Le changement de régime matrimonial par contrôle judiciaire

le changement de régime matrimonial par contrôle judiciaire

L’article 1396 al 3 admet que le tribunal puisse autoriser des changements qui, s’ils étaient décidés conventionnellement seraient nuls.

Certaines modifications sont purement judiciaires et se font à la demande d’un seul époux, comme par exemple la séparation de biens judiciaire pour un époux sous le régime de la communauté, la séparation de corps qui entraîne toujours la séparation de biens. Il y a alors substitution du régime de séparation de biens au régime préexistant.

On trouve aussi les modifications partielles et temporaires des conventions matrimoniales (voir les articles 217, 219, 220-1 sur les transferts de pouvoir dans le régime primaire et les articles 1426 et 1429qui s’y apparentent pour le régime de communauté).

Enfin, le changement de régime à la requête des deux époux, c’est alors un changement conventionnel dont le tribunal contrôle seulement la régularité : l’article 1397 du Code civil introduit par la loi de 65 offre cette possibilité.

Dans les dispositions transitoires et la loi de 65, il y avait quelques possibilités simplifiées de changement de régime matrimonial (les articles 11, 17 et 18 de la loi du 13 juillet 1965), pour appliquer plus vite le régime de la loi nouvelle. Cela a duré deux ans.

Section I
les conditions du changement de régime

I La condition de délai

L’article 1397 exige deux ans d’application du régime matrimonial pour qu’on puisse en changer : il faut en effet prendre cette décision en toute connaissance de cause.

Deux ans à compter du mariage, les changements successifs ne sont pas interdits, mais il faut attendre deux ans à partir du jugement d’homologation.

II Conditions de fond

A Le consentement des deux époux

Le changement suppose l’accord des deux époux.

L’article 1397 dispose que «les époux pourront convenir…».

L’accord des époux confère à l’intervention du juge un caractère gracieux, il s’agit au fond d’un contrat entre époux, les seuls époux ont à consentir à ce contrat, et, s’il y avait d’autres parties au contrat de mariage, elles n’ont pas à signer la convention modificative.

Problèmes :

Lorsqu’un époux fait l’objet d’une liquidation judiciaire, le liquidateur doit être appelé à l’instance d’homologation.

Si un époux est soumis à un régime de protection, il doit être assisté par celui ou ceux qui devraient consentir à son mariage : un majeur en curatelle doit être autorisé par son curateur ou le juge des tutelles (1ère Civ. 6 janvier 2004).

Il faut toujours l’accord personnel des époux et la jurisprudence exige un accord profond et durable, c’est à dire qui se maintienne jusqu’au jour du jugement d’homologation = 1ère Civ. 27 avril 1982.

B Les changements et modifications permises

Les possibilités de modification sont très largement ouvertes : on peut changer de régime ou procéder à des modifications partielles.

On s’est interrogé sur deux limites :

le sort des conventions annexes incluses dans le contrat de mariage

si on peut faire un changement de régime seulement pour modifier le statut d’un bien déterminé, comme par exemple décider que tel bien propre sera commun.

Hésitations car cela peut être un moyen de tourner la règle de révocabilité des donations : la Cour de cassation a donné son accord et a invoqué un argument a fortiori : qui peut le plus peut le moins. Puisqu’ils peuvent mettre en communauté tous leurs biens propres pour la communauté universelle, ils le peuvent pour un seul bien = 1ère Civ. 21 janvier 1992.

C Conformité du changement de la modification à l’intérêt de la famille.

Aspect positif :

La conformité du changement à l’intérêt de la famille est exigée par la lettre de l’article 1397 qui dit que «les époux pourront convenir dans l’intérêt de la famille… de modifier le régime».

Cette notion était simple à définir : dans les cas où le régime antérieur s’est révélé nuisible ou gênant pour les époux, mais cette condition n’est pas nécessaire, il suffit de justifier que le régime que l’on veut adopter réalise un progrès.

La difficulté principale résulte de ce qu’il arrive parfois que les intérêts individuels des différents membres de la famille soient en conflit. Il n’y a pas concordance entre les intérêts individuels. L’exemple le plus net et fréquent est celui où des époux âgés adoptent le régime de la communauté universelle et complètent cela par une stipulation d’attribution intégrale de la communauté à l’époux survivant. La communauté ainsi élargie sera attribuée au survivant qui conservera la maîtrise de tous les biens du ménage. Cette combinaison est favorable au conjoint survivant, mais est peu favorable aux intérêts des enfants dans la mesure où ceux-ci lors du premier décès de leur parent ne recueilleront rien.

Alors, comment apprécier l’intérêt de la famille ?

Nombreuses discussions et décisions de justice, finalement un arrêt de principe a fixé un cadre général au contrôle du juge. C’est l’arrêt Alessandri 1ère Civ. 6 janvier 1976. Il s’agissait d’un changement de régime en communauté avec attribution intégrale à l’époux survivant. L’enfant n’est-il pas lésé ? La CA avait refusé le changement de régime, non conforme à l’intérêt de la famille mais à celui du conjoint survivant. Cet arrêt a été cassé par la Cour de cassation et on peut tirer plusieurs enseignements qui aident à définir la notion d’intérêt de la famille.

Définition même de l’intérêt de la famille :

La Cour de cassation a dit que l’intérêt de la famille s’appréciait par appréciation d’ensemble des intérêts en présence, les peser et elle a dit qu’il était possible de faire primer l’intérêt d’un problème de la famille sur celui d’un autre. Notamment, il est possible de décider que le souci de protéger le conjoint survivant, d’assurer la situation pécuniaire du conjoint survivant peut primer sur l’intérêt des enfants. Donc l’intérêt du conjoint peut constituer un intérêt de nature familial.

Cet arrêt a précisé la nature du contrôle du juge :

Le juge procède à un contrôle objectif c’est à dire qu’il recherche si réellement le changement est conforme à l’intérêt de la famille et ne se contente pas d’un contrôle purement subjectif (exclure une intention de fraude des époux).

Rôle respectif des juges du fond et de la Cour de cassation :

La définition de l’intérêt familial c’est une question de droit: cela donne une certaine cohérence à la jurisprudence en la matière. Mais déterminer si c’est conforme est du domaine des juges du fond.

Par la suite, la jurisprudence a affiné son analyse et dans cette hypothèse fréquente d’adoption de communauté universelle avec attribution au conjoint survivant ressort quelques lignes directrices :

Si on est en présence d’enfants communs: dans ce cas, on peut constater que les tribunaux admettent que le souci d’assurer les vieux jours du conjoint survivant est au dessus de l’intérêt des enfants d’attendre leur succession. Il y a parfois une hésitation à admettre le changement de régime quand il vise à assurer la transmission d’un patrimoine considérable et que la situation du conjoint survivant est nettement assurée = CA Rouen 3 février 1981. Pour apprécier l’intérêt de la famille et l’incidence du changement sur l’intérêt des enfants, les tribunaux ont pris l’habitude de consulter les enfants, mais il ne s’agit pas d’une autorisation et la Cour de cassation dans un arrêt du 24 novembre 1993 précise que l’avis des enfants n’est pas obligatoire : le juge n’est pas obligé de prendre l’avis des enfants, il n’est pas tenu de le suivre.

Il y a des enfants d’un précédent lit ou mariage: apparaît un danger plus particulier car cet enfant n’est parent que d’une des deux époux. Si son parent décède le premier, la totalité des biens va passer à l’autre parent dont il n’est pas héritier. Il risque donc de perdre tous ses droits successoraux. Mais c’est une situation qui est prévue depuis longtemps par les textes et notamment l’article 1527 al 2 prévoit une protection pour les enfants d’un mariage précédent. Schématiquement, ce texte prévoit ce qu’on appelle une action en retranchement de l’avantage excessif = un époux peut donner une partie assez grande de ses biens à son conjoint mais pas la totalité, il y a une part réservée aux enfants. On prend la mesure de ce qu’on peut donner au conjoint (quotité disponible entre époux) et s’il résulte que cet avantage dépasse la mesure de la quotité disponible, il sera réduit à la quotité disponible, l’enfant récupérant ainsi une partie des biens qu’il aurait eu de la succession de son parent. Normalement, le juge ne devrait pas refuser le changement sauf si les circonstances révélaient un danger particulier.

L’enfant est toujours d’un autre lit, mais c’est un enfant naturel ou adultérin : la Cour de cassation dans un arrêt du 8 juin 1982 avait décidé que la protection de l’article 1527 qui ne visait que les enfants d’un précédent mariage ne s’appliquait pas aux enfants naturels, en dépit du principe d’égalité de la loi de 1972. Or le risque est de même nature que précédemment. Il résulte que quand il y a un enfant naturel d’un époux, les tribunaux devaient refuser le changement de régime qui risquait de porter atteinte gravement aux droits successoraux de cet enfant (à moins de compensations particuliers). Critiques de cette jurisprudence : loi du 3 décembre 2001 qui a modifié l’al 2 de l’article 1527 et accorde l’action en retranchement aux enfants qui ne seraient pas issus des deux époux. Désormais, l’enfant naturel peut exercer cette action en retranchement, il bénéficie de la même protection qu’un enfant d’un précédent mariage.

La Cour de cassation, curieusement, après la réforme de 2001 a opéré un revirement de jurisprudence et a estimé que la solution qui interdisait aux enfants naturels d’agir en retranchement était contraire à la CEDH et que la protection devait être étendue aux enfants naturels = 1ère Civ. 29 janvier 2002.

Les époux doivent respecter l’intérêt des tiers et ne doivent pas invoquer l’intérêt de la famille contre les droits des tiers.

C’est la question de la protection des créanciers. C’est l’hypothèse où des époux mariés sous le régime de la communauté passent sous le régime de la séparation de biens : ne cherchent-ils pas à organiser leur insolvabilité ?

S’il s’agit de risques futurs: un époux change de profession et il embrasse une profession à risque, la demande de changement de régime se fait à un moment où la situation des époux est saine, les tribunaux acceptent, les futurs créanciers seront avertis du changement de régime.

Mais si leur situation est dégradée quand ils veulent changer de régime? La jurisprudence considère que même si un époux est lourdement endetté on ne peut pas présumer la fraude, et d’autre part, les créanciers n’ont pas un droit acquis au maintien du régime matrimonial de leur débiteur. La jurisprudence aménage la protection des créanciers = article 1397 lui-même et dans le droit du partage.

o Dans le cadre de l’article 1397: on observe qu’il y a une certaine protection des créanciers par les mesures de publicité qui accompagnent l’instance en homologation et permettent aux créanciers d’intervenir pendant celle-ci. Les juges vont chercher s’il y a une intention de fraude à l’encontre des créanciers. Mais la fraude est difficile à déceler car en raison des règles du passif, en lui-même, le changement de régime ne nuit pas au créancier puisqu’on admet qu’ils n’ont pas un droit acquis au régime matrimonial de leur débiteur. Surtout, l’article 1397 prévoit expressément que les créanciers peuvent pendant un délai d’un an à compter de la publicité du jugement former tierce opposition contre un jugement d’homologation qui ferait fraude à leurs droits. La jurisprudence a facilité l’action des créanciers en leur permettant de démontrer que la fraude ne s’était réalisée que dans le partage de communauté, mais que le changement lui-même n’était pas animé par une intention de fraude.

o Protection recherchée dans le droit du partage: la fraude se réalise le plus souvent au moment du partage des biens communs qui est la conséquence du changement de régime. Souvent, apparaît au moment du partage une intention de fraude qui consiste par exemple à mettre dans le lot de l’époux non endetté les biens de valeur sûre (immeubles) et les valeurs incertaines (fonds de commerce qui périclite ou des biens faciles à dissimuler) dans le lot de l’époux endetté. C’est le partage consécutif au changement qui montre la fraude. La jurisprudence a aménagé une protection dans cette hypothèse = le créancier peut faire opposition au partage ce qui lui permet de surveiller le partage.

§ Mais même si les créanciers ne l’ont pas fait, la jurisprudence admet que si le partage a été fictif ou précipité, ce dernier peut être attaqué par l’action paulienne et il sera inopposable aux créanciers.

§ Une défense des créanciers peut être fondée sur le caractère lésionnel du partage. Il peut alors être rescindé en cas de lésion de plus du quart.

§ L’époux apparemment victime ne va pas se plaindre, c’est pourquoi la jurisprudence a admis que les créanciers pouvaient intenter l’action oblique à la place de leur débiteur.

III Conditions de forme et procédure du changement

A Convention modificative

L’article 1397 prévoit que les époux doivent établir cette convention par acte notarié. Les époux et eux seuls sont parties à cette convention modificative.

Rôle du notaire: il doit exercer son devoir de conseil vis-à-vis des époux mais ne saurait se faire juge du changement de régime, il ne doit pas refuser son concours que s’il constatait le caractère frauduleux du changement demandé.

B Homologation judiciaire

La convention doit être homologuée par le tribunal, elle est demandée au TGI du domicile des époux. La demande est introduite par requête conjointe, avec une copie de l’acte notarié prévoyant le changement, c’est une procédure gracieuse, qui repose sur l’accord des époux.

Il y a déjà une certaine publicité de la demande notamment par utilisation du répertoire civil.

= articles 1292 et 1303 du Code de Procédure Civile.

Les pouvoirs du tribunal :

Il doit vérifier si certaines conditions sont réunies comme :

le délai de deux ans,

si les parties sont capables,

mais le point essentiel est de savoir quelle est l’étendue de son pouvoir quant à la conformité à l’intérêt de la famille. Il peut demander certains documents. Le tribunal ne recherche pas seulement l’absence d’intention frauduleuse, mais il recherche si effectivement le changement lui paraît conforme à cet intérêt de la famille.

Le jugement va être rendu par le tribunal, il fait l’objet d’une publicité.

Il existe des voies de recours contre la décision du tribunal:

L’appel : le jugement peut être frappé d’appel :

o Soit par les époux, mais seulement en cas de refus d’homologation.

o Soit par les personnes intervenues à l’instance en cas d’homologation.

La tierce opposition : les créanciers qui ne seraient pas intervenus peuvent former tierce opposition contre un jugement qui fait fraude à leurs droits. Seuls les créanciers peuvent faire opposition. La demande des tiers est rejetée.

La Cour de cassation a admis dans un arrêt de 1999 que le recours en révision pouvait être exercé quand les conditions de cette voie de recours extraordinaire étaient réunies et en particulier l’obtention d’un jugement en fraude.

Lorsque le jugement est définitif, il fait l’objet d’une publication, en cas d’homologation, le jugement d’homologation fait l’objet d’une publication dans un journal paraissant dans le ressort du tribunal, avec une mention du jugement en marge de l’acte de mariage = article 1294 du Code de Procédure Civile.

Quand les époux ont fait un contrat de mariage, le jugement d’homologation est mentionné sur la minute, sur l’original du contrat de mariage = article 1397 al 4.

Si les époux sont commerçants, il est fait mention du changement de régime au registre du commerce. C’est une condition d’efficacité du jugement à l’égard des tiers.

Section II
effets du changement de régime

Deux points à étudier :

lorsque la modification est irrégulière, que le contrat entre époux paraît critiquable : l’homologation supprime-t-elle toute possibilité de modification de la convention convenue ?

il faut par ailleurs préciser les effets entre les époux et à l’égard des tiers.

Modification intervenue irrégulièrement :

Les changements de régime sont assez fréquents (environ 20000 changements par an).

Peut-on contester la validité de la convention modificative alors qu’il y a eu homologation et plus de voies de recours ? La convention homologuée est-elle susceptible d’annulation ?

Après de nombreuses discussions, hypothèse = quand des clauses illicites auraient été insérées dans la convention ou encore hypothèse du dol ou d’une fraude commise par un époux.

En faveur de la nullité possible: il s’agit d’une décision gracieuse, on ne se heurte donc pas à l’autorité de la chose jugée et il peut arriver que le tribunal ait été mal informé.

Contre la nullité: c’est dangereux et si c’est une nullité absolue, elle peut être exercée pendant 30 ans, facteur d’insécurité juridique. Par ailleurs, dans la mesure où il y a contrôle du juge, il doit en quelque sorte purger la convention de ses vices. On pourrait comparer avec le divorce sur requête conjointe où la Cour de cassation a posé en principe que la convention homologuée ne peut en principe être remise en cause par des actions en nullité.

Ici, le problème n’est pas le même car l’une des raisons qui refuse la remise en cause de la convention de divorce est le lien avec la dissolution du mariage, on risque de remettre en cause le divorce même, ici, cela ne touche que la convention modificative.

Cour de cassation: en faveur de la recevabilité de l’action en nullité de la convention dans un cas où on comprend la solution : des époux avaient adopté le régime de la communauté universelle avec attribution intégrale au conjoint survivant en dissimulant au tribunal pas présence d’un enfant naturel du mari. Le mari décède et l’enfant naturel voit ses droits successoraux réduits à néant. Dans une telle situation, l’enfant ne pouvait former tierce opposition puisque la Cour de cassation réserve cette voie de recours au créancier. La Cour de cassation a décidé que l’homologation judiciaire laissait subsister le caractère contractuel du changement de régime. En conséquence, la convention des parties peut être annulée pour des causes qui lui sont propres. En l’espèce, elle a estimé que l’enfant avait la qualité pour agir en nullité de la convention car il avait été victime d’une fraude, alors que cet élément aurait dû faire l’objet d’un contrôle.

= 1ère Civ. 14 janvier 1997. Dalloz 1997 p 273.

Il n’y a pas eu de jurisprudence ultérieure en ce sens, du moins sur d’autres hypothèses. Mais a priori, les causes de nullité d’un contrat sont susceptibles en général de s’appliquer à la convention homologuée.

La Cour de cassation a étendu la solution à une hypothèse voisine mais plus complexe = quand la filiation naturelle est établie après le changement de régime.

Dans un arrêt du 12 décembre 2000, la Cour de cassation estime que c’est comme si l’existence de l’enfant avait été dissimulée du fait de l’aspect déclaratif de l’établissement de la filiation dans ce cas.

Devrait disparaître depuis la réforme du droit de succession de 2001 puisque l’enfant naturel est désormais protégé comme l’enfant d’un précédent mariage puisque l’action en retranchement de l’avantage, s’il est excessif, de l’article 1527 lui est ouverte comme pour un enfant d’un mariage précédent.

Donc il n’y a logiquement plus d’intérêt à dissimuler l’existence de l’enfant naturel pour obtenir le changement de régime et le cas de figure sur lequel la Cour de cassation a statué ne devrait pas semble-t-il, si les époux agissent logiquement, se reproduire à l’avenir.

En tous cas, la position de la Cour de cassation est que l’homologation ne supprime pas la possibilité d’une action en nullité si la convention modificative est affectée d’un vice qui justifie son annulation : la convention n’a pas un effet intangible par le fait de l’homologation.

2e hypothèse (de loin la plus fréquente) = modification régulière du régime matrimonial :

Il n’y a pas d’action en nullité possible, et les voies de recours ont été exercées ou le délai est expiré. Alors pour une telle modification, pour un tel changement de régime, il suffit de préciser les effets à l’égard des époux et à l’égard des tiers.

1° les effets à l’égards des époux :

Le 3e alinéa de l’article 1397 décide expressément que le changement homologuée a effet entre les époux à dater du jour du jugement d’homologation et lorsque le changement consiste à substituer la séparation de biens à la communauté, ce jugement entraîne logiquement la dissolution de la communauté qui existait jusque là.

Il faut donc que les époux liquident et partagent cette communauté s’ils veulent être vraiment soumis à une séparation de biens

Cependant, à la différence de ce qui se passe en cas de séparation de biens judiciaire, demandée par une procédure contentieuse par un époux contre l’autre (on retrouvera l’institution plus tard), il n’y a pas en cas de changement conventionnel homologué de délai imposé aux époux pour liquider leur communauté.

Simplement, il y aura une indivision post communautaire. Et le maintien de cette indivision empêchera l’application pleine et entière du nouveau régime matrimonial, mais pas de sanction particulière.

2° les effets à l’égards des tiers :

L’article 1397 prévoit un délai supplémentaire pour que le changement de régime produise effet à l’égard des tiers : délai supplémentaire de 3 mois après la mention du jugement en marge de l’acte de mariage.

A l’égard des tiers, le changement ne se produit que 3 mois après la publicité consistant à mentionner le jugement ou son dispositif en marge de l’acte de mariage. Les tiers ont donc toute sécurité s’ils traitent avec les époux en disposant d’un extrait d’acte de mariage de moins de 3 mois car s’il y a une modification plus récente, elle leur est inopposable : à leur égard, c’est régime initial qui reste en vigueur.

Cela peut avoir des conséquences importantes pour les créanciers. On distingue les créancier antérieurs ou postérieurs au changement de régime :

les créanciers antérieurs sont ceux dont la créance est née avant l’expiration de ce délai de 3 mois: pour eux les choses se passent comme si les époux étaient encore mariés sous le régime de la communauté. Donc s’il y a des biens indivis en raison du changement de régime et de la dissolution de communauté, ils peuvent saisir les biens indivis.

les créanciers postérieurs sont ceux dont la créance naît après l’expiration de ce délai de 3 mois: ils ne peuvent saisir que les biens personnels de leur débiteur. Ou s’assignant des biens indivis, ils ne peuvent que provoquer le partage pour se payer sur ce qui revient à leur débiteur. Ce n’est pas pareil de saisir le bien et de se payer dessus.

Pour l’illustration de ce mécanisme, se reporter par ex à un arrêt Civ. 1e 17 mars 1987, JCP 88, II, n°21021, note Simler

Ou encore arrêt du Civ. 12 9 juillet 1991, bull. II n°1935

Cela dit, il y a un moyen de rendre plus rapidement opposable aux tiers le changement de régime : c’est lorsque dans les contrats conclus avec eux, les époux leur ont déclaré avoir modifié leur régime matrimonial. Si à l’occasion d’un acte les époux déclarent avoir changé de régime et que cela correspond à la réalité, les tiers sont informés et ne sauraient s’abriter derrière ce délai de 3 mois.

Resterait à dire un mot d’une autre catégorie, mais c’est un problème marginal qu’on ne fait qu’évoquer : ce sont les effets à l’égards des parties au contrat de mariage autre que les époux, c’est assez rare : c’est-à-dire quand des donateurs sont intervenus au contrat de mariage, et auraient consenti une donation en fonction d’un certain régime matrimonial.

Question de savoir si le donateur qui se serait opposé sans succès au changement de régime pourrait au moins révoquer la donation consentie en faveur d’un certain régime : c’est une question discutée, aucune décision de justice sur ce point. Il semble que la faveur aille à la révocation.

Mais c’est une hypothèse d’école. Question théorique, pas besoin de l’approfondir.

Voila les règles essentielles concernant les effets d’un changement de régime matrimonial : il faut voir si la modification est régulière ou non, et voir les effets entre époux et vis-à-vis des tiers.

Pour terminer, un mot des dispositions transitoires concernant la partie que nous venons d’étudier

Aussi bien la loi de 65 que celle de 85 ont prévu des dispositions à ce sujet en énonçant comme règle de principe que la validité d’un contrat de mariage s’apprécie d’après la loi en vigueur au jour où il est conclu.

Donc normalement, on se réfère à la loi ancienne.

Et normalement, la loi nouvelle ne devrait pas avoir pour effet de valider un contrat qui aurait été nul sous l’empire de la loi ancienne.

Signalons seulement, à titre non pas de curiosité, mais parce que c’est intéressant intellectuellement, que la loi de 65 dans ses articles 20 et 21 avait prévu 2 exceptions à ces règles conformes aux droit transitoire :

la validation de la clause commerciale car il a paru socialement utile de valider cette clause. C’est un cas de rétroactivité.

La validation des contrats de mariage autrefois passés sans la présence simultanée des parties : cette règle qui veut que toutes les parties soient présentes. Pourquoi avoir accepté la validité ces contrats alors que la règle était déjà existante ? La règle n’était pas claire et la jurisprudence s’était prononcée tardivement. On a estimé que les parties pouvaient ignorer cette cause de nullité.

On a terminé l’étude de la détermination du régime matrimonial, au moment du mariage ou pendant, avec cette possibilité de changer de régime matrimonial qui suppose à l’heure actuelle une procédure judiciaire, une homologation par le juge. On s’est demandé s’il fallait la supprimer à l’avenir et se contenter d’un acte notarié soumis à publicité.

La détermination du régime matrimonial conduit le plus fréquemment à se laisser guider par la loi : c’est-à-dire que les époux se trouvent majoritairement soumis au régime de la communauté légale. Au moins 4 ménages sur 5 sont mariés, sous le régime légal.

C’est ce régime légal que nous allons maintenant étudier avant de voir dans une dernière partie les régimes conventionnels.