La clause de réserve de propriété.
La clause de réserve de propriété permet au vendeur de s’assurer du bon paiement d’un bien meuble ou immeuble lors d’une vente, en lui garantissant un titre de propriété sur le bien vendu jusqu’à ce que le paiement total ait été effectué. Cette disposition permet au vendeur de se prémunir contre les risques d’insolvabilité de la part de l’acheteur.
La mise en oeuvre d’une telle clause peut restreindre le risque pour le vendeur impayé de ne pas récupérer ses biens.
En effet, le transfert de propriété est subordonné au paiement intégral du prix, ce qui donne la possibilité au vendeur d’exercer son droit de revendication sous certaines conditions.
Cette clause peut cependant être mise en échec dans certaines hypothèses.
- Les procédures collectives
- Le déclenchement de la procédure de conciliation
- La procédure de conciliation
- Les conséquences de la procédure de conciliation
- L’application des procédures collectives aux personnes physiques
- L’application des procédures collectives aux personnes morales
- Cessation de paiements (définition, éléments constitutifs, preuve…)
1 ) La mise en oeuvre de la clause de réserve de propriété.
a ) Les conditions de validité et d’opposabilité de la clause : l’une des conditions de validité de cette clause réside dans sa mention dans un écrit établi au plus tard au moment de la livraison. Elle peut par conséquent être stipulée après la conclusion du contrat tant que les marchandises n’ont pas été livrées. Cette disposition est inscrite dans l’article L 624-16 al 2 Code de Commerce selon lequel ladite clause peut figurer dans un écrit régissant un ensemble d’opérations commerciales convenues entre les parties. Une telle clause inscrite dans un contrat cadre et acceptée sans équivoque par les parties est donc valable.
Pour produire ses effets et permettre au vendeur de revendiquer les marchandises, ce texte exige qu’au moment de l’ouverture de la procédure, elle se trouve en nature dans le patrimoine du débiteur, que celui-ci les détienne lui-même ou que ces marchandises soient détenues par un tiers pour le compte du débiteur. La preuve de l’identité des marchandises ou des biens qui donnent lieu à revendication est donc indispensable.
Afin de déterminer la teneur des biens du débiteur et permettre une éventuelle identification, le code de commerce émet l’obligation de faire l’inventaire des biens de l’entreprise dès l’ouverture de la procédure collective.
Pour sa part, la jurisprudence soumet la revendication à l’exigence que les biens soient identifiables c’est-à-dire qu’il n’ait été ni transformés, ni modifiés, ni incorporés par l’acquéreur. La revendication demeure cependant possible quand les marchandises ont été intégrées à un autre bien et que leur reprise ne nécessite qu’un simple démontage ou que la marchandise, bien incorporée à d’autres, reste identifiable, dissociable de l’ensemble auquel elle a été intégrée.
L’article L 624-16 consacre cette solution jurisprudentielle dès lors que la récupération peut être effectuée sans dommage pour les biens eux-mêmes et celui dans lequel ils sont incorporés. Ce texte dispose également que la revendication en nature peut porter sur des biens fongibles s’ils se trouvent entre les mains de l’acheteur des biens de même espèce et qualité. La fongibilité des biens revendiqués relève de l’appréciation souveraine des juges du fond.
b ) Les conditions d’exercice de la revendication : la demande en revendication ou en restitution d’un bien s’effectue auprès de l’administrateur ou à défaut du mandataire judiciaire par lettre recommandée avec AR dans le délai de 3 mois suivant la publication du jugement ouvrant la procédure collective.
L’administrateur ou le débiteur, après accord du mandataire judiciaire, acquiesce à la demande. À défaut d’accord ou à la suite d’une contestation, la demande est portée devant le juge commissaire qui statue sur le sort du contrat aux vues des observations des créanciers, du débiteur et du mandataire de justice.
La revendication ou la restitution doit en principe être faite par le vendeur initial. Elle peut également intervenir au profit de l’entrepreneur qui a réalisé l’ouvrage dans le cadre d’un contrat d’entreprise incluant la vente de fournitures.
De plus, la cour de cassation, admettant que la clause de réserve de propriété, assimilée à une sûreté réelle, est un accessoire de la créance, conçoit qu’une autre personne puisse s’en prévaloir sans qu’il y ait donc lieu de distinguer selon que la demande provient du vendeur lui-même ou d’un tiers subrogé dans ses droits.
La cour de cassation a également décidé que le bénéfice de la clause est transmis de plein droit au porteur de la lettre de change qui acquiert la propriété de la provision et de ses accessoires.
La revendication est privée de tout fondement lorsque le prix est immédiatement payé. Cependant, le juge commissaire peut, avec le consentement du créancier requérant, octroyer un délai de règlement auquel cas le paiement du prix est assimilé à celui d’une créance née régulièrement après le jugement d’ouverture.
c ) Les effets de la clause : la réunion des conditions légales rend le vendeur, bénéficiaire de la clause, apte, comme tout propriétaire, à revendiquer et récupérer le bien qui échappe donc à l’actif saisissable de l’entreprise.
La restitution de ce bien vaut paiement en nature du prix de la vente à concurrence de la valeur du bien repris.
Au cas où cette valeur ne couvrirait pas la totalité de la créance du vendeur, ce dernier conserverait la faculté de produire au passif de la procédure pour ce qui lui reste dû.
Si l’administrateur décide, conformément à l’article L 622-13 Code de Commerce, de continuer la vente, le prix du bien doit être immédiatement versé au vendeur.
2 ) La mise en échec de la clause de réserve de propriété.
Certaines conditions liées à la validité de la clause de réserve de propriété peuvent en empêcher l’exercice. En effet, les marchandises revendiquées doivent se retrouver en nature chez le débiteur, mais en cas de revente des biens couverts par la clause, le vendeur initial ne peut plus se prévaloir de cette clause ; l’acquéreur de bonne foi se trouve alors protégé par l’article 2279 cciv « en fait de meuble, possession vaut titre » et n’a donc pas à restituer les marchandises au vendeur initial qui peut toutefois lui en réclamer le prix si celui ci n’a pas été versé au débiteur. La revendication ne peut non plus être exercée en cas d’impossibilité d’individualisation des marchandises.
Enfin, le vendeur réserviste peut se trouver en conflit avec un créancier gagiste entré en possession des marchandises de bonne foi. Ce dernier tirant profit de l’article 2279 cciv l’emporte alors sur le vendeur initial.