, on a trouvé sur une rame le corps sans vie d’une jeune femme, aucun témoin. L’époux de la victime agit et demande que la RATP soit condamnée à réparer le préjudice. La cour d’appel rejette et la RATP dit qu’il y a force majeure. Si la faute de la victime n’exonère totalement le gardien qu’à la condition de présenter les caractères de force majeure, c’est satisfait s’il y a imprévisible et irrésistible. Il n’y a pas extérieur mais c’était forcément extérieur à la RATP. Ayant retenu que la chute de la femme sur la voie ne pouvait s’expliquer (pas d’autre cause possible) que par l’action volontaire de la victime, que le comportement de celle-ci n’était pas prévisible car aucunes personnes de la RATP ne pouvait prévoir son comportement, il n’avait été constaté aucun manquement aux règles de sécurité (on parle de faute de la RATP et donc influence la cour de cassation) et que celui-ci ne saurait se voir reprocher de ne pas prendre toute mesure contre le passage de personnes voulant se suicider.

Il y a eu plein d’arrêts sur la SNCF. Par exemple une jeune homme qui habitait, il était monté à Rouen dans un train corail, il a ouvert la porte et il a sauté à sa gare, le train ne s’arrêtait pas.

Arrêt 13 juillet 2006 page 45: le comportement de la victime ne présentait pas le caractère de force majeure pour exonérer la responsabilité de la SNCF.

Arrêt de 2010 : une jeune femme était montée dans un train de nuit. Elle avait un wagon couchette. C’était verrouillé par rapport aux autres wagons. Elle est allée aux toilettes elle a été attaquée par quelqu’un qui l’a tué. La personne avait déverrouillé la porte. La cour de cassation dit qu’il n’y a pas de force majeure : la SNCF n’avait pas tout fait pour qu’il y ait des personnes qui accèdent aux wagons.

Quand il y a un accident de la circulation, le cas de force majeure n’est plus une cause d’exonération de responsabilité.

La cour de cassation, quand c’est RATP et SNCF, dit toujours qu’ils sont responsable, il n’y a jamais force majeure sauf quand il y a suicide. La force majeure n’est pas exonératoire, mais le suicide est exonératoire.

Arrêt du 14 avril 2006 : une entreprise qui devait fabriquer une pièce particulière (!) pour son client. Un bon commentaire d’arrêt est un commentaire où l’on commente les faits. L’autre fait déterminant est que c’était aussi une pièce très difficile à fabriquer et il y avait un salarié qui était très spécialisé pour le faire. Le salarié va voir un médecin et découvre un cancer généralisé et en 1 mois il était mort, il ne fabrique pas la pièce. L’entreprise ne peut pas livrer la pièce et il dit force majeure. D’habitude on disait que c’est pas extérieur à l’entreprise et donc ca n’est pas un cas de force majeure. Or ici on a retenu la force majeure. Certains auteurs ont dit que c’était la suppression d’extériorité. Là c’était inévitable, seul le salarié pouvait le faire. Même si c’était intérieur, on ne pouvait quand même rien faire et donc ca ne supprime pas vraiment la condition d’extériorité.

Les effets de la force majeure sont radicaux. La force majeure fait disparaitre la responsabilité personnelle. La force majeure est le système du tout ou rien : soit l’événement présente les conditions de la force majeure et il y a une exonération totale, soit il n’y a pas les conditions et donc aucune exonération totale. Si l’événement de la nature ne présente pas les caractères de la force majeure, il n’y a pas d’exonération.

Le fait de la victime

Ça peut être un fait de la victime qui engage la responsabilité de la victime sur un autre fondement que 1382 : par exemple la victime est partiellement responsable parce qu’elle est responsable du fait d’une chose. On parle de fait de la victime de nature à entrainer sa responsabilité.

Ca peut conduire à une exonération partielle de l’auteur du dommage. Exemple de Derguini, Lemaire. Jamais exonération totale sauf si la faute de la victime remplie les conditions de la force majeure. Donc si le fait non fautif de la victime remplie les caractères de la force majeure il y a exonération totale de l’auteur. En revanche sinon il faut que la victime soit partiellement responsable, il faut que le fait de la victime engage sa responsabilité, pour qu’on puisse diminuer la responsabilité.

Avant la loi de 1985, les accidents de la circulation était de la responsabilité délictuelle. Très souvent quand quelqu’un est victime de la circulation, il y a au moins une faute de négligence qu’on peut lui reprocher. Les compagnies d’assurances faisaient des procès systématiques en invoquant une faute de la victime qui ne touchait rien pendant 10 ans 15 ans.

Arrêt Desmares de 1982 : la cour de cassation s’est énervée, elle a dit que la faute de la victime n’est plus exonératoire sauf si elle remplie les caractères de la force majeure. La cour de cassation ne pouvait pas dire que c’était seulement en matière d’accident de la circulation.

Ubi lex non distinguit nec nos distinguere debemus : où la loi ne distingue pas, nous non plus ne devons pas distinguer.

Dans cet arrêt la cour de cassation a dit que la faute de la victime n’était pas exonératoire, et ça valait pour tous les autres domaines. On a dit que cet arrêt était une provocation du législateur. Il faut savoir à hauteur de combien elle est exonératoire. En général on fait une appréciation selon la gravité respective des fautes.

Arrêt de 1981 : la cour de cassation a jugé que la faute de la victime directe est opposable également à la victime par ricochet. Si la victime par ricochet demande réparation de son dommage par ricochet, l’auteur peut lui opposer la faute de la victime pour diminuer son indemnisation.

Le fait d’un tiers

Lorsque l’auteur d’un dommage invoque, pour s’exonérer de sa responsabilité, le fait d’un tiers, ca veut dire qu’il y a un coauteur. Si le fait d’un tiers a contribué à réaliser un dommage, il y a deux auteurs du dommage. Cette question du fait du tiers se pose quand il y a plusieurs coauteurs du fait du même dommage.

Supposons que la victime poursuivre le premier auteur, ce dernier va dire qu’il y avait une autre personne qui était avec lui et donc invoquer le fait du tiers pour cause d’exonération. En matière de responsabilité civile il y a une règle par faveur de la victime, on a posé le « principe de responsabilité in solidum ». Lorsqu’on a plusieurs coauteurs d’un même dommage ils sont toujours responsables in solidum.

Principe de responsabilité in solidum : on a deux temps chronologiquement.

Premier temps on a un rapport d’obligation à la dette. C’est de savoir qui est obligé à la dette vis-à-vis de la victime. Responsabilité in solidum répond que tous les coauteurs sont obligés vis-à-vis de la victime au paiement de l’entière dette. Ca veut dire que la victime dans le rapport d’obligation à la dette peut poursuivre l’un quelconque des coauteurs et lui demander le paiement total de sa dette. C’est le rapport entre les coauteurs d’une part et la victime d’autre part.

Deuxième temps qui est un rapport de contribution à la dette. Qui va contribuer au paiement de cette dette ? C’est le rapport des coauteurs entre eux. Chacun va contribuer à la dette à proportion de sa responsabilité dans le dommage. Supposons qu’ils étaient ¾ et ¼. Il y a une action récursoire (: recours en contribution à la dette) et là il doit demander 25 000 € si il a payé 100 000 €. On dit que dans le rapport de contribution à la dette, celui qui a payé la victime doit diviser sa dette. S’il a payé 300 000 € et qu’il devait 100 000, les deux autres vont devoir lui payer 100 000€.

Obligation solidaire : en droit civil, la solidarité ne se présume point, elle doit être prouvée. En droit des contrats, un contrat civil, la solidarité ne se présume pas mais doit être stipulée. Tout ce qu’on a vu pour l’obligation in solidum, ca vaut aussi pour l’obligation solidaire. Mais la solidarité, le premier et deuxième rapport, sont les effets primaires de la solidarité et ils sont communs à l’obligation in solidum et à l’obligation solidaire. Mais il y a des effets secondaires qui n’existent pas pour l’obligation in solidum. Les commerçants et professionnels sont censés se représenter les uns les autres au sens juridique du terme. si par exemple on fait une action contre l’un des codébiteurs, la prescription est interrompu vis-à-vis de tous les autres codébiteurs. Ca ne vaut pas pour l’obligation in solidum.

Arrêt 17 novembre 2000 Perruche : un enfant était gravement handicapé et il y avait une faute médicale qui n’était pas contestée. L’enfant avait un handicape, ce n’était pas contesté. Est-ce que le médecin devait réparer ? C’est aussi une question de lien de causalité. Ceux qui ont critiqués l’arrêt ont dit qu’il n’y a pas de lien de causalité parce que c’était un handicape congénital, le médecin n’avait rien fait pour que l’enfant ait ce handicape. Ici il n’y a pas de lien de causalité selon ceux qui ont critiqués l’arrêt. Si le médecin avait bien informé la mère qu’elle avait la rubéole, elle aurait avorté et donc l’enfant ne serait pas né. Il y avait un handicape qui n’est pas causé par la faute.

Prof : est ce que la solution juste est de donner l’argent aux parents ou à l’enfant ? Plutôt à l’enfant. Le médecin a l’obligation de soin et l’obligation d’information. Le médecin était responsable pour violation de son devoir d’information. Est-ce qu’il faut que la mère démontre que si elle avait eu l’information elle aurait avorté ? Non car c’est trop violent de dire devant son enfant que si elle avait su elle aurait avorté.