Les recours contre les actes administratifs unilatéraux

les actes administratifs unilatéraux et leurs recours

Ils sont très nombreux car les autorités administratives qui peuvent les prendre sont très nombreuses et aussi parce que des personnes privées chargées d’un SPA peuvent les prendre (arrêt Montpeur, Bouguen, fédération française des industries de sport etc.).

La prise d’actes administratifs est le mode ordinaire d’action des personnes publiques en dehors des actions matérielles sur le terrain. L’action unilatérale qui se traduit par la prise d’actes unilatéraux est la première des Prérogatives de Puissance Publique qui n’appartient pas aux personnes privées, sauf exception. Les personnes privées étant égales en droit, aucune personne privée n’a le droit d’en contraindre une autre. En revanche l’administration a le pouvoir de contraindre les administrés en prenant des actes administratifs unilatéraux sans leur consentement. La possibilité de prendre des actes administratifs unilatéraux est la traduction de l’inégalité foncière entre l’administration et les administrés. Cette inégalité est irréductible malgré tous les efforts de transparence, d’information et de participation en direction des administrés.

Cette situation d’inégalité induit deux privilèges de l’administration (personne morale de droit privé et personne privée chargée d’un Service Public Administratif) : le privilège de l’unilatéralité et le privilège du préalable.

Privilège du préalable : l’administration n’a pas besoin de l’autorisation du juge pour faire appliquer et exécuter ses actes administratifs unilatéraux. Ca signifie que l’acte administratif est exécutoire sans contrôle préalable du juge sur sa légalité. L’acte administratif s’applique immédiatement dès qu’il est signé, nul besoin d’un contrôle a priori du juge administratif. Nul besoin de l’autorisation du juge pour faire exécuter l’acte. On dit encore que l’acte administratif est exécutoire de plein droit ( : sans aucune autorisation d’aucune sorte). Le caractère exécutoire des actes administratifs a été qualifié par le Conseil d’Etat de règle fondamentale du droit public !

Arrêt du 2 juillet 1982 Huglo : le caractère exécutoire des actes administratifs est une règle fondamentale du droit public.

Ces deux privilèges entrainent deux conséquences :

Premièrement, les actes administratifs bénéficient d’une présomption de légalité qui est réfragable, jusqu’à ce que le juge éventuellement les annule suite à une demande en annulation formulée par un administré ou jusqu’à ce que l’administration se rende compte de l’illégalité de l’acte et l’abroge ou le retire.

Deuxièmement, le contrôle du juge administratif sur les actes administratifs est donc toujours un contrôle a posteriori, qui intervient après ou pendant l’exécution de l’acte. Le recours en annulation formé contre un acte administratif, recours pour excès de pouvoir, n’est pas un recours suspensif ! Pour obtenir la suspension de l’exécution de l’acte, le requérant doit la demander expressément au juge administratif par une procédure spéciale qui est la «procédure du référé suspension». C’est une procédure d’urgence par la loi du 30 juin 2000. Le recours en annulation contre un acte administratif n’est donc pas suspensif, sauf si le requérant demande au juge la suspension de l’acte et qu’il l’obtienne. Le juge a un pouvoir discrétionnaire pour octroyer la suspension, même si les conditions requises par la loi sont là. La demande d’un référé suspension doit se faire séparément mais parallèlement à un recours pour excès de pouvoir. On ne peut pas demander la suspension d’un acte sans avoir demandé un recours pour excès de pouvoir contre cet acte. C’est une condition de recevabilité de la demande du référé suspension.

On voit dont le rôle central du juge administratif dans l’application des actes administratifs et donc beaucoup d’auteurs ont définis l’acte administratif comme étant l’acte susceptible de recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif. Quand le juge dans les années 1950 a été confronté au problème de la qualification des actes pris par des personnes privées chargées d’un SPA, l’acte a été qualifié d’acte administratif car le juge administratif s’est reconnu compétent pour en connaitre et donc beaucoup d’auteurs définissent l’acte administratif comme l’acte susceptible de recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif. Les juges judiciaires eux ne sont pas compétents pour connaitre de la légalité des actes administratifs. Saisi par voie d’exception de la légalité d’un acte administratif, le juge judiciaire doit sursoir à statuer par un recours en appréciation de la légalité, c’est le juge judiciaire qui va saisir le juge administratif de la question de la légalité de l’acte.

Il faut savoir si tous les actes administratifs sont susceptibles de recours pour excès de pouvoir ? La réponse est non. Lorsque le juge administratif est saisi d’un recours pour excès de pouvoir, il se prononce en premier lieu sur la compétence de la juridiction administrative. En deuxième lieu le juge administratif examine la recevabilité du recours pour excès de pouvoir, ce sont les conditions qui sont posés par les textes ou par le juge à l’examen du recours. Il y a des conditions de recevabilité relative à l’acte, au délai, à la personne du requérant, à la nature de l’acte. Le juge considère qu’il y a des actes administratifs qui ne méritent pas de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir. La raison principale est que le Conseil d’Etat puis les Tribunaux Administratifs et les Cours administratives d’appel, ont toujours leur calendrier de recours encombrés. Et donc l’objectif des juridictions administratives a toujours été de désencombrer leur rôle : le Conseil d’Etat a toujours refusé que le recours pour excès de pouvoir soit ouvert contre tous les actes sans conditions. Il ne voulait pas que le recours pour excès de pouvoir soit populaire.

Subdivision entre les actes susceptibles de recours pour excès de pouvoir et les actes insusceptibles de recours pour excès de pouvoir. Importance de s’attacher à la question de savoir quels sont ces actes car ça n’est jamais écrit dans l’acte et les administrés ne peuvent pas le savoir à l’avance. Quand le recours pour excès de pouvoir est considéré comme irrecevable en raison de la nature de l’acte, le recours ne sera pas examiné au fond et donc la légalité de l’acte ne sera pas examinée par le juge. Par conséquent la présomption de légalité va devenir irréfragable. La définition de l’acte administratif comme étant celui susceptible de recours pour excès de pouvoir est largement incomplète.

  • Acte susceptibles de recours pour excès de pouvoir : actes décisoire et exécutoire.
  • Actes insusceptibles : actes non décisoire.

Il y a des catégories d’actes qui normalement ne sont pas décisoire et donc pas susceptibles de recours pour excès de pouvoir, sauf exception. Il faut donc les examiner à part. Ils sont importants pour la garantie des droits des personnes.

  • Catégorie spéciale des mesures d’ordre intérieur
  • Catégorie spéciale des circulaires et directives

Le juge n’est pas le seul à pouvoir annuler les actes administratifs, l’administration n’annule pas (elle abroge ou elle retire les actes).

I – Les actes décisoires et exécutoires : susceptibles de recours pour excès de pouvoir

D’où vient ce qualificatif de décisoire ? Il vient d’une règle de procédure consigné à l’article R 421-1 du Code de justice administrative, mais la règle date d’une loi de juin 1900 qui a été abrogée. Le code de justice administratif date de 2000. Le juge administratif ne peut être saisi que par voie de recours contre une décision administrative ! Et donc les actes administratifs susceptibles de recours sont les actes décisoires.

Il est revenu au juge administratif de construire depuis 1800 par sédimentation la notion d’acte administratif décisoire. On ne va pas faire un cours d’histoire, on va voir le résultat et voir comment ce résultat est appliqué aujourd’hui dans le contentieux contemporain. La doctrine a aidé à synthétiser et généraliser les règles qui provenaient de la jurisprudence.

Sont considérés comme décisoires :

  • Les actes administratifs qui modifient l’ordonnancement juridique général, c’est-à-dire qui ajoutent ou retirent quelque chose à l’état du droit.
  • Les actes administratifs qui font griefs (et donc individuel) à leurs destinataires : grief signifie que l’acte modifie des droits et obligations des destinataires de l’acte. modifient dans un sens positif ou négatif.

Ca recoupe l’acte règlementaire et non règlementaire. L’acte décisoire soit qui modifie l’ordonnancement juridique soit qui fait grief à ses destinataires. Mais il y a des actes administratifs qui ne modifient pas l’ordonnancement juridique, qui ne font grief à personne et que le juge administratif considère quand même comme susceptible de recours.

Arrêt du 21 octobre 1988 Eglise de Scientologie de Paris: cette secte attaquait pour recours pour excès de pouvoir qui a été jugé comme recevable la décision du Premier Ministre de publier un rapport sur les sectes écrit par la mission parlementaire sur la surveillance des sectes. Un rapport parlementaire ne modifie pas l’ordonnancement juridique et ne fait grief à personne. La décision de publier pour informer le public sur les dangers éventuels des sectes, a été attaquée. le Conseil d’Etat a considéré que le Premier Ministre n’avait violé aucun texte en décidant de publier un rapport. Demande infondée mais recevable.

Arrêt du 27 novembre 2000 Association Comité Tous Frère: l’association attaquait en excès de pouvoir une décision informelle du PR Mitterrand de faire fleurir la tombe du Maréchal Pétain tous les ans le 11 novembre. L’association demandait à l’Elysée la communication de tous les documents retraçant le placement de la gerbe de fleur qui était payé par tous les contribuables. Les factures se sont avérées avoir été détruites. le Conseil d’Etat admet la recevabilité du recours. L’association demandait la matérialité des factures. Le juge administratif admet qu’il y a une décision, même informelle du PR et il admet le recours, mais sur le bien fondé du recours le rejette. Mitterrand avait quitté la présidence depuis 1995.

Le juge peut considérer comme acte administratif décisoire, des actes qui ne modifient pas l’ordonnancement juridique et qui ne font pas grief. Par conséquent il faut remonter plus haut pour retrouver une définition plus englobante : ce sont des actes administratifs qui manifestent une volonté d’une autorité administratif ( : décision). La portée de cette manifestation de volonté peut être de modifier l’ordonnancement juridique ou faire grief. Les autorités administratives existent que pour faire prévaloir l’intérêt général et donc le juge administratif se doit le plus possible, de contrôler les manifestations de volonté des autorités administratives pour éviter que le pouvoir discrétionnaire des autorités administratives se transforment en pouvoir arbitraire. Ce sont donc les actes qui contiennent une manifestation de volonté. Mais cette définition est trop vaste car tous les actes contiennent une manifestation de volonté.

On va essayer de faire un panorama des actes décisoires en expliquant que même les refus sont des actes décisoires.

A) Les actes décisoires et les décisions négatives susceptibles de recours

Les actes décisoires sont les plus nombreux. Il y a deux grandes catégories :

  • Actes réglementaires à portée générale et impersonnelle qui ont pour objet de modifier l’ordonnancement juridique (et donc susceptible de recours pour excès de pouvoir) et les
  • Actes non règlementaires dans lesquels on distingue les actes individuels qui font grief à un individu (accord ou refus de permis de construire, nomination d’un fonctionnaire sur une poste), les actes collectifs, actes particulier (ou acte d’espèce).

Le recours n’est pas suspensif sauf référé suspension. Si le recours était suspensif, ça paralyserait complètement l’action de l’administration. L’administration ne pourrait pas réaliser ses fonctions si les recours étaient suspensifs. Il y aurait entrave de l’intérêt général.

Décision du 23 janvier 1987 du CC : pose une réserve de compétence constitutionnelle au profit du juge administratif qui est l’annulation et la réformation des actes administratifs pris dans l’exercice de Prérogatives de Puissance Publique par une autorité administrative. Le CC décide que la possibilité de demander le sursis à exécution d’une décision administrative (ancien nom de la suspension) est un corollaire des droits de la défense et est donc une garantie fondamentale des droits des administrés. La possibilité de demander la suspension d’un acte administratif qui fait l’objet d’un recours est toujours possible, mais il y a les conditions de la loi du 30 juin 2000 pour l’octroie de la suspension.

Toutes les décisions administratives susceptibles de recours sont des actes administratifs. A l’inverse, tous les actes administratifs ne sont pas des décisions administratives susceptibles de recours. Par exemple, un simple vœu qui émane d’une autorité administrative (vœu émanent du conseil général du département du Jerse) n’est pas une décision administrative susceptible de recours car il n’y a pas de décision dans cette manifestation de volonté.

Arrêt du 16 décembre 2005 Société Friadent : le Conseil d’Etat a considéré comme susceptible de recours pour excès de pouvoir une simple réponse ministérielle à une question posée par un parlementaire. Cette réponse ministérielle interprétait la loi fiscale Conseil d’Etat qui constitue la doctrine fiscale. Or, et c’est une particularité du droit fiscal, la doctrine fiscale peut être opposée au contribuable. Et donc la réponse ministérielle qui interprète une loi fiscale qui constitue un élément de doctrine fiscal qui peut être opposé au contribuable et qui peut lui faire grief et donc cette réponse a été considéré comme susceptible de recours pour excès de pouvoir.

Il faut la manifestation de volonté, modifie l’ordonnancement juridique ou font grief. Mais il y a des limites à la manifestation de volonté.

Décision négatives :

Une décision négative modifie la situation juridique des personnes mais parfois elles entrainent le statu quo. Même une décision négative qui ne change rien à la situation peut faire grief. Il faut distinguer les décisions négatives expresses des décisions négatives implicites. Refus exprès ou explicites et refus tacites ou implicites.

Refus expresses ou explicites : ils sont formels, l’administré reçoit une réponse écrite négative.

Refus implicites ou tacites : ils sont obtenus par l’administré au bout de 2 mois de silence de l’administration qui ne répond pas. Cette règle résulte de la loi du 12 avril 2000 DCRA qui a modifié le délai puisque avant 2000 le délai était de 4 mois (faire attention à un commentaire d’un vieil arrêt). Evidemment, il y a des exceptions mais les exceptions doivent être prévues par la loi puisque c’est la loi qui prévoit la règle du 2 mois de silence. Des lois particulières peuvent prévoir un délai plus long ou peuvent prévoir que le silence gardé par l’administration ne vaut pas refus mais acceptation de la demande (c’est le cas du permis de construire).

Tous les refus, exprès ou implicites, sont susceptibles de recours pour excès de pouvoir. Les refus exprès sont susceptibles de recours pour excès de pouvoir alors même que les décisions positives ne le seraient pas en application de règles jurisprudentielles.

Exemple : dans le cadre d’une opération d’expropriation pour cause d’utilité publique, la décision positive d’ouvrir une enquête publique avant l’expropriation, n’est pas susceptible de recours car c’est simplement un acte préparatoire. En revanche le refus d’ouvrir une enquête publique est susceptible de recours pour excès de pouvoir car il porte atteinte aux droits des futurs expropriés.

Exemple : les activités économiques sont classées par catégorie dans une nomenclature des activités économiques, nomenclature établie par l’INSEE. Le classement n’est pas susceptible de recours. C’est une décision positive considérée comme ne faisant pas grief. Mais le refus exprès de classer une activité économique dans la nomenclature de l’INSEE est susceptible de recours car ce refus peut porter atteinte aux droits des entrepreneurs intéressés.

En principe le refus d’engager une procédure est évidemment susceptible de recours pour excès de pouvoir. Mais il y a deux exceptions.

Premièrement, les refus d’un supérieur hiérarchique d’engager une procédure disciplinaire contre un étudiant ou un fonctionnaire. C’est une position très discutable de la part du juge qu’il justifie en mettant en avant l’obéissance au pouvoir hiérarchique. C’est une explication qui progressivement ne vaudra plus rien dans quelques temps. L’exemple type est une enseignante dans un collège qui se plaignait à son directeur de ne pouvoir pas faire classe en raison de discipline. Le chef d’établissement avait refusé d’engager la procédure disciplinaire en disant qu’elle avait cas faire la police dans sa classe. Ce refus a été considéré comme insusceptible de recours par l’enseignante.

Deuxièmement, le refus d’engager une procédure n’est pas susceptible de recours. Il existe dans le cadre du déféré préfectoral. Le préfet peut déférer aux Tribunaux Administratifs des actes des collectivités territoriales qu’il estime illégaux. Il peut le faire spontanément ou il peut le faire à la demande d’un administré lésé (lésion de ses droits subjectifs). Le préfet peut refuser d’exercer son déféré préfectoral à la demande d’un administré lésé. Ce refus n’est pas susceptible de recours. En effet, l’administré lésé peut toujours exercer un recours pour excès de pouvoir direct contre l’acte de la collectivité territorial qu’il estime illégal. Ca ne porte pas atteinte au droit de recours puisqu’il reste toujours la possibilité pour l’administré d’exercer le recours pour excès de pouvoir contre tout acte, étant un PGD. Arrêt du 25 janvier 1991 Brasseur.

B) Les actes non décisoires insusceptibles de recours

Il y a 4 catégories d’actes qui ne sont pas décisoires et donc insusceptibles de recours mais il y a dans chaque catégories des exceptions. La dernière pose de gros problèmes.

1) Les actes préparatoires

Ils ne sont pas susceptibles de recours puisqu’ils sont destinés à préparer une décision (et donc ne sont pas décisoires). Ce sont les avis, les délibérations préparatoires des conseils municipaux, certaines mises en demeure, les recommandations, les propositions etc.

Les délibérations préparatoires des assemblées locales ne sont pas susceptibles de recours pour excès de pouvoir même si le recours est formé par un membre de l’assemblée. Mais possibilité au préfet d’exercer son déféré préfectoral contre la délibération préparatoire. Mais pas de recours pour excès de pouvoir.

Les recommandations de la HALDE ne sont pas susceptibles de recours pour excès de pouvoir, mais il y a une exception.

La loi du 4 mars 2002 légalise le risque ou l’aléa thérapeutique, elle prévoit un système d’indemnisation des accidents médicaux. Ce sont les accidents graves qui interviennent lors d’une intervention chirurgicale. Système d’indemnisation par l’office national d’indemnisation. Il y a une procédure qui consiste à vérifier que toutes les conditions prévues par la loi pour faire marcher la solidarité nationale. Il y a des commissions qui donnent des avis sur les causes du dommage : savoir si le dommage a été causé par une faute médicale (mécanisme de la responsabilité médicale qui s’applique) ou est ce qu’il n’y a pas eu de faute et donc là on a un aléa thérapeutique.

Avis contentieux du Conseil d’Etat du 10 octobre 2007 Sachot: le Conseil d’Etat a décidé que les avis des CRCI étaient insusceptibles de recours.

L’avis contentieux a été introduit par la loi du 31 décembre 1987 (loi qui a instauré les cours administratives d’appel). La procédure d’avis est la suivante : ils ne peuvent être demandés que par le Tribunal Administratif et les Cour Administrative d’Appel qui vont se heurter à une question nouvelle qui pose des problèmes juridiques sérieux qui risquent de se poser dans une nouvelle espèce. Il y a demande d’avis contentieux au Conseil d’Etat qui est rendu dans les mêmes conditions d’un arrêt, c’est-à-dire avec conclusion d’un rapporteur public et avec une rédaction comme les arrêts.

L’avis Sachot décide que les avis des CRCI ne sont pas susceptibles de recours. Mais il y a des exceptions :

Les avis aux importateurs et exportateurs émanent du ministre en charge du commerce extérieur sont susceptible de recours. Les mises en demeure dès lors qu’il y a un délai sont susceptible de recours.

2) Les actes confirmatifs

Ce sont des actes qui ne font que reprendre le contenu d’un acte antérieur et donc ils ne sont pas décisoires puisque c’est l’acte antérieur qui l’est.

le Conseil d’Etat a posé deux critères de l’actes confirmatifs :

  • Il faut qu’il porte sur le même objet
  • Il faut qu’il n’y ait pas eu de changement de circonstance de fait ou de droit entre les deux actes.

Par conséquent, lorsque le changement des circonstances de fait est évident dans un intervalle de temps donné, il ne peut pas y avoir d’acte confirmatif puisqu’il est considéré comme tenant une nouvelle décision et donc susceptible de recours. Il y a changement de circonstance de fait lorsque l’exercice d’un droit par un administré peut être exercé de façon continue. Par exemple la demande d’un certificat d’urbanisme. De la même façon la demande de communication de documents administratifs peut se faire de manière continue. Si on nous oppose un refus de demande de communication en 2011 on peut renouveler en 2014. L’acte sera décisoire et susceptible de recours.

3) Les actes déclaratifs ou recognitifs

Ce sont des actes qui se contentent de reconnaitre un état de fait sans modifier ni l’ordonnancement juridique ni la situation juridique des personnes.

Exemple : l’état des services dans la fonction publique. Les enseignant de l’enseignement supérieur remplissent une fiche d’état de service qui récapitule les enseignements qu’ils vont faire. Et à la fin ils remplissent une autre fiche qui récapitule les enseignements qu’ils ont réellement faits. Ces actes ne sont pas susceptibles de recours car déclaratifs d’une situation de fait.

Exception : les actes de délimitation des propriétés privées et du domaine maritime naturel sont des actes administratifs. L’acte de délimitation à la demande du propriétaire privé est obligatoire pour l’administration. Si la mer monte et qu’elle modifie notre propriété, on doit demander un acte de délimitation du domaine public maritime naturel qui appartient à l’Etat. Ces actes de délimitation du domaine public maritime naturel sont déclaratifs. L’administration ne peut que reconnaitre un état de fait qui est imposé par la nature. Par exception, parce que cet acte peut porter atteinte à la propriété, il est susceptible de recours pour excès de pouvoir. Ce n’est pas un acte confirmatif d’un acte précédent car les circonstances de fait ont nécessairement bougés dans l’intervalle de 10 ans. Ca bouge forcément en 10 ans.

4) Les mesures d’ordre intérieur

Elles sont normalement insusceptibles de recours, mais c’est compliqué car il faut respecter le droit à un recours effectif de l’article 13.

Depuis 1995 le juge administratif accepte de plus en plus d’admettre la recevabilité pour excès de pouvoir.

Ce sont des mesures internes au service public, des mesures internes d’organisation du service qui n’ont pas vraiment d’importance. Selon l’adage de minimis non curat praetor : le juge ne s’occupe pas des petites choses. L’interdiction par les directeurs de collèges faite aux filles de porter des pantalons étaient des mesures d’ordres intérieurs insusceptibles de recours. L’affectation d’un étudiant dans un TD n’est pas susceptible de recours.

Contre exemple : le Conseil d’Etat a jugé que le refus de mettre des jumeaux dans la même classe était un acte administratif décisoire susceptible de recours, et pas une mesure d’ordre intérieur.

Le changement de service d’un fonctionnaire est une mesure d’ordre intérieur. Si par exemple on dit à notre professeur qu’elle ne fera plus ce cours, elle ne pourra pas attaquer cette mesure d’ordre intérieur.

Une mesure d’ordre intérieur, on peut toujours faire un recours gracieux ou un recours hiérarchique (devant le supérieur hiérarchique de celui qui a pris la mesure). Ce n’est pas parce que la voie du recours pour excès de pouvoir est fermée devant le juge que les autres aussi.

Le problème est que dans certains Service Public fermés et sensibles, il y a des mesures d’ordre intérieur qui s’apparentent à des sanctions et qui affectent les droits et obligations de leurs destinataires. Les Service Public fermés et sensibles c’est l’école et la prison et aussi l’armée.

II – La justiciabilité progressive des mesures d’ordre intérieur

Evolution en trois grandes étapes. L’évolution juridique est commandée en l’occurrence par des évolutions sociétales.

Première étape de l’évolution : ca s’est réalisé à l’école. En début d’année on nous donnait la photocopie du règlement intérieur. On devait signer un papier comme quoi on avait lu et approuvé le règlement intérieur. C’était des mesures d’ordre intérieur insusceptibles de recours avant 1992.

Arrêt du 21 novembre 1992 Kherroua: le règlement intérieur attaqué interdisait le port du voile à l’école. Le juge s’est rendu compte que la qualification de mesure d’ordre intérieur ne pouvait plus tenir. Le règlement intérieur d’un collège ou d’un lycée est un acte règlementaire pris par une autorité administrative, susceptible de recours pour excès de pouvoir.

Deuxième étape de l’évolution : le juge a accepté le recours pour excès de pouvoir contre des décisions individuelles qui s’apparentaient à des sanctions sans en être. Le revirement de jurisprudence a été opéré concernant des mesures individuelles relatives aux militaires dans les casernes et prisonniers dans les prisons. Avait été en cause une mise aux arrêts ( : prison au sein de l’armée) et une mesure d’isolement prise à l’égard d’un prisonnier dans un établissement pénitentiaire, l’isolement entrainant la privation d’un certain nombre de droit (on ne reçoit plus de courrier, plus le droit à la sortie etc.). Le juge s’est rendu compte que ces mesures modifiaient la situation juridique de la personne concernée au sein du service et qu’il fallait donc admettre la recevabilité du recours pour excès de pouvoir.

Deux arrêts jumeaux du 17 février 1995 Hardouin et Marie (GAJA 97) : à partir de ces deux arrêt il y a eu une jurisprudence instable du Conseil d’Etat qui qualifiait tantôt des mesures qui concernait les prisonnier de mesure d’ordre intérieur, tantôt acceptait le recours pour excès de pouvoir.

Arrêt du 12 mars 2003 Frerot: le placement dans une cellule disciplinaire a été considéré comme une mesure d’ordre intérieur. Mais l’engagement d’une procédure disciplinaire est susceptible de recours. Mais avant l’engagement de la procédure disciplinaire le prisonnier est mis à l’écart dans une cellule disciplinaire.

Arrêt du 30 juillet 2003 Remli: Par contre le Conseil d’Etat a jugé que le placement d’un détenu à l’isolement, ce qui a une incidence sur ses droits au sein de la prison, est susceptible de recours pour excès de pouvoir et donc pas mesure d’ordre intérieur mais acte décisoire.

Troisième étape : le Conseil d’Etat a ressenti la nécessité de donner une grille de lecture de la portée des décisions prises d ans les établissements pénitentiaires, donnée par trois arrêts : arrêt du 14 décembre 2007 garde des sceaux contre Broussouard: directive jurisprudentielle qui consiste à apprécier cas par cas la nature et l’importance des effets de la décision sur la situation du détenu : « pour déterminer si une décision relative à un changement d’affectation d’un détenu d’un établissement pénitentiaire à un autre constitue un acte administratif susceptible de recours pour excès de pouvoir il y a lieu d’apprécier sa nature … ».

Le juge examine si ce transfert doit être une mesure d’ordre intérieur ou une décision susceptible de recours. On peut penser que cette directive jurisprudentielle va commander la distinction mesure d’ordre intérieur, et décision susceptible de recours, au sein des prisons. La recevabilité du recours pour excès de pouvoir dépend des conséquences concrètes de la décision sur la personne concernée. On a donc du point de vue du raisonnement juridique une règle de droit qui dépend des circonstances de fait.

Arrêt du 9 avril Rogier: le transfèrement d’un établissement à un autre était une mesure d’ordre intérieur.

Arrêt du 27 mai 2009 monsieur M: le transfèrement d’un établissement à un autre était susceptible de recours.

Selon les auteurs, il y en a qui incluent dans les mesures d’ordre intérieur les circulaires et les directives. Il y a des auteurs qui les traitent à part. Notre professeur les étudie à part.

III. Le cas des circulaires et des directives administratives

LES CIRCULAIRES OU DIRECTIVES SERONT ÉTUDIÉS DANS UN AUTRE CHAPITRE

  • Les circulaires

Ce sont des actes administratifs qui ont pour objet de donner une « interprétation » de la règlementation et de la législation en vigueur. Il y a entre 10 000 et 15 000 circulaires par an. Ça émane le plus souvent du Premier Ministre ou du ministre.

  • Les directives administratives

Définition : les directives sont des actes administratifs qui donnent des orientations à des fonctionnaires, à des agents publics, pour utiliser leurs pouvoirs d’appréciation discrétionnaire. Les directives sont prises par les chefs de service qui s’adressent à leurs subordonnés pour les orienter dans l’exercice de leur pouvoir discrétionnaire d’appréciation.