Les sources non écrites du droit (doctrine, coutume, usage…)

LES SOURCES NON ÉCRITES DU DROIT

Le Droit est l’ensemble des règles impératives dont le but est d’organiser la vie en société. Ces règles ont été progressivement établies pour tenir compte des contraintes de la vie en société et surtout de l’évolution de cette société. La règle de droit peut être écrite (loi, règlement, traité, décret…) mais aussi non écrite (coutume, usage, doctrine, jurisprudence… ).

Le cours d’introduction au droit privé est divisé en plusieurs fiches :

Définition du droit Les rapports entre le Droit et la Justice Les sources non écrites du droit Les sources écrites du droit (constitution, loi, traité…) Droit subjectif Application de la loi dans le temps et l’espace Distinction acte juridique et fait juridique Personne physique et personne morale Les grands principes de procédure civile Organisation juridictionnelle en France

  • I ) La coutume

La coutume est une règle de droit non écrite émanent du corps social et considérée comme obligatoire. La coutume n’émane pas des pouvoirs publics à la grande différence de la loi. La coutume est moins reconnue que la loi qui est promulguée à une date précise. La loi n’a pas à être précisée en justice. Si la coutume est rédigée la preuve de la coutume est facilitée.

1) Les éléments constitutifs de la coutume

– L’élément matériel :

Pratique et comportement répété dans le temps et l’espace ce qui n’implique pas que la pratique soit immémoriale mais qu’elle soit constante dans le temps, c’est à dire régulièrement suivie.

– L’élément psychologique :

Conviction partagée par tous qui à l’usage à une force obligatoire, en effet les personnes doivent avoir le sentiment qu’on est en présence d’une règle générale obligatoire. Ex : solidarité en droit commercial. La solidarité est donc une institution en vertu de laquelle lorsqu’il y a plusieurs débiteurs d’une même dette, la dette ne se divise pas entre chaque débiteur car chaque débiteur est tenu a l’égard du créancier de la totalité de la dette donc le créancier peut poursuivre n’importe lequel des débiteurs pour la totalité de la créance. Celui qui a réglé la totalité de la dette se retournera ensuite contre les codébiteurs. En droit civil ce n’est pas le cas car la solidarité n’existe que si les partis l’ont prévue ou si la loi la prévue. A la coutume on assimile les usages professionnels qui sont des règles coutumières qui s’imposent à tous les membres d’une même profession. Ex : entre commerçant on se facture Hors Taxe.

2) Rapports entre la loi et la coutume

Aujourd’hui la coutume ne joue qu’un rôle marginal par rapport à la loi. Nous sommes dans un pays de lois écrites car en 1804 Napoléon a fait rédigé le Code Civil. La coutume a donc une place restreinte. En Afrique la coutume a une place prépondérante.

Comment la loi et la coutume peuvent cohabiter ensemble?

Les règles de droit ne sont comparables que lorsqu’elles sont de mêmes natures or la coutume et la loi ne sont pas de même nature, on ne peut pas parler de hiérarchie entre elles

Il existe trois sortes de coutumes :

– Secundum Legem : la loi renvoie directement à la coutume qui dans ce cas la, s’applique en vertu d’une prescription du législateur. En matière de propriété foncière elle renvoie aux usages en vigueur pour les hauteurs des clôtures entre deux maisons et les murs de séparations, pour l’utilisation de l’eau, pour effectuer des plantations, pour certaines constructions.

– Praeter Legem : c’est une coutume qui se développe dans un domaine non régi par la loi. La coutume supplée à la loi. Elle s’applique car elle règle une situation que la loi n’a pas prévue. Ex : avant que quelqu’un ne ratifie cette coutume c’est le fait pour une femme de porter le nom de son mari. Autre ex : la solidarité. Ces coutumes sont rares car les questions sont vite réglées par la loi, c’est-à-dire que s’il y a un manque de loi une loi sera inventée ou par la jurisprudence. La coutume est source du droit exige du temps et la jurisprudence et la loi sont des sources rapides de création de lois.

– Contra Legem : cela dépend de la force obligatoire de la loi. Applique-t-on la loi ou la coutume? La loi supplétive s’applique en cas de l’absence de manifestation contraire : dans ce cas là on peut comprendre qu’une coutume contraire à la loi soit valable puisque le caractère de cette loi n’est pas absolu. Si la loi est impérative, il y a un conflit entre deux pratiques du droit qui peuvent s’appliquer. Ex : Art 931 qui exige que les donations se fassent par acte notarié or le don naturel déroge à cette loi et donc la coutume s’applique et déroge à la loi contraire. Autre ex : l’usage bancaire veut que le solde débiteur du compte courrant produise de plein droit des intérêts ce qui déroge à la rège selon laquelle les intérêts doivent avoir été stipulés. Dans un pays de droit écrit il y a de la place pour les sources réelles du droit donc pour le droit spontané.

Conclusion :On peut déplorer le manque de précision de la coutume, le fait de devoir prouver qu’elle existe quand on l’invoque, mais elle a une grande supériorité par rapport à la loi, c’est l’adhésion automatique au corps social.

  • II) L’usage.

Les usages sont des règles professionnelles ou locales qui s’imposent par le caractère répété et la croyance en leur caractère obligatoire. Les usages conventionnels sont les règles suivies par les professionnels, dans leurs relations contractuelles. Ils sont très nombreux en droit commercial et en droit du travail.

La coutume et les usages sont issus de la pratique et ne sont pas des règles écrites. En conséquence, avec le développement des textes écrits, ils ne représentent plus qu’une source secondaire du droit. Une coutume ou un usage peuvent d’ailleurs disparaître s’ils ne sont plus appliqués ou si une loi ou encore une convention collective en droit du travail y mettent un terme. A l’inverse, certaines conventions collectives ont intégré les usages pour mieux assurer leur pérennité. L’écrit est en effet une preuve en cas de litige, il permet également d’unifier le droit.

III) La jurisprudence.

C’est l’ensemble des décisions rendues par les tribunaux et donc par les juges. La Cour de Cassation rend des décisions qui ont une autorité particulière. Dire que la jurisprudence est source de droit c’est dire que les décisions des magistrats posent la règle à appliquer.

Comment les magistrats peuvent poser la règle de droit alors que leur mission est de l’appliquer ?

– 1ère raison :l’art 4 indique clairement que le juge est obligé de juger, même en présence du silence de la loi.

– 2ème raison :lorsqu’il n’existe pas de règle de droit, le juge doit quand même juger donc il crée la loi. Le juge crée donc une règle de droit. Ex : Art 180 qui dispose que l’on peut faire annuler son mariage s’il y a eu erreur sur la personne. Mais comme la loi ne précise rien de plus, c’est le juge qui décide de l’annulation du mariage. Si le mariage est annulé on peut se remarier à l’Eglise. La Cour de Cassation joue un rôle prépondérant dans la prononciation du droit et non des faits. Elle va regarder si les juridictions inférieures ont bien appliquées les règles de droit, elle ne reprend pas les faits. Elle rend des arrêts de rejet quand elle estime que la juridiction supérieure a correctement jugé : le procès est donc terminé. Ou bien elle rend des arrêts de cassation quand elle estime que la juridiction inférieure a mal appliqué la règle de droit. La cassation de la décision d’un juge est donc la sanction que la Cour de Cassation met en œuvre contre des juges qui ont mal appliqué la règle de droit. La Cour de Cassation par le biais du mécanisme du pourvoit en cassation a toujours la possibilité d’avoir le dernier mot et d’imposer sa solution aux juridictions inférieures. Ces arrêts n’enlèvent pas aux juges du fond leur possibilité de juger. Cependant ils risquent de voir leurs décisions cassées par l’assemblée plénière de la Cour de Cassation.

Conclusion :La jurisprudence joue un rôle incontestable dans la création du droit, mais que sa mission première n’est pas de créer du droit mais de l’appliquer, mais en l’absence de règle de droit elle va pouvoir créer et interpréter des règles de droit. Mais la loi a toujours le dernier mot et peut venir briser une jurisprudence. Arrêt Perruche dans lequel un enfant née avec un grand handicap aurait pu obtenir des dommages et intérêts du fait de sa naissance, car les médecins avaient fait une erreur de diagnostic : loi du 4 mars 2002 relative au droit des malades dispose que nul ne peut se prévaloir d’un préjudice du fait de sa naissance : on ne peut pas demander de dommages et intérêts et il n’y a pas de droit à la mort non plus.

  • II) La doctrine.

La doctrine est l’ensemble des travaux des auteurs (essentiellement des avocats, notaires, universitaires…) qui expriment leurs conceptions théoriques du droit et commentent les lois. Ils interviennent sur des problèmes d’interprétation du droit ou sur des vides juridiques.

La doctrine est une source indirecte du droit. En effet, elle ne s’imposent jamais au juge mais peut parfois l’influencer dans sa prise de décision.

La doctrine est publiée dans des ouvrages ou des revues juridiques sous forme d’articles ou de commentaires sur des décisions prises par les tribunaux.

EXERCICES D’APPLICATION

Article 1135 du code civil : Toute convention oblige, non seulement à ce qui est exprimé, mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature.

Quelles sont les sources de droit présentes dans cet article ?

On a ici l’article 1135 du code civil, et donc une règle écrite, donc une loi, la règle prévoit que les conventions obligent les partis à ce qui est écrit mais encore aux suites que l’usage donne aux obligations d’après sa nature .

Le code fait donc référence pour interpréter le contrat. Le code renvoie donc à un usage. On est donc en présence d’une coutume Secundum Legem

Pierre et Paul ont passé en France un contrat qui s’inspire d’un contrat existant aux USA, mais dont la réglementation est à l’étude en France. Un litige naît entre pierre et Paul concernant ce contrat. Ce litige est soumis au juge, et le juge ne statue pas au motif que la loi française réglementant ce contrat n’a pas encore été promulgué.

Un juge surseoit à statuer au motif que la réglementation française d’un contrat n’est pas encore en vigueur. Article 4 du code civil : Le juge est donc tenu de juger, sous peine de délit de justice.

Myriam a loué à son amie Sylvie à un prix d’ami et en vertu d’un bail un petit studio proche de son lieu de travail. Myriam n’a jamais demandé d’augmentation de loyer qui est prévue tous les 3 ans par la loi. Elles indiquaient régulièrement que c’était une coutume entre elles de ne pas augmenter le loyer. Suite à un licenciement, Myriam connaît des difficultés financières. Elle souhaite appliquer à Sylvie, après 15 ans de coutume contraire, une augmentation de loyer. Sylvie s’y oppose. Laquelle est dans son droit ?

Le bail est un acte juridique bilatéral ou synallagmatique, c’est à dire que chacune des parties à des obligations réciproques. Le bailleur doit permettre la jouissance paisible du local et le preneur doit payer le loyer et le restituer en fin de bail. Le bailleur n’augmente pas le loyer pendant 15 ans et réclame une augmentation, cependant, le preneur se prévaut d’une coutume qui contraint le bailleur à ne pas augmenter le loyer. C’est donc une coutume contra legem. Nous avons donc à faire à un conflit qui se réfère à deux sources juridiques : une loi qui est une règle écrite et une prétendue coutume qui est une règle de droit non écrite qui émane du corps social dont les membres ce conforment a une règle qu’il considèrent comme obligatoire. C’est donc une pratique entre deux amies et il n’est pas possible de considérer cette coutume. Pas de conflit puisque cette pratique n’est pas une source de loi et Myriam peut demander une augmentation de loyer à son amie.

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Définition du droit Les rapports entre le Droit et la Justice Les sources non écrites du droit Les sources écrites du droit (constitution, loi, traité…) Droit subjectif Application de la loi dans le temps et l’espace Distinction acte juridique et fait juridique Personne physique et personne morale Les grands principes de procédure civile Organisation juridictionnelle en France