L’indivisaire : les droits de partage, d’usage et de jouissance

Les droits des indivisaires

L’indivision est la situation juridique dans laquelle deux ou plusieurs personnes sont propriétaires ensemble d’un même bien suite à un décès par exemple ou à une acquisition. En pratique, l’indivision peut être souhaitée (acquisition d’un bien à 2 ou plus…) ou subie (à la suite d’un décès, d’une séparation…). Les indivisaires s’exposent alors aux risques nés des contraintes de l’indivision, la principale étant l’unanimité requise pour les prises de décisions les plus importantes.

A) Droits au partage

Nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage peut toujours être provoqué à moins qu’il n’y est été sursis par jugement ou convention : => article 815 al 1er du Code Civil

Le droit au partage est le principe mais il y a des exceptions, par ailleurs il convient de souligner que l’établissement d’un compte entre l’indivision et l’indivisaire aura été nécessaire au début.

1) Le principe

L’indivision est une situation provisoire, article 815 al 1er. Le principe a été maintenu en 1976 et en 2006 : «tout indivisaire a en principe la possibilité de demander le partage».

  • Ce droit de solliciter le partage est insusceptible d’abus, il importe peu que l’indivisaire poursuive un but légitime ou malicieux, —> Civ , 28 décembre 1866
  • Ce droit est imprescriptible ce qui signifie que l’indivisaire peut l’exercer même si l’indivision a duré plus de 30 ans : —> Requête, 13 décembre 1937
  • Le partage a un effet déclaratif et non point translatif de droit. Des lots concrets sont substitués à des parts abstraites dont les indivisaires étaient titulaires. En vertu de cet effet déclaratif, chacun des co-partageants est réputé propriétaire des biens qui lui sont attribués à la date du commencement de l’indivision et pas à la date du partage. Réciproquement chacun sera censé ne pas être propriétaire des biens attribués aux autres indivisaires: —> Chambres Réunies, 5 décembre 1907

Le partage a un effet rétroactif, la période de l’indivision va être fictivement effacée.

Conséquences : les actes irréguliers accomplis par un indivisaire seront rétroactivement validés s’ils ont été effectués sur un bien dont l’indivisaire qui avait agi a été alloti au contraire ces actes irrégulièrement accomplis seront privés d’efficacité s’il tombe dans le lot d’un autre indivisaire.

2) Exceptions

Art 815 in fine du Code Civil.

a) Le maintien conventionnel de l’indivision

Art 1873-2 du Code Civil : les co-indivisaires peuvent décider à l’unanimité et par écrit de demeurer dans l’indivision pour une durée de 5 ans maximum renouvelable par décision expresse des parties.

Cela étant même dans cette hypothèse le partage peut être provoqué avant l’arrivée du terme convenu dans le cas où l’indivisaire a de justes motifs de le faire, => article 1873-3 al 1er du Code Civil.

b) Le maintien judiciaire dans l’indivision

Article 820 al 1er du Code Civil

Le tribunal peut surseoir au partage pour 2 années au plus,

Si la réalisation immédiate du partage risque de porter atteinte à la valeur des biens indivis. Partage inopportun.

Si l’un des indivisaires ne peut reprendre l’entreprise agricole, commerciale, industrielle, artisanale, libérale dépendant de la succession qu’à l’expiration de ce délai. Cette disposition a été introduite 1976 en raison du service national ; elle a cependant été maintenue en 2006.

Des indivisaires entendent demeurer dans l’indivision de lui attribuer sa part en valeur ou en nature

Article 824 du Code Civil, on parle d’attribution éliminatoire ou encore partage partiel.

3) Avance en capital

Les indivisaires peuvent consentir à l’un d’entre eux une avance en capital.

Faute d’accord des indivisaires, le Président du TGI peut ordonner une telle avance en capital sur les droits de l’indivisaire dans le partage à intervenir à concurrence des fonds disponibles, article 815-11 al 4.

L’avance ne serait pas excéder la part qui reviendra à l’indivisaire lors du partage, —> Civ 1, 5 février 1980

4) Règlement des comptes

Un indivisaire est fréquemment créancier ou débiteur de l’indivision.

  • Il pourra être créancier, à la suite de paiement qu’il a effectué de dette de l’indivision ou encore en raison d’amélioration ou de réparation effectuées sur les bien indivis ou encore au titre de la rémunération de sa gestion.
  • Un indivisaire peut être débiteur de l’indivision ; s’il a encaissé des créances de l’indivision ou perçu des fruits et des revenus au profit de provision, ou encore lorsqu’il a jouit privativement de la chose indivise. Il pourra aussi être débiteur s’il a perçu des fruits ou des revenus de l’indivision.

C’est la raison pour laquelle l’établissement d’un compte de l’indivision est un préalable indispensable pour déterminer la masse à partager. Après la balance on retient le solde créditeur ou débiteur de chacun des indivisaires vis à vis de l’indivision et seulement disponible à la clôture du compte. Le solde est exigible seulement qu’à la clôture du contrat.

B)Droits d’usage et de jouissance

Chaque indivisaire peut user et jouir personnellement des biens indivis et non privativement et dans la mesure comptabilité avec les droits des autres indivisaires, article 815-9 al 1er.

Il doit respecter la destination de la chose indivise. Il doit respecter les droits concurrents de ces co-indivisaires. A défaut d’accord entre les indivisaires une décision de justice pourra intervenir pour repartir à titre provisoire l’utilité du bien indivis.

L’exercice privatif exclusif de l’usage et de la jouissance de la chose indivise sauf convention contraire, oblige à verser une indemnité d’occupation à l’indivision, et cela a pour créancier l’indivision et non chaque indivisaire : —> Civ 1, 14 novembre 1984, article 815-9 alinéa 2 du Code Civil.

Le montant de l’indemnité équivaudra à la valeur locative du bien sans toutefois le juge n’est pas lié à cette valeur locative.

C)La cession des droits indivis

Toute indivision, les parts des indivisaires sont exprimées par des fractions on parle de «côte part».

Il s’agit de part pendant la durée de l’indivision de part abstraite qui se transforme en des lots concrets.

Ces parts abstraites sur des masse indivise considérées dans sa globalité sont des droits individuels à valeur patrimoniale aussi bien est-il loisible à chacun de céder ou de donner sa côte part. La côte part ne peut pas être saisie par un créancier personnel de l’indivisaire. L’indivisaire n’est pas prisonnier de son titre.

L’objet de cette cession peut être :

L’ensemble des droits de l’indivision de l’indivisaire

Ses droits déterminés sur tel ou tel bien.

  • La cession est aléatoire, s’il cède l’ensemble des droits indivis il n’y pas de difficulté en revanche si l’indivisaire cède seulement son quart dans tel bien et non pas dans la masse indivise il faudra attendre l’issue du partage. Si le bien ne tombe pas dans son lot, l’action sera dépourvue