Les rapports des époux entre eux et avec les tiers (effets du mariage)

QUELS SONT LES EFFETS DU MARIAGE?

Le mariage crée des devoirs entre époux (I) et modifie la nature de leurs rapports avec les tiers (II).

I. Les devoirs entre les époux

Le mariage oblige les époux au respect d’un certain nombre de devoirs qui sont réciproques et, pour l’essentiel, d’ordre public. Lorsque tel est le cas, ils ne peuvent faire l’objet d’aucun aménagement conventionnel. Elles concernent tant les relations personnelles (A) que les relations matérielles (B) des époux.

A – Les devoirs personnels

L’article 212 du Code civil énonce : « Les époux se doivent mutuellement fidélité, secours etassistance ». Ces devoirs sont d’ordre public et l’article 215 al. 1 du Code civil indique que « les époux s’obligent mutuellement à une communauté de vie ». Ces devoirs ne peuvent faire l’objet d’aucun aménagement conventionnel. La sanction de ces devoirs ne peut être qu’indirecte. Le manquement à l’un de ces devoirs peut être constitutif d’une faute, cause de divorce ou de séparation du corps au sens de l’article 242 du Code civil. Ils peuvent également donner lieu à des dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1382 ou 266 du Code civil en cas de divorce

1) Le devoir de fidélité

Le mariage oblige les époux au devoir de fidélité. Chacun des époux ne peut avoir de relations sexuelles avec une personne autre que son conjoint. (article 212 du Code civil)

Cependant, depuis la loi du 11 juillet 1975, l’adultère n’est plus une infraction pénale. Il ne constitue également plus une cause péremptoire de divorce, ce qui signifie que le demandeur n’obtiendra pas de plein droit le divorce en cas d’adultère. Il devra démontrer la faute, au sens de l’article 242 du Code civil.

2) Le devoir de cohabitation

Le mariage oblige les époux à une communauté de vie. Le devoir de communauté implique une cohabitation effective des époux et sanctionne de nullité absolue toutes les conventions de séparation de fait. La communauté suppose aussi l’existence de relations sexuelles. (article 215 du Code civil). C’est la raison pour laquelle la loi pose une présomption de paternité à l’égard du mari de la mère.

Cependant, chaque époux peut avoir un domicile distinct sans qu’il soit pour autant porté atteinte aux règles relatives à la communauté de vie (article 108 du Code civil). En pratique, les époux peuvent résider séparément notamment pour des raisons professionnelles s’il existe entre eux une communauté de vie suffisante.

3) Le devoir d’assistance

Le mariage oblige les époux à un devoir d’assistance. Chacun des époux doit apporter à l’autre son soutien affectif dans les difficultés de l’existence. (article 212 du Code civil) Tel est notamment le cas lorsque l’un des deux conjoints est diminué par la maladie ou un accident. Néanmoins, la loi permet le divorce pour altération des facultés mentales (article 238 du Code civil).

B – Les devoirs matériels

Sur le plan matériel, le mariage met à la charge des époux une obligation de contribution aux charges du mariage (1) qu’il ne faut pas confondre avec le devoir de secours (2).

1) La contribution aux charges du mariage.

Les époux sont tenus de contribuer aux charges du mariage, tenant aux dépenses d’entretien du ménage et d’éducation des enfants. Si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du mariage, ils contribuent à proportion de leurs facultés respectives (article 214 du Code civil).

La jurisprudence considère que l’activité domestique du conjoint au foyer constitue une exécution en nature de l’obligation de contribuer aux charges du mariage.

L’obligation existe tant que le lien matrimonial demeure, que les époux vivent ensemble ou pas. Néanmoins, en cas de séparation de fait, les juges peuvent «tenir compte des circonstances de la cause » et priver en conséquence le conjoint demandeur du bénéfice de la contribution aux charges du mariage si la rupture lui est imputable.

2)Le devoir de secours

Le devoir de secours est l’obligation de fournir le minimum vital à l’époux qui est dans le besoin (article 212 du Code civil). Le devoir de secours est le plus souvent absorbé par l’obligation de contribuer aux charges du mariage. Mais lorsqu’un des époux est déchargé de cette obligation, il reste tenu de cette obligation alimentaire entre époux qui prime sur l’obligation alimentaire familiale. Le conjoint est alors un débiteur prioritaire, qu’il faut actionner avant les autres membres de la famille.

L’obligation alimentaire entre époux prime sur l’obligation alimentaire familiale. Le conjoint est alors un débiteur prioritaire, qu’il faut actionner avant les autres membres de la famille.

II. – Les rapports des époux avec les tiers

Le mariage oblige les époux à répondre solidairement des dettes contractées par chacun d’eux (A). Cette obligation existe quel que soit le régime matrimonial choisi. Sur d’autres points, le régime matrimonial choisi par les époux est de nature à modifier les règles applicables aux époux dans leurs rapports avec les tiers (B). Le mariage crée aussi une vocation successorale réciproque, de nature à limiter les droits des autres héritiers (C).

A – La solidarité des dettes ménagères

L’article 220 du Code civil instaure une solidarité entre les époux pour les dettes ménagères. En effet, toute dette contractée par l’un pour l’entretien ou l’éducation des enfants engage l’autre solidairement. Dans ce cas, les créanciers ont un droit de gage très étendu : tous les biens de la communauté et tous les biens propres des deux époux peuvent être saisis.

Néanmoins, « la solidarité n’a pas lieu pour les dépenses manifestement excessives, eu égard au train de vie du ménage, à l’utilité ou l’inutilité de l’opération, à la bonne ou mauvaise foi du tiers contractant. Elle n’a pas lieu non plus, (…) pour les achats à tempérament ni pour les emprunts modestes à moins que ces derniers ne portent sur des sommes modestes nécessaires au besoin de la vie courante » (article 220 al. 2 et 3 Code Civil).

B – Le statut matrimonial des époux

En se mariant, les époux sont soumis aux règles d’un régime matrimonial destiné à régir leurs rapports pécuniaires avec les tiers et ainsi que leurs rapports réciproques. A défaut de choix contraire exprès, les époux sont soumis au régime légal, la communauté réduite aux acquêts depuis la loi du 13 juill. 1965 (1). Ils peuvent, par contrat de mariage conclu par-devant notaire, opter pour un régime conventionnel, notamment la communauté universelle (2), la séparation de biens (3) ou la participation aux acquêts (4).

1) Le régime légal : la communauté réduite aux acquêts

La communauté se compose de l’ensemble des biens acquis pendant le mariage à titre onéreux, appelés acquêts. Restent propres à chacun des époux les biens possédés avant le mariage ainsi que ceux recueillis à titre gratuit pendant le mariage. Les gains et salaires du conjoint et les revenus de ses biens propres sont des acquêts de communauté. En cas de difficultés de preuve, la loi a décidé que « tout bien meuble ou immeuble est réputé acquêt de communauté si l’on ne prouve qu’il est propre à l’un des époux par application d’une disposition de la loi (article 1402 Code Civil).

S’agissant de la gestion des biens communs, le principe posé par la loi du 23 décembre 1985 est celui de la gestion concurrente : chacun des époux peut, en principe, accomplir tous les actes d’administration et de disposition à l’égard des biens communs. A titre d’exception, la loi prévoit une cogestion pour les actes les plus graves (notamment vente d’un immeuble ou d’un fonds de commerce, donation de biens communs, acte portant sur le logement familial, cautionnement) et une gestion exclusive dans certains domaines où l’indépendance de l’époux est apparu nécessaire (biens communs nécessaire à la profession, gains et salaires).

S’agissant de la gestion des biens propres, « chaque époux a l’administration et la jouissance de ses propres et peut en disposer librement » (article 1418 Code Civil). Chaque époux les gère en principe de façon exclusive. La loi prévoit néanmoins une cogestion à l’égard du logement familial même s’il appartient en propre à un des deux époux.

2) La communauté universelle

La communauté universelle est fréquemment adoptée avec une clause d’attribution intégrale de la communauté. Dans ce cas, la totalité de la communauté est attribuée au survivant en cas de décès d’un conjoint. Cet avantage matrimonial n’étant pas juridiquement analysé comme une libéralité. Il n’est pas soumis aux droits de mutation des actes à titre gratuit, ni enfermé dans les limites de la quotité disponible entre époux. Ce régime est assez défavorable lorsque les conjoints, a fortiori seulement l’un des deux, ont des descendants.

La masse commune se compose, à défaut de stipulation contraire des époux, de tous les biens meubles et immeubles présents (au moment du mariage) et futurs. Restent propres les biens qualifiés de propres par nature par la loi (article 1404 Code Civil) et les biens donnés ou légués déclarés propres par le disposant.

Les règles de gestion sont, sauf disposition contraire des époux, celles du régime légal.

3) La séparation de biens

Dans le régime de séparation de biens, chaque époux reste propriétaire de tous ses biens et conserve l’administration, la jouissance et la libre disposition et n’a, en principe, rien à liquider ou à partager avec son conjoint.

Néanmoins, la communauté de vie entraîne une certaine communauté d’intérêts. La loi impose le consentement de deux conjoints pour les actes portant sur le logement familial. La loi prévoit la solidarité des dettes ménagères contractées par l’un des époux. Les biens acquis en commun relèvent du régime de droit commun de l’indivision. Les biens sur lesquels aucun des époux ne peut justifier d’une propriété exclusive sont réputés leur appartenir indivisément chacun pour moitié (article 1538 al. 3 Code Civil).

4) La participation aux acquêts

La participation aux acquêts est un régime matrimonial de type mixte : pendant toute sa durée, il fonctionne comme une séparation de biens ; à la dissolution, il ouvre à chaque époux le droit de participer aux bénéfices de l’autre comme dans une communauté de biens. Ce droit prend la forme d’une créance de participation due par celui des deux époux qui s’est le plus enrichi pendant le mariage.

C – La vocation successorale réciproque des époux

Le mariage entraîne une vocation successorale réciproque des époux. Elle est toutefois très limitée spécialement en présence de descendant (1/4 en usufruit). Toutefois, cette vocation peut être étendue par la volonté du conjoint disposant à la condition de ne pas porter atteinte aux droits des héritiers réservataires. A l’inverse, le conjoint survivant n’étant pas un héritier réservataire, il peut être valablement exhérédé par testament.

Le gouvernement souhaite améliorer le sort du conjoint survivant et une proposition de loi VIDALIES a déjà été votée à l’unanimité par l’Assemblée nationale les 6 et 8 février 2001. Ainsi, le conjoint aurait des droits en pleine propriété même lorsqu’il est en concours avec des descendants ou les ascendants du défunt. Lorsque le conjoint serait en concours avec les frères et sœurs du défunt, il recueillerait l’intégralité de la succession. De plus, il est prévu d’instaurer un certain nombre de règle destinée à assurer la possibilité pour le conjoint survivant de rester dans l’habitation commune. Il disposerait d’un droit de jouissance gratuite de la résidence principale occupée au jour du décès ou d’un droit viager d’habitation sur le logement et le mobilier. La réforme proposée ne fait cependant pas du conjoint un héritier réservataire : il est donc possib le d’écarter l’application de ces dispositions en faveur de son conjoint, par une manifestation expresse de volonté contraire.