Les sources et méthodes du droit international privé

Les méthodes et les sources du droit international privé

Chaque État dispose d’un système juridique spécifique composé de règles qui régissent les comportements des hommes entre eux sur son territoire. À partir du moment où un ressortissant d’un pays quitte ses frontières nationales (par exemple, pour se marier avec une personne de nationalité différente, travailler à l’étranger, partir en vacances, …), il faut déterminer quelle sera la loi applicable.

On distingue le droit international public et le droit international privé

      • – Le droit international public. Le droit international public est l’ensemble des règles qui organisent les relations entre les États. Exemple : l’accord entre la France et l’Italie sur le contrôle de la circulation dans les tunnels du Mont-Blanc et du Fréjus.
      • – Le droit international privé :Le droit international privé est l’ensemble des règles qui organisent les relations entre personnes privées (personnes physiques, sociétés, organisations non gouvernementales) de nationalités différentes. Exemple : le mariage entre un français et une belge.

I ) Les méthodes du droit international privé

Pour régir ces rapports, 2 grandes méthodes.

  1. A) Les règles matérielles (substantielle)

Elles donnent directement la solution au fond. Elles s’appliquent directement aux relations internationales sans passer par la résolution d’un conflit de loi.

Il existe des règles matérielles de source internationale qui sont contenues dans des traités d’unification entre deux ou plusieurs Etats. Exemple :Convention de Vienne 11 avril 80 sur la vente de marchandises. S’applique chaque fois que la vente est internationale.

Mais il existe des règles qui proviennent d’usages. Exemple : les lois des marchands (lex mercatoria)

Il existe aussi des règles matérielles de source interne qui ne vont s’appliquer que quand le rapport est international. Ex : art 146-1 du Code civil : le mariage d’un Français, même célébré à l’étranger, requiert sa présence.

Il y a beaucoup de règles matérielles d’origine jurisprudentielle : Ex : cour cass, 2 mai 1966 , Galakis. Dans cette affaire l’Etat français était partie à un contrat international et le problème était de connaître la validité d’une clause compromissoire qui avait été insérée dans le contrat. Or, il y a des dispositions françaises qui interdisent à l’Etat de compromettre. Donc si le contrat devait être régi par la loi française, la clause aurait dû être nulle. Cette question soulève aussi un problème de capacité contractuelle. Or , normalement la question de la capacité juridique est soumise à la loi nationale de chaque pays. Ici l’une des parties est l’Etat français et donc cette question de capacité aurait dû être régie par la loi française. Or, la Cour de cassation dans cet arrêt a posé une autre solution et c’est une règle matérielle de Droit International privé car ce principe s’applique, quelle que soit la loi applicable au contrat. Pour la cour, la clause compromissoire dans les contrats internationaux est toujours valable !

Mais l’on trouve aussi des règles matérielles dans d’autres domaines : en droit de la nationalité , en matière de conflit de juridiction, en droit des étrangers.

Ce sont des règles matérielles car il n’y a pas désignation d’une loi. On a tout de suite la substance de la solution, ce procédé de la règle matérielle est direct mais l’inconvénient est que ça ne va pas conduire à l’uniformisation des règles matérielles entre les pays car chaque système national va adopter sa propre solution.

  1. B) Les règles de conflit de lois

La règle de conflit de loi n’apporte pas de solution directe mais se contente de désigner le système juridique qui sera appliqué à la relation en cause. C’est une règle indirecte : elle désigne simplement le droit et une fois le système juridique désigné , on appliquera les règles matérielles internes de ce système juridique.

Cette règle de conflit de loi a aussi la particularité de désigner le champ d’application des différentes lois qui sont en conflits car chacune a un lien avec la situation juridique. Ex : un Français au cours d’un voyage en Belgique achète un immeuble qui se trouve aux Pays-Bas. Dans cette hypothèse, conflit de lois entre 3 lois. La règle de conflit va attribuer les domaines à chaque loi : une règle de conflit dira que le transfert de propriété sera régie par la loi hollandaise, la capacité de contracter par la loi française … C’est donc une règle de répartition.

Mais l’application de la loi du plus fort ou l’application cumulative des lois en présence conduit à une solution restrictive. L’on a pensé alors qu’il fallait laisser plus de place à la loi étrangère et le fait de l’appliquer ne porte pas atteinte à la souveraineté française. C’est pour cela que l’on a crée la règle de conflit de loi. C’est pour cela aussi que c’est la méthode la plus utilisée. Mais cette méthode est plus complexe qu’une règle matérielle car cela suppose plusieurs choses : de diviser la matière juridique en plusieurs catégories, et à chaque catégorie on attribue un rattachement et c’est cette équation catégorie / rattachement qui permettra de désigner le droit applicable à la situation. Et une fois le droit désigné, on appliquera les règles matérielles de ce droit désigné.

Schéma :

  1. question de droit

¯

  1. qualification

¯

  1. catégorie

Donc, la règle matérielle donne la règle substantielle du litige et la règle de conflit de lois est une méthode de désignation uniquement.

  1. II) Les sources du droit international privé.

2 types de sources. En Droit International privé la doctrine s’est opposée très tôt sur les caractères que devaient avoir les sources du Droit International privé.

D’abord les universalistes ont estimé qu’il fallait donner la primauté aux sources internationales et trouver donc des solutions de valeur universelle.

L’autre courant, le courant particulariste, nie au contraire la possibilité d’une unification : pour ce courant, le Droit International privé n’est qu’une projection des droits internes sur le plan international.

  1. A) Les sources internes

On dit souvent que le Droit International privé est international par ses sources.

1) La loi (1ère source interne) :

Son rôle est restreint en Droit International privé, sauf dans le domaine de la nationalité et de la condition des étrangers.

Art 3 code civ. : traite des conflits de lois.

Art 311-14 à 311-18 code civ. : contiennent des règles concernant la filiation.

Art 310 code civ. : traite du divorce

Et récemment, loi du 6 février 2001 sur l’adoption internationale (art 370-3 à 370-5)

2) La jurisprudence :

Etant donné le rôle restreint de la loi , la jurisprudence est devenue une source essentielle du Droit International privé .

3) La doctrine

Là encore on peut dire que la doctrine a un rôle essentielle à jouer, notamment parce que les tribunaux statuent sur des cas d’espèce et qu’il faut des juristes pour passer du particulier au général.

La 2eme raison est que le Droit International privé est une matière complexe et donc passer du particulier au général n’est pas si simple et l’on constate que les juges s’en remettent souvent aux spécialistes pour les questions de Droit International privé. On s’est aperçu que les décisions étaient influencées par la doctrine. Donc place importante.

  1. B) Les sources internationales

1) Les traités

Ils poursuivent des buts variés . 2 types de traités internationaux selon leur but.

Tout d’abord, des traités qui vont avoir pour but d’unifier les règles matérielles de fond.Dans cette catégorie, il y a la convention de Vienne du 11 avril 1980 sur la vente internationale de marchandises. Ces conventions ont pour but d’unifier les règles de fond, cad qu’entre tous les Etats parties à la convention de Vienne, on aura les mêmes règles concernant la formation, l’exécution du contrat de vente et les obligations du vendeur. Facilite l’harmonie des solutions, mais il y a beaucoup d’inconvénients : difficiles à négocier, elles sont le résultat d’un compromis, et elles laissent subsister des problèmes de délimitations entre le domaine du droit interne pur et le droit de la Convention. De plus, ce but d’unification n’est pas atteint à 100% pour plusieurs raisons : Tous les pays du monde n’ont pas ratifié cette convention et ensuite, même si c’était, il resterait toujours des divergences d’interprétations.

La 2e catégorie de traités tend à unifier les règles de conflit de lois et les règles de conflit de juridiction. Ici, plusieurs exemples :

Pour les conflits de juridiction : la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 sur la compétence judiciaire et l’effet des jugements en matière civile et commerciale. La convention a été transformée en règlement communautaire du 22/01/00 et elle a été récemment complétée par la « Convention de Bruxelles n°2 » adoptée sous forme de règlement du 29 mais 2000 et qui a ajouté la matière familiale.

Les autres conventions unifient les règles de conflit de lois et sont de plus en plus nombreuses :

Ex : la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles .

Mais les conventions les plus importantes en matière d’unification ont été adoptées par la conférence de Droit International privé de La Haye, cette conférence réunit les Etats du monde entier et s’est réunie pour la 1ère fois en 1883. Elle a adopté beaucoup de conventions, notamment en matière de responsabilité, en matière d’accidents de la circulation, d’obligation alimentaire, de droit de la famille.

Ces conventions contiennent des règles de conflits de lois et elles vont unifier ces règles. Mais en lisant la convention de Rome, on ne pourra savoir tout de suite quelles sont les obligations du vendeur : la convention dira simplement comment désigner le système juridique qui apportera la réponse. C ‘est donc une harmonisation de solutions.

2) Les autres sources internationales.

On peut évoquer 2 sources :

La jurisprudence internationale : ici en Droit International privé, il y en a très peu (depuis que la CIJ existe, peut être 2 ou 3 décisions concernant le Droit International privé) mais rôle important joué par la CJCE. Au départ c’était timide mais depuis quelques années, elle a donné plusieurs solutions : elle interprète la convention de Bruxelles notamment. De même pour l’interprétation de la Convention de Rome, la CJCE va être compétente et on s’aperçoit que de plus en plus, il y a des solutions qui ont des interférences directes avec le Droit International privé.

L’influence éventuelle d’organes supra-nationaux : il y a parmi eux l’ ONU avec ses organes comme la CNUDCI qui va proposer des contrats-types : on va adopter des lois-types qui peuvent à terme influencer les législateurs nationaux. Ex : elle l’a fait pour le commerce électronique.