Comment faire une demande de brevet? Qui? Quoi? Où? Quand

LA DEMANDE DE BREVET ? Qui, quoi, où, quand?

L’inventeur qui souhaite protéger son invention par un titre doit déposer une demande qui est un acte juridique unilatéral d’appropriation d’un bien jusque là sans maître. La demande de brevet conduit à se poser 5 questions.

A. Qui peut effectuer une demande de brevet ?

Il faut savoir quelles sont les personnes qui sont habilitées à requérir une demande de brevet.

1. Le droit légal à un brevet.

Deux grands systèmes d’attribution du droit légal au brevet existent.

– Système américain = le premier inventeur.

– Le reste du monde = le premier déposant.

a. Le système américain.

La revendication de la protection par brevet est liée indissolublement à la personnalité de l’inventeur. Seul l’auteur de l’invention, personne physique a le droit légal au brevet. C’est le premier qui a réalisé l’invention qui a le droit au brevet. S’il est établi qu’un tiers a réalisé l’invention avant lui, alors le tiers aura le droit au brevet.

b. Le système du premier déposant.

— Le droit au brevet appartient à l’inventeur premier déposant. Article L611-6 du CPI. Le droit au titre de propriété industrielle appartient à l’inventeur ou à son ayant cause. Si plusieurs personnes ont réalisé l’invention, indépendamment de l’autre, le droit au titre de propriété industrielle appartient à celle qui justifie de la date de dépôt la plus ancienne.

Ce n’est pas forcément le premier inventeur, mais le premier déposant. Si un tiers prouve qu’il a réalisé l’invention antérieurement au dépôt du brevet, il ne peut pas revendiquer le brevet.

— Notre droit va dissocier le droit moral, du droit patrimonial.

– Le droit à la qualité d’auteur de l’invention appartient à l’inventeur et est indissolublement lié à la personnalité de l’inventeur.

– Le droit au brevet peut être attribué à une autre personne que l’auteur de l’invention car l’auteur peut céder son invention à un tiers qui sera habilité à déposer la demande de brevet alors qu’il n’est pas l’inventeur. L’auteur de l’invention lui aura cédé son droit de brevet envisagé comme un droit patrimonial. Ex : cession à une personne morale du droit de déposer.

— S’il y a deux inventeurs successifs de la même invention dans le domaine de l’invention, si le deuxième déposant apporte la preuve de l’antériorité de l’invention, il n’est pas dépourvu de toute prérogative. Il n’a pas droit au brevet mais pourra invoquer un droit de possession personnelle antérieur à l’invention qui lui permettra d’exploiter l’invention sans être contrefacteur du titulaire du brevet. La maîtrise de l’invention par l’inventeur peut être prouvée par des enveloppes Soleau. Ces enveloppes donnent une date certaine à l’invention par le système de la perforation. Si un tiers indépendant de l’inventeur aura déposé la demande de brevet avant l’inventeur, ce droit de possession pourra être invoqué par ce système.

En revanche, si celui qui va déposer la demande de brevet l’a fait en fraude des droits de l’inventeur ou en violation d’une obligation contractuelle, l’inventeur légitime du droit au brevet n’est pas démuni et peut exercer une action en revendication.

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2. Les inventions réalisées en exécution d’un contrat.

Il faut distinguer entre les inventions de commande et les inventions de salariés ou d’employés.

— Les inventions réalisées dans le cadre de recherche ou de collaboration technique.

C’est le régime de la liberté contractuelle qui s’applique. Il faut distinguer selon que le contrat :

– Est muet : l’exécution du contrat consistera pour le chercheur à effectuer les travaux et à l’issu du contrat, à remettre au créancier, les résultats de ces travaux. Le créancier aura la maîtrise des résultats et donc en disposera librement. Il pourra déposer des demandes de brevets.

– Si le droit au brevet n’est pas lié à la qualité d’auteur de l’invention, le contrat de commande ou de collaboration scientifique pourra stipuler par une clause expresse un droit contractuel au brevet à l’un ou l’autre des partenaires contractuels. Il faut une stipulation contractuelle pour déroger au principe.

Ex : le stagiaire n’est pas un salarié et donc la relation qu’il y a entre l’entreprise et lui est une relation qui est d’une autre nature.

— Les inventions de salariés ou d’employé : pendant longtemps le droit français ne connaissait aucune réglementation régulière et la Jurisprudence avait distingué 3 cas de figure :

– Les inventions faites par les employés en exécution de travaux de recherche confié dans l’entreprise = invention de service ou d’entreprise. Elles appartenaient à l’employeur qui pouvait verser un intéressement.

– Les inventions faites par les salariés en dehors de leur mission d’étude et de recherche. On distinguait entre :

o Les inventions mixtes communes au salarié et à l’employeur. Le salarié n’était pas payé pour faire des inventions mais profitait de l’entreprise pour faire des inventions.

o Les inventions libres ou personnelles étaient faites par le salarié qui n’était pas chargé de la mission d’invention et sans utiliser les moyens de l’entreprise. L’inventeur est salarié d’une entreprise et réalise une invention étrangère à l’entreprise et donc n’est pas faite dans le cadre du contrat de travail.

La loi de 1978 est venue introduire un régime légal des inventions des salariés. Ce régime figure aux articles L611-6 à L611-9.

a. Le domaine d’application du régime légal.

Le régime légal s’applique aux inventions conçues après la date d’EV du régime légal à savoir 1979. C’est la date de réalisation de l’invention qui doit être prise en compte.

Le départ du salarié est sans incidence sur l’invention. L’invention doit simplement avoir été créée au cours du contrat de travail pour bénéficier du régime légal.

La loi applicable au contrat de travail détermine l’application du régime légal.

Les personnes qui bénéficient du Régime Légal.

Ce sont tous les salariés du secteur privé. Dès lors qu’on est en dehors d’un contrat de travail, le régime légal ne s’applique pas. Ex : le stagiaire.

Article L611-7 CPI. Le Régime Légal s’applique également aux inventeurs du SP.

b. Le régime.

C’est un régime supplétif qui s’applique à défaut de stipulations contractuelles plus favorables au salarié susceptible de figurer dans une convention collective ou un accord collectif.

Article L611-7 CPI : la loi va distinguer entre :

– Les inventions de mission. Si l’inventeur est un salarié, les inventions faites par le salarié dans l’exécution soit d’un contrat de travail comportant une mission inventive qui correspond à ses fonctions effectives, soit d’étude et de recherche qui lui sont explicitement confiées, appartiennent à l’employeur. C’est l’invention qui appartient à l’employeur et non le brevet. Les conditions dans lesquelles le salarié auteur d’une invention bénéficie d’une rémunération supplémentaire sont déterminées par les accords, les conventions collectifs et les accords individuels de travail. Jusqu’en 1997, la rémunération supplémentaire correspondait à une gratification qui pouvait correspondre à 2 ou 3 mois de salaire. CA Paris 19 décembre 1997. Depuis lors, une série de décision est venue confirmer une nouvelle approche de rémunération. Il y a un texte qui prévoit le mode de calcul des agents publics. La rémunération est de 50% du prix des redevances perçues par l’établissement public.

– Les inventions hors mission. Toutes les autres inventions appartiennent au salarié. Il faut faire une distinction entre :

o Les inventions attribuables à l’entreprise. Toutefois, lorsqu’une invention est faite par un salarié soit dans le cours de l’exécution de ses fonctions soit dans le domaine des activités de l’entreprise, soit par la connaissance ou l’utilisation des techniques ou de moyens spécifique à l’entreprise ou de données procurées par elle, l’employeur a le droit, dans des conditions et délais fixés par décret en CE, de se faire attribuer la propriété ou la jouissance de tout ou partie des droits attachés au brevet protégeant l’invention de son salarié. Le législateur a attribué au profit de l’employeur un droit de préemption en propriété ou en jouissance. L’exercice de ce droit de préemption est assorti de contrepartie financières : le salarié doit en obtenir le juste prix qui a défaut d’accord entre les parties est fixé par la commission de conciliation instituée par l’article L615-1.

o Les inventions non attribuables à l’entreprise : l’employeur ne peut pas exercer de droit de préemption et le salarié en dispose librement.

o Le salarié auteur d’une invention en informe son employeur qui en accuse réception selon les modalités fixées par décret.

c. Les règles de procédure.

Le salarié doit informer l’employeur. La déclaration doit contenir les informations nécessaires pour permettre à l’employeur d’effectuer le classement de l’invention. Le salarié doit procéder au classement de son invention. Article R611 et suivants.

L’employeur dispose d’un délai de 2 mois pour donner son accord au salarié ou lui donner son propre classement. Dans le même temps, l’employeur dispose de 4 mois pour exercer le droit de préemption sur les inventions hors mission classées attribuables à l’entreprise.

Le règlement prévoit l’obligation pour chaque partie de s’abstenir de toute divulgation de l’invention aussi longtemps qu’une divergence demeure entre elles sur le classement de celles-ci.

d. Le contentieux des inventions de salariés.

Article L615-21 institue une commission de conciliation en cas de conflit à propos du classement ou du juste prix. Cette commission est composée :

– Un président.

– Deux assesseurs que le président désigne sur une liste des personnes compétentes. Il y a un représentant des organisations des employeurs et un représentant proposé par les organisations de salarié.

La commission est placée auprès le l’INPI et est saisie par une demande déposée au secrétariat. Le secrétariat de la commission invite l’autre partie à faire des observations écrites. Les parties sont convoquées pour une réunion préliminaire de conciliation. La commission dans les 6 mois après cette audience va formuler une proposition de conciliation sur le classement, le juste prix ou la rémunération supplémentaire.

La proposition de conciliation vaut accord des parties si dans le mois qui suit sa notification aucune des parties n’a saisi le TGI. A défaut d’accord des parties seul le TGI pourra trancher le conflit.

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B. Où effectuer la demande de brevet ?

Elle doit être déposée à l’INPI ou à la préfecture. Le dépôt peut être effectué par courrier ou par voie électronique.

C. Quand ?

Seul le déposant décide du moment. Il faudra tenir compte du droit de priorité unioniste. Il faudra également tenir compte de la priorité interne prévue par l’art L612-3 : lorsque deux demandes de brevet sont déposées par son inventeur dans un délai de 2 mois, le demandeur peut requérir la date de la première demande.

D. Sur quoi effectuer une demande de brevet ?

1) L’objet la demande.

La demande de brevet doit satisfaire à l’exigence de l’unité d’invention. Article L612-4 : la demande de brevet ne peut concerner qu’une invention ou une pluralité d’invention afin qu’elles ne forment qu’un seul concept inventif général.

Il y a deux raisons à cette exigence :

– Une raison fiscale.

– Lorsqu’on effectue une demande de brevet, l’invention est classée dans la classification internationale des brevets. Cela va permettre d’effectuer des recherches quant à l’antériorité.

2. La forme de la demande.

La demande de brevet se présente sous la forme de dossiers qui comportent différentes pièces :

– La requête en délivrance = document sur lequel doivent figurer certaines mentions. Ex : titre de l’invention, désignation de l’inventeur, les noms et prénoms du déposant, le nom du mandataire. Pour bénéficier de la priorité unioniste, il faut l’indiquer dans la requête.

– La description de la demande de brevet. Article L612-2 CPI : la description de l’invention est commune à tous les régimes. La description a deux missions et va servir de support pour l’interprétation des revendications. La description ne définit pas la portée du brevet mais a pour seule mission de divulguer. Lorsque se pose devant le juge la portée des revendications, le juge va se référer à la description pour interpréter les revendications. La sanction de l’insuffisance de description est la nullité de brevet.

– Les revendications : Article L612-2 dit « que le demandeur doit produire une description et une ou plusieurs revendications ». Article L612-6 vient préciser que les revendications définissent l’objet de la protection demandée, elles doivent être claires et concises et se fonder sur la description. Il s’agit de protéger l’immatérielle. Le cadre juridique n’est plus que les revendications. Ce qui est revendiqué mais qui n’est pas écrit n’est pas protégé. La portée du brevet doit être interprétée à la lumière de la description. C’est la loi de 1938 qui a introduit le système des revendications : elles ne sont pas intangibles. Les revendications peuvent être modifiées après la délivrance d’un brevet lorsqu’il fait l’objet d’une décision d’annulation partielle. Le titulaire du brevet devra procéder à une nouvelle rédaction des revendications. Les revendications doivent être rédigées avec grand soin et doivent comporter des mentions conformément à l’article R612-7 CPI : chaque revendication doit comporter :

o Un préambule mentionnant la désignation de l’objet de l’invention et les caractéristiques techniques nécessaires à la définition des éléments revendiqués mais qui combinées entres elles font parties de l’état de la technique.

o Une partie caractérisante exposant les caractéristiques techniques, qui en liaison avec les caractéristiques prévues avant, sont celles pour laquelle la protection est recherchée. Une demande de brevet peut contenir plusieurs revendications indépendantes si l’objet de la demande peut être couverte par une seule revendication. Article L612-6 dit que les revendications délimitent l’objet de la protection demandée.

– L’article L613-2 évoque les dessins dont la présence est parfois nécessaire pour la compréhension de l’invention. La description et les dessins servent à interpréter les revendications.

– L’abrégé est prévu à l’article R612-20 CPI : c’est un résumé de la description de l’invention et est exclusivement établi à des fin d’information technique. Il ne peut être pris en considération à d’autres fins et il est publié au bulletin officiel de la propriété industrielle.

– La déclaration de priorité : le déposant d’une demande de brevet qui souhaite se prévaloir de la priorité d’un dépôt antérieur est tenu de produire, lors du dépôt de sa demande, une déclaration de priorité et une copie de la demande antérieure qui fonde cette priorité unioniste. Article L612-7.

– Le paiement de redevance : tout demande de dépôt de brevet qui doit être acquitté dans un délai de un mois à compter de la date de la remise des pièces. Article R612-5 CPI.

– Les langues : il y a trois langues officielles. Lorsqu’un brevet est délivré et entre en phase nationale, il doit être traduit dans la langue officielle du pays désigné. En principe, la description et la revendication doivent être rédigées en langue française mais un dépôt de brevet dans l’ordre français peut être effectué en langue étrangère lorsqu’il existe un accord de réciprocité avec le pays déposant. Une traduction dans un délai de 3 mois devra être faite par le demandeur. Article R612-2.

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