Les différents recours en contentieux administratif

LESDIFFÉRENTSTYPES DE CONTENTIEUX ADMINISTRATIFS

— C’est le Code de Justice Administrative qui organise les règles du contentieux administratif. Il reprend un certain nombre de notions qui ont été antérieurement élaborées et définies par la jurisprudence elle-même.

— Le droit administratif tend à équilibrer les relations entre les administrations et les usagers. La procédure contentieuse administrative tend à la même chose, mais devant le juge administratif cette fois.

— Il y a une certaine souplesse en droit civil dans la saisine du juge, on peut formuler son recours en fonction de l’action que l’on veut porter devant le juge.

— En droit administratif c’est plus compliqué car il existe un petit nombre de recours disponibles pour saisir le juge. Cela contraint le justiciable à présenter son recours en fonction de ça. La forme du recours l’emporte sur l’action elle-même.

Deux théories élaborées en doctrine :

  • Edouard Laferrière (Vice-président du CE fin 19ème) : Sa classification repose sur les pouvoirs attribués au juge. Cela lui permet d’identifier quatre types de contentieux : oLe contentieux de pleine juridiction (Le plein contentieux) : Le juge a une palette très étendue de pouvoirs. Il peut annuler un acte administratif, condamner l’administration, réparer un dommage causé, tout comme réformer la décision administrative (En se substituant à l’administration)

o Le contentieux de l’annulation : Le juge ne peut faire qu’annuler l’acte administratif en cause.

o Le contentieux de la déclaration : Le juge ne peut faire qu’une déclaration sur le sens de l’acte en question, ou alors sur la légalité de cet acte. Même si l’acte est déclaré illégal, il reste en place dans ce type de contentieux.

o Le contentieux de la répression : Le juge administratif peut alors prononcer des sanctions. Cette classification relève du droit positif. Elle a des conséquences contentieuses : Dans le plein contentieux il faut recourir au ministère d’un avocat. Le problème de cette classification est qu’elle repose sur un élément formel, étranger au litige (Le pouvoir du juge).

  • Léon Duguit : Sa classification repose sur l’analyse de la question posée au juge.

o Pures questions de droit objectif : L’administration a-t-elle respectée les principes de légalité ? oQuestions de droit subjectif : Lorsque les droits d’un individu déterminé sont remis en cause.

On oppose désormais le plein contentieux objectif (Fiscal, électoral etc.) et le plein contentieux subjectif (Responsabilité de la puissance publique) au sein du plein contentieux, afin de lier les deux doctrines.

Sous-section 1 : Les contentieux des actes

— Les possibilités de contestation des actes de l’administration sont très largement ouvertes en France, contrairement à d’autres pays. Ce contentieux est bâti à partir d’un principe qualifié de principe fondamental du droit public, c’est le caractère exécutoire des décisions administratives. Cela signifie qu’une décision prise par l’administration s’applique a priori, et qu’elle doit être respectée. En échange de l’obéissance spontanée, on ouvre un recours devant le juge.

Maurice Haurioua qualifié ce caractère exécutoire de privilège du préalable. L’administration, pour imposer sa volonté n’a pas besoin de demander l’accord du juge avant d’agir. En conséquence, les recours contre ses actes/décisions doivent être faciles à mettre en œuvre.

§1 : L’annulation

— Annuler un acte administratif c’est le faire disparaitre rétroactivement au jour où il a été édicté et erga omnes. C’est le pouvoir dévolu au juge de l’excès de pouvoir. On remet l’ordonnancement juridique dans l’état d’avant la prise de l’acte ou de la décision concernée. — Ce pouvoir d’annulation va être exercé par le juge en fonction des règles de droit en vigueur au jour où l’acte a été pris, et non du jour où le juge statue. Si l’acte était légal, mais que par la suite il est devenu illégal, il ne peut être annulé (D’autres mécanismes entreront en jeu pour le faire disparaitre pour l’avenir).

— Cependant, cette annulation rétroactive est parfois source de conséquences pratiques difficiles. Ex : CE assemblée 11 mai 2004 AC ! Pour de simples problèmes de procédure d’élaboration d’un acte, des millions de situations individuelles étaient concernés. Si l’annulation avait été prononcée il aurait fallu demander à tous les chômeurs de reverser les sommes perçues. Le CE s’est donné le pouvoir de neutraliser la rétroactivité de l’annulation. Il peut donc ne la prononcer que pour le futur, à partir d’une date laissant le temps à l’administration de se préparer.

— D’autre part, l’annulation a lieu erga omnes. Il est normal que l’illégalité d’un acte soit constatée à l’égard de tous, même s’il n’y a qu’un seul requérant. L’autorité absolue de l’annulation prononcée par le juge de l’excès de pouvoir trouve ici sa justification. On ne pourra pas revenir sur cette décision, et cet acte ne pourra plus être invoqué dans un litige. C’est un moyen d’ordre public (Le juge peut le tirer à tout moyen et à toute époque)

— Le CE a fait en sorte que ce recours pour excès de pouvoir soit facilement accessible. CE 17 février 1950 DAME LAMOTTE : Le recours pour excès de pouvoir est ouvert, même sans texte, contre toute décision de l’administration. Mais ce principe ne vaut qu’à l’égard des décisions administratives (Acte unilatéral qui va déployer par lui-même des effets de droit à l’égard des tiers. Mais ça peut être aussi bien une décision règlementaire qu’une décision individuelle)

— A contrario, il faut comprendre que le recours pour excès de pouvoir n’est pas recevable contre un contrat administratif. Il y a néanmoins des limites :

  • Parfois il y a des clauses règlementaires dans les contrats administratifs. Ces clauses règlementaires sont des actes unilatéraux dans une enveloppe contractuelle et ils sont susceptibles d’être l’objet d’un recours pour excès de pouvoir : CE assemblée 10 juillet 1996 CAYZEELE.
  • La première dérogation se manifeste à l’égard du déféré préfectoral (Recours du préfet contre un acte illégal), c’est une forme de recours pour excès de pouvoir donc il est admit contre les contrats : CE section 26 juillet 1991 COMMUNE DE SAINTEMARIE.
  • Le CE a autorisé des tiers à un contrat de recrutement d’un agent public par contrat, dans le cadre d’un recours pour excès de pouvoir : CE section 30 octobre 1998 VILLE DE LISIEUX.

— L’individu qui effectue un recours pour excès de pouvoir est dispensé du ministère d’avocat en première instance.

§2 : La déclaration

— Cette demande de déclaration peut se présenter de deux façons :

  • Recours principal : L’objet même du litige est cette déclaration.
  • Recours incident : Le recours se greffe sur un autre recours déjà déposé.

— Les recours en déclaration peuvent relever aussi bien du contentieux objectif que du contentieux subjectif.

A)Le recours en déclaration d’inexistence

— Cela signifie que l’acte est d’une illégalité tellement aberrante que le juge se contente de dire qu’il n’a pas pu exister, et qu’il n’y a donc même pas besoin de l’annuler. L’effet est le même que dans le recours pour excès de pouvoir.

  • Intérêt pratique : L’acte déclaré inexistant ne saurait avoir déclenché un délai de recours, donc il n’y a pas de délai de recours.
  • Intérêt moral : Connotation morale envers l’administration.

— Ce recours est cependant très rare. C’est du contentieux objectif.

B) Le recours en appréciation de légalité

— Le juge ne se voit soumettre qu’un problème de droit objectif, comme pour le recours en déclaration d’inexistence. Le juge doit se prononcer sur la légalité d’un acte administratif unilatéral ou individuel. Mais ce recours ne peut pas être exercé par voie d’action, c’est un recours incident qui est exercé car la question de légalité de l’acte administratif en cause est apparue au cours d’un litige devant le juge judiciaire non répressif qui va sursoir à statuer. Ce qui compte c’est de connaitre la légalité ou non de l’acte, pas de l’annuler.

— Les juridictions répressives ont une plénitude de juridiction, ce qui signifie qu’ils sont juges de tous les incidents, et notamment des questions de légalité des actes administratifs (ARTICLE 111-5 CP)

— Le recours en appréciation de légalité n’existe pas entre juridictions administratives. Un juge administratif devant lequel est posée la question de la légalité d’un acte administratif pour lequel il n’est pas compétent (Ex. Le Tribunal Administratif pour un décret), ne peut pas poser de question préjudicielle. La juridiction sera alors compétente.

— Il n’y a pas de portée erga omnes de la déclaration de légalité. La décision revêt une autorité relative pour l’ordre administratif, alors que la décision revêt une autorité absolue pour l’autorité judiciaire (Seiller trouve que la position de la Cour de cassation est meilleure)

C)Le recours en interprétation

— Il permet de saisir le juge administratif pour qu’il donne le sens d’un acte. Le type d’acte est très variable : Un acte unilatéral, un contrat etc.

— On ne peut pas néanmoins le faire n’importe quand. Ce recours en interprétation n’est ouvert que s’il y a un litige sur le sens de cette disposition.

— Ce recours en interprétation relève soit du contentieux objectif soit du contentieux subjectif, et il relève aussi bien du contentieux par voie d’action que du recours incident.

§3 : La réformation

— Ce pouvoir de réformation des actes administratifs n’est pas à la disposition du juge pour excès de pouvoir. Il appartient donc dans certaines hypothèses au juge du plein contentieux (Ex. Contentieux fiscal, contentieux électoral, contentieux des installations classées pour la protection de l’environnement etc.)

— Dans ce cas, le juge administratif substitue sa propre appréciation à celle de l’administration, il se comporte comme un administrateur. C’est étonnant, par rapport au principe de séparation des pouvoirs.

— Lorsque le juge administratif utilise ce pouvoir, il va statuer comme l’a fait l’administration, en se prononçant au regard de la situation au jour où il statue (Contrairement au recours pour excès de pouvoir). Il peut donc tenir compte d’une évolution des circonstances postérieure à la décision attaquée.

Sous-section 2 : Les contentieux des personnes

— Ici le juge administratif est saisi de questions qui se rapportent à la situation subjective, individuelle d’un individu ou de plusieurs personnes. C’est un contentieux subjectif, en conséquence de quoi cela relève du plein contentieux.

§1 : La protection des droits

— Ici le juge administratif est saisi de questions n’étant pas fondamentalement étrangères à celles du juge judiciaire non répressif. Mais dans cette hypothèse, le juge est saisi d’un recours contre un acte, ce qui est obligatoire pour une juridiction administrative. C’est l’exigence de la décision préalable, pour qu’on soit certain qu’il y a bien un litige. Le recours est donc dirigé contre l’acte par lequel l’administration se prononce sur la situation subjective de cette personne.

Les catégories sont limitées :

  • Responsabilité extracontractuelle de l’administration
  • Litiges contractuels qui opposent des parties à un contrat administratif

§2 : La répression des infractions

— Ici le juge administratif se comporte comme un juge judiciaire répressif. Il est saisi du comportement d’un individu dont on estime qu’il a été contraire à des textes et qu’il doit être réprimé. Le juge administratif peut dès lors prononcer des sanctions pénales.

— Le juge administratif prononce une sanction juridictionnelle. Il faut qu’il y ait une base textuelle, mais celles-ci sont assez peu nombreuses :

  • Répression des contraventions de grande voierie : Atteintes portées au domaine public.
  • Violation des règles comptables et financières dans le domaine public : La Cour des comptes et la Cour de discipline budgétaire et financière.
  • Sanctions à l’égard des membres d’une profession particulière : Sections disciplinaires des Ordres etc.

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