Les conditions de la complicité punissable

Les conditions de la complicité : élément légal, matériel et moral

D’après l’article 121 – 7 le complice est la personne qui sciemment par aide ou assistance a facilité la préparation ou la consommation d’un crime ou d’un délit ou la personne qui par don, promesse, menace, ordre, abus d’autorité ou de pouvoir, aura provoqué à une infraction ou donné des infractions pour la commettre.

A partir de cette définition, on peut dire que la complicité punissable suppose trois éléments, éléments légal, matériel et moral.

1§ L’élément légal de la complicité.

Deux systèmes sont concevables pour savoir comment punir le complice. Le premier système est celui de la criminalité d’emprunt, le second consiste à faire de la complicité un délit distinct.

Le premier système, la criminalité d’emprunt, repose sur l’idée que le complice emprunte sa criminalité à l’auteur principal. Il accomplit des actes qui en eux-mêmes sont dépourvus de criminalité et qui n’acquièrent de criminalité que par référence à l’infraction de l’auteur principal. La conséquence de ce système est que le complice se voit alors appliquer les mêmes qualifications et les mêmes peines que l’auteur principal.

Le second système consiste à punir le complice de façon autonome, distincte et donc à envisager sa responsabilité, indépendamment de celle de l’auteur principal et donc à nier la notion de complicité. Le nouveau code pénal a consacré dans l’article 121 – 6 le système d’emprunt de criminalité. L’idée est que le complice n’a pas de criminalité propre car on est complice d’une infraction commise par quelqu’un d’autre. Il emprunte sa criminalité au fait commis par l’auteur principal.

Techniquement il en résulte que la complicité n’est punissable qu’en présence d’un fait principal lui même punissable.

A) L’exigence d’un fait principal.

Le fait principal doit être une infraction pénale, un crime ou un délit, parfois une contravention, et ce peut être une infraction consommée ou tentée.

  1. L’existence d’un fait principal infraction.

Si le fait principal ne constitue pas une infraction pénale, le complice n’emprunte aucune criminalité, et donc le complice ne peut pas être puni. En droit français par respect pour la liberté individuelle le suicide n’est pas une infraction pénale. Celui qui aide quelqu’un à se suicider ou le provoque, techniquement il ne pouvait pas être considéré comme un complice. La faille de la législation française est apparue quand a été publié l’ouvrage suicide mode d’emploi. Le législateur est intervenu pour ériger la provocation au suicide en infraction autonome dans les articles 223 – 13 et suivants. Le code pénal fait de même à l’égard de différentes provocations ou de comportements qui ne constituent pas ou plus une infraction pénale. La mendicité n’est plus un délit pénalement répréhensible. En revanche la provocation des mineurs à la mendicité est une infraction autonome.

  1. La nature du fait principal.

Il faut mettre d’un coté les crimes et délits et de l’autre les contraventions.

Pour les crimes et délits l’article 121 – 7 al 1, comme le faisait auparavant les anciens articles 59 et 60, incriminent systématiquement la complicité. Néanmoins on s’interroge pour savoir si la complicité est concevable pour certains délits non intentionnels, c’est-à-dire les délits d’imprudences non conscientes. S’agissant des contraventions, sous l’empire de l’ancien code pénal, la complicité de contravention n’était pas en principe punissable, sauf texte spécial. Depuis le nouveau code pénal on est obligé de distinguer suivant les deux formes de complicité, la complicité par aide ou assistance, et la complicité par instigation.

La complicité par aide ou assistance ne vise que le complice d’un crime ou d’un délit. Il faut donc en déduire que cette complicité n’est pas en principe punissable, en matière de contravention. On peut dire que la complicité par aide ou assistance est donc générale pour les crimes et les délits et spéciales pour les contraventions. Un texte doit la prévoir en matière de contraventions. Ils existent en matière de tapage nocturne, de violence volontaire.

La seconde forme de complicité, par instigation vise sans distinction le complice de l’infraction ce qui fait que la complicité est générale, même pour les contraventions, de n’importe quelle classe.

Ce fait principal pourra être une infraction consommée ou tentée.

  1. Les modalités du fait principal, une infraction consommée ou tentée.

Pour qu’il y ait complicité, il faut qu’une infraction principale ait été commise. Cette exigence ne pose pas de difficulté quand le fait principal a été totalement consommé. Ce qui pose le plus de problème c’est lorsque le fait principal est une tentative d’infraction. On dit que la complicité de tentative est punissable tandis que la tentative de complicité ne l’est pas.

La tentative d’infraction est générale, en matière de crime, et spéciale en matière de délit. Dès lors a priori, la complicité de tentative est punissable, on peut être dans tous les cas, complice d’une tentative de crime et on peut être complice d’une tentative de délit à condition que cette tentative de délit ait été prévue par le législateur.

Pour être réprimée, la tentative d’infraction doit avoir été complètement caractérisée. Or ce n’est pas toujours le cas, il n’y a pas commencement d’exécution, et il y a eu des actes préparatoires. Parfois il peut y avoir un désistement volontaire de l’agent et, dans ce cas, la tentative d’infraction n’est pas punissable. Il ne peut pas y avoir fait principal punissable, donc le complice ne peut pas être puni. Le complice d’une infraction tentée qui n’est pas entièrement caractérisée, n’encours pas la répression pénale. C’est une expression qui est critiquable parce qu’elle prête à la confusion. Cette dernière solution peut aboutir en pratique à des résultats choquants.

Tel est le cas quand il y avait eu aide ou provocation à la commission d’une infraction, mais qu’ils n’ont pas été suivis des faits. Au final, il n’y a ni infraction consommée, ni tentée.

Hypothèse que l’on trouve dans les arrêts du 25 octobre 1962, Lacour et Shieb/Benamar. La chambre criminelle a conclu qu’il y avait impossibilité de punir un médecin qui a engager un tueur à gage pour tuer sa femme, ce dernier ayant pris l’argent mais sans rien faire. On ne peut pas réprimer l’instigateur en tant que complice. À défaut d’un texte formel, la provocation non suivie des faits n’est pas punissable au titre de la complicité.

Le législateur a estimé opportun d’intervenir dans certains cas pour réprimer la complicité, même si la provocation n’a pas été suivie des faits. Par exemple provocation de mineur à commettre des crimes et des délits.

De façon paradoxale, l’hypothèse de cette jurisprudence est restée très longtemps imprévue. Il a fallu attendre la loi Perben 2 du 9 mars 04, pour que cette provocation non suivie des faits soit incriminée dans le nouvel article 221 – 5 – 1. le fait de faire à une personne, des offres ou des promesses, ou de lui proposer des dons, présents ou avantages quelconque, afin qu’elle commette un assassinat ou un empoisonnement, ce fait ni commis, ni tenté, est punie de 10 ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende.

Ce fait principal doit être punissable.

B) Le caractère punissable du fait principal.

Le complice ne sera pas punissable si le fait principal ne l’est pas. Le caractère punissable du fait principal est une condition nécessaire et suffisante de la répression du complice.

a) Les conditions nécessaires.

En tant que condition nécessaire, le caractère punissable exige que ce fait puisse être objectivement sanctionné. Or il s’avère que ce fait principal ne peut pas être objectivement sanctionné. Il se peut que la participation de l’auteur principal à l’infraction ne soit pas suffisamment établie. Il se peut que l’auteur du fait principal bénéficie d’une cause objective d’irresponsabilité pénale, ce qu’on appelait un fait justificatif sous l’ancien code, et cette cause fait disparaître l’infraction. C’est le cas quand l’auteur principal a accompli l’infraction, dans le cas d’une légitime défense, en situation d’état de nécessité ou en obéissant aux ordres de la loi.

Lorsque l’auteur principal bénéficie d’une immunité telle que l’immunité familiale. Elle est prévue par l’article 311 – 12 du Code pénal. C’est sur cette base que l’on dit qu’il n’y a pas de vol entre époux.

Il y a des circonstances ou le fait principal n’est plus punissable. Par exemple quand il y a eu abrogation de la loi pénale (adultère), le fait principal n’est plus punissable parce que l’action publique est prescrite, quand l’auteur bénéficie d’une amnistie à caractère réel. Dans tous ces cas, l’auteur principal ne peut pas être puni et le complice non plus.

Cette solution jurisprudentielle semble avoir été remise en cause à partir d’un arrêt de la chambre criminelle du 8 janvier 2003, présenté comme un revirement de jurisprudence.

C’est une affaire de trafic de drogue.

L’exécutant avait été poursuivi comme auteur matériel, l’instigateur qui avait l’exécutant en rapport avec le fournisseur de stupéfiant avait été poursuivi comme complice, mais les juges du fond ont relaxé l’auteur principal, l’auteur matériel pour défaut d’élément moral, mais elle avait néanmoins condamné le complice aux motifs que lui savait ce qui était transporté. Le complice, dans son pourvoi, invoquait la jurisprudence traditionnelle, pas de complice si l’auteur principal n’est pas punissable. La chambre criminelle a rejeté le pouvoir aux motifs la relaxe en faveur de l’auteur principal n’exclut pas la culpabilité d’un complice dès lors que l’existence d’un fait principal punissable ait été constatée par la cour d’appel. Cette solution de 2003 est défendue par quelques auteurs. Cette solution est très largement critiquée au regard du respect du principe de légalité. Si l’auteur ne réalise pas lui-même tous les éléments constitutifs de l’infraction il n’y a pas infraction principale et donc il n’y a pas de complicité punissable. Depuis la jurisprudence est contrastée, puisque successivement a rendu le 18 juin 03 un arrêt qui reprend la solution traditionnelle, mais l’année suivante la chambre criminelle dans un arrêt du 15 décembre 2004 a réaffirmé la nouvelle jurisprudence, même si c’est dans un domaine particulier, le droit fiscal.

Ce revirement est contestable puisqu’il aboutit à réprimer la complicité à titre autonome, indépendamment de l’action principale, et en l’absence de texte permettant de considérer l’instigateur comme un auteur à part entière.

b) Une condition suffisante.

On veut dire par là, qu’il n’est pas exigé que l’auteur du fait principal soit effectivement puni pour que le complice soit punissable. Dès lors peu importe que l’auteur principal échappe pour des raisons personnelles à la répression, si le fait principal est objectivement punissable, le complice pourra être puni. Ces raisons personnelles qui permettent à l’auteur principal d’échapper à la répression effective peuvent être des circonstances de fait ou des circonstances de droit.

Ces circonstances peuvent aussi être des circonstances de droit.

L’auteur peut bénéficier d’une cause subjective d’irresponsabilité pénale, c’est-à-dire qu’il a agi sous l’empire de la contrainte (122 – 2) ou sous l’empire de la démence (art 122 – 1) ou qu’il était mineur (art 122 – 8). Il peut ne pas engager sa responsabilité.

S’il a commis l’infraction mais qu’il a bénéficié d’une grâce ou d’une amnistie, peut importe ces circonstances de fait ou de droit, le complice pourra être réprimé, il suffit que le fait principal soit objectivement punissable.

2 § Les éléments matériels de la complicité.

Ces deux grandes formes de la complicité se trouvent dans l’article 121 – 7.

L’alinéa 1 est consacré à la complicité par aide ou assistance, c’est la complicité par collaboration. L’alinéa 2 est consacré à la complicité par provocation ou par instruction donnée, c’est la complicité par instigation. Si l’une de ces deux formes de complicité n’est pas entièrement caractérisée, la responsabilité pénale du complice ne peut pas être retenue.

A) La complicité par aide ou assistance.

Cette complicité prend la forme d’une collaboration du complice à l’activité de l’auteur principal. Le code exige que cette collaboration réponde à certains caractères et certaines formes.

1) Les caractères de la collaboration du complice.

Traditionnellement on dit que l’acte de collaboration doit être un acte positif, antérieur ou concomitant à l’acte de l’auteur principal.

Le plus souvent le complice apporte une participation positive à l’activité de l’auteur principal, ce qui fait qu’on en a déduit qu’il n’y avait pas de complicité par abstention. Cette solution a été posée de façon traditionnelle par la jurisprudence à la fin du 19e et au début du 20e, la jurisprudence considérant que ceux qui ne font qu’assister de façon passive à la commission d’une infraction ne peuvent pas être considéré comme des complices de cette infraction car ils n’ont eu aucun rôle actif. Solution posée par la chambre criminelle dans un arrêt du 30 novembre 1810, et peut aboutir à des résultats moralement choquants, dans un arrêt du 15 janvier 1948.

Cela peut expliquer qu’à l’époque contemporaine, la loi et la jurisprudence ont facilement accepté de réprimer la complicité par abstention. Le législateur a parfois érigé en infraction autonome, un certain nombre d’omissions et d’abstentions fautives. Est alors non plus complice, mais auteur, celui qui laisse faire, qui laisse commettre l’infraction, par exemple dans l’article 423 – 10, où est incriminé comme auteur celui qui ne s’oppose pas à l’infraction, article 223 – 6 al 1.

Dès lors, la jurisprudence constate que des individus ont été passifs, alors qu’ils ont joué un rôle déterminant dans la commission de l’infraction.

Elle le fait lorsque l’entente préalable a déterminé le caractère passif d’un des complices.

Par exemple en matière de tapage nocturne, on peut considérer que la personne qui laisse se dérouler le tapage, alors qu’elle a le pouvoir d’y mettre un terme, se rend complice par abstention.

On trouve aussi cette tendance dans le droits des affaires, avec la complicité d’un banquier ou d’un expert-comptable.

La jurisprudence s’oriente aussi vers la sanction du complice, avec la présence d’une attention participative, la présence du complice, même passive peut être considérée comme un encouragement à son attitude. Par exemple dans un arrêt du 2à janvier 92 la jurisprudence l’a retenu en matière de complicité de violences volontaires, à l’encontre d’individus qui par leur simple présence et, par leur nombre, les victimes s’étaient retrouvées en nombre inférieur et les tiers avaient été dissuadés d’intervenir. Si le comportement du complice en lui-même n’est pas positif, sa conséquence constitue bien une aide pour l’auteur principal, au sens de l’article 121 – 7 al 1.

2) Un antérieur ou concomitant.

Le principe résulte des termes mêmes employés par l’article 121 – 7 al 1. Le complice doit avoir facilité la préparation ou la consommation du crime ou du délit. Si on parle de consommation, l’acte du complice doit avoir été concomitant à l’acte de l’auteur principal. Normalement des agissements postérieurs ne sont pas punissables au titre de la complicité.

Ce principe est attaqué par le législateur et la jurisprudence.

La jurisprudence, réprime l’acte postérieur du complice dès lors qu’il résultât d’un accord antérieur à la commission de l’infraction. Par exemple si le complice s’est entendu avec l’auteur d’un cambriolage pour faciliter sa fuite. Arrêt du 1er décembre 1998.

Il arrive au législateur d’érigé l’aide à l’auteur de l’infraction en infraction autonome. C’est le cas lors des infractions de conséquences, comme le recel et le blanchiment.

Jusqu’à 1915, le receleur était considéré comme un complice, mais le législateur a considéré que le receleur faisant le voleur, il est considéré comme l’auteur d’une infraction distincte de l’infraction principale. Cela permet une répression plus sévère que la complicité.

Le blanchiment, c’est le fait de faciliter par tout moyen la justification mensongère de l’origine de biens ou de revenus de l’auteur d’un crime ou d’un délit.

3) Les formes de la collaboration du complice.

Ce sont l’aide ou l’assistance.

L’aide.

On peut inclure dans l’aide la fourniture de moyen par le complice de l’auteur principal, qui était visé avant par l’article 60 al 2 de l’ancien Code pénal.

La jurisprudence antérieure sur la fourniture de moyen conserve dès lors sa valeur, sa pertinence. La fourniture de moyen peut être la fourniture d’un bien, le plus souvent mobilier. Le bien fournit peut-être un immeuble, c’est le cas quand le complice met un bien immobilier à la disposition de l’auteur principal, pour que celle-ci y soit exécutée.

L’assistance.

Elle suppose la présence du complice sur les lieux et donc elle permet à l’auteur principal de se sentir soutenue, assisté.

Cette aide ou assistance est apportée directement par le complice à l’auteur principal, mais la jurisprudence accepte aussi de réprimer l’aide indirecte.

L’aide ou l’assistance apportée en connaissance de cause, même par l’intermédiaire d’un tiers, constitue la complicité punissable.

B) La complicité par provocation ou instruction.

On l’appelle la complicité par instigation parce que l’instigateur est à l’origine de l’infraction principale, parce que, soit il l’a provoqué, soit il donne des instructions pour la commettre.

  1. Les caractères exigés de l’instigation.

Il est évident que la complicité consiste en un acte positif antérieur ou concomitant à celui qui commet l’infraction principale.

On exige que la complicité ait un caractère personnel et précis. Il faut donc que la provocation ou la fourniture d’instruction soient personnelles, c’est-à-dire adressées à une personne ou un groupe de personnes déterminé.

Il n’y a pas de complicité si elles sont adressées au public en général. Certaines provocations sont spécifiquement incriminées par le législateur.

Il faut que la provocation ou la fourniture d’instruction soit suffisamment précise et directe. Elles doivent donc être en rapport avec une infraction donnée. Les instructions données doivent par ailleurs être utilisable par l’auteur principal. Elles doivent lui servir à quelque chose. Si ce sont de simples indications vagues et générales il n’y aura pas complicité punissable.

  1. Les formes de la complicité.

La provocation.

C’est le fait d’inciter une personne à commettre une infraction, le fait de lui inspirer une infraction. En l’absence de texte, faisant de l’instigateur, un auteur à part entière, il est considéré comme un complice. L’alinéa 2 exige alors que cette provocation ait été effectuée par certains moyens, qu’elle ait été accompagnée de certains procédés qui sont énumérés par le texte et qu’on appelle des adminicules. La provocation doit avoir été effectuée par don, par promesse, par menace, par ordre, par abus d’autorité ou de pouvoir.

Cette autorité et ce pouvoir peuvent être légaux.

Cette autorité ou ce pouvoir peuvent être de nature morale, comme l’autorité morale d’un leader syndical. À défaut d’autorité, il n’y a pas complicité par provocation. Cette énumération est limitative, il faut donc en caractériser au moins un, le cas échéant il n’y a pas complicité par provocation.

La fourniture d’instruction.

Fournir des instructions, c’est donné des renseignements, des informations, nécessaires à la commission de l’infraction principale.

Les instructions données doivent présenter une utilité pour l’auteur principal. Logiquement, on devrait exiger que l’auteur principal ce soit servi de ces informations mais la jurisprudence retient la complicité même si l’auteur principal n’a pas utilisé ces informations, ou en a utilisés d’autres. La jurisprudence réprime le complice même lorsque le moyen recommandé par le complice s’est révélé inefficace.

À la différence de la complicité par provocation, bien que le texte soit mal rédigé sur ce point, la présence d’un des cinq adminicules n’est pas ici nécessaire.

3§ L’élément moral de la complicité.

L’exigence de cet élément moral résulte du fait que l’alinéa 1 de l’art 121 – 7, dit que la complicité par aide ou assistance doit avoir été apportée sciemment. L’alinéa 2 concerne l’application d’une infraction et de la fourniture d’instruction pour commettre l’infraction.

Cet élément moral c’est le caractère intentionnel de la participation du complice, dès lors, il fau que le complice ait eu conscience du caractère licite, infractionnel, des actes de l’auteur principal. Il faut ensuite qu’il ait eu néanmoins la volonté de s’associer à cette infraction. Bien sûr la charge de la preuve pèse sur le ministère public et donc cette intention devait exister au moment de la provocation.

Il se peut que l’élément moral n’ait pas existé. On peut en toute bonne foi fournir une aide ou une assistance sans savoir que cela va être pour commettre une infraction.

On n’est pas complice par simple imprudence, simple négligence. Cette intention du complice pose deux difficultés.

Peut-on être complice d’une infraction non intentionnelle ?

Que fait-on lorsqu’il y a discordance entre intention du complice et l’infraction qui a été effectivement réalisée.

A)La complicité d’une infraction non intentionnelle.

Peut-on être complice d’une infraction non intentionnelle commise par l’auteur principal. Le complice ne peut pas avoir voulu participer à ce qu’il n’a pas pu prévoir. L’imprudence, la non-intention, exclue l’entente nécessaire entre l’auteur principal et le complice.

1) La distinction jurisprudentielle.

La jurisprudence est double.

Elle a d’abord posé le principe que la complicité est incompatible avec les infractions non intentionnelles dans la mesure où les principes de la complicité sont d’ordre général.

Néanmoins la jurisprudence préfère utiliser la coaction plutôt que la complicité. Elle considère l’intéressé comme un coauteur.

Arrêt 12 avril 1930, la chambre criminelle a considéré comme coauteur d’homicide involontaire celui qui prête en connaissance de cause un véhicule à une personne sans permis.

Arrêt 4 octobre 56, un employeur a donné l’ordre à son chauffeur alors que le camion n’est pas conforme et que le trajet est trop long. Le chauffeur cause un accident. Il est l’auteur principal du délit de blessures ou d’homicides involontaires, mais la cour d’appel avait déclaré les deux supérieurs complices de ce délit non intentionnel. Les deux ont formé un pourvoi, la chambre criminelle n’a pas cassé l’arrêt, mais par substitution de motifs les a considérés comme coauteur de l’acte et leur a appliqué la théorie de la peine justifiée.

Ces arrêts ne doivent pas être interprétés comme une indisponibilité d’appliquer les règles de la complicité aux infractions non intentionnelles, rien dans les textes ne l’interdit, simplement la jurisprudence estime que la coaction est un fondement moins compliquer, mieux adapter aux infractions non intentionnelles.

Les fautes non intentionnelles se sont considérablement diversifiées. En l’état de cette diversification, certaines de ces fautes permettent de faire une place à la complicité.

2) La distinction doctrinale.

La doctrine souligne qu’il ne faut pas confondre l’élément moral du complice et l’élément moral de l’infraction commise par l’auteur principal. Dire que la complicité est intentionnelle ne signifie pas que l’auteur principal doit nécessairement avoir commis une infraction intentionnelle. Le complice ne s’est peut-être pas intentionnellement associé aux résultats de l’auteur principal. Mais le complice s’est peut-être intentionnellement associé à l’acte qui a permis ce résultat.

Il faut distinguer de l’infraction intentionnelle commise par l’auteur principal.

La complicité commise par instigation est réprimée. En dehors de ces infractions matérielles il faut distinguer suivant qu’on est en présence d’une imprudence consciente et d’une imprudence inconsciente. C’est la faute de mise en danger délibérée.

Cette dimension consciente permet de retenir cette complicité. La jurisprudence a suivie dans un arrêt de la chambre criminelle du 6 juin 00, ou la chambre criminelle a accepté de retenir la complicité du risque causé à autrui de l’article 223 – 1 du Code pénal.

Il y a une dimension d’imprudence consciente dans cette faute caractérisée. On ne peut pas dire que la complicité est incompatible avec les intentions non intentionnelles.

B)L’adéquation entre l’intention du complice et l’infraction commise par l’auteur principal.

Le plus souvent l’auteur principal a réalisé l’infraction avec la même intention que celle du complice, on applique la règle de l’emprunt de criminalité.

Peut-on toujours parler d’emprunt de criminalité lorsqu’il y a discordance entre les deux et surtout si l’infraction accomplie par l’auteur principal est plus grave que celle à laquelle le complice avait voulu s’associer.

On distingue trois degrés de discordances :

La discordance est totale, le complice ne sera pas punissable, c’est le cas quand l’infraction réalisée reçoit une qualification différente de celle qui avait été projetée par le complice.

La discordance est partielle, la complicité reste punissable, la qualification de l’infraction n’a pas été fondamentalement modifiée. Le complice sera punissable et on lui appliquera les circonstances aggravantes réelles et mixtes, même s’il ne les avait pas voulus. Le complice devait prévoir toutes les qualifications dont le fait été susceptible, toutes les circonstances dont il pouvait être dégagé.

Si le complice était prêt à s’associer à n’importe quelle infraction. Il sera responsable de toute infraction effectivement commise par l’auteur principal.