CE 30 mai 1930, Arrêt Chambre syndicale du commerce en détail de Nevers, (Liberté du commerce et de l’industrie – Concurrence entre personnes publiques et entreprises privées)
Le Conseil municipal de Nevers avait autorisé le maire à créer un service municipal de ravitaillement en denrées de toutes sortes. Cette entreprise avait concédé. La municipalité espérait ainsi enrayer la montée du coût de la vie. Saisi par les commerçants, le préfet avait refusé de déclarer nulle cette décision. Son refus fut déféré au Conseil d’État.
La jurisprudence n’avait admis jusqu’alors l’érection en service public par les collectivités locales de certaines activités commerciales ou industrielles que s’il n’y avait aucun autre moyen de satisfaire les besoins de la population. Or deux textes de 1926 manifestaient le désir du gouvernement de favoriser à l’avenir les interventions économiques des communes.
Cependant, comme le soulignait le commissaire du gouvernement Josse, « que l’intérêt public puisse être entendu plus largement qu’autrefois d’accord, mais nous ne sommes pas fondés à conclure que les décrets de 1926 dérogent aux principes ».
Le Conseil d’État appliqua effectivement aux faits de l’espèce les principes qui régissaient sa jurisprudence avant la publication des décrets et constatant que la ville de Nevers n’invoquait aucune circonstance particulière mais seulement la vie chère, il annula les délibérations attaquées.
- GAJA : Arrêts de la jurisprudence administrative
- Arrêt Blanco, TC 8 février 1873 (compétence – responsabilité)
- Arrêt Pelletier, TC 30 juillet 1873 (faute – responsabilité)
- Arrêt Pariset, CE 26 novembre 1875 (Recours pour excès de pouvoir…)
- Arrêt Cadot, CE 13 décembre 1889
- Arrêt Canal de Gignac, TC 9 décembre 1899
- Arrêt Commune de Néris-Les-Bains, CE 18 avril 1902
Depuis lors l’évolution de la société a comporté un double mouvement: elle a d’abord été favorable à une extension des initiatives publiques dans le domaine industriel et commercial; mais aussi elle a permis de les admettre à condition qu’elles s’exercent à égalité avec les initiatives privées.
L’arrêt du Conseil d’État Ordre des avocats au barreau de Paris, de 2006, fait la synthèse des solutions auxquelles la jurisprudence est aujourd’hui parvenue: outre « les activités nécessaires à la réalisation des missions de service public dont elles sont investies » et pour lesquelles elles « bénéficient… de prérogatives de puissance publique », les personnes publiques, « si elles entendent, indépendamment des ces missions, prendre en charge une activité économique… ne peuvent le faire que dans le respect tant de la liberté du commerce et de l’industrie que du droit de la concurrence ».
En schématisant, on peut dire qu’on est passé de l’interdiction à la liberté, et de la liberté à l’égalité.