Les éléments constitutifs de la contrefaçon de marque

Les éléments constitutifs de la contrefaçon

Aux termes de l’article L. 716-1 du Code de la propriété intellectuelle, l’atteinte portée au droit du propriétaire de la marque, telle que définie aux articles L. 716-2 et L. 716-4 du Code de la propriété intellectuelle, constituent une contrefaçon.

Les actes de contrefaçons de marque peuvent être regroupés en 4 catégories :

  • · La contrefaçon par reproduction(§ 1)
  • · La contrefaçon par imitation (§ 2) ;
  • · L’usage de marque (§ 3) ;
  • · La suppression, la modification ou l’apposition de marque (§ 4).
  • 1 : La contrefaçon par reproduction

La contrefaçon par reproduction peut se réaliser sous des formes différentes :

  • · La contrefaçon servile : c’est la reproduction fidèle du signe ;
  • · La contrefaçon quasi servile : le signe présente de fortes ressemblances avec le signe protégé, de sorte qu’il laisse subsister l’apparence d’une identité totale entre les deux signes ;
  • · La contrefaçon par adjonction d’élément du signe de la marque : il s’agit notamment de l’adjonction du terme tel qu’une formule, une façon, un système, etc.

En cas de reproduction d’un élément d’une marque complexe, la contrefaçon sera réalisée si cet élément est isolable du tout.

Il faut également que l’élément soit protégeable en lui-même et qu’il présente un caractère essentiel par rapport à l’ensemble complexe que constitue la marque. On en déduit que, lorsque l’élément reproduit ne se « fond » pas dans le nouvel ensemble et ne forme pas un tout indivisible, lui faisant perdre son individualité, la contrefaçon est reconnue.

Dans ces hypothèses, la contrefaçon est réalisée dès lors que la marque d’autrui est matériellement reproduite sans le consentement du titulaire, et indépendamment de tout usage,à quelque titre que ce soit, et indépendamment également de toute commercialisation. On est donc sur une approche très stricte pour les tiers et pour les titulaires de la marque.

  • 2 : La contrefaçon par imitation

La contrefaçon par imitation est réalisée lorsqu’il existe entre les deux signes des ressemblances susceptibles de provoquer dans le public un signe de confusion. Ce risque de confusion peut être généré par une architecture commune du signe, une prononciation voisine, un graphisme voisin, une signification proche ou contraire. L’architecture commune peut tenir au nombre de lettres ou de chiffres qui constituent le signe, ou le nombre de syllabes, par exemple.

Parfois, une inversion de lettre fait que l’on n’aura pas de signes identiques, mais dans l’esprit du public, il n’y a pas de grande différence. La contrefaçon par imitation est retenue dès lors que la marque d’autrui est matériellement imitée, indépendamment de tout usage, et indépendamment de toute commercialisation.

En jurisprudence, la contrefaçon par imitation a été retenue, par exemple, dans les hypothèses de confusion phonétiques et visuelles des signes.

La contrefaçon par imitation peut être caractérisée lorsque la marque imitante est la traduction de la marque imitée, à condition que le terme étranger soit connu par le public français.

On peut avoir un raisonnement par synonyme, avec le même pouvoir évocateur, comme une marque qui s’appelait «L’eau stimulante©», et qui a été reconnue comme une contrefaçon de «L’eau dynamisante©» de Clarens©.

  • 3 : L’usage de la marque

L’atteinte qui est ici visée est celle où un tiers non autorisé par le titulaire utilise une marque authentique ou une marque reproduite ou imitée pour désigner des produits ou services identiques ou similaires, couverts par la marque. L’usage d’une marque peut se réaliser sous des formes différentes.

Exemple : il peut s’agit de l’utilisation de la marque d’un tiers à titre de dénomination sociale d’enseigne, de référence publicitaire, ou de nom commercial, ou encore par la commercialisation d’un produit authentique au mépris d’une clause contractuelle d’un contrat de distribution sélective.

Ce cas de contrefaçon ouvre notamment l’usage des marques dans le fonctionnement des moteurs de recherche, et plus particulièrement d’un moteur de recherche en particulier : Google©, ainsi que d’un système technique et commercial proposé par Google© que l’on appelle les Adware©, qui est un système publicitaire permettant d’afficher en marge des résultats de recherche sur internet des liens commerciaux vers des sites des annonceurs à partir de mots clés choisis et achetés par ces derniers. Dans le fonctionnement, il apparaît que lorsque des recherches sont effectuées sur Google©, elles renvoient grâce à l’utilisation de marques, à des sites d’annonceurs qui ne sont pas agréés pour distribuer ces marques. Généralement, il s’agit de sociétés concurrentes.

La question s’est posée de savoir si, en proposant ces mots publicitaires, Google© réalisait de la contrefaçon. Ce contentieux a fait l’objet d’un arrêt qui a été tranché par la CJUE, et qui impliquait Vuitton© (CJUE, 23 mars 2010).

Pour la CJUE, le prestataire d’un service de référencement sur internet qui stocke en tant que mot clé un signe identique à une marque et qui organise l’affichage d’annonce à partir de celui-ci, ne fait pas un usage de ce signe dans la vie des affaires, et à ce titre il ne peut voir sa responsabilité engagée au titre de la contrefaçon.

En revanche, dans chaque cas, les juridictions nationales déterminent si le rôle par le moteur de recherche est passif ou purement technique, auquel cas sa responsabilité ne peut être engagée, ou si au contraire il est actif, ce qui peut être le cas dans l’hypothèse où le moteur participe à la rédaction du message commercial accompagnant le lien promotionnel.

L’usage de marque doit être réalisé pour être condamnable à des fins commerciales ; il n’est pas illicite s’il est réalisé à des fins privées. S’ajoute à cela que l’usage illicite d’une marque n’implique pas au préalable une contrefaçon par reproduction, alors que l’usage d’une marque reproduite ou imitée exige au préalable la contrefaçon par reproduction ou imitation.

L’article L. 713-6 du Code de la propriété intellectuelle prévoit une exception lorsque l’usage constitue une référence nécessaire pour indiquer la destination d’un produit ou d’un service, à condition qu’il n’y ait pas de confusion dans l’origine.

Exemple : les fabricants d’accessoires ou de pièces détachées.

  • 4 : Suppression, modification ou apposition de marque

La suppression ou la modification d’une marque régulièrement apposée sur un produit constitue une contrefaçon de marque, à la condition qu’elle soit réalisée à des fins commerciales. Si un tiers appose matériellement une marque, un signe, à des fins commerciales, et ce sans l’autorisation de son propriétaire, sur des produits ou des services authentiques, il sera possible que l’on soit dans un cas de contrefaçon, bien que l’hypothèse reste marginale.

Le plus fréquemment, la position se fait sur un produit ou un service non authentique, c’est-à-dire des produits ou services qui ne proviennent pas du titulaire de la marque. Cette forme de contrefaçon est constituée notamment par le délit de remplissage, qui consiste à remplir des récipients revêtus de la marque authentique avec des produits qui ne proviennent pas du titulaire de la marque. C’est le plus gros de la contrefaçon.

Exemple : on appose le signe reproduit sur un sac non authentique sans l’autorisation du titulaire ; c’est le cas pour les produits de luxe, les médicaments, etc.

  • 5 : Autres actes de contrefaçon

L’on va inclure l’importation ou l’exportation de marchandises présentées sous une marque contrefaite. L’on va également inclure la détention, la vente ou la mise en vente, la fourniture ou l’offre de fourniture des produits ou des services sous une marque contrefaite,dès lors qu’une personne détient, sans motif légitime, des produits qu’elle sait revêtus d’une marque contrefaite ou qui, sciemment, procède à la vente ou à la fourniture des produits ou services sous une telle marque.

Dans tous ces cas de figure, il faut que la personne agisse à des fins commerciales. Le Code de la propriété intellectuelle réprime ceux qui auront sciemment livré un produit ou fourni un service autre que celui qui leur a été demandé sous une marque enregistrée, protégée. La livraison ou la fourniture d’un autre produit ou service doit avoir été faite en connaissance de cause.