Responsabilité du fait des choses : conditions, exonérations

Article 1242 du Code Civil : Les conditions de la responsabilité du fait des choses et les exonérations de responsabilité

Selon l’article 1242 du code civil, « on est responsable (…) des choses que l’on a sous sa garde ».

  • 1°) Les conditions de la responsabilité

L’article 1242 al 1 du code civil : il faut l’intervention d’une chose, il faut qu’une chose ait eu un rôle causal. Autrement dit, il faut un fait de la chose.

A – Une chose

L’article 1242 alinéa 1er nous parle des choses que l’on à sous sa garde. Cela appelle trois remarques :

  • Les choses concernées par 1242 al 1 du code civil sont par hypothèse celles qui auront un gardien. Seront donc exclues les choses qui n’appartiennent à personne ainsi que les choses abandonnées.
  • L’article 1242 al 1 du code civil ne s’applique qu’aux choses qui ne sont pas soumises à un régime spécifique: échappent donc à l’application de l’article 1242 (qui reprend à l’identique l’article 1384 ancien), alinéa 1er, les choses soumises à un statut spécial: animaux (Code civil article 1243), bâtiments en ruine (art. 1244), produits défectueux (article 1245 s.), véhicules terrestres à moteur (L. n° 85-677 du 5 juill. 1985).
  • En dehors de ces deux exclusions, cette responsabilité s’applique à toutes les choses, ce principe résulte de l’arrêt Jand’heur, puisque cet arrêt à exclu expressément un grand nombre de distinctions proposées par la doctrine. La doctrine avait proposé tout cela pour réduire le domaine de l’article 1242 al 1 pour conserver le primat de la chose. Les « choses » définies à l’article 1242 peuvent donc être : meubles ou immeubles, mobiles ou immobiles, dangereuses ou non dangereuses, actionnées ou non par la main de l’homme.

La doctrine :

  • Ripert avait proposé de distinguer les choses mobilières et les choses immobilières, et cela car les immeubles sont régis par l’article 1244 Code civil. La distinction proposée par Ripert à été jugée artificielle car comment tracer la frontière entre ce qui est dangereux et ce qui ne l’est pas. Si la chose est actionnée ou non par la main de l’homme, il faut prouver la faute de celui qui actionne la chose (1240), si c’est l’inverse, c’est le fondement de l’article 1242 al 1 du Code civil.
  • La chose visée par le principe général est n’importe quelle chose du moment qu’elle à un gardien et qu’elle n’est pas régie par un régime spécifique. Critiquée par Capitant: Cette nouvelle doctrine à pour résultat de déplacer le centre de la responsabilité délictuelle, elle le transporte de l’article anciennement 1382(nouveau 1240 du code civil) à 1384 al 1, elle vide le premier au profit du second.

B – Le fait de la chose

La responsabilité du fait des choses suppose un fait de la chose à l’origine du dommage. La victime doit rapporter la preuve causale de la chose dans la survenance de son dommage. La simple présence de la chose ne suffit pas, il faut montrer la chose active.

  • Dans un premier temps la jurisprudence à démontrer qu’il ne fallait pas la matérialité d’un contact (c’était pas un critère pour caractériser « le fait de la chose »)
  • Dans un second temps elle à opérer une distinction entre les choses inertes et les choses en mouvement. Une chose inerte, peut elles avoir un rapport causal dans la survenance d’un dommage ? Oui selon la cour de cassation qui retient un critère, celui de l’anormalité. La cour de cassation a recours au critère de l’anormalité pour savoir si une chose inerte à eu un rôle causal. La chose était elle dans une position anormale? Si ce critère de la normalité est présent, la chose aura un rôle actif donc causal. Depuis 1995, la jurisprudence retient le rôle causal. Deux arrêt de principe du 24/02/95, critère constant, celui de l’anormalité. Ex : une personne se blesse en tombant sur le sol (sol = inerte), la responsabilité du gardien sera retenue si le sol est anormalement glissant ou alors si le sol à un relèvement qui ne se distingue pas : ici la chose sera anormale.

Le critère de l’anormalité n’entraîne t-il pas une certaine résurgence de la faute du gardien ?

Pour les choses en mouvement, lorsque celle ci est en mouvement, il n’est pas nécessaire qu’il y ait contact pour qu’il y ait rôle causal. (une personne effrayée par un drone, plongeant dans un ravin) La jurisprudence à présumé le rôle actif de la chose lorsqu’il y a mouvement + contact ; dans ce cas le rôle actif de la chose sera présumé.

  • 3°) La garde

Voir tout le chapitre consacré à la garde de la chose

  • 2°) La responsabilité du gardien

Il pèse sur le gardien une responsabilité de plein droit impliquant le fait qu’il ne pourra invoquer que certaines causes d’exonération.

A – Une responsabilité de plein droit

Avec l’arrêt Jeand’heur, on sait qu’il pèse sur le gardien une présomption de responsabilité. Cela veut dire que le gardien ne peut pas rapporter la preuve de son absence de faute. L’existence d’une faute ou l’absence d’une faute du gardien est indifférente. Cela implique qu’on est en présence d’une responsabilité dite objective. Le fondement de cette responsabilité n’est pas la faute mais le risque. Il doit répondre des conséquences dommageables du fait de la chose qu’il à sous sa garde.

B – Les causes d’exonération

Quatre causes :

  1. La force majeure : il revêt trois caractères cumulatifs, il doit être extérieur au gardien, il doit être imprévisible celui que le gardien ne peut pas avoir anticipé (s’apprécie in abstracto), et l’événement doit être irrésistible, le gardien ne pouvait pas l’empêcher.
  2. Le fait d’un tiers : Cela ne peut être ni le gardien, ni la victime. Ce tiers peut être par son fait, à l’origine du dommage. Pour que le fait d’un tiers exonère le gardien de sa responsabilité, il doit présenter le caractère de la force majeure, sinon pas d’exonération.
  3. Le fait de la victime : La victime peut avoir concouru à son propre dommage, à sa survenance. Le fait peut constituer une cause d’exonération pour le gardien.

Exonération soit totale soit partielle. Totale pour le gardien lorsque le fait de la victime est de force majeure. S’il ne présente pas ces caractères, l’exonération pourra être partielle.

En matière de responsabilité du fait des choses cela n’a pas toujours été le cas comme entre 1982-1987 ou la cour de cassation à adopter le système du tout ou rien. Pas d’exonération partielle, à cause de la loi Badinter sur les accidents de la route (1985). Arrêt de provocation Desmares, 2nde chambre civile, 21/07/1982 (une provocation à la réforme du régime de responsabilité civile des accidents de circulation, qui aboutira à la réforme de 1985). Cet arrêt concerne un accident de la circulation, la cour de cassation en présence d’une faute de la victime qui ne revêt pas le caractère de la force majeure, pas d’exonération partielle du gardien. Cet arrêt constitue un revirement de jurisprudence. Cette jurisprudence à incité le législateur à agir. (1242 al 1) jurisprudence très sévère pour les gardiens.

D’ou la loi Badinter du 5/07/1985 qui régie les accidents de la circulation. Après cette loi, nouveau revirement de jurisprudence le 06/04/1987 ou la cour de cassation à a nouveau admis une exonération partielle.

  1. L’acceptation des risques : Peut on opposer à la victime son acceptation des risques ? Exemple, dans le cadre d’un rallye auto, une personne, le co-pilote est blessé, peut on lui opposer l’acceptation des risques? La jurisprudence et la législation ont varié : 2010 et 2012.
  • Avant 2010 la jurisprudence prend en compte l’acceptation des risques mais uniquement pour les compétitions sportives. 2nde chambre civile, 28/03/2002. Arrêt de la cour d’appel censuré par la cour de cassation en refusant de prendre en compte l’acceptation des risques, elle relève que le dommage s’est produit pendant un jeu improvisé entres mineurs et non en compétition sportive.
  • En 2010 la 2nde chambre civile rend un arrêt le 04/11/2010, dans cet arrêt la cour de cassation rejette toute acceptation des risques sur le terrain de la responsabilité du fait des choses, attendu de principe clair dans lequel elle énonce que la victime d’un dommage causé par une chose peut invoquer la responsabilité résultant de 1242 al 1 à l’encontre du gardien de la choses, instrument du dommage, sans que puisse lui être opposé son acceptation des risques. Ici, l’attendu est général et ne fait plus référence à une compétition sportive. Elle n’entend plus accepter l’exonération des risques sur 1242 al 1 peut importe que ce soit une compétition ou pas.
  • Arrêt très critiqué. Réforme du 12 mars 2012. Cette loi introduit L312-3-1 dans le code du sport. Cet article ne vaut que pour les participants, les pratiquants, pas pour le public venu assister à une compétition. Cet article ne vaut que pour les dommages matériels et non corporels. Cet article s’applique dans le cas d’une manifestation sportive ou d’un entraînement en vue de cette manifestation sportive, de plus, il faut que le dommage ait lieu sur un lieu réservé à la pratique de l’activité.
  • Effet: irresponsabilité du fait des choses, pas de responsabilité matérielle du dommage causé à la victime.