Les avantages de la justice des Etats-Unis

Quels sont les aspects positifs de la justice américaine?

Aux Etats-Unis on ne peut pas nier le poids des justiciables américains. Ce poids veut dire que le droit américain offre un certain nombre de mécanismes qui permettent aux américains de faire entendre leur voix en justice, l’exemple des « class action ». En France le dommage de masse, c’est quoi ? C’est un dommage qui touche une partie importante de la population et le même dommage en général, du fait en général de la même entreprise. Exemple; en 2005 la plupart des opérateurs de téléphonie mobile se réunissent dans les salons d’un hôtel et passent un deal. Plutôt que de se faire une guerre des prix, les trois opérateurs vont fixer les prix. Ils ne vont pas se livrer de guerre ils fixent le prix des sms, des forfaits de sorte qu’il n’y a pas de concurrence entre eux et que le consommateur ne puisse bénéficier de réductions des prix.

Comme les trois se sont alignés : on fixe des prix de sms élevé, le consommateur n’a pas le choix. C’est une entente illicite qui a duré 4 a 5 ans, le consommateur français a payé trop cher ses sms et ses abonnements. En droit français quand vous avez un préjudice vous allez devant le juge seul cela veut dire qu’on n’a pas la possibilité d’agréger ses actions. Si tous les consommateurs veulent obtenir réparation ils doivent y aller individuellement et demander chacun des dommages et intérêts. Un grand nombre de contentieux de masse ne voit jamais le jour en France car dissuasion.

Aux Etats-Unis on a l’action de groupe, à la différence du droit français les consommateurs qui ont subi le même dommage ont la possibilité d’agir collectivement et être représenté par un même cabinet d’avocat qui va agir au nom de la classe des personnes lésées. L’entreprise lambda qui a causé un dommage d’un millier de dollars à tous les citoyens américains. Si le droit américain leur permet d’additionner les dommages. L’entreprise va souvent céder devant l’avocat, on a un regroupement des actions devant une seule instance ; c’est la « class action ». On est en train de réfléchir aujourd’hui en France, on pense à adopter une pseudo action de groupe.

Le droit au jury qui peut être parfois discutable, c’est faire participer les américains à la justice américaine et l’idée que la justice n’est pas réservée aux élites. Le contrôle a posteriori des lois c’est aussi un point fort. La cour suprême des Etats-Unis a le pouvoir formidable d’invalider les lois contraires à la constitution. En France la QPC s’en inspire.

Plus largement les justiciables vont facilement saisir la justice. Au départ il y a quelque chose qui est une spécificité américaine, ils ont conscience de leurs droits tout simplement parce que le droit est très représenté dans les fictions en général. La constitution pour eux c’est quelque chose de sacré (la déclaration d’indépendance). La masse des américains savent ce que c’est et connaissent leur droit, et c’est pour cela qu’ils vont en justice. L’affaire Topey qui est un jeune étudiant de l’université de Sinsinaty qui prend souvent l’avion et se fait attraper à l’aéroport et on lui fait la fouille complète. Tobey se fait contrôler ce jour-là par l’administration américaine, il enlève son t-shirt au moment où on l’interpelle et écrit au stabilo le 4eme amendement de la constitution américaine. Ce texte protège les citoyens de toute perquisition et fouilles non justifiées. C’est un acte militant de mécontentement. Cela provoque un attroupement il est menotté 5 h.

Tout ça pour dire que le citoyen américain a conscience de ses droits on sait donc quand aller en justice etc. Une des vertus du système judiciaire est donc le poids des justiciables. Il faut reconnaitre également que dans la jurisprudence américaine il existe un certain nombre de décisions qui ont été importantes qui ont fait l’histoire. A commencer par l’une des décisions les plus importantes ; la jurisprudence Brown qui corrige les errements de la cour suprême. Il y en a d’autres, une décision que les conservateurs essayent de rogner, la décision Roe vs Wade qui est rendue par la cour suprême en 1973, dans les années 70 au Texas on avait un certain nombre de lois qui criminalisait la possibilité de recourir à l’avortement. Janne Roe (anonyme) va attaquer la loi en la considérant comme contraire à la constitution fédérale des Etats-Unis. La cour suprême en 1973 a considéré que toute loi restreignant l’accès a l’avortement était inconstitutionnelle, deux ans avant la France.

On peut citer également une jurisprudence qui a fait preuve d’audace en matière politique : la jurisprudence Morrison contre Olson. C’est une décision rendue en 1988 : quelques années avant on a l’affaire du Watergate, Nixon aux Etats-Unis alors qu’il n’est pas très aimé, il a de bonnes chances d’être réélu, Nixon n’étant pas sûr de lui va faire espionner ses concurrents. Dans l’immeuble du Watergate il va faire placer des micros, c’est illégal et pas très fairplay. Il va apprendre des infos pour discréditer. Un anonyme dit aux journalistes que Nixon espionne les gens du parti républicain. Scandale politique, le président en exercice fait espionner en toute illégalité ses opposants et première fois dans toute l’histoire des Etats-Unis un président annonce sa démission. En 1975 pour éviter que cela se reproduise on adopte « ethic and government act », loi destinée comme son nom l’indique à mettre plus d’éthique dans le gouvernement. Cette loi prévoit notamment que le Congrès, ou plus exactement le sénat pourra nommer un procureur indépendant pour mener des enquêtes. Le pouvoir législatif donc par cette loi a la possibilité de nommer un procureur indépendant. Pourquoi la loi prévoit-elle cette possibilité ? Parce que dans l’affaire du Watergate, la constitution nous dit que ceux qui mènent les enquêtes, les procureurs sont sous la responsabilité du pouvoir exécutif. Quand l’affaire du Watergate éclate que le New York Times sort ses articles. On veut une enquête, le public veut une enquête mais les procureurs travaillent pour le président en exercice. L’enquête n’avance pas à cause du procureur. La loi prévoit donc la possibilité de créer des procureurs indépendants du pouvoir exécutif pour qu’un jour si on se retrouve dans une situation dans laquelle le pouvoir exécutif est impliqué dans une magouille on puisse enquêter normalement. Constitutionnellement parlant le président nomme les procureurs.

Dix ans plus tard Ronald Reagan est à la tête du pays, et on a un scandale politique encore une fois. On est dans les années 80 un des secrétaires de département est impliqué, Mr Olson a la tête de l’équivalent du ministère de l’environnement. Olson détourne des fonds, il y a des soupçons, l’argent destiné à l’environnement va ailleurs et un certain nombre de sénateurs aimerait que la lumière soit faite. Le sénat va nommer un procureur indépendant, une femme. Alexia Morrison, jeune procureur ambitieuse qui va faire la vie dure à Olson. Olson en a tellement marre qu’il va saisir la justice. Il va attaquer la loi qui est selon lui inconstitutionnelle. La Cour Suprême va rendre sa décision en 1988. Contre toute orthodoxie juridique la Cour Suprême des Etats-Unis va décider que cette loi est conforme à la constitution car il est important de pouvoir avoir un procureur indépendant pour surveiller le pouvoir exécutif. Le pouvoir judiciaire vient au secours du pouvoir législatif pour nous dire qu’aux Etats-Unis on peut s’écarter de la constitution pour faire vivre son esprit. On a une autre décision plus récente la décision Boumediene de 2008. Décision symboliquement et juridiquement intéressante par laquelle la Cour Suprême va nous dire qu’un détenu non américain détenu sur un sol non américain a le droit à un minimum de droits fondamentaux et notamment celui de l’habeas corpus (être entendu par le juge). La Cour Suprême prend ici une décision extrêmement symbolique, elle ouvre comme porte que les droits fondamentaux s’appliquent à des personnes non américaines des lors que l’armée est impliquée. Des personnes attrapées en Irak devront être entendus. La décision a donc une portée énorme. Ça veut dire que les Etats-Unis en dehors de leur territoire ne peuvent se comporter comme des sauvages.

On a des décisions qui sont symboliquement importantes et puis une décision relativement récente qui nous montre que la Cour Suprême ce n’est pas uniquement 9 vieux juges en robe, elle adopte des décisions modernes. La jurisprudence de la Cour suprême adopte des décisions à la pointe, pour l’avortement par exemple. Dans le temps cela s’est vérifié. On a une décision « United states contre Jones » de 2012. Dans la constitution américaine il est prévu que lorsque la police veut enquêter sur un délinquant, elle ne peut pas rentrer dans le domicile du délinquant sans mandat. La constitution américaine prévoit également lorsqu’une enquête est diligentée contre tel ou tel parrain de la mafia, on ne peut pas le faire n’importe comment. Dans les années 2010 la police pour surveiller les déplacements d’un suspect va placer un GPS sous la voiture. Question posée à la cour suprême est ce que ce placement nécessite une autorisation judiciaire ou pas ? Réponse très claire, c’est un moyen de surveillance, une méthode intrusive donc pour placer ce GPS il faut une autorisation du juge, un mandat fédéral. La Cour Suprême est toujours soucieuse des libertés individuelles.

On a des zones d’ombre dans la justice américaine mais on a également une espèce de double face. C’est ce côté ambivalent des Etats-Unis que l’on doit garder en tête, certaines décisions sont contestables mais peuvent s’expliquer il faut toujours nuancer.