Les conditions de fond de la lettre de change

Conditions de fond de la lettre de change

La validité de la capacité, du pouvoir, de l’objet et de la cause sont les conditions de fond de la lettre de change

  • 1 : La capacité

A la différence du droit commun, la capacité est appréciée d’une façon originale.

La capacité doit exister car la lettre de change est un acte juridique mais aussi un acte de commerce par la forme. Par conséquent, elle ne peut être valablement émise que par un titulaire de la capacité commerciale. En conséquence, l’exception d’incapacité commerciale est opposable à tout porteur de bonne foi ou de mauvaise foi.

Exception : lorsque le mineur est très proche de sa capacité, car proche de sa majorité, et qu’il présente la forme d’un majeur, la jurisprudence établie une distinction :

Si le mineur a agit avec légèreté et insouciance, la lettre de change est admise. Dans ce cas, il est permit au mineur d’invoquer la nullité relative (car c’est une nullité de protection du mineur).

Si le mineur a agit avec une intention frauduleuse : il est donc considéré comme auteur d’un dol. A titre de sanction, la jurisprudence le considère come obliger par l’effet de commerce qu’il a émit.

Dans le premier domaine (la nullité relative), le mineur oppose l’exception de nullité au porteur de la traite. Mais le porteur dispose d’un recours sur le fondement de l’action en enrichissement sans cause à l’encontre du mineur incapable.

La capacité donne lieu à une appréciation particulière ne correspondant pas au droit commun. L’idée est l’indépendance des signataires et l’idée de l’indépendance de l’appréciation des capacités de chacun des signataires de la lettre de change. En effet, la lettre de change circule est fait l’objet de signature multiple. Mais parmi les endossataires, il se peut que certains soient incapables, tandis que d’autres sont capables. L’article L. 511-5 al. 2 prévoit que la lettre de change n’est pas nulle globalement. Autrement dit, au terme de cet article, ceux qui se sont valablement engagés (les signataires capables) sont engagés. Alors la traite pourra être opposable à certain mais pas à d’autres.

  • 2 : Le pouvoir

La question du pouvoir se pose chaque fois qu’intervient un intermédiaire.

Deux hypothèses :

Le tirage de la lettre par un mandataire (ou par fondé de pouvoir)

Dans les entreprises, certains salariés disposent du pouvoir d’émettre les lettres de change. La question est de savoir si l’émetteur de la lettre de change dispose ou non du pouvoir de le faire. Ce n’est qu’une application du droit commun de la représentation. Et le représenté sera engagé à condition que le représentant ait agit en vertu de pouvoirs réguliers.

Dans ce contexte, la traite doit faire apparaitre clairement que le tireur n’agit pas pour son compte mais pour le compte de la société qu’il représente.

Néanmoins, pourra intervenir le droit commun, et l’hypothèse de la théorie des pouvoirs apparents afin de valider la lettre de change.

Le tirage pour compte

Il existe à partir du moment où le tireur de la lettre a agit pour le compte d’autrui et ne fait pas connaitre au tiers l’ordre qui lui a été donné d’agir. Il se présente même comme le véritable créateur du titre qu’il a signé en son nom.

Celui pour lequel la lettre est, en vérité, créée s’appelle le donneur d’ordre. A l’opposé, celui qui tire la lettre est le tireur pour compte. C’est une forme du contrat de commission.

Pourquoi ce mécanisme ? L’objectif est la volonté du donneur d’ordre de ne pas apparaitre officiellement dans une transaction commerciale, pour des raisons de secret des affaires (article 511-7 al. 1: il dispose que la provision doit être fournie au tiré par le donneur d’ordre et non pas pour le tireur pour compte). Le porteur dispose d’un recours contre le tiré afin d’être payé. Lorsque le tiré ne paie pas, le porteur dispose d’un autre recours contre le tireur pour compte. A contrario, le porteur ne dispose pas de recours contre le donneur d’ordre. La jurisprudence est constante dans la matière. La chambre commerciale indique que le donneur d’ordre peut également avoir la qualité de porteur ; dans ce cas, il ne peut pas agir en cas de défaut de paiement du tiré contre le tireur pour compte. Cela car il n’est pas possible d’agir en paiement, à défaut de paiement du tiré, contre celui qui nous représente.

  • 3 : Objet et cause

L’objet :

L’obligation assumée par le souscripteur de la lettre de change est le paiement d’une somme d’argent déterminée.

L’article L.511-29 du code de commerce n’adopte pas une ancienne distinction de la jurisprudence en matière de la monnaie de paiement. C’était posé la question d’une lettre de change émise dans une monnaie différente. La jurisprudence répondait par oui ou non, selon que l’on se trouvait ou pas dans un contrat international. Si la lettre de change entrait dans un rapport international, la monnaie étrangère était possible. Par contre, pour un paiement interne, cela n’était pas possible. Mais la loi ne se réfère pas à cette distinction. Par conséquent, l’on peut choisir n’importe quelle monnaie, indépendamment d’un contrat international.

La cause :

La cause doit être licite. La lettre de change doit être valable. En conséquence de quoi la lettre de change pour payer des opérations occultes n’est pas valable.

La portée de l’éventuelle nullité, en cas de cause nulle, doit être nuancée selon les personnes en présence :

Nullité dans les rapports tireur/porteur et tiré/accepteur : la cause est nulle.

Dans les relations porteur de mauvaise foi/tiré accepteur : nullité de la lettre.

Dans les relations tiers porteur/tiré non accepteur : nullité de la lettre.

Dans les relations porteur de bonne foi/tiré accepteur : la lettre est valable parce que le tiers porteur est de bonne foi ; il ne connait pas le vice qui affecte la traite.