Les obligations du commissionnaire de transport

Les obligations du commissionnaire

Le commissionnaire a promis d’organiser le transport de bout en bout afin que la marchandise parvienne à destination en bon état et à la date prévue. Il s’agit d’une obligation de résultat. Parfois, les juges acceptent de tempérer la situation et estiment qu’en cas de force majeure, l’obligation de livrer à une date précise devient une simple obligation de moyens.

Le commissionnaire va devoir exécuter les engagements précis qu’il a pris envers son commettant. Il doit respecter toutes les instructions du commettant car il avait la possibilité de refuser le mandat qui lui est confié lorsque le commettant l’a contacté.

Le commissionnaire a de nombreuses obligations au départ, en cours de route et à l’arrivée de la marchandise à destination. Le commissionnaire est tenu des obligations suivantes:

  • accomplir sa mission
  • se conformer, dans l’exécution de sa mission, aux instructions du commettant.
  • rendre compte de sa gestion et de tous les paiements,
  • informer le commettant des événements importants
  • S’il se voit remettre des marchandises pour compte de son commettant, il a uneobligation de garde, et, le cas échéant, de restitution.
  • A) Les obligations du commissionnaire au départ de la marchandise

Les moyens utilisés sont en principe à la discrétion du commissionnaire mais celui-ci doit agir au mieux des intérêts de son commettant. On constate que le commissionnaire a en fait 2 obligations au départ: soigner l’expédition et assurer la marchandise. L’obligation d’assurer la marchandise ne peut être que le conseil donné au commettant en vue de prendre cette assurance.

1) L’obligation de soin

Le commissionnaire choisit le mode de transport sauf clause contraire. Il doit tenir compte de la nature de la marchandise, de l’urgence du transport et des garanties de sécurité offertes à l’expéditeur. Compte tenu de ces circonstances, il doit choisir le meilleur moyen de locomotion mais aussi les meilleurs auxiliaires de transport. Il doit aussi s’assurer de l’existence et de la régularité des documents qui lui sont remis et qui sont nécessaires au transport.

En parallèle, le commissionnaire dispose en tant que professionnel d’un devoir de conseil à l’égard de ses clients. La jurisprudence estime ainsi qu’un commissionnaire qui se charge d’un transport international est réputé connaître la réglementation des différents pays traversés car ces législations étrangères peuvent avoir une incidence sur les conditions du transport, sur le temps du transport et sur la réparation en cas d’incident. Ce devoir de conseil est strictement limité à l’organisation du transport, ainsi, Cour d’Appel Paris a estimé que le commissionnaire n’était pas tenu d’expliquer à son client les formalités nécessaires pour éviter la forclusion prévue par la CMR, la CA estime que c’est là « une affaire de juristes et commissionnaires et clients sont souvent des profanes ou professionnels inexpérimentés ». En fait, les juges apprécient le devoir de conseil en fonction des circonstances, de la taille de l’entreprise du commettant et des usages locaux.

2) L’obligation d’assurance

Le commissionnaire est tenu de vérifier si les transporteurs auxquels il a fait appel sont convenablement assurés en ce qui concerne leur responsabilité contractuelle.

On s’est demandé si par prudence il ne devait pas prendre l’initiative d’assurer la marchandise avant de la remettre à ses substitués. La réponse est différente selon que le transport est terrestre ou maritime:

  • – lorsque la marchandise est acheminée par voie terrestre, la Cour de cassation depuis 1992 estime que le commissionnaire n’a pas l’obligation d’assurer la marchandise si le contrat de commission ne le prévoit pas. D’ailleurs, en matière de transport terrestre, il est rare que l’expéditeur contracte une assurance spécifique puisque la clause d’intérêt à la livraison peut suffire.
  • – en matière maritime, il est d’usage d’assurer la marchandise. La pratique étant différente de celle du transport terrestre, les tribunaux estiment que le commissionnaire de transport maritime ou combiné doit prendre l’initiative d’assurer la marchandise.

Lorsque le commissionnaire est obligé d’assurer en vertu du contrat, il doit y procéder mais, selon les tribunaux, il doit le faire avec discernement. S’il ne souscrit pas d’assurance, il devra verser à son client une somme égale à l’indemnité que ce dernier aurait reçu de l’assureur, il devient donc assureur.

Cette obligation d’assurance n’entre toutefois pas dans les obligations normales du commissionnaire, elle fait l’objet d’un mandat spécial et la clause est détachable du contrat de commission, elle subira donc une prescription de droit commun et non la prescription annale applicable en matière de transport.

  • B) Les obligations du commissionnaire en cours d’acheminement de la marchandise

En cours de route, l’obligation de soigner existe toujours, le commissionnaire a donc l’obligation d’effectuer les opérations étapes par étapes et veiller au bon déroulement de ces opérations. Il doit rendre compte à l’expéditeur et dans un délai raisonnable des incidents et difficultés qu’il rencontre.

Au départ, sa mission commence lors de la prise en charge, c’est lui qui doit vérifier l’arrimage car l’expéditeur est réputé profane en matière de transport, c’est lui aussi qui doit veiller aux opérations de chargement, c’est donc lui qui recourra, au besoin, à un manutentionnaire (l’expéditeur et le transporteur ne pouvant eux-mêmes procéder au chargement).

Ensuite, il va suivre l’acheminement et va donc veiller au respect d’un temps raisonnable et compatible avec la nature et l’objet de la prestation.

ex: c’est lui qui sera responsable s’il n’a pas tout mis en œuvre pour que la marchandise arrive sur une foire exposition dont il connaît la date.

S’il y a changement de transport, c’est également le commissionnaire qui surveille la marchandise à la charnière des deux transports (la rupture de charge), il peut se faire aider par une transitaire.

ex: il est reproché régulièrement au commissionnaire en cas de transport de denrées congelées de ne pas prendre toutes les mesures nécessaires pour maintenir la chaîne du froid. Ce type de condamnation intervient lorsque le véhicule est impliqué dans un accident de la circulation et que le commissionnaire doit affréter un nouveau véhicule pour la suite du parcours, dans l’attente du véhicule il doit gérer les produits congelés.

Cette responsabilité ne peut concerner que les dommages apparents, il est impossible de demander au commissionnaire de connaître mieux la marchandise que l’expéditeur.

  • C) Les obligations du commissionnaire à l’arrivée de la marchandise

Les obligations du commissionnaire ne disparaissent pas lorsque le camion, le train, l’avion ou le navire arrive à destination, elles ne prennent fin qu’avec la livraison de la marchandise au destinataire lui-même. Sur ce point, la jurisprudence est claire et classique: la livraison à quai ne suffit pas à éteindre les obligations du commissionnaire.

Le commissionnaire doit donc être présent ou représenté au lieu de destination. Si la marchandise est perdue, avariée ou en retard, il doit conserver les recours de son client. Si la marchandise est refusée par le destinataire, il doit en référer à son commettant. Si la marchandise est acceptée sans réserve sa mission s’achève.

1) La conservation des recours du commettant

Lorsque la marchandise n’est pas livrée en bon état ou à la date prévue, le commissionnaire doit éviter à son client la forclusion de Code de commerce Article L133-3 ou de CMR Article30. Il doit donc accomplir toutes les diligences nécessaires à la procédure en raison de la confiance qui existe dans tout contrat de commission entre commettant et commissionnaire.

En pratique, cette conservation n’est pas évidente. En effet, le client qui traite avec une commissionnaire a tendance à adresser ses protestations au commissionnaire alors que les textes prévoient qu’elles soient envoyées au transporteur. D’ailleurs, souvent, l’expéditeur ne connait que le commissionnaire et pas le transporteur. Si le commissionnaire est toujours dans les délais pour le faire, il doit notifier ces contestations au transporteur pour conserver les droits de son client (le délai est de 3 jours). Préserver un recours n’est pas l’exercer, le préserver consiste à tout faire pour mettre le titulaire de l’action en l’état d’agir, le commissionnaire n’a pour mission que de surveiller le transport, pas d’exercer les recours, s’il ne préserve par le recours, il deviendra responsable. La Cour de cassation en 1996 a cassé un arrêt de CA Paris qui avait sanctionné le commissionnaire qui n’avait pas intenté à temps l’action appartenant à son client.

2) En cas de refus de la marchandise par le destinataire

En cas de refus du destinataire, le commissionnaire doit en informer le commettant sans délai et par des moyens de communication indiscutables i.e. il ne doit pas se contenter de le faire par téléphone, il faut un écrit (fax, e-mail, lettre recommandée). Si l’expéditeur lui enjoint de ne pas rapparier la marchandise, le commissionnaire devient simple mandataire et ne sera responsable que de ses fautes prouvées. A l’inverse, si le rapatriement est demandé, il donne naissance à un nouveau contrat de transport qui restera sous la surveillance du commissionnaire jusqu’au retour de la marchandise chez l’expéditeur.

Lorsque la marchandise n’est pas rapatriée, le commissionnaire a, comme les transporteurs, la possibilité de laisser la marchandise à l’administration des domaines qui procèdera à sa mise en vente.