L’application des procédures collectives aux personnes morales

L’application du traitement des difficultés aux personnes morales

  Conformément aux articles L 620-2 du Code de Commerce pour la sauvegarde, L 631-2 pour le redressement judiciaire et L 640-2 pour la liquidation judiciaire, le traitement des difficultés s’applique à toute personne morale de droit privé.

Néanmoins, la soumission à la procédure collective de tous les groupements qui n’exercent pas une activité commerciale n’est possible qu’à la double condition de posséder la personnalité morale et de fonctionner selon les principes du droit privé. Ces conditions sont suffisantes.

La procédure collective ne nécessite pas que le groupement exerce une activité économique.

L’application des procédures collectives qui était l’exception pour les personnes physiques devient au contraire la règle lorsque le débiteur est une personne morale.

La nature civile au commercial de celle-ci n’est pas prise en considération.

 

I – L’existence de la personnalité morale

L’ouverture de la procédure collective suppose que le groupement jouisse de la personnalité morale. En effet, seules les personnes morales ont un patrimoine c’est-à-dire un actif et un passif propre susceptible d’être liquidé de manière autonome, séparément de leurs membres. Ainsi, les sociétés civiles, les associations déclarées ou reconnues d’utilité publique, les syndicats, les comités d’entreprise, les coopératives, les GIE sont exposés aux procédures collectives au même titre que les différentes sociétés commerciales dotées de la personnalité morale.

Celle-ci s’acquiert par l’immatriculation au RCS pour les sociétés ou par une déclaration à la préfecture pour les associations.

S’agissant de la société en participation, l’article 1871 cciv énonce qu’elle n’a pas la personnalité morale, elle ne peut donc faire l’objet d’une procédure collective alors que son dirigeant ou ses membres peuvent personnellement faire l’objet d’une sauvegarde, d’un redressement ou d’une liquidation judiciaire ; il en va de même de la société créée de fait, également dépourvue de toute personnalité juridique que la loi du 4 janvier 1978 a soumis au régime de la société en participation ; quant à la société en formation qui a connu un commencement d’exploitation sans avoir été immatriculée et qui dégénère en société en participation ou société créée de fait, elle ne peut faire l’objet d’une procédure collective, mais cette procédure peut s’engager à l’égard des associés pris individuellement ou collectivement s’ils ont réellement participé à l’exploitation, la simple signature des statuts ne présumant pas cette participation, il faut toutefois qu’ils se soient comportés comme des commerçants ce qui suppose qu’ils aient accompli des actes de commerce à titre de profession habituelle.

En revanche, une société de fait peut être confrontée à une procédure collective. Il s’agit en effet d’une société qui a été immatriculée, donc a obtenu la personnalité morale, mais l’a perdue à la suite d’une annulation ; elle ne conserve la personnalité morale que pour les besoins de la liquidation, elle s’apparente à la société dissoute et connaît un régime similaire.

À cet égard, les articles L 631-5 al 2 et L 640-5 al 2 Code de Commerce disposent que le tribunal doit, aux fins d’un redressement ou d’une liquidation judiciaire être saisi dans le délai d’un an à partir de la radiation du RCS. Le délai court à compter de cette radiation consécutive à la publication de la clôture des opérations de liquidation. Tout comme le commerçant, l’artisan ou le professionnel indépendant retiré des affaires, une personne morale ne serait sous prétexte de sa dissolution échapper à ses engagements vis-à-vis de ses créanciers.

Enfin, un groupe de sociétés ne constitue pas une personne morale, il ne peut donc en lui-même subir une procédure collective. Il faut ouvrir autant de procédure que de sociétés faisant partie du groupe, quitte à s’efforcer de regrouper toutes les instances devant un même tribunal par application des règles de l’extension fondée sur la fictivité ou la confusion du patrimoine.

 

II – Le caractère privé de la personne morale

   A / La difficile distinction des personnes morales de droit public et de droit privé.

            Le redressement ou la liquidation judiciaire, tout comme d’ailleurs la procédure de conciliation ou de sauvegarde ne s’appliquent qu’aux personnes morales de droit privé. Cependant, la frontière de entre le droit public et le droit privé est assez fluctuante.

Il est évident que l’état ou une collectivité publique de type traditionnel, tel que les départements, la commune, ne peut se trouver confronté à une procédure collective.

La question ne devrait pas se poser en principe car en raison de l’existence d’un contrôle de l’engagement des dépenses, ces personnes morales ne devraient pas pouvoir dépenser plus que les crédits qui leur ont été alloués. La cessation de paiement est donc, sinon impossible, au moins essentiellement provisoire car les dépenses non payées seront réglées d’office sur les crédits futurs.

Sur le plan international, la défaillance prolongée de l’état ne se règle pas par l’ouverture d’une procédure judiciaire mais par l’intervention du FMI qui impose aux états endettés des mesures d’assainissement et leur facilite l’obtention d’un moratoire (c’est-à-dire des délais de paiement).

Il faut cependant constater que bon nombre d’organismes se situent à mi-chemin du droit public et du droit privé. C’est le cas des établissements publics à caractère industriel et commercial, les associations administratives, des organismes professionnels et corporatifs. Il faut alors rechercher qu’elle est le statut de ces personnes morales et si elles participent ou non à une mission de service public pour savoir si elles sont ou non soumises aux procédures collectives.

 

  B / L’exception fondée sur la nature particulière de la personne morale.

            Il existe une exception à l’application des procédures collectives aux personnes morales de droit privé. Elle concerne les syndicats de copropriétaires. Lorsque le syndicat n’est pas en mesure de payer ses dettes, le président du TGI nomme un administrateur provisoire et peut ordonner la suspension des poursuites pendant 6 mois.

Ce régime spécial se justifie par le fait que les syndicats de copropriétaires ne sont pas des entreprises.

En outre, la procédure collective peut entraîner la liquidation de la personne morale. Or on ne conçoit pas une copropriété sans un syndicat lui servant de support.

Isa Germain

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