Les grands principes du droit des contrats

LES PRINCIPES GÉNÉRAUX  DU CONTRAT

  Découlent de l’autonomie de la volonté. Elle subit des atteintes de plus en plus fortes du fait de la société de Contrat. La définition du contrat met l’accent sur le rôle des volontés dans la création d’obligation. C’est la volonté humaine qui va créer du droit. La théorie du contrat est fortement marquée par une doctrine de philosophie juridique : principe de l’autonomie de la volonté.

Le contrat repose uniquement sur la volonté des parties qui devient la source des droits acquis et des charges assumées par les parties. Cette doctrine est apparue au 18e siècle, s’est développée à cette époque. Emmanuel Kant justifiait ainsi le principe de l’autonomie de la volonté : « Quand quelqu’un décide quelque chose pour une autre personne, il se peut que quelqu’un lui fasse justice. Mais toute injustice est impossible quand il décide pour lui. » Fouyé : « Qui dit contractuel, dit juste. »

Lorsqu’une personne consent à quelque chose, le contenu ne peut pas être injuste. Cela était peut-être vrai à la période de Kant, n’est plus nécessairement vrai aujourd’hui (personnes qui ne se trouvent pas sur un pied d’égalité) Principales conséquences des principes dérivés de l’autonomie de la volonté :

          consensualisme

  •           liberté contractuelle
  •           force obligatoire du contrat légalement formé
  •           sécurité des transactions juridiques

De nombreuses atténuations sont aujourd’hui apportées à la doctrine et les principes dérivés ont perdu, dans une certaine mesure, leur force.

Ce cours d’Introduction au sciences juridiques est divisé en plusieurs fiches (notion de droit, sources du droit, biens, contrat, organisation judiciaire française

I ) L’autonomie de la volonté et ses conséquences

  • Principe: égalité entre les citoyens

L’autonomie de la volonté est la source et la mesure des obligations nées du contrat.

  • Source : les règles mises en place dans le contrat ont valeur de loi dans le contrat.
  • Article 1134 du Code Civil : le contrat est obligatoire dès qu’on y a adhéré.
  • Mesure : fixer l’étendue des volontés dans le contrat.
  • Principe du consensualisme : on met en place des contrats consensuels sans forme particulière du seul fait de la liberté
  • Liberté et égalité contractuelle: chacun est libre de contracter et au même pied d’égalité que l’autre.

 

  • La liberté contractuelle signifie tout d’abord que chaque individu a la liberté de contracter ou de ne pas contracter. Toute personne a ainsi, en principe, le droit de contracter avec le contractant de son choix.
  • Arrêt de la chambre commerciale du 7 avril 1998 : « Un concédant a le droit de traiter avec le cocontractant de son choix. Il n’est pas tenu de motiver sa décision ni de communiquer les critères selon lesquels il exerce son choix. Toutes les sociétés qui ont des concessionnaires ont le libre choix de leur cocontractant et elles n’ont pas à communiquer leur critère. Ceci n’est plus tout à fait vrai aujourd’hui. Diverses lois sanctionnant la discrimination interdisent de choisir les cocontractants selon certains critères.
  • La liberté contractuelle signifie aussi que les parties si elles décident de faire le contrat ont la liberté de déterminer le contenu sous réserve que le contenu du contrat ne heurte pas l’ordre public ou les bonnes mœurs. Art. 6 CC :  « on ne peut déroger par des conventions particulières aux lois qui intéressent l’ordre public et les bonnes mœurs. » A contrario, dès lors que le contenu du contrat ne heurte pas l’ordre public ou les bonnes mœurs, il est librement déterminable.
  • Ex. d’un contrat qui heurte les bonnes mœurs : Art. 227-27 Code pénal prohibe le tourisme sexuel à l’étranger touchant des mineurs.

 

II ) Les atteintes au principe

A- Les atteintes au consensualisme

Il ne suffit pas d’être d’accord, il faut respecter la forme.

 Le consensualisme qui met l’accent sur le pouvoir de la volonté individuelle, a d’abord été développé par l’Eglise canonique fin 16e siècle avant de s’imposer en droit français. Loysel exprimait déjà : « On lit les boeux par les cornes et les hommes par leurs paroles. » En règle générale, la formation du contrat repose sur le simple accord des parties, elle n’est soumise à aucune condition de forme. L’accord de volonté des parties suffit pour faire un contrat. Il n’est pas nécessaire de rédiger un écrit ou de respecter une autre condition de forme. La Cour de cassation affirme régulièrement et rappelle la force du consensualisme.

          3e chambre civile 27 mai 1990 BC 2e partie n°225 « le consentement des parties n’est pas soumis à aucune condition de forme. »

          1e chambre civile 9 mars 1999. Le contrat d’assurance doit être rédigé dans un but probatoire pour en apporter la preuve. article 1341 CC.

          1e chambre civile 15 mars 2005 Contrat, Concurrence, Consommation (CCC) n°125 notes Levenein « Le mandat peut être donné par acte authentique, acte sous seing privé ou verbalement.

L’écrit est exigé comme une condition de preuve et non de validité.

Le consensualisme s’oppose au formalisme qui subordonne la validité d’un contrat au respect de certaines formes : rédaction d’un acte notarié, sous seing privé. Parfois, la validité d’un contrat sera subordonnée à l’accomplissement de certaines formes (enregistrement de l’acte dans un certain délai). Le formalisme est un gage de sécurité, car il protège non sans raison, les esprits faibles contre les consentements irréfléchis. Lorsqu’on écrit des choses, on prend la mesure de la portée de l’engagement, on sera protégé contre des consentements irréfléchis.

Gering : « Elle n’eut géré de l’arbitraire, la forme est la sœur jumelle de la liberté. Elle sert en effet de contrepoids à l’action de la liberté vers la licence. »

Le droit français préfère en règle générale la simplicité du consensualisme. Le plus souvent une condition n’est exigée que pour prouver l’existence du contrat. L’écrit est utilisé ad probationem et non ad validitatem. Ecrit : instrumentum destiné à prouver le negotium (opération). Opération que l’écrit constate.

Le code civil considère en règle générale que le consentement suffit et exige que le consentement soit libre et éclairé et surtout qu’il soit exempt de vices, sanctionne les vices de consentement.

Le principe du consensualisme a toujours admis des exceptions : Contrats non consensuels. => Contrats solennels et contrats réels.

  •     Contrats solennels sont des contrats dont la validité est subordonnée à l’accomplissement de certaines formes. Cependant, la solennité doit résulter d’un texte clair, précis et il n’y a contrat solennel que lorsque la forme est exigée pour la validité du contrat. Ex : contrat de mariage : contrat conclu entre les futurs époux avant le mariage et qui organise les relations financières entre les futurs époux. Le contrat de mariage est solennel parce qu’il doit obligatoirement être rédigé par acte notarié. article 1494 CC. Autre ex : la donation qui est l’acte par lequel une personne transfert gratuitement la propriété d’un de ses biens. La donation est réalisée par acte notarié art. 931 CC. Pour la formation d’autres contrats, un simple écrit sous seing privé est parfois exigé (mandat donné à un agent immobilier, mandat donné à un intermédiaire des les achats des espaces publicitaires). Ces deux contrats doivent passer sous seing privé.
  •     Contrats réels (res = chose).Ce sont des contrats qui ne se forment pas par l’échange de consentements mais par la remise de la chose objet du contrat. Ex : dépôt, gage, prêt. La Cour de cassation a cependant apporté un tempérament au caractère réel du contrat. Arrêt de la 1e chambre civile du 28 mars 2000 BC Ie partie n°105. Le prêt consenti par un professionnel de crédit n’est pas un contrat réel. Une banque consent un prêt à un client, le prêt se forme au moment de l’échange des consentements.

Un contrat solennel ou réel est nul (non valable) si la formalité exigée n’a pas été accomplie ou si la chose objet du contrat n’a pas été remise. D’autres tempéraments au consensualisme sont apparus au 20e siècle. Le principe du consensualisme est apparu dangereux pour certains contractants susceptibles de s’engager à la légère. On a assisté à la fin du 20e siècle à un renouveau du formalisme informatif. Pour toute sorte de contrat, p. ex le contrat d’assurance-vie, le contrat doit comporter par écrit certaines mentions destinées à informer le consommateur.

Le législateur a prévu que la validité du contrat suppose une mention manuscrite (écrite de la main) de l’un des contractants.

L’article 22-1 de la loi du 31 décembre 1989 relative au bail d’habitation exige que la caution rédige de sa main une certaine mention.

Le formalisme contemporain est parfois lié à des considérations fiscales. Le fisc veut déjouer certaines fraudes. Certains textes à caractère fiscal exigent que certaines formalités soient accomplies pour que l’acte soit valable. Ancien art. 1840A.

Les promesses unilatérales de vente d’immeubles ou de fond de commerce constatées dans un acte sous seing privé doivent, à peine de nullité, être enregistrées dans les 10 jours de leur conclusion.

 

B- Les atteintes à la liberté contractuelle

Selon l’Article 6 du Code Civil : on ne peut déroger aux lois qui intéressent l’intérêt public ou les bonnes mœurs loi impérative

  • On impose de plus en plus souvent l’obligation de contracter
  • Loi de 1958 : obligation de contracter un contrat de responsabilité civile si l’on veut conduire.

 

  • La liberté contractuelle est la traduction juridique du libéralisme économique défendu à partir du 19e siècle (Alan Smith). » Laisser faire, laisser passer. » La liberté économique, ne doit pas être entravée par l’Etat, par les règles de droit. Seule restriction : réserve de l’ordre public et bonnes mœurs. En 1804, l’ordre public se réduisait à peu de choses, très grande place pour la liberté contractuelle. La liberté contractuelle n’est pas sans danger, peut transformer le contrat en un instrument de pouvoir, de domination d’une partie sur l’autre.
  • En 1943 : «La liberté contractuelle permet aux entrepreneurs de légiférer par contrat d’un manière substantiellement autoritaire sans prendre l’apparence de formes autoritaires. »
  • Ces considérations ont conduit à une remise en cause de la liberté contractuelle. Celle-ci reste un grand principe du droit des obligations, mais le principe a été, depuis 1804, battu en brèche par toutes sortes de lois qui imposent certaines clauses dans les contrats, qui prohibent certaines clauses dans les contrats. Aujourd’hui, un clivage se dessine entre les contrats d’affaires pour lesquels la liberté contractuelle est la règle et les contrats conclus par des consommateurs, les contrats exposant la personne même. (Transport de personnes).
  • Si le principe de la liberté contractuelle conserve une très grande place, il y a bon nombre de limites à la liberté contractuelle, bon nombre de clauses interdites. Hypothèses dans lesquelles on va imposer des contrats. P. ex l’assurance automobile.
  • Aujourd’hui, il y a un clivage important, la liberté contractuelle est la règle, les contrats exposant la personne humaine, la liberté s’efforce devant la loi qui doit retrouver sa force lorsqu’il s’agit de protéger la personne humaine. Il y aura alors une liberté contractuelle très limitée.
  • Arrêt de la Cour d’appel de Versailles du 5 avril 2002 concernant le rallye Grenade Dakar, avec une clause qui exonérait l’organisateur du rallye de toute responsabilité en cas d’accident matériel ou corporel. La Cour d’Appel a dit que cette clause était non valable, car la clause est contraire à l’ordre public. Cet arrêt a été confirmé par d’autres arrêts, par ex la Cour de cassation qui a rendu un arrêt en 2005.
  • Le principe de la liberté contractuelle demeure. Quelle était la valeur de ce principe ? Les lois ordinaires ne pouvaient déroger au principe. Le Conseil constitutionnel, dans une décision du 20 mars 1997, a considéré que le principe de la liberté contractuelle n’a pas en lui-même valeur constitutionnelle. La liberté contractuelle peut être protégée dans une certaine mesure à travers la liberté découlant de l’article 4 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen. « On peut tout faire ce qui ne nuit pas à autrui. »

 

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