L’acceptation du contrat (article 1118 al. 1 du Code civil)

L’acceptation

L’article 1118, alinéa 1, du Code civil définit l’acceptation comme étant « la manifestation de volonté de son auteur d’être lié dans les termes de l’offre ». L’acceptation est donc une adhésion pure et simple à l’offre. Il faut cependant examiner l’objet de cette acceptation avant de voir sa forme et le cas particulier des contrats entre absents.

1) L’objet de l’acceptation

  1. a) Le principe

L’acceptation doit être conforme aux termes de l’offre (article 1118, alinéa 1). Cependant, cette définition n’est pas tout à fait conforme à ce qu’a dit la doctrine qui présentait l’acceptation comme devant porter sur tous les éléments essentiels du contrat et admettait ainsi qu’une acceptation avec réserve était en principe inefficace sauf lorsque cette réserve portait sur un point non-essentiel. En pratique, la jurisprudence considérait que s’il y avait une réserve, elle portait sur un point essentiel, le plus souvent (arrêt de la chambre commerciale du 16 avril 1991 – affairePESCABRAVA).

b) Des nuances

On peut noter trois nuances au principe de l’acceptation :

Le fait que, lorsque l’offre est rédigée avec des clauses en petit caractères ou figurant au verso, cette offre peut être considérée, dans les contrats d’adhésion ou les contrats où l’une des parties est dominante, comme n’étant pas nécessairement acceptée par l’acceptation lorsqu’il n’en a pas pris connaissance très clairement (arrêts de la troisième chambre civile du 3 mai 1979 et du 13 octobre1992).

L’offre est parfois prolongée par des documents publicitaires. En principe, ils ne complètent pas l’offre et l’acceptation de l’offre entraine l’acceptation du contenu de l’offre (arrêt de la troisième chambre civile du 17 juillet 1996). La jurisprudence donne cependant l’exception que les documents publicitaires ont une valeur contractuelle aux conditions qu’ils soient suffisamment détaillés et précis, et qu’ils aient une influence sur le consentement du cocontractant (arrêt de la première chambre civile du 6 mai2010).

La pratique des « Conditions générales » est fréquente (article 1119 du Code civil), notamment chez les professionnels et il en existe qui complètent l’offre de contracter. Ces conditions générales sont soit définies par le syndicat professionnel dont fait partie l’offrant ou l’acceptant, soit directement élaborées par le professionnel. Il faut cependant, pour avoir valeur contractuelle, que ces conditions aient été porté à la connaissance du cocontractant et acceptés par celui-ci. Dans le cas particulier où le contrat serait conclu entre deux professionnels, chacun d’entre eux présente à l‘autre ses propres conditions générales. Mais il peut arriver qu’il y ait des contradictions entre ces deux conditions générales et dans ce cas, la Cour de cassation a pu estimer que le vendeur ne pouvait se prévaloir d’une acceptation par le silence gardé par l’acheteur pour en déduire que ce dernier a accepté tel ou tel élément des conditions générales du vendeur (arrêt de la chambre commerciale du 10 janvier 2010). L’article 1119, alinéa 2, prévoit que « en cas de discordance entre des conditions générales invoquées par l’une et l’autre des parties, les clauses incompatibles sont sans effet».

Lorsque l’offre est acceptée avec une réserve, le contrat est conclu instantanément selon les termes de l’offre . Si l’offre n’est pas acceptée totalement, le contrat n’est pas conclu, en principe. Les réserves sont parfois assorties d’une contre- proposition et la proposition devient une contre-offre, et ainsi de suite jusqu’à ce que les parties tombent d’accord ou non.

2) La forme de l’acceptation

L’acceptation peut être expresse ou tacite. Si elle est tacite, elle se déduit des circonstances et il faut interpréter la volonté du prétendu acceptant (le fait pour le destinataire d’une offre de commencer à exécuter le contrat par exemple). On pourra considérer que ce début de commencement vaut acceptation, selon les circonstances. S’agissant du silence, le principe est que « qui ne dit mot ne consent pas », autrement dit, le silence ne vaut pas acceptation (jurisprudence constante : arrêt de la Cour de cassation du 25 mai 1870, rappelé par l’assemblée plénière dans un arrêt du 3 mai 1956 : repris dans l’article 1120 du Code civil). Mais il y a cependant des exceptions:

Une exception légale puisqu’il existe des cas où la loi prévoit par exemple la prolongation ou le renouvellement du contrat par lesilence,

Les usages professionnels sont parfois retenus (arrêt du 13 mai2003),

Les relations habituelles (d’affaires) des parties, c’est-à-dire les contrats conclus régulièrement dans des mêmes termes (arrêt du 15 mars2011).

Plus généralement, dans un arrêt de la première chambre civile du 24 mai 2005, la Cour de cassation précise que le silence vaudra acceptation lorsque les circonstances permettent de donner au silence valeur d’acceptation. Cette solution est reprise à l’article 1120 du Code civil. La Cour de cassation avait déjà retenue un cas particulier avant l’ordonnance de 2016 : le silence vaut acceptation lorsque l’offre faite au destinataire a été faite dans l’intérêt exclusif de celui-ci (arrêt de la chambre des requêtes du 28 mars 1938). Cette solution, souvent critiqué par la doctrine, a considéré qu’il pouvait parfois s’agir d’un

« forçage » de la volonté du destinataire. Cette hypothèse n’est pas prévue en tant que telle à l’article 1120 mais celle des circonstances particulières peut permettre de retenir la même solution.

3) Le contrat entre absents (ou à distance)

Le contrat entre absents pose deux grands problèmes : sa date (mais ce dernier est moins important aujourd’hui du fait des NTIC) et son lieu de conclusion. S’il y a plusieurs acheteurs pour une seule offre, seul le premier qui accepte conclut le contrat. L’offrant peut décider du mode d’acceptation qu’il désire. La tendance générale de la jurisprudence, avant l’ordonnance, était que ce sont les parties qui décident du système qu’ils désirent appliquer (plutôt l’offrant d’ailleurs) et l’offrant précise que l’acceptation sera faite en vertu du cachet de la Poste par exemple (qui fera foi). En absence de précision des parties ou de volonté particulière, une tendance jurisprudentielle veut que la date d’émission soit retenue (arrêts de la chambre des requêtes du 21 mars 1932 et la chambre commerciale du 7 janvier 1981 en ce sens) : c’est la théorie de l’émission. L’avantage ici est que tous les destinataires de l’offre sont sur un pied d’égalité mais le désavantage est que l’offrant ne connait la date d’acceptation qu’à la réception et qu’il a déjà pu conclure durant le temps de transit de l’acceptation. L’interprétation est différente selon les auteurs sur la théorie retenue. Selon M. GASSER, un arrêt de la troisième chambre civile du 17 septembre 2014 semble confirmer la théorie de l’émission mais, en sens contraire, un arrêt de la troisième chambre civile du 16 juin 2011 semble retenir la théorie de la réception (envisagée à l’article 1121 du Code civil : « Le contrat est conclu dès que l’acceptation parvient à l’offrant »). Ceci est en accord avec les règles internationales, notamment la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises qui retient cette théorie de la réception.

S’agissant du lieu, une solution identique est apportée dans l’ordonnance de 2016 : il s’agit du lieu où l’acceptation est parvenue. On peut penser que ces solutions peuvent être écartées par la convention des parties. Pour la révocation, la Cour de cassation avait plutôt retenu la théorie de la réception de l’acceptation, c’est-à-dire que tant que l’acceptation n’est pas reçue par l’offrant, ce dernier peut rétracter l’offre (arrêts de la troisième chambre civile du 24 octobre 1978 et du 17 septembre 2014). Il semble que ce soit une solution identique qui pusse être retenue au regard de l’ordonnance de 2016 et on peut retenir à ce titre deux articles : l’article 1115, qui prévoit que l’offre peut être librement rétracter tant qu’elle n’est pas parvenue à son destinataire, et l’article 1118, alinéa 2, qui prévoit que tant que l’acceptation n’est pas parvenue à l’offrant, elle peut être rétractéelibrement.

Il existe des cas de rétractation ou de réflexion au profit d’un acceptant. Par exemple, certaines dispositions de droit de la consommation. Pour un contrat de vente, on peut laisser 10 jours de réflexion avant le contrat et l’acte authentique et laisser 10 jours au vendeur avant le contrat sous seing privé.

4) Le contrat électronique

Le contrat électronique est prévu par les articles 1127 et suivants du Code civil. Ce sont des règles qui ont d’abord été prises par des institutions européennes (directive de 2000 sur le commerce électronique). Le législateur français a donc transposé cela par des lois du 13 mars 2000 (en matière de preuve) et du 21 juin 2004 (relative à la formation du contrat électronique et plus particulièrement au consentement), toutes deux complétées par une ordonnance du 16 juin 2005. L’ordonnance de 2016 a repris ces diverses dispositions sans réel changement.