Le critère de l’affectation des biens à l’utilité publique

L’affectation à l’utilité publique

L’affectation, la destination du bien à un usage déterminé, à l’utilité publique est une des conditions non pas de propriété, indispensable pour qu’un bien soit réaménagé parmi les biens qui relèvent du domaine public. Il existe 2 branches dans cette affectation à l’utilité publique, soit l’affectation à l’usage public, soit l’affectation à un Service Public. Dans un cas comme dan l’autre, bien affecté à l’utilité publique t la jurisprudence du Conseil d’Etat avait largement contribué à étendre le périmètre de la domanialité publique car notion d‘affectation largement conçue.

Le CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES amorce un mouvement de réduction de la domanialité publique qui se comprend par référence à cette jurisprudence extensive du CE.

On trouve au CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES, la volonté de réduire le périmètre de la domanialité publique puisque la domanialité publique emporte l’application de règles protectrices de l’utilisation des biens. Règles considérées comme étant contraires à la nécessité de valoriser les propriétés publiques.

Article L 2111-1 montre cette volonté.

  • A) Les critères législatifs réducteurs

La jurisprudence du Conseil d’Etat avait progressivement assoupli cette règle de l’affectation. Egalement, le jurisprudence exigeait que le bien affecté au Service Public fut également spécialement aménagé aménagement spécial est le critère réducteur litant l’extension de la domanialité public

Le CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES prend le contrepied de cette jurisprudence il entend bien restreindre le critère général de l’affectation. Par ailleurs, le CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES se veut plus restrictif que la jurisprudence puisqu’il mentionne désormais la nécessité d’un aménagement indispensable. Ce critère de l’aménagement indispensable est différent du critère de l’aménagement spécial.

 

1.Le critère général d’identification du domaine public : l’affectation

Le CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES consacre la dualité de l’affectation (usage du public ou affectation à un Service Public) ais le code cherche à clarifier ce critère générale d’affectation à l’utilité publique, à clarifier la distinction entre les biens affectés à l’usage du public et les biens affectés à un Service Public. En effet, lorsqu’on regarde la jurisprudence du Conseil d’Etat, ses 2 branches de l’affectation sont sources d’un certain nombre d’ambiguïtés, d’obscurités.

On comprend mal pourquoi un cimetière ou encore une promenade publique serait affecté à l’usage du public alors que l’allée des Alyscamps, le Conseil d’Etat considère que cette allée est affectée à un Service Public et non pas à l’usage du public. Dans l’un ou l’autre, biens affectés à l’utilité publique mais il y a dans cette notion d‘affectation à l’utilité publique, une mise en œuvre jurisprudentielle pas toujours cohérente. C’est ce type d’incertitudes portées par la jurisprudence qui a contribué à l’élargissement de la domanialité publique. Donc le législateur avec le CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES, a cherché à clarifier ces deux branches de l’affectation, à définir ses deux branches de l’affectation.

Le CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES mentionne qu’un bien est affecté à l’utilité publique lorsqu’il est soit affecté à l’usage direct du public soit affecté à un Service Public (article L 2111-1). Ici le législateur en se contente plus en ce qui concerne la première alternative possible d’une affectation à l’usage du public mais d’une affectation à l’usage direct du public critère plus précis. Il ne suffit plus qu’un bien soit affecté à un usage public pour rentrer dans la catégorie des biens du domaine public, il faut qu’il y ait une affectation directe à l’usage du public ou que ce bien soit affecté à l’usage direct du public. Seuls relèvent donc du domaine public, les biens des personnes publiques que les usagers peuvent utiliser directement et cela suppose que l’on puisse identifier une certaine partie du public qui pourront avoir la qualité d’usagers de ces biens, qui seront utilisés conformément à leur affectation.

L’affectation gagne ici une précision importante, la seul ouverture à l’usage du public ne suffit plus encore faut-il que le bien soit directement affecté à l’usage de certaines catégories d’individu qui auront la qualité d’usager. Ex : les églises ouvertes au public mais pas à n’importe quelle catégorie, pareil pour les universités.

Ce n’est pas cette première banche de l’affectation qui a suscité le plus de difficultés, c’est la seconde. Le bien appartenant à une personne publique et qui est affecté à un Service Public sous réserve d’un aménagement. C’est cette deuxième branche qui a suscité le plus de difficultés contentieuses et c’est là où s’est traduite l’hypertrophie l’extension démesurée du domaine public et le législateur a tenté d’enrailler ce mouvement jurisprudentiel en exigeant que le bien en cause soit certes affecté à un Service Public mais surtout pourvu que ce bien fasse l’objet d’un aménagement indispensable (critère réducteur de la domanialité public).

 

2.Aménagement indispensable

Nouvelle sémantique du législateur : la notion d‘aménagement indispensable se substitue à celle d’aménagement spéciale utilisé en jurisprudence pour limiter l’extension de la domanialité public (arrêt 19 octobre 1966 société Le Béton). Cette notion d’aménagement spécial avait fait l’objet d’une interprétation particulièrement souple et cette notion avait été utilisée de manière inconsistante par la Jurisprudence.

On relève certaines décision du Conseil d’Etat qui montrent que le critère de l’aménagement spécial avait été utilisé quel que soit les branches de l’affectation c’est à dire que le bien est affecté à l’usage du public ou à un Service Public. Première tendance jurisprudentielle qui démontre l’inconsistance de cette notion qui avait même été utilisé ne dehors du cas de figure où le bien est affecté à un Service Public mais affecté à l’usage du public.

Décision du 31 mai 1975 Dame Gozzoli qui concernait une plage incluse dans le domaine public parce que le Conseil d’Etat avait décidé que cette plage était entretenue que cet entretien faisait qu’elle était spécialement aménagée pour sa destination qui était l’usage du public, c’est à dire l’usage de tous. Il suffisait qu’un bien fasse l’objet d’un entretien pour considère que l’entretien fallait aménagement spécial qui permettait à ce bien comme destiné à l’usage du public

Notion utilisé indépendamment de tout Service Public alors qua proprio ce critère de l’aménagement spéciale ne devait servir que dans le cas d’un bien affecté à un Service Public.

Cela témoigne d’une 2ème tendance jurisprudentielle, même lorsque ce critère l’aménagement spécial est utilisé dans le cadre de biens affectés à un Service Public, cet aménagement spécial n’a pas véritablement de consistance. Cette notion d’aménagement spécial est appliqué de manière compréhensive sachant que ce critère de l’aménagement spécial pouvait viser tout et n’importe quoi dans la jurisprudence du CE. Décision allée des Alyscamps : le Conseil d’Etat considère que cet allée est affecté au Service Public culturel et spécialement aménagé à cet effet : aménagement spécial consistait en une chaîne déposé à l’entrée de l’allée donc régime de la domanialité publique.

La jurisprudence du Conseil d’Etat s’était montré généreuse.

Donc le Conseil d’Etat s’était montré généreux, et l’aménagement spécial n’avait pas pu remplir le rôle qui lui avait été assigné en 1956.

On comprend mieux pourquoi le législateur a souhaité substituer à l’aménagement spécial un critère réducteur : l’aménagement indispensable.

Le législateur a donc préféré faire référence à un nouveau critère réducteur de la domanialité publique : le critère de l’aménagement indispensable. Ce critère est destiné à réduire le champ de la domanialité publique, mais ce critère désormais, ne doit pourvoir jouer que si le bien est affecté au Service Public, et non plus indifféremment selon les 2 branches possibles de l’affectation. Pour l’autre branche de l’affectation, l’usage direct du pub, c’est une notion plus restrictive que celle mise en œuvre auparavant. Et ensuite, ce critère aménagement indispensable est appelé a avoir une véritable consistance à l’inverse du critère précédent de l’aménagement spéciale.

Mais encore faut-il que le juge administratif se rallie à cette prescription législative, encore faut-il que le juge administratif ne poursuive pas les tendances antérieures au code généra : il faut qu’il tienne effectivement compte de ces nouveaux critères de la domanialité publique. C’est semble-t-il le cas : on en a le signe à travers 2 illustrations jurisprudentielles qui sont notables, car ces décisions concernent des situations qui ont été constituées avant l’entrée en vigueur du code (avant le 1er juillet 2006). Quand le code entre en vigueur, il n’est pas rétroactif.

Mais l’intérêt de ces 2 décisions, est que pour des faits, situations juridiques qui datent d’avant l’entrée en vigueur du code, le Tribunal des Conflits a fait application de l’aménagement spécial, mais a utilisé ce critère dans un sens conforme aux intentions du législateur, ce qui est susceptible d’indiquer que les juges se rallient à ces nouveaux critères de la domanialité a fortiori (ils n’étaient pas obligé, car les litiges étaient antérieur à l’entrée en vigueur du code).

2 décisions significatives donc : décision du 7 mai 2012 Mercadier et Krantz (requête 342107, au recueil). Dans cette décision, le Conseil d’Etat adopte un considérant qui semble rédigé sous forme d’un considérant de principe. le Conseil d’Etat dit « or le cas où il est directement affecté à l’usage du public, l’appartenance au domaine public est subordonné à la double condition que le lien soit affecté au Service Public et spécialement aménagé en vue de ce Service Public » : le Conseil d’Etat distingue les deux branches de l’affectation. Donc pour le Conseil Etat, le critère de l’aménagement spécial est réservé désormais à la 2nde branche de l’affectation, c’est-à-dire à l’affectation à un Service Public, et non plus indifféremment, quel que soit la branche de l’affectation : affectation au public ou affectation à un Service Public. On voit le Conseil d’Etat se rallier à la nouvelle définition du législateur du domaine public.

Mais ce n’est peut-être pas l’arrêt le plus significatif : on en trouve un 2nd : décision du Tribunal des Conflits 22 octobre 2007 Mademoiselle Doucedame contre Département des Bouches-Du-Rhône. Décision concernait un bien qui était propriété du département des Bouches-Du-Rhône. Il s’agissait d’une grotte située dans le massif des Hautes Rocs, qui est un massif forestier. Un litige était survenu, car un accident avait eu lieu dans cette grotte. La question se posait de la compétence juridictionnelle : si c’était le juge administratif, c’était peutêtre une dépendance du domaine public alors.

Le Tribunal des Conflits considère, alors que le département des Bouches-Du-Rhône a acquis ce massif, il a entendu mettre en œuvre un Service Public : le Service Public de protection de l’environnement, conformément aux dispositions relatives à la protection des espaces naturels sensibles. Donc ce bien était affecté à ce Service Public. Regardant si cette dépendance avait été aménagée, il relève que le département avait implanté dans ce massif des panneaux d’information, des sentiers de randonnée avaient été balisés → il y avait eu des aménagements assez conséquents. Le Tribunal des Conflits n’en considère pas moins que ces aménagements, en dépit de leur nature, de leur importance, ne peuvent pas être considérés comme spécialement adaptés à l’exploitation du Service Public.

Cette qualification est intéressante, car d’une part, on se trouve face à une situation juridique constituée antérieurement à l’entrée en vigueur du CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES, le Tribunal des conflits fait réf à la notion d’aménagement spécial, mais il retient de cette notion un sens, une signification juridique particulièrement restrictive. À travers cette référence à l’aménagement spécial, ce que vise le Tribunal des Conflits est l’absence d’aménagement indispensable. On voit le Tribunal des Conflits se rallier à une notion plus rigoureuse de l’aménagement, relayant ainsi les vues du législateur, qui se manifestent dans l’article L2111-1.

Donc grosse différence entre cet arrêt et la jurisprudence antérieure, qui voyait dans n’importe quel type d’aménagement un aménagement spécial. Or ici, le Tribunal des Conflits considère que ce ne sont pas des aménagements spéciaux. Donc en vrai, il utilise la notion d’aménagement indispensable.

Il y a encore d’autres éléments à ajouter, illustrations jurisprudentiels qu’on pourrait analyser. Arrêt section

CE très important du 29 décembre 2009 SARL Brasserie du Théâtre (commentée à l’AJDA 2010 p.841 note Oliver Ferro). Il s’agissait d’un théâtre exploité par la ville de Reims. La ville avait permis à un restaurateur d’exploiter un café. La société bénéficiait de l’exploitation exclusive de vendre de quoi se restaurer aux clients. La question : était-ce une dépendance domaniale ? le Conseil d’Etat se livre à une interprétation très restrictive de l’affectation au Service Public, car il considère que même si le brasseur devait ouvrir son bar à des horaires déterminées… il n’y avait aucune obligation, sujétion spécifique qui permettait de penser que cette activité était affectée à un Service Public : donc l’affectation à un Service Public conçue de manière restrictive par le CE. le Conseil d’Etat estime que c’était un contrat de droit privé, et pas contrat de domanialité publique.

THEORIE DE LA DOMANIALITE PAR ANTICIPATION () DOMANIALITE PUBLIQUE VIRTUELLE)

C’est un cas spécifique du II.

Ça consiste à faire application du régime de la domanialité publique à des biens qui sont destinés à être affectés à un Service Public mais pour lesquels les travaux d’aménagement n’ont pas encore été réalisés. On sait que le bien va être affecté à un Service Public, donc on fait application du régime de la domanialité publique, même si le bien n’a pas encore fait l’objet à l’époque d’un aménagement spécial, mais on considère que l’aménagement va se faire.

Cette théorie a été élaborée par le Conseil d’Etat au milieu des 80′ : dans une décision du 6 mai 1985 association Eurolat et Crédits Fonciers de France (recueil p.141). Il s’agissait de la construction et exploitation d’une maison de retraite sur le terrain appartenant à une commune, qui était le fait de l’association Eurolat, qui avait fait un projet avec crédit fonciers de France. Elle avait fait un contrat pour l’exploitation avec la commune. Mais la construction et exploitation avait des difficultés en terme de financement des projets : il fallait un montage financier, car exploitation dégage des recettes au fur et à mesure. Le crédit foncier avait demandé des garanties. Dans le contrat qui liait l’association à la commune, un certain nombre de droits réels avaient été consentis, en garantie du montage financier pour l’investisseur. Donc la maison n’était pas encore construite, mais le terrain devait être affecté au Service Public de l’entretien des pers âgées, mais pas encore de travaux réalisés. le Conseil d’Etat a considéré que ce bien était un bien auquel il fallait appliquer les règles du domaine public, et en particulier la règle de l’inaliénabilité, sachant que cette règle s’oppose à la constitution de droits réels sur le domaine public. Donc les stipulations du contrat étaient nul, du fait de l’entrée par anticipation du bien domanial, application par anticipation du régime de la domanialité public. Par anticipation, le bien doit être regardé comme couvert par les règles protectrices du domaine public. Donc Conseil d’Etat a dit que les stipulations qui octroyaient des droits réels sont nuls.

Cette application de la domanialité publique virtuelle est intéressante car permet de faire bénéficier des biens d’un régime protecteur, on voit la logique protection du domaine public qui s’oppose à la valorisation du bien domanial, mais conception qui fait échos à la conception large que le Conseil d’Etat pouvait avoir de l’aménagement spécial, car ici il n’a avait pas à proprement parler d’aménagement spécial.

Cette théorie par anticipation a perduré jusqu’à l’entrée en vigueur du CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES. Le CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES marque semble-t-il un abandon de cette possibilité d’une application anticipée de la domanialité publique. C’est en tout cas l’intention du législateur, néanmoins, il faut souligner une incertitude sémantique qui fait que cette théorie n’a peut-être pas disparu de l’ordonnancement juridique.

En effet, article L2111-1, il est indiqué qu’un bien fait l’objet du domaine public s’il appartient à une personne pub et qu’il est affecté à un Service Public pourvu qu’en ce cas, il face l’objet d’un aménagement indispensable → c’est là incertitude, « pourvu qu’en ce cas » : faut-il considérer que le bien ne peut pas appartenir au domaine pub tant qu’il n’a pas fait l’objet d’un aménagement indispensable, ou faut-il considérer que le commencement des travaux d’aménagement suffit à faire rentrer ce bien dans le domaine public ? → Différentes lectures. Il n’est pas si facile de savoir si la théorie de la domanialité publique par anticipation a effectivement été supprimée compte tenu de l’entrée en vigueur du CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES. Il se peut qu’un jour, le Conseil d’Etat fasse application de la jurisprudence sous couvert de l’article L2111-1, qui pourrait être interprété comme n’excluant pas la théorie de la domanialité anticipée.

La jurisprudence administratif fait application d’un critère de l’aménagement indispensable plus consistante, sous réserve de la théorie peut être survivante de la domanialité par anticipation.

  • B) La limitation de la règle de l’accessoire

Cette règle est liée à la définition de la domanialité publique elle-même.

Juste après l’article L2111-1, suit l’article L2111-2, qui dit « font également partie du domaine public, les biens des personnes publiques, qui concourant à l’utilisation d’un bien appartenant au domaine public, en constituent un accessoire indissociable ». Le CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES étend la définition de la domanialité publique à des biens qui sont accessoires indissociables à des biens appartenant au domaine public.

Le législateur par cet article a entendu limiter l’utilisation qui avait été faite en jurisprudence de la règle de l’accessoire. Le législateur définit la règle de l’accessoire par la réunion de 2 conditions :

que le bien en question doit concourir à l’utilisation du bien qui appartient au domaine public (bien doit concourir soit à la mission du Service Public, ou soit permettre l’usage à une catégorie d’usagers, donc condition d’affectation)

le bien doit constituer un accessoire indissociable de ce bien principal.

Qu’entends-on par indissociable ? Le législateur a entendu limiter l’application de la théorie de l’accessoire, alors qu’elle faisait l’objet d’un application assez large de la part du CE. Qu’est-ce qu’un bien accessoire ? Pour le législateur, cette notion d’accessoire indissociable suppose qu’il existe un lien non seulement physique entre le bien accessoire et le bien principal, mais au-delà de la proximité entre ces 2 biens, cela suppose qu’il existe un véritable lien fonctionnel, sans quoi cet accessoire ne pourra pas être considéré comme étant indissociable.

Cette condition d’un bien indissociable renvoie à la volonté du législateur de définir strictement le domaine public, car là il exige des conditions qui sont assez fortes pour qu’un tel bien accessoire puisse se voir appliquer également la domanialité publique. Or ça n’a pas tjrs été le cas : la jurisprudence du Conseil d’Etat voulait que la notion d’accessoire soit entendue de manière moins rigoureuse que l’entend maintenant le législateur.

Illustration : CE 28 janvier 1970 Consorts Philip-Binjisser. Affaire complexe, qui se passe à Avignon. Était en cause un immeuble qui abritait un café restaurant : est-ce que ce café était exploité selon une dépendance du domaine public de la commune ou pas ? le Conseil d’Etat a considéré que cet immeuble était construit sur une dalle qui surmontait une voute, voute qui recouvrait un canal, et canal qui participait au réseau d’assainissement de la ville. le Conseil d’Etat dit que la voute qui recouvre le canal fait partie du domaine public de la ville, car sans cette voute, le canal ne serait pas propre à sa destination, à savoir servir à l’assainissement de la ville. Ensuite, il dit que l’immeuble est construit sur une dalle qui surplombe la route. Il considère que la dalle est l’accessoire de la voute, et comme la voute est une dépendance du domaine public, alors l’immeuble est aussi une dépendance du domaine public. Application de l’accessoire en cascade, qui montre que cette notion n’a d’accessoire que le nom. Ce qui est accessoire, c’est la proximité public entre la dépendance domanial et le bien. Il n’y a pas de dépendance entre l’immeuble et la voute. Donc l’arrêt a provoqué beaucoup de questions, pas logique.

Une telle qualification n’est plus possible étant donné la nouvelle rédaction du CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES, étant donné la nouvelle rédaction du L2111-2, qui oblige d’établir un lien physique entre le bien principal relevant du domaine public et le bien accessoire, mais en plus un lien fonctionnel. Cette notion d’accessoire indissociable se comprend comme concourant à la limitation de l’application du régime de la domanialité publique. C’est toujours l’intention du législateur de réduire le champ de la domanialité publique, du coup, le bien sera domaine privé, sauf s’il existe un lien accessoire.

Le Conseil d’Etat a fait application de cette nouvelle conception de l’accessoire dans l’arrêt 2009 Brasserie du théâtre, dans les termes qui sont ceux du législateur. Il a refusé de considérer la brasserie comme l’accessoire du théâtre. Cette question se pose car le Conseil d’Etat d’abord a rejeté l’argument qui consistait à dire que la brasserie était affectée au Service Public du théâtre, et aménagée de manière indispensable à son usage. Mais l’argument avait été soulevé de manière : même si la brasserie n’est pas affectée à un Service Public, elle est accessoire du théâtre. Donc s’appliquerait l’article : si c’est accessoire, un bien qui concourt à l’utilité publique, la brasserie devait être considérée comme tel. le Conseil d’Etat rejette la théorie de l’accessoire. Il considère qu’il y a un lien physique entre les 2, mais le lien fonctionnel n’est pas suffisant. Pour justifier cette conclusion, le Conseil d’Etat dit : on peut passer du théâtre à la brasserie sans difficulté, mais la brasserie jouit d’une entrée indépendante et accessible depuis la chaussée. Donc à partir du moment où on peut entrer dans la brasserie en partant de la route, on ne peut pas voir dans le local une dépendance accessoire au théâtre, car pas de lien fonctionnel suffisamment fort. Il eut fallu qu’on ne puisse pas rentrer par la chaussée pour peut-être avoir une qualification accessoire. Cette qualification est donc opposée à la conception de l’arrêt de 1970.

Le législateur lorsqu’il élabore la typologie, classification des biens publics, recherche la imitation des biens qui relèvent du domaine public, ce qui permet de donner par contre coup aux biens qui relèvent du domaine privé, la plus grande extension possible, et ce pour permettre la valorisation des biens publics, car la gestion des biens privé est plus facile que celle des biens publics.