Les méthodes de recrutement en droit du travail

LES OPÉRATIONS DE RECRUTEMENT

Graphologie, astrologie, numérologie, morphopsychologie : un inventaire des sciences parallèles ? Non, des méthodes de recrutement utilisées par certaines grandes entreprises françaises. En matière de recrutement, le principe en France était la liberté de l’employeur.

L122-45: prohibe les discriminations et interdit au chef d’entreprise de prendre en compte certaines caractéristique du candidat au moment de l’embauche (origine, sexe, mœurs, état de santé…).

L121-6 à L121-10:

– L121-7 et 8 : relatifs aux méthodes de recrutement utilisées par l’employeur et dispositif de collecte d’information mis en place par l’employeur au moment de l’embauche. Ces articles exigent que ces dispositifs soient portés à la connaissance du candidat à l’embauche.

– L121-6 : concerne les informations qui peuvent être demandées au candidat lors de l’embauche. Cet article précise que ces informations ne peuvent avoir pour finalité que d’apprécier la capacité du candidat à occuper l’emploi proposé ou ses aptitudes professionnelles. Ces informations doivent présenter un lien direct et nécessaire avec l’emploi proposé ou l’évaluation des aptitudes professionnelles.

Aujourd’hui, pas d’arrêt de cassation qui applique ces dispositions. D’autre part, le texte ne prévoit pas les sanctions donc il y a un problème d’effectivité.

Mais L121-6 peut avoir une certaine importante concernant l’appréciation des vices du consentement lors de la formation du contrat de travail.

En 1992 a été commandé un rapport visant à envisager des mesures contre la dérive du processus de recrutement. Ce rapport c’est le rapport Lyon Caen. Le rapport dans ses conclusions propose un certain nombre de mesures visant à encadrer le recrutement. Sont ainsi proposés : la création d’une commission d’évaluation technique du recrutement, la mise en place d’une obligation de motiver le refus de recruter ou encore l’instauration de diplômes universitaires de recrutement.
Certaines de ces mesures seront reprises par une loi, la loi « Aubry » du 31 décembre 1992.
Cette loi va encadre le recrutement afin d’en limiter les excès et d’ouvrir des droits aux candidats s’estimant floués en imposant une certaine forme de transparence.
La loi, qui est la Loi Aubry du 31 décembre 1992, a inséré de nouveaux articles dans le code du travail. Ces articles imposent des règles aux employeurs comme aux candidats.

LES REGLES IMPOSEES AUX EMPLOYEURS

Les techniques utilisées doivent avoir pour seul but de vérifier la capacité du candidat à occuper l’emploi proposé ou ses aptitudes professionnelles.
Ceci est prévu par l’article 121-6 du Code du travail.
On a voulu limiter l’emploi de techniques hasardeuses ou discriminatoires. La morphopsychologie (système d’interprétation psychologique fondé sur le classement d’individus en types et la correspondance entre les signes physiques et les tendances ou émotions), par exemple, outre son caractère scientifique incertain, ne satisfait pas à cette condition de pertinence des techniques utilisées.
L’emploi de toute méthode visant à vérifier autre chose que les aptitudes professionnelles du candidat est illégal et peut être dénoncée par le salarié.
La victime peut alors saisir le comité d’entreprise ou le représentant du personnel, ou agir directement en justice.

Les méthodes de recrutement doivent être connues des candidats, des salariés et du comité d’entreprise.
Ceci est prévu par les articles L121-7 et L121-8 du Code du Travail.
L’employeur ne peut faire passer des tests « en cachette », il doit informer les représentants du personnel des procédures de recrutement et le candidat à l’embauche doit en être lui-même informé.
Le candidat détient donc un véritable droit à l’information qui peut être invoqué devant la justice.

Les informations obtenues sont confidentielles.
Ceci est prévu par l’article L121-7 du Code du travail.
L’employeur n’a pas le droit de communiquer les informations qu’il a recueillies sur vous sans votre accord. Ceci serait une violation de vos droits pouvant ouvrir droit au versement de dommages et intérêts.

Le salarié ou candidat à l’embauche a le droit d’obtenir les résultats des tests pratiqués.
Ceci est également prévu par l’article L121-7 du Code du travail.
Apres un entretien vous pouvez réclamer les résultats des tests, l’employeur est obligé de vous les communiquer.

Il ne doit pas être fait de discriminations dans le choix du candidat.
Sont estimées arbitraires des discriminations fondées sur la race, le sexe, l’appartenance syndicale, l’état de santé, l’origine.
Le problème ici sera celui de la preuve. En effet comment prouver que l’on est la victime d’une discrimination ?
Le principe en droit français est la non-motivation du refus de recruter, le silence de l’employeur le protègera donc. Les seuls recours seront ceux contre un employeur ayant affiché ou reconnu le caractère discriminatoire de sa décision. Ainsi l’employeur écrivant à un candidat qu’il ne l’a pas retenu du fait de sa nationalité, pourra être condamné.
Cependant, une directive européenne prévoyant le renversement de la charge de la preuve devrait sous peu être insérée en droit français. Cela veut dire en clair que se sera à l’employeur de prouver qu’il n’y a pas eu discrimination et non plus, comme c’est le cas, au candidat de prouver le caractère discriminatoire de la sélection.

LES RÈGLES IMPOSÉES AUX CANDIDATS

Les candidats doivent être sincères dans les réponses qu’ils donnent aux questions pertinentes.
Ceci est prévu par l’article L121-6 du Code du travail.
Si l’employeur est obligé de ne poser que des questions ayant un lien direct et nécessaire avec l’emploi proposé, le candidat est lui tenu d’y répondre de « bonne foi ». Ainsi on ne peut faire de fausse déclarations ou d’oubli volontaire quant à ses qualifications professionnelles, ses diplômes…
Le cas échéant, le candidat se rend coupable d’un dol qui conduira au licenciement, voire au paiement de dommages et intérêts en faveur de l’employeur.

Ils ont le droit, dans certains cas, de garder le silence, voire de mentir.
Il est prévu que l’employeur ne pose que des questions pertinentes par rapport au but de l’entretien : l’attribution du poste.
S’il ne respecte pas cette condition et pose des questions sans rapport avec le poste, le candidat peut ne pas répondre voire même mentir. Ainsi, une société avait licencié un employé n’ayant pas déclaré une condamnation pénale antérieure, la Cour de cassation a qualifié ce licenciement d’abusif car ce fait était sans incidence sur l’activité exercée (Cour de cassation, 25 avril 1990)
La justice reconnaît donc un certain droit au silence et au mensonge dans la mesure ou les questions posées sont en elles même illégales.

Toutes ces règles étant ce qu’elles sont, des règles souvent méconnues et peu usitées par le candidat qui se trouve isolé, la loi de 1992 a inséré dans le code du travail un article donnant pouvoir aux délégués du personnel de diligenter une procédure rapide d’enquête en cas d’atteinte aux libertés individuelles dont pourraient être victimes les candidats en phase de recrutement.
Cet article c’est l’article L422-1-1.
Il conduit en pratique à permettre au candidat de bénéficier de l’aide des représentants du personnel qui sont habilités à agir pour lui.

Voici donc les principales règles relatives à la protection du candidat face aux techniques de recrutement. Certes ce ne sont que des règles de droit et beaucoup se découragent à l’idée d’engager une action en justice. Néanmoins elles protègent le candidat et celui ci sans aller jusque devant la justice peut au moins faire valoir ses droits lors d’un entretien abusif ou illégal.