La Restauration, la Charte du 4 juin 1814

La Monarchie selon la Charte du 4 juin 1814

Cette Charte se veut un texte de compromis, et reconnaît les grands principes acquis durant la période révolutionnaire (liberté religieuse, égalité devant l’impôt…) Afin de rétablir la cohésion du pays, l’amnistie politique est déclarée pour tous les faits antérieurs à 1814. En revanche, la Charte réaffirme les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire du souverain, ainsi que sa capacité à dissoudre la Chambre des Députés et à nommer les pairs. Les chambres, élues au suffrage censitaire, ont plus de pouvoir que sous l’Empire, et le système judiciaire est principalement hérité de cette période, notamment le Code Civil. Rédigée dans l’optique d’un compromis, la Charte s’attire les foudres des royalistes les plus intransigeants (Ultra)

Paragraphe 1 : le rapport des institutions entre elles

  • Le Roi souverain

Benjamin Constant a voulu attribuer au Roi un pouvoir neutre, et il admettait l’institution royale mais comme un organe devant se situer au dessus du jeu politique. Dans la réalité il n’en est rien, la Charte reconnaît des pouvoirs au Roi, il n’est pas neutre. Le Roi représente l’unité du pouvoir d’État à lui seul, de surcroît l’examen de ses pouvoirs montre à l’envie l’absence d’esprit parlementaire dans la lettre de la Charte. Tout d’abord, le Roi a le monopole de la fonction exécutive, les Chambres (chambre des pairs ; des députés des départements) sont totalement exclus de tout pouvoir exécutif. C’est un pouvoir de commandement, de nomination et de négociation pour toutes les affaires internationales. De fait, ces prérogatives sont classiques dans le cadre d’un pouvoir fort. L’article 14 fait du Roi le chef suprême de l’État et lui donne le pouvoir de faire les règlements et ordonnances nécessaires pour l’exécution des lois et la sûreté de l’État. Or qui détermine la sûreté de l’État ? Le Roi. En réalité, l’article 14 donne au Roi une capacité normative dont l’expansion dépend de sa seule volonté, ordonnances qu’il peut faire « contra legem ». Et même de surcroît puisque la Charte est une auto-limitation du pouvoir royal, le pouvoir des ordonnances est contra legem et contre la Charte. C’est à dire que le Roi n’est pas tenu de se soumettre à sa propre Charge ou aux lois, dès lors qu’il invoquera la sûreté de l’État. Enfin, toute justice émane du Roi.

Normatif/Législatif. Norme → ce qui fait obligation. Loi/Règlements → types de norme.

L’article 15 nous dit que la puissance législative s’exerce collectivement par le Roi la Chambre des Pairs et des députés des départements. On en est presque à la souveraineté en Angleterre après la révolution de 1688, à savoir qui détient la souveraineté législative ? C’est l’ensemble des institutions c’est à dire le Roi dans son Parlement, dans ses deux Chambres. En réalité, seul le Roi a l’initiative, les Chambres sont limitées à un rôle de Conseil.

Le Roi propose la loi, les chambres n’ont que la possibilité de supplier le Roi de proposer une loi. C’est à dire en suppliant le Roi fait ensuite ce qu’il veut.

Pour éviter que l’initiative éventuelle des Chambres puisse avoir un poids politique, ses initiatives, ses suppliques doivent être discutées en comité secret, c’est à dire que la supplique n’a pas la possibilité en étant publique et en faisant appel à l’opinion public de contraindre le Roi sur le plan politique. Le Roi fait ce qu’il veut de la supplique, il n’est pas tenu de la suivre.

Ensuite, le Roi seul sanctionne et promulgue les lois. Cela veut dire qu’il existe un veto complet et implicite du Roi. De surcroît, le Roi contrôle le fonctionnement et le recrutement des Chambres, il nomme les Pairs de France qui sont en nombre illimité, il peut les nommer à vie et même rendre les pairies héréditaires (La pairie de France est un groupe de grands vassaux de la couronne né au Moyen Âge, qui élisaient les rois (Hugues Capet par exemple) avant que la couronne ne devienne complètement héréditaire, et qui se transforma en une classe nobiliaire dotée de privilèges spécifiques sous l’ancien Régime, dont le plus insigne était le droit de siéger au Parlement).

La Chambre des députés est renouvelée par 5e tous les ans, cela nuit au sentiment de groupe. Ainsi, ils peuvent moins s’opposer à la volonté politique du Roi. Le Roi nomme les présidents de chaque chambre et il convoque et proroge (suspendre) les chambres et le Roi peut même dissoudre la Chambre des députés. Si le Roi trouve une opposition dans la Chambre des Pairs, il nomme une fournée de pairs fidèles pour renverser la majorité en sa faveur.

Tout permet au Roi de contrôler les institutions.
Deux limites font qu’il ne s’agit pas d’une monarchie tempérée comme sous l’Ancien Régime (= monarchie dans laquelle le pouvoir du Roi est limité par sa propre conscience)

Tout projet de loi doit pouvoir être discuté librement par les deux chambres. (Article 18)

Aucun impôt ne peut être établi ni perçu s’il n’a été consenti par les deux Chambres et sanctionné par le Roi, ainsi à défaut d’avoir la faculté de faire, ils ont la faculté d’empêcher.

Il y a deux lectures de la Charte : lecture des ultras et selon les libéraux, lecture pactise et parlementaire de la Charte.

Dès 1815, les libéraux considèrent que le droit de supplique est un véritable droit d’initiative législatif. Ils le fondent sur un principe : il ne peut pas en être autrement. C’est comme ça que les choses doivent être. Car ils considèrent que le Roi n’est Roi car il a reconnu les lois de la Nation. Ce qui va faire que très tôt, les députés vont proposer des lois, et très tôt, le Roi va admettre la possibilité d’une initiative législative dans les faits de la part des Chambres.

En 1814, Benjamin Constant affirme « le but d’une assemblée représentative est d’exprimer les besoins du peuple, on l’investit de cette mission car les membres de cette assemblée pris dans le sein du peuple même sont censés connaître leurs besoins mais si l’initiative leur est refusé à quoi bon leur serve cette connaissance » c’est à dire que ce ne sont pas des conseils ce sont des organes porteurs d’une volonté, celle du peuple qui doit rencontrer la volonté royale.

La Charte ne dit pas grand chose sur le ministre, ce ne sont que les exécutants de la volonté royale, ils ne sont pas censés avoir une autonomie politique vis à vis du peuple, ils sont nommés et révoqués par le Roi, ils sont avant tout responsables devant le Roi. Dans la Charte, la responsabilité des ministres n’est envisagée que sous l’aspect pénal. Ils sont importants, peuvent être membres de l’une des deux chambres. Dès 1815, l’ordonnance établissant le ministère Talleyrand, fait apparaître l’institution du Cabinet. Cette institution qui n’existe pas dans la Charte mais qui est voulu par le Roi puisque c’est une ordonnance, permet aux ministres de se réunir sans le Roi en Conseil de cabinet, ce Conseil de Cabinet est présidé par l’un des ministres qui est généralement soit le ministre des affaires étrangères soit celui intérieur.

  • Les chambres

La Charte prévoit deux Chambres.

La Chambre des Pairs, Pairs nominés par le Roi, en nombre illimité, il faut avoir 25 ans mais on a une voie délibérative qu’à partir de 30 ans. Il doit avoir appris un minimum le fonctionnement de l’État. C’est une chambre aristocratique. Si l’on donne un pouvoir par l’hérédité il faut que les gens aient un âge pour délibérer et s’ils ont 30 ans il y a études et expériences, et si dès 25 ans ils seront formés.

On est là dans la logique réactionnaire de la Restauration qui veut redonner une fonction politique à la noblesse. Mais cette noblesse il faut la transformer en aristocratie au sens premier du terme c’est à dire en gouvernement des meilleurs. Elle sert de Cour, de Tribunal pour les crimes de haute trahison et les attentats à la sûreté de l’État. La Chambre des Pairs dans une procédure proche de l’Empechment c’est elle qui juge les ministres poursuivis dans le cadre de la responsabilité pénale.

La Chambre des députés, les députés doivent avoir 40 ans et sont élus pour 5 ans, par des collèges électoraux dont les présidents sont nommés par le Roi, présidents qui fixent l’ordre du jour, et veille à l’ordre au sein des chambres. Les séances de la chambre sont publics sauf quand il s’agit d’adresser une supplique législative au Roi.

Le régime électoral est censitaire. Le suffrage universel a vécu et a donné lieu à deux « mauvaises » expériences → il fut le support de la violence révolutionnaire et il fut largement manipulé par le régime bonapartiste qui l’a transformé en instrument de légitimation permanente d’un régime autoritaire. Et de surcroît, d’un régime d’usurpation. Si un (?) électoral est rétabli ce n’est pas tant pour écarter les pauvres mais que pour réserver l’électorat aux plus riches. Le régime censitaire est révélateur et cherche à stabiliser un régime des notables.

Des notables ou en d’autres termes c’est une ploutocratie, et une aristocratie. Il est oligarchique.

Il y a deux sens : il y a un sens électoral et ensuite, un sens d’éligibilité.

Le droit de vote est réservé, à tous les gens qui ont au moins 30 ans en 1814, c’est être né avant la RF. C’est à dire avoir eu des parents qui vous ont parlé Ô combien ct vachement mieux du temps de la monarchie.

Deuxième élément : la fortune. Et elle calculée sur 4 impôts directs : l’impôt foncier, la personnelle immobilière, les portes et fenêtres et l’impôt sur ( ?)

L’intérêt de cela c’est qu’on fait reposer l’impôt non pas sur un revenu mais sur un capital, cela favorise donc la propriété des propriétaires fonciers, sociologiquement plus conservateurs que les hommes d’affaire, les commerçants etc.

Le pays légal/Le pays réel.

Le pays légal représente avant tout la propriété foncière, le pays légal c’est 100 000 électeurs sur 9 millions d’hommes adultes en 1814. Ensuite, pour manipuler l’électorat, on fait des dégrèvements fiscaux, on réduit les impôts de certaines personnes de façon à les exclure de l’électorat. Aucun député ne peut être admis dans la Chambre s’il ne paye pas une contribution directe de 1 000 francs → existence de 17 239 personnes éligibles.

A Paris, 2781 personnes éligibles, mais dans les autres départements ça fait moins de 100 personnes éligibles. Et on prévoit que si y’a moins de 50 personnes éligibles dans un département on prendra les personnes qui payent les plus importants, et en Corse, on élève le nombre d’éligibles à 50 alors qu’il y a 39 électeurs. Il s’agit d’un ressèment extrême dans les institutions, des personnes riches.

Par ailleurs, la composition et le fonctionnement des collèges électoraux est confié à la loi, cela va conduire à des modifications régulières des lois électorales de façon à modifier le sens et le résultat que peut avoir une élection ans un département. Par exemple, il y aura 5 ordonnances et lois électorales qui toutes vont changer un aspect de l’élection et à chaque fois il s’agit de renforcer un clan une tendance politique. Il faut citer la loi Laîné de 1817, voté par une assemblée royaliste modérée prévoit pour l’élection un collège unique de départements avec un scrutin par liste dans les chefs lieu de département.

Si dans un département y’a trois députés à élire, on ne découpe pas le département en trois circonscriptions, on formera un collège électoral de tous les électeurs qui votera les trois députés.

Il faut une majorité absolue

En 1820, la loi Laîné sera modifiée précisément cette fois pour renforcer l’électorat de l’ultra, c’est à dire l’électorat conservateur que l’on trouve plutôt dans le monde rural et on instaura alors un double vote : 258 députés sont élus au scrutin d’arrondissement et 172 députés sont élus au chef lieu du département pour le quart des électeurs les plus imposés. C’est à dire que le quart des électeurs imposés sont élus deux fois. Une loi de 1824 destinée à verrouiller définitivement le système en faveur des ultras établit le mandat à 7 ans, non renouvelable, en effet l’évolution du régime a permis de consolider l’assise des ultras sur le pays légal et du coup les ultras n’ont plus besoin d’un renouvellement périodique de la Chambre car le système électoral leur permet d’avoir la majorité.

Cette évolution du régime électoral va à contre-sens de deux choses : des aspirations du pays (de l’esprit du siècle) et si en 1814 1815 il y avait eu un recul par rapport aux institutions de la liberté pour la Nation, cette évolution électorale marque qu’il s’agissait d’un recul, d’une transition, vers une sorte d’isolement du pays légal sourd et aveugle face à la réalité du pays réel ce qui conduira au blocage et en grande partie à la RF de 1830.

  • La continuité administrative et judiciaire

L’enjeu en 1814 1815 de la Restauration porte désormais sur les organes du gouvernement, il s’agi de déterminer un équilibre dans l’État entre les différents forces sociales porteuses de projet politique antagoniste. En d’autres termes, il s’agit de concilier la Nation représentée par des organes et le Roi restauré sur son trône. Du coup la régénération qui avait dirigé et présidé la Révolution n’est plus à l’ordre du jour et il n’est pas nécessaire de modifier les institutions judicaires et les institutions administratives. Au fond, la Révolution a balayé tout ce qui ne fonctionnait pas sous l’Ancien Régime et Napoléon a consolidé les institutions qui font la stabilité de l’État, il n’y a donc pas de réel enjeu dans la remise en cause des institutions administratives et judiciaires d’où la conservation des institutions administratives et judiciaires. A tel point que dans la Chambre des Pairs, les ultras qui voient d’un mauvais œil l’existence du Conseil d’État, qu’ils finiraient par qualifier la charte d’acte additionnel à la Constitution d’empire. Autre nuance : dans le personnel administratif et judiciaire, les vas et vient vont conduire à des épurations massives notamment aux lendemains des cents-jours la Restauration va balayer tous les juges et les préfets administrateurs qui s’étaient montrés fidèles à Napoléon pendant les 100 jours.

Paragraphe 2 : L’ébauche d’une pratique parlementaire des institutions

La Charte ne prévoit pas tout, et cela laisse une marge de manœuvre importante pour la marche du régime. Cette incomplétude a été nécessaire à l’origine parce que le régime manquait de soutient ou plutôt de fermeté dans son soutient politique. Au fond ct un pari et on ne savait pas si les français accepteraient le retour d’une monarchie et ainsi on restait vague pour prendre moins de risque. Et c’est cela qui a permis de donner à la Restauration un caractère parlementaire que la Charte n’établit pas. L’évolution dans un sens parlementaire, restait fragile, elle était fragile parce qu’elle dépendait de la bonne volonté de l’ensemble des titulaires des fonctions de l’État. Fragile mais en même temps révélatrice d’une évolution quasi inéluctable comme en atteste la révolution de 1830 qui précisément est une réaction à la tentative de Charles X de rétablir l’Ancien Régime dans son entier. On cherche à rétablir le dialogue entre les institutions.

Schématiquement un régime parlementaire est un régime dans lequel les organes de l’État collaborent et se contrebalancent les uns les autres. D’où la nécessité d’un instrument de dialogue. Les chambres sont privées du droit d’initiative donc c’est un frein mais les ministres qui sont les chargés du Roi, les secrétaires du Roi peuvent être membres des chambres et ont le droit s’ils n’en sont pas membres d’y être entendus quand ils le demandent. Comment la Chambre communique-t-elle avec le Roi et ses ministres ?

A/ La pratique va développer 4 instruments :

  • l’adresse, qui est évoqué dans le texte de la Charte à travers la possibilité pour la Chambre d’adresser des suppliques. Une loi de 1814 sur une relation des Rois et des Chambres fixent les conditions de l’adresse. L’adresse est une réponse aux discours du Trône qui est lu par un Ministre généralement le Président du Cabinet à l’ouverture de la session parlementaire annuelle, de la session des chambres, il annonce son programme politique. L’adresse est une réponse. On va commencer à inclure dans l’adresse des demandes et notamment en 1819 le député Laffitte suggère d’inclure dans l’adresse une supplique non pas de faire mais de ne pas modifier la Loi Laîné. A partir de 1821 l’adresse devient le lieu de la critique que les chambres votent à la politique du gouvernement. Elle permet d’ouvrir une interpellation générale sur la politique du gouvernement. Le moment de la discussion de l’adresse devient le moment le plus important de la session des Chambres. Mais elle ne peut intervenir qu’une fois par an et en réponse au discours du trône. Et c’est pour ça qu’ils vont développer d’autres moyens.
  • Le débat sur les pétitions. La pétition c’est la demande qu’un particulier adresse à la Cambre pour demander le respect de ses droits et libertés, pour se plaindre des violations qui portent atteinte à leurs droits et libertés, pétition qui peut intervenir à tt moment et cela ouvre pour la Chambre la possibilité de débattre de l’action du ministre incriminé, et plus précisément de l’action du gouvernement. Le débat sur les pétitions n’est pas de l’initiative des Chambres.
  • La discussion du budget et de la loi des comptes. La loi des comptes est faite pour sanctionner l’utiliser des impôts, c’est un moyen de juger a posteriori de l’action des ministres. Si la Chambre parvient à imposer un principe d’information on présentera le budget par ministère, le budget peut être voté par ligne, par branche. Et ainsi on contrôle de plus en plus. C’est une loi de 1818 impose tout d’abord, le vote du règlement des comptes passés avant le vote du budget. Ce qui établit le principe d’un contrôle a posteriori de la politique menée par les ministres qui peut trouver sa conséquence dans le vote qui sera fait des finances à louer pour l’année suivante. Le vote du budget et de la loi de compte est donc un moyen essentiel pour donner la confiance ou pas à un ministre. Sachant que la confiance que l’on retire à un ministre n’implique pas tout le ministère.

    Les moyens d’action entre les organes

L’exécutif peut dissoudre la chambre des députés des départements et c’est là qu’il convient de distinguer entre deux types, deux dissolutions. Dans l’esprit des rédacteurs de la Charte, la dissolution est une dissolution royale. C’est à dire, le Roi, peut en dissolvant la Chambre, se débarrasser d’un organe qui est devenu un contre-pouvoir. C’est ainsi que la Chambre introuvable, Chambre où il y a une très large majorité de députés ultras en 1815, introuvable car personne ne s’attendait à un tel succès des ultras aux élections, elle sera dissoute par le Roi, car elle veut imposer au Roi une politique réactionnaire alors que le Roi, beaucoup plus sage et plus prudent souhaite une politique modérée. Le problème de la dissolution royale c’est qu’elle met directement en jeu la figure royale. En effet, certes, le Roi s’est débarrassé dans le pays légal de l’organe qui le menaçait mais si les électeurs renvoient une chambre qui reste hostile au Roi, en réalité cela veut dire que les électeurs remettent en cause la décision royale ce qui veut dire en réalité que la dissolution royale engage la responsabilité politique du Roi. On peut le rapprocher du plébiscite. Le Roi en dissolvant la Chambre demande la confirmation de la confiance qu’il a dans le pays des électeurs. Mais c’est un danger car cela fragilise le Roi qui est inviolable et sacré. C’est donc une possibilité et un pouvoir très grand pour le Roi, mais dangereux. Maintenant il y a un autre type de dissolution : en 1830 Charles X dissout la Chambre de sa seule et propre volonté, les électeurs lui renvoient une chambre qui lui reste hostile, il la dissout de nouveau et il y perdra son trône. L’autre dissolution c’est la dissolution parlementaire, qui apparaît après la deuxième Restauration c’est à dire après les Cents-Jours. La prépondérance royale n’existe que s’il y a une majorité parlementaire pour soutenir les ministres. La logique de la dissolution parlementaire est donc un instrument de régulation qui permet de trouver un accord entre les ministres du Roi et la Chambre des Députés. Au fond, lorsqu’il y a une absence de majorité à la Chambre soutenant le ministère, qui peut conduire une série, une longue et lourde critique dans l’adresse, qui peut même conduire à ce que les députés ne votent pas le budget et s’il n’y a pas de majorité, le Roi renvoie aux électeurs le choix de trancher une querelle entre ses ministres et la Chambre.

La dissolution parlementaire peut aussi permettre de trouver une majorité dans une chambre trop divisée. En effet il n’y a pas de parti politique qui n’apparaîtront qu’avec la massification du processus électoral, qu’il n’y a pas de parti politique qui détermine la plateforme électoral, ni de grands moyens d’actions ni de valeurs autour desquelles se retrouveront les électeurs.

On ne vote pas tant pour une personne que pour un programme. Mais comme les partis politiques n’existent pas les élections sont très locales du coup les quelques électeurs votent pour les grands notables locaux, ils votent pour les gens qu’ils connaissent, pour les gens qui leur ont rendu un service, d’où un système largement gangrené par la corruption électorale. Donc on peut avoir une chambre de 400 personnes qui quand un problème va se poser sur « que faut-il faire par rapport à la guerre d’Espagne » et bien, il y a des gens qui s’en moquent, d’autres pensent que c’est important d’intervenir, il y a toute position mais pas de plateforme électorale préalable et donc on peut dissoudre une chambre qui ne sert à rien car elle ne peut pas sanctionner.

Sous le régime de la Restauration, il y aura deux types de dissolution : des dissolutions pour régler un conflit et celles pour prévenir un conflit. En 1815, le Roi va dissoudre la Chambre élu pendant les Cents-Jours. En 1816, le Roi met fin à la Chambre introuvable car il veut protéger ses ministres de l’influence de la majorité ultra à la chambre. En 1823-1827, le Ministère Villèle dispose largement de la majorité mais veut la renforcer pour éviter son effritement lors des renouvellements partiels. En effet, il y a la majorité mais jusqu’à la loi de 1827 le renouvellement est par 5e.

Il n’y a que deux dissolutions purement royales qui ont toutes les deux ont eu lieu en 1830, de fait elle provoque le conflit.

Autre question fondamentale, la responsabilité des ministres.

Selon la Charte, les ministres sont responsables devant le Roi à tous égards et devant la Loi. C’est ce qu’on appelle la responsabilité pénale et civile.

Tout l’enjeu est celui de la construction d’une responsabilité politique. Alors qu’est-ce que la responsabilité pénale, qu’est-ce que la responsabilité politique.

La responsabilité pénale ou civile d’un ministre c’est lorsque le titulaire d’une fonction ministérielle enfreint la loi pénale ou civile, en particulier mais pas nécessairement, dans le cadre de l’exercice de ses fonctions, il peut être poursuivi devant la Chambre des Pairs. Il est mis en accusation par la Chambre des députés des départements, et il est jugé par les Pairs.

C’est le principe anglais de l’Empechment qui s’applique aussi au Président des États Unis. C’est à dire que le ministre est responsable car il a fait quelque chose d’illégal.

La sanction est une sanction d’ordre pénal.

La responsabilité politique c’est une sanction politique sur l’opportunité d’une action politique. La sanction dans la responsabilité politique, c’est le retrait ou le maintien de la confiance accordée par la/les chambres aux ministres. La responsabilité politique peut être individuelle ou solidaire. Individuelle par exemple, ce sera le cas plusieurs fois sous la Restauration, on peut remettre en cause l’action d’un ministre sur un plan précis et ça n’engage pas la politique générale du gouvernement, et si l’on remet en cause la politique générale du gouvernement cela entraîne la démission des ministres. Et ça n’est qu’avec l’arrivée de la responsabilité solidaire politique et collective que l’on a la pièce définitive et fondamentale au cœur du régime parlementaire. Cela veut dire que ce qu’on reproche aux ministres n’est pas une action illégale mais inopportune. Par exemple, la guerre d’Espagne en 1823, ce que la Chambre dans une adresse condamne l »opportunité d’intervenir en Espagne cela voudrait dire que les ministres n’ont plus la confiance de la Chambre. Conséquence : soit maintien du ministre et dissolution de la Chambre par le Roi, soit la démission ou le renvoi des ministres par le Roi.
Ceci étant dit, l’enjeu de la responsabilité politique des ministres est d’opérer un transfert de pouvoirs politiques entre le Roi et le Gouvernement. En effet, si le Ministre est soumis au Roi, remettre en cause le Ministre, c’est remettre en cause le fait qu’il y ait collaboration entre les agents de la Nation et le Roi. Mais si le Ministre est responsable devant la Chambre il va pouvoir opposer au Roi qu’il n’agira qu’en fonction de son programme puisque c’est lui qui responsable et donc qui est responsable c’est celui qui a le pouvoir politique.

La difficulté en France c’est que jusqu’en 1848 les ministres restent les ministres du Roi : responsables devant le Roi puis progressivement devant les Chambres ;

Dès 1814 1815, les députés ont tenté d’envisager la conséquence d’une motion de censure tentée contre un Ministre. Cette tentative a été un échec et donc la chose n’a pas été formalisée.

Pourtant, dès le début du régime, la nécessité d’une harmonie entre le Parlement et le Ministère fut ressentie même si la chute des premiers ministères n’est pas due à la responsabilité politique.

La difficulté de mettre en place la responsabilité politique des ministres va donner lieu à une pratique de résistance : un ministère ne se considère remis en cause par la Chambre :

  1. Qu’après des élections législatives défavorables
  2. après des manifestations d’hostilité répétées, c’est à dire après une série de refus de vote d’une loi par la Chambre, par une succession de débats hostiles au gouvernement avec des votes contre le Gouvernement.

Esquisse de la responsabilité du ministre → monarchie de juillet, phénomène appuyé.

Jusqu’à la fin du Régime, les ministres restent les ministres du Roi, il n’y aura donc jamais d’automaticité entre un vote de motion de censure et une démission du Ministère qui tient du Roi.

Deux éléments sur la solidarité du Cabinet.

Le Cabinet est établi dès 1815 et pendant toute la Restauration il forme un corps uni et solidaire. La démission du Président du Cabinet que l’on appelle Président du Conseil, ou son renvoi entraîne celui de tous les ministres. Ce qui n’empêche pas de renommer les mêmes au mêmes postes en particulier aux postes techniques telles que l’armée, la Marine.

Un autre principe est celui de l’inégalité entre les Chambres. On a tenté très tôt d’imposer le principe selon lequel la Chambre des Pairs pouvait elle aussi rendre responsable le Ministère. Cela lui a été refusé pour deux motifs : la Chambre des Pairs par sa composition ne représente pas l’opinion. Ensuite, ces séances sont secrètes c’est à dire qu’il ne peut y avoir de débat qui fait appel à l’opinion public. Enfin il n’y a pas de contre-poids avec la dissolution. Le moyen d’action sur la Chambre des Pairs qui est la fournée des pairs n’est pas un moyen de contrebalancer un vote négatif des Pairs.

L’évolution parlementaire a été continue jusqu’en 1829 lorsque Charles X alors que les Chambres ne sont pas réunies, change sans aucun conflit ni raison apparente, le Ministère et nomme un ultra alors qu’il y a une majorité modérée à la Chambre. En l’espèce il n’y a pas de conflit entre les organes politiques, c’est le Roi qui crée le conflit entre la majorité de la Chambre et le Ministère.