Le blanchiment d’argent (art. 324-1 Code pénal)

Le blanchiment d’argent

Le blanchiment d’argent est à rapprocher du recel, c’est un délit de conséquence qui suppose une infraction primaire dans le champ duquel il va se commettre.

Cette notion de blanchiment est récente,, apparue dans les années 80 avec l’internationalisation croissante des opérations financières et des circuits financiers.

Elle était utilisée par le crime organisé pour blanchir l’argent de ses activités. Le blanchiment est en effet presque le seul moyen de profiter pleinement et en toute sécurité des immenses profits de leurs activités criminelles. D’où la volonté de donner une forme dématérialisée à ces espèces pour en profiter. On a profité de l’internationalisation.

&1 La définition du blanchiment d’argent

Le délit de blanchiment d’argent (ou blanchiment de capitaux) est réprimé par le Code pénal. Il s’agit d’un délit qui consiste à transformer des fonds issus d’activités criminelles en fonds apparemment légaux. Le délit de blanchiment d’argent (ou blanchiment de capitaux) est un acte criminel qui consiste à dissimuler la source illégale de fonds obtenus par des activités criminelles. Il est souvent utilisé par les criminels pour rendre l’argent provenant d’activités illégales « propre » et légitime en le faisant passer à travers des transactions financières complexes et en le mélangeant avec de l’argent provenant de sources légitimes.

Le blanchiment d’argent est réprimé par les articles 324-1 et suivants du Code pénal. L’article 324-1 du Code pénal définit le blanchiment d’argent comme le fait de faciliter, par quelque moyen que ce soit, la justification mensongère de l’origine des biens ou des revenus de l’auteur d’un délit.

La répression du blanchiment d’argent en France peut entraîner une peine maximale de dix ans d’emprisonnement et une amende de 750 000 euros. Les sanctions peuvent également inclure la confiscation de biens ou la perte de licences professionnelles.

­ Sur la prise en compte internationale :

Le premier acte est une Convention du 20 décembre 1988 de Vienne contre le trafic illicite de stupéfiant et de substances psychotropes, entrée en vigueur en France le 31 mars 1991 :

C’est le premier texte international sur le blanchiment qui faisait obligation aux Etats signataires de créer un délit de blanchiment de capitaux issus du trafic de stupéfiants. Cette obligation était motivée par le fait que le délit de recel ne permettait pas de saisir l’ensemble des actes de blanchiment. Ainsi, le délit de recel suppose une manipulation du bien issu du délit ou de ses transformations. Or le blanchiment peut souvent se réduire à une aide apporter à une personne pour donner une apparence licite à des produits criminels qui ne relevait ni du recel détention ni du recel profit.

En 1989, le G7 a créé le GAFI groupe d’action financière internationale, c’est un organisme international dont le siège est à Paris :

Il regroupe en plus du G7, l’ensemble des Etats de l’UE, la Suisse, les USA et le Canada et l’Australie et la Nouvelle­-Zélande, plus des membres observateurs.

Sa mission est de prendre des recommandations dans la lutte contre le blanchiment que l’ensemble des Etats membres s’engagent à appliquer.

Il est très réactif et il y a plus de 40 recommandations. Il y a une liste blanche de bons élèves, une liste grise et une liste noire d’États dénoncés. A priori, si un État est sur la liste noire, les organismes financiers des autres États ne doivent plus traités avec lui.

La directive du Conseil de l’Europe du 10 juin 1991 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux :

Cette directive est celle qui a fait obligation aux États membres d’imposer à leurs organismes financiers de nouvelles obligations à des fins de lutte contre le blanchiment.

C’est une obligation d’identification des clients aux banquiers, c’est l’obligation de vérification de certaines opérations et une obligation de dénonciation d’opérations suspectes.

 

­ Sur la prise en compte interne, du droit français:

Une loi du 31 décembre 1987 qui a créé le premier délit de blanchiment en droit français qui punissait le blanchiment de capitaux issus du trafic de stupéfiants :

Ce délit était prévu à l’article L 657 alinéa 3 du Code de la santé publique et transposé dans l’article L 22­3-8 du Code pénal de 1992.

Une loi du 23 décembre 1988 qui a créé un second délit de blanchiment dans l’article 415 du Code des douanes :

Est puni le fait de procéder ou de tenter de procéder par exportations, importations, transferts ou compensations à une opération financière entre la France et l’étranger, portant sur des fonds que l’auteur sait provenir d’une infraction en matière de stupéfiant.

Une loi du 12 juillet 1990 qui a créé l’organisme TRACFIN qui est l’abréviation de la cellule de traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins :

Cet organisme dépend du ministère de l’économie et des finances. Sa mission est de recueillir ce que l’on appelle les déclarations de soupçons qui sont faites par les organismes auxquels la loi de 1990 a imposé de les faire.

Ces déclarations de soupçons sont imposées aux établissements de crédit, aux assureurs, aux bureaux de change ou aux intermédiaires immobiliers, aux gérants de casino, aux antiquaires et aux bijoutiers.

L’obligation est définie par l’article L 562­2 du Code monétaire et financier.

Il n’y a pas de sanction pénale, c’est à ­dire les individus qui méconnaissent leur obligation n’encourt pas de sanction pénale pour ce seul manquement.

La loi du 13 mai 1996 qui a créé un délit général de blanchiment à l’article 324-­1 du Code pénal :

Ce délit ne s’est pas substitué aux autres. C’est l’infraction de droit commun et les autres sont les infractions spéciales dans leur domaine particulier.

Ces trois délits s’articulent facilement. Ils sont proches voir identiques aux autres. La seule différence concerne l’origine des fonds blanchis, les délits initiaux ne s’appliquant que sur des fonds issus du trafic de stupéfiant.

La répression est assez proche, même si le blanchiment de fond issu de trafic de stupéfiants est plus puni en droit commun.

  • &2 : La constitution du blanchiment d’argent :

L’article 324­-1 du Code pénal définit deux délits de blanchiment. Il en va de même pour l’article 222­-38 du Code pénal.

Ces délits ont des caractéristiques communes qui tiennent principalement dans l’existence d’une infraction antérieure. Ils se séparent en revanche en ce qui concerne l’élément matériel proprement dit, à savoir l’acte incriminé.

  1. A) Les caractères communs :

a) L’existence d’une infraction antérieure :

Ils exigent l’existence d’une infraction antérieure dont un produit est issu. Le blanchiment consistant à dissimuler l’origine criminelle ou délictuelle de ces produits.

Les liens entre cette infraction d’origine sont transposables au blanchiment et il en résulte que cette infraction soit punissable ; Il en résulte qu’une cause objective d’irresponsabilité pénale qui va toucher l’infraction d’origine va empêcher l’existence du blanchiment. La prescription de l’infraction d’origine ne fait pas obstacle au blanchiment.

La condamnation de l’auteur d’origine est indifférente, il suffit que les juges qui condamnent un individu pour blanchiment constatent l’existence de l’infraction d’origine.

En outre, selon la cour d’appel de Montpellier le 8 mars 2000, cela s’applique même si l’infraction d’origine a été commise à l’étranger. La solution avait déjà été rendue pour le recel.

b) La connaissance de l’infraction antérieure :

On peut considérer que c’est l’élément intentionnel du blanchiment ou tout au moins sa principale composante.

Si l’on veut être rigoureux, il a une double composante qui comprend la connaissance de l’infraction antérieure et la volonté de blanchir. La deuxième composante étant largement subordonnée à la première. Il en résulte que l’ignorance de l’infraction antérieure ne pourrait donner lieu à un blanchiment par négligence ou par imprudence qui n’est pas punissable. Par exemple, un banquier qui commettrait bien l’acte de blanchiment mais l’ignorerait ne pourrait pas être condamné.

On peut penser que les solutions dégagées pour le recel sont transposables au blanchiment où le juge pénal déduira des circonstances. Cela peut être l’absence d’explication plausible sur la provenance des fonds ou des revenus. Cela peut­ être aussi les modalités de l’opération, la complexité, la dissimulation, les prêtes noms, la falsification si elle est décelable…

B) Les caractères spécifiques aux infractions de blanchiment d’argent :

C’est l’élément matériel de délit de blanchiment.

a) Le blanchiment par la justification mensongère de l’origine des biens ou des revenus : Puni à L’article 324­-1 alinéa 1er et 222­-38 du Code pénal.

Cette justification mensongère était impunissable au titre du recel étant donné que cette justification mensongère ne suppose ni détention ni profit de la chose issue de l’infraction d’origine.

On est en présence de l’assistance à l’auteur du crime ou du délit qui ne relevait pas de la qualification pénale si fait bénévolement.

Cette justification mensongère est punie peu importe le moyen par lequel elle intervient.

Cette justification doit s’entendre d’un résultat et que le moyen de ce résultat est indifférent.

Ce sont des fausses factures, des faux bulletins de salaires, des fausses rémunérations, des faux gains de casino.

b) L’apport d’un concours à une opération de placement de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d’un crime ou d’un délit

Cela va consister à introduire des fonds criminels dans des circuits financiers.

L’acte matériel est ici rigoureusement défini, c’est l’apport d’un concours. C’est suffisamment précis pour que l’on exige une action, on n’apporte pas son concours en ne faisant rien.

L’objet de cet élément matériel est une opération de placement, de dissimulation ou de conversion. Le législateur en a décrit le processus habituel de l’opération en des termes non pénaux par « prélavage, lavage et essorage ». Ce sont les trois temps parfaits du processus de blanchiment.

­ C’est l’opération de placement ou de « prélavage » :

Elle est celle par laquelle commence le processus de blanchiment et consiste à introduire les fonds criminels dans les circuits financiers en les plaçant sur des instruments financiers. Par hypothèse, l’opération de placement se trouve dans un lieu très proche de l’infraction d’origine, c’est le trafiquant qui a ses espèces et va tenter de les déposer dans une banque qu’il connaît.

­ Cette phase est suivie d’une phase de dissimulation ou « lavage » :

Elle consiste à faire circuler l’argent à travers les établissements financiers et ce sans limite de frontières en passant par des paradis fiscaux.

­ L’opération de conversion ou « d’essorage » :

C’est celle par laquelle les fonds vont ressortir des circuits financiers pour être placé dans des opérations légales.

Le délit n’exige pas que les trois opérations aient cumulativement été faites ; une seule suffit. Surtout à l’entrée et à la sortie où il est plus facile de déceler l’opération de blanchiment. Mais il est toutefois difficile de remonter au­-delà de certains paradis fiscaux à l’origine.

  • &2 : La répression du blanchiment :

Les peines du blanchiment d’argent :

le blanchiment simple de l’article 324-­1 al.1 du Code pénal est puni de 5 ans de prison et 375 000 euros d’amende.

Une aggravation de 10 ans et 750 000 euros d’amende quand ce blanchiment est commis de façon habituelle, en bande organisée ou grâce aux facilités d’une activité professionnelle.

La peine d’amende peut­-être élevée jusqu’à la moitié de la valeur des biens blanchis.

Enfin, l’article 222-­38 du Code pénal prévoit des peines de 10 ans de prison et 750 000 euros d’amendes.

Le régime du blanchiment d’argent :

Par rapport au recel, le blanchiment se distingue en ce qui concerne la durée de sa consommation et donc de la fixation du point de départ de sa prescription. Les délits de blanchiment ne sont pas des délits continus, les actes ne se prolongent pas. Cela sera une succession de délit, mais pas un prolongement s’il y a plusieurs bulletins de salaires par exemple.

Peut­on transposer la jurisprudence en matière de recel qui interdit le cumul des qualités d’auteur principal et de receleur ? (c’est­ à ­dire le cumul des qualités d’auteur principal et de blanchisseur ?) On ne sait pas :

La cour d’appel de Montpellier le 30 octobre 2000 s’est écartée de la solution en matière de recel pour considérer que l’auteur pouvait être poursuivi personnellement.

En revanche, le TGI de Paris dans la première affaire du Sentier de janvier 2002, il a refusé ce cumul en reprenant les motifs du recel.

Pour le professeur, plutôt d’accord avec le TGI de Paris, il semble que le blanchisseur soit l’auteur principal. Comment peut­-on justifier ses propres revenus ?

 

 

Voici quelques liens de sites internet qui parlent du blanchiment d’argent :

  1. Site internet de la Banque de France – https://www.banque-france.fr/stabilite-financiere/lutte-contre-le-blanchiment-dargent-et-le-financement-du-terrorisme Ce site fournit des informations sur les mesures prises par la Banque de France pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, notamment en matière de réglementation et de surveillance.
  2. Site internet de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) – https://www.oecd.org/fr/corruption/luttecontreleblanchimentdargent.htm L’OCDE travaille sur les questions de blanchiment d’argent et fournit des conseils et des orientations pour les gouvernements et les institutions financières pour aider à prévenir et à lutter contre le blanchiment d’argent.
  3. Site internet du Groupe d’action financière (GAFI) – https://www.fatf-gafi.org/fr/ Le GAFI est un organisme international qui établit des normes pour la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Le site fournit des informations sur les travaux et les recommandations du GAFI en matière de lutte contre le blanchiment d’argent.
  4. Site internet de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) – https://acpr.banque-france.fr/agrements-et-autorisations/lutte-contre-le-blanchiment-dargent-et-le-financement-du-terrorisme.html L’ACPR est l’organe de surveillance et de réglementation des banques et des compagnies d’assurance en France. Le site fournit des informations sur les mesures prises par l’ACPR pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, ainsi que des conseils pour les institutions financières.

Ces sites internet fournissent des informations utiles sur la lutte contre le blanchiment d’argent et peuvent aider à mieux comprendre les enjeux et les mesures prises pour prévenir et lutter contre cette activité criminelle