L’accord de conciliation

L’issue de la conciliation

Définition de la procédure de conciliation : c’est une procédure amiable de prévention des difficultés des entreprises qui permet à l’entreprise de poursuivre son activité sans que le chef d’entreprise ne soit dessaisi de ses pouvoirs. La procédure de conciliation a pour objectif d’aboutir à la conclusion d’un accord amiable entre l’entreprise et ses principaux créanciers : Personne à qui l’on doit de l’argent ou la fourniture d’une prestation.

Comme pour le règlement amiable la procédure de conciliation a vocation de parvenir à l’élaboration d’un accord entre le débiteur et ses principaux créanciers. La conciliation peut- elle échouer ? Évidemment oui si aucun créancier ne veut participer, alors le débiteur pourra à nouveau solliciter l’ouverture d’une autre conciliation mais dans cette hypothèse il devra attendre un délai de 3 mois à compter de la fin de la précédente procédure. L’échec d’une conciliation n’est pas cause d’ouverture de la procédure collective. Toutefois en pratique si le débiteur n’est pas en cessation des paiements on pourra vivement lui conseiller de suivre une procédure de sauvegarde.

D’autre part la conciliation peut ne pas aller jusqu’au terme assigner, deux circonstances sont prévues par le code de commerce dans lequel la conciliation prendrait fin prématurément :

– lorsque le débiteur en fait la demande

– lorsque le conciliateur estime que les propositions faites au débiteur étaient indispensables et que celui-ci les a rejeté.

Si la conciliation a abouti à un accord à ce stade l’accord engage déjà tous ceux qui l’ont signé et ce en vertu du droit commun de 1134 du code civil. Toutefois l’efficacité de l’accord obtenu peut être renforcée soit par un recours à une constatation de cet accord par le président du tribunal soit par le recours à une homologation de cet accord mais cette fois ci par le tribunal lui-même.

A- La constatation de l’accord

Cette constatation trouve sa source dans l’article L611-8 al 1er du code de commerce aux termes duquel le président du tribunal sur la requête conjointe des parties constate leur accord et donne à celui-ci force exécutoire. Il statue au vue d’une déclaration certifiée du débiteur attestant qu’il ne se trouvait pas en cessation de paiement lors de la conclusion de l’accord ou que ce dernier y a mis fin.

La décision constatant l’accord n’est soumise à aucune publication mais corrélativement n’est soumise d’aucun recours. L’accord constaté interrompt toute action en justice et interdit toute poursuite individuelle sur les biens meubles ou immeubles du débiteur. Toutefois l’accord ne va créer d’obligation qu’à l’égard de ceux qui l’ont signé, autrement formulé la constatation interrompt effectivement toute poursuite individuelle des créanciers dans le but d’obtenir le paiement des créances qui ont font l’objet. Mais les créanciers non parties à l’accord ne pourront pas eux se voir imposer des délais. Ils devront être payés à l’échéance donc.

Si lors de la phase de recherche de l’accord le président du tribunal sur demande du débiteur, a fait application des dispositions des articles 1244-1 à 3 du code civil à l’encontre de créanciers ayant exercé des poursuites ou ayant délivré des mises en demeure, les délais de grâce seront maintenus en phase d’exécution de l’accord de conciliation.

Soit les créanciers vont participer à l’accord et y seront donc tenus ou bien ceux qui ne participent pas le débiteur devra payer à l’échéance. Au stade de la constatation il n’existe pas de privilèges accordés aux créanciers qui ont fait l’effort financier dans le cadre de l’accord. Par contre les garant et notamment les cautions solidaires pourront bénéficier des dispositions de l’accord.

L’ordonnance de 2008 a mis un terme à une différence qui existait entre l’accord constaté par le président et l’accord homologué par le tribunal.

Les effets résultants de la constatation de l’accord sont limités, la constatation donne à l’accord force exécutoire, les parties sont dispensées d’avoir à recourir préalablement au tribunal pour en obtenir l’exécution, mais surtout le second effet est que la constatation de l’accord permet à la procédure de garder son caractère confidentiel.

B- L’homologation de l’accord

L’article L611-8 al 2 du code de commerce.

1- Les conditions de l’homologation

a- Les conditions de forme

L’homologation repose sur une demande que seul le débiteur peut accomplir. Force est de constater qu’en pratique la démarche ne sera pas forcément spontanée, le débiteur l’accomplira souvent sous la pression de ses créanciers qui le cas échéant pourraient faire de l’homologation une condition de l’engagement.

b- Les conditions de fond

L’homologation est soumise à trois conditions de fond :

  • Le débiteur ne doit pas être en cessation des paiements ou si il y est l’accord conclu doit y mettre fin. S’il l’était deux choix s’offrent à lui :
  • – soit le tribunal devra vérifier que la conciliation met un terme à cette cessation des paiements car le débiteur a obtenu de ses créanciers un rééchelonnement de ses dettes.
  • – Soit il a pu obtenir des concours nouveaux (financiers) lui permettant de faire face à son passif exigible.
  • Il faut que l’accord soit de nature à assurer la pérennité de l’entreprise. Le tribunal devra analyser le contenu de l’accord pour voir si les mesures envisagées sont suffisantes pour assurer un rétablissement durable de l’entreprise.
  • Il faut que l’accord ne porte pas atteinte aux intérêts des créanciers non signataires.

L’accord ne créé d’obligations que pour les créanciers signataires mais du fait de l’homologation l’accord va être opposable à tous les créanciers. Le tribunal devra donc vérifier que les garanties éventuellement prises par les signataires de l’accord ne sont pas disproportionnées par rapport aux efforts consentis. Le risque d’une telle disproportion serait de rendre inefficace les suretés prises par les créanciers non signataires. Nous rappelons ici que les créanciers non signataires ne sont pas tenus, donc par rapport à ceci ces créanciers seront payés à l’échéance toutefois si au jour de la procédure d’ouverture de la conciliation ou pendant le déroulement si le créancier a eu recours au code civil (procédure vue) les prérogatives peuvent se voir neutralisées.

2- La procédure d’homologation

Elle est régie par les articles L611-9 et 10 du code de commerce, l’homologation met fin à la procédure de conciliation puisque l’accord est obtenu.

Pour procéder à l’homologation le tribunal doit provoquer en chambre du conseil un cercle élargit de personnes. On y trouve les débiteurs, mais aussi les créanciers partis à l’accord, des représentants du comité d’entreprise, du conciliateur, du ministère public et enfin le cas échéant l’ordre professionnel dont relève le débiteur lorsque celui-ci exerce une activité libérale. Toutes ces personnes sont admises à prendre connaissance de l’accord au greffe du tribunal R611-40. Le jugement d’homologation n’est pas tenu de reprendre les termes de l’accord. Il doit toutefois déterminer les garanties et les privilèges qui ont été constitués pour assurer l’exécution de l’accord.

Lorsque l’homologation est accordée un avis du jugement est inséré au BODACC, il sera aussi dans un journal d’annonce légal du siège ou du domicile du débiteur. Ces démarches font inévitablement perdre à la procédure son caractère confidentiel.

Quant aux voies de recours si la demande d’homologation est rejetée le jugement est susceptible d’appel de la part du débiteur et des créanciers parties à l’acte. Si l’homologation est prononcée le jugement est susceptible de tierce opposition mais également d’un appel mais uniquement du ministère public. La tierce opposition est à faire dans les 10 jours de la publicité.

3- Les effets de l’homologation

On aura deux sortes d’effets, immédiats et différés.

a- Les effets immédiats de l’homologation

Les effets sont à L611-10-1 du code de commerce. Ils consistent en une suspension des poursuites contre le débiteur en vue d’obtenir le paiement des créances qui sont l’objet de l’accord et ce pendant toute la durée de l’exécution de l’accord. Concrètement la situation des créanciers est donc neutralisée car il leur est interdit non seulement de poursuivre le débiteur en paiement de leur créance mais également de prendre de nouvelles garanties sur les biens du débiteur. Peu importe par ailleurs que les poursuites portent sur les meubles ou sur les immeubles du débiteur.

On a deux limites à cette suspension des poursuites :

– la première limite est liée au fait que L611-10-1 n’arrête que les actions en paiement des créances ce qui signifie qu’échappe à l’application de cet article les actions en résolution en nullité ou en garantie des vices cachés.

– L’autre bémol est que les créanciers demeurant en dehors de l’accord conservent leur droit de poursuite individuel mais peuvent se voir imposer les délais et réductions prévus par 1244-1 à 1244-3.

C’est l’article L611-10-2 al 2 prévoit que l’accord homologué entraine la levée de plein droit de toute interdiction d’émettre des chèques conformément à L131-73 du code monétaire et financier.

b- Les effets différés de l’homologation

Pour les créanciers ces effets différés résultent principalement de l’article L611-11 du code de commerce qui consacre le privilège de conciliation autrement dit privilège du new money.

Cet article énonce qu’en cas d’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire les personnes qui avaient consenties dans l’accord homologué un nouvel apport en trésorerie du débiteur. En vue d’assurer la poursuite de l’activité de l’entreprise. Ces personnes sont payées pour le montant de cet apport par privilège avant toute créance née antérieurement à l’ouverture de la conciliation et selon le rang prévu par l’article L622-17 du code de commerce.

Ce privilège était initialement réservé aux concours bancaires mais le texte a évolué et les personnes désormais qui fournissent dans l’accord homologué un nouveau bien ou un nouveau service en vue d’assurer la poursuite de l’activité de l’entreprise sont payés pour le prix de ce bien ou de ce service par privilège avant toute créance née antérieurement avant l’ouverture de la conciliation.

Ce privilège s’exercera en réalité en cas d’ouverture ultérieure d’une sauvegarde, d’un redressement ou d’une liquidation. Cela prendra la forme d’une déclaration d’une nouvelle créance indiquant au mandataire l’existence de ce privilège.

Le créancier qui est titulaire de ce privilège ne sera primé que par le super privilège des salaires et par les frais de justices utiles à la procédure. En revanche il l’emportera sur les créanciers postérieurs à l’ouverture de la procédure collective.

Sont concernées par ce privilège les personnes qui consentent au débiteur un nouvel apport en trésorerie ce qui induit que cet apport nouveau doit être liquide d’où le nom de privilège de l’argent frais. Sa finalité est d’assurer la poursuite de l’activité de l’entreprise l’article L611-11 précise d’ailleurs que les créanciers signataires de l’accord ne peuvent pas bénéficier directement ou indirectement de cette disposition au titre de leur concours antérieur à l’ouverture de la conciliation. Le bénéfice du privilège est par contre exclu pour les apports consentis pour les actionnaires ou les associés dans le cadre d’une augmentation de capital. A cette nuance prés que l’on considère que les apports consentis par les mêmes actionnaires et associés bénéficieraient du privilège lorsqu’ils sont faits en compte courant. Ce que la doctrine critique aisément parce que lorsqu’ils souscrivent on leur reconnait pas le privilège mais par contre oui dans le compte courant, ce n’est pas logique du tout.

Cette disposition instituant le privilège de conciliation est essentielle pour le débiteur car elle incite les créanciers à jouer le jeu de la conciliation en leur donnant une priorité de paiement mais elle reste limitée à l’hypothèse où l’accord de conciliation est homologué par le tribunal. Et comme seul el débiteur peut demander cette homologation indirectement il bénéficie d’un instrument de pression sur les créanciers pour que ceux-ci participent à la négociation.

L’autre effet différé concerne les cautions l’article L611-10 du code du commerce énonce que les coobligés ou les personnes ayant consenties un consentement ou une garantie autonome peuvent se prévaloir des dispositions de l’accord homologué que ces garants soient des personnes physiques ou des personnes morales. Cette règle supposait initialement que l’accord soit homologué cette règle est désormais applicable simplement à l’accord constaté.

C- L’échec de l’accord constaté ou homologué

Si l’accord obtenu entre le débiteur et les créanciers n’est pas exécuté deux hypothèses peuvent se présenter. L’article L611-10-3 dispose d’abord que saisi par l’une des parties à l’accord constaté, le tribunal s’il constate l’inexécution de l’engagement résultant de cet accord prononce la résolution de celui-ci dans les mêmes conditions. Il peut prononcer la résolution de l’accord homologué.

A la lecture des textes il nous apparait que le tribunal n’a aucun pouvoir d’appréciation et l’inexécution de l’accord déclenche de facto sa résolution. Concrètement l’accord de conciliation est anéanti par la résolution mais l’article précise également que la résolution emporte la déchéance de tous délais de paiement accordé au débiteur.

L’autre hypothèse c’est que L611-12 du code de commerce prévoit que l’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire qui met fin à l’accord homologué. Les créanciers recouvrent alors l’intégralité de leur créances et de leur suretés, ce qui fait dire à certain que l’article consacre également une résolution automatique de l’accord de conciliation.

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