La révision constitutionnelle de 2008 a renforcé le rôle du Parlement en précisant ses fonctions dans l’article 24, alinéa 1, en lui attribuant trois missions fondamentales, dont deux nouvelles.
1. Le vote de la loi : une fonction classique mais centrale : Le vote des lois est la mission traditionnelle du Parlement, qui s’exerce dans le cadre d’une procédure législative bicamérale impliquant l’Assemblée nationale et le Sénat.
Exemple récent : L’adoption de lois clés, comme les lois relatives à la réforme des retraites en 2023, illustre le rôle prépondérant du Parlement dans le vote des lois ayant un impact national majeur.
2. Le contrôle de l’action gouvernementale : une fonction renforcée : Le contrôle parlementaire de l’action du gouvernement est une prérogative ancienne, mais la révision de 2008 a élargi les moyens mis à la disposition du Parlement pour exercer cette fonction.
Instruments de contrôle :
3. L’évaluation des politiques publiques : une nouvelle mission : La révision de 2008 a introduit cette mission, qui marque une évolution significative dans le rôle du Parlement.
Objectifs :
Moyens d’évaluation :
La fonction législative en France, encadrée par la Constitution de 1958, repose sur une distinction claire entre le domaine de la loi et celui du règlement. Cette répartition, innovante par rapport aux régimes antérieurs, est destinée à rationaliser la production normative et à clarifier les compétences respectives du Parlement et du gouvernement.
L’article 34 de la Constitution définit explicitement le domaine de la loi, en le divisant en deux grandes catégories : les matières où la loi fixe les règles et celles où elle détermine les principes fondamentaux.
1. Les domaines où la loi fixe les règles
Ces matières incluent les aspects les plus fondamentaux de la vie publique et des droits individuels, notamment :
2. Les domaines où la loi détermine les principes fondamentaux
Ces principes concernent des secteurs stratégiques :
Les lois de programmation, introduites en 2008, permettent également de fixer des objectifs pluriannuels, particulièrement dans les domaines militaire, agricole ou budgétaire.
L’article 37 établit un principe de subsidiarité : tout ce qui ne relève pas du domaine de la loi appartient au domaine réglementaire. Ce domaine est à la discrétion du gouvernement et concerne :
La pratique constitutionnelle a conduit à un élargissement progressif du domaine de la loi, par des mécanismes directs et indirects.
Le Conseil constitutionnel a progressivement assimilé les règles aux principes fondamentaux définis à l’article 34. Cette interprétation élargie permet au législateur d’intervenir sur des domaines initialement dévolus au règlement.
Par tolérance, le gouvernement peut volontairement laisser des dispositions réglementaires être intégrées dans une loi. Cela s’explique par des raisons politiques ou techniques.
Dans certains cas, le législateur omet de légiférer sur des questions relevant de sa compétence. Le Conseil constitutionnel sanctionne alors ce qu’il considère comme une incompétence négative, obligeant le Parlement à intervenir sur ces sujets.
La Constitution prévoit des mécanismes pour protéger le domaine de la loi ou le réorganiser lorsque cela s’avère nécessaire.
À tout moment de la procédure législative, le gouvernement peut invoquer l’irrecevabilité d’un projet de loi ou d’un amendement qui empiète sur le domaine réglementaire. En cas de désaccord sur cette irrecevabilité, le Conseil constitutionnel est chargé de trancher.
Cependant, cette procédure est peu utilisée depuis 1979, reflétant une tendance à tolérer l’expansion du domaine législatif.
L’article 37 alinéa 2 permet au gouvernement de saisir le Conseil constitutionnel pour déclasser une disposition législative devenue obsolète ou qui relève désormais du domaine réglementaire. Cette procédure, bien que rarement utilisée, vise à maintenir une répartition cohérente des compétences.
Conclusion : La fonction législative en France repose sur une distinction fondamentale entre le domaine de la loi et celui du règlement, introduite par la Constitution de 1958. Bien que cette répartition vise à rationaliser l’action normative, elle est régulièrement modifiée et étendue par la pratique parlementaire et la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Ces mécanismes garantissent une certaine souplesse dans l’exercice des compétences législatives, tout en permettant de préserver l’équilibre entre les pouvoirs exécutif et législatif.
La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a modifié beaucoup d’article concernant la procédure législative ordinaire. (Remarque : le cours ne traitera que de la procédure législative ordinaire)
L’initiative législative est définie par l’article 39 de la Constitution, profondément modifié lors de la révision constitutionnelle de 2008. Cette révision a introduit des dispositions précises pour clarifier les étapes de l’élaboration des lois et renforcer la rigueur de leur présentation.
Article 39, alinéa 1 : L’initiative des projets de loi appartient au Premier ministre. Une fois cette initiative prise, plusieurs étapes essentielles doivent être respectées :
Exceptions au principe de dépôt :
Certains projets de loi doivent impérativement être déposés en première lecture devant une assemblée déterminée :
Règles de présentation :
L’alinéa 3 de l’article 39 introduit pour la première fois des normes de présentation des projets de loi, renforcées par la loi organique du 12 avril 2009. Ces règles visent à garantir la clarté et la pertinence des propositions législatives. Ainsi, tout projet de loi doit obligatoirement :
En cas de non-respect de ces exigences, le projet de loi peut être déclaré irrecevable.
Article 39, alinéa 1 : L’initiative des propositions de loi appartient à tout membre du Parlement, qu’il s’agisse d’un député ou d’un sénateur. Ces textes, à l’inverse des projets de loi, ne sont pas issus du gouvernement mais de l’initiative parlementaire.
Rôle du Conseil d’État :
Depuis la révision constitutionnelle de 2008, l’alinéa 4 prévoit que le président de l’assemblée saisie peut soumettre une proposition de loi au Conseil d’État pour avis. Toutefois :
Exemple récent : En 2022, une proposition de loi visant à encadrer l’influence des plateformes numériques a illustré ce dispositif. Le Conseil d’État a été consulté pour examiner l’impact juridique et technique des mesures envisagées, permettant une discussion parlementaire mieux éclairée.
En résumé, l’initiative de la loi repose sur une distinction claire entre projets de loi, émanant du gouvernement, et propositions de loi, issues des parlementaires, toutes deux soumises à des règles rigoureuses pour assurer leur efficacité et leur pertinence.
Une fois le projet ou la proposition transmise sur le bureau d’une Assemblée, le président de l’Assemblée désigne une commission permanente chargée de l’examiner. Le processus législatif français débute par un examen en commission, suivi d’une inscription à l’ordre du jour et de débats structurés. La navette parlementaire entre l’Assemblée nationale et le Sénat peut être accélérée via des procédures spécifiques, renforçant le rôle du gouvernement. La révision constitutionnelle de 2008 a équilibré les pouvoirs, mais l’Assemblée nationale conserve une prééminence dans le cadre d’un bicaméralisme inégalitaire.
En résumé, voici les étapes et caractéristiques du processus législatif en France
Étape clé | Détails | Particularités |
---|---|---|
Examen en commission | Analyse initiale et amendements du texte par une commission permanente. | Depuis 2008, le gouvernement peut défendre sa version en cas de modifications majeures. |
Ordre du jour | Organisation des débats selon un calendrier révisé en 2008. | Répartition équilibrée : 2 semaines pour le gouvernement, 1 semaine pour les assemblées, et 1 semaine pour le contrôle. |
Discussion générale | Présentation et débat sur le texte avec possibilité d’amendements. | Délais de 6 semaines avant la première discussion et 4 semaines entre les lectures des assemblées. |
Discussion article par article | Débat détaillé sur chaque article et amendement. | Depuis 2008, le texte issu de la commission devient la référence, sauf exceptions (lois de finances, sécurité sociale). |
Navette parlementaire | Aller-retour du texte entre les deux assemblées pour consensus. | Le gouvernement peut accélérer la procédure via l’article 45 (procédure accélérée). |
Adoption définitive | Possible recours à une Commission mixte paritaire en cas de désaccord persistant. | L’Assemblée nationale peut statuer seule si la CMP échoue (article 45, alinéa 4). |
Prédominance gouvernementale | Utilisation d’outils comme le vote bloqué ou la procédure accélérée pour limiter les oppositions. | Le gouvernement conserve une forte influence sur le processus législatif. |
Obligation constitutionnelle :
Chaque projet ou proposition de loi doit d’abord être examiné par une commission permanente désignée par le président de l’assemblée concernée. Cette étape est essentielle pour analyser le texte et proposer des modifications.
Déroulement de l’examen :
L’ordre du jour, c’est-à-dire le calendrier des débats parlementaires, a été réaménagé à plusieurs reprises, avec des modifications majeures introduites en 2008.
Délais imposés : Depuis 2008, de nouveaux délais ont été introduits pour structurer les débats :
Exceptions : Ces délais ne s’appliquent pas :
Déroulement des débats :
Prise de parole individuelle : Chaque parlementaire peut intervenir individuellement. Depuis la Ve République, cette intervention est régulée pour éviter les abus :
Depuis la révision constitutionnelle de 2008, le cadre des discussions article par article a été repensé pour renforcer le rôle des commissions parlementaires et structurer les débats législatifs.
Texte de référence pour la discussion (article 42, alinéa 1)
Désormais, le texte débattu en séance est celui élaboré en commission, sauf exceptions. Avant 2008, c’était uniquement le texte gouvernemental qui faisait l’objet des discussions, sans tenir compte des modifications proposées par les commissions.
Exceptions :
Le droit d’amendement (article 44, alinéa 1)
Le droit d’amendement est une prérogative essentielle, reconnue aussi bien au gouvernement qu’aux parlementaires. Ce droit s’exerce :
Règles de recevabilité des amendements (article 45, alinéa 1) : Les amendements doivent respecter certaines conditions, précisées dans une décision du Conseil constitutionnel du 19 janvier 2006 et actualisées par la révision de 2008 :
Les irrecevabilités soulevées par le gouvernement
Le gouvernement dispose de plusieurs outils pour contester la recevabilité des amendements :
Déroulement de la discussion article par article
Examen des articles et des amendements : Chaque article est discuté en détail, accompagné des amendements et sous-amendements proposés. Un vote est organisé pour chaque amendement. Plus il y a d’amendements, plus les débats s’allongent.
Vote sur les articles : Après l’examen des amendements, un vote est organisé pour adopter ou rejeter chaque article.
Vote d’ensemble : Une fois tous les articles examinés, un vote global est organisé pour approuver ou rejeter le texte dans son intégralité.
Limitation des débats : réforme de 2009. Depuis une réforme du règlement intérieur de l’Assemblée nationale en 2009, il est possible de fixer un temps maximal pour les discussions. Cette mesure vise à éviter les débats prolongés ou obstructions parlementaires, souvent utilisées pour retarder l’adoption d’un texte.
Une fois que la première assemblée saisie du texte l’a adopté ou rejeté commence l’étape suivante :
La procédure législative française repose sur le bicaméralisme, nécessitant l’approbation d’un texte par l’Assemblée nationale et le Sénat. Ce processus de navette parlementaire peut s’avérer long et complexe, surtout en cas de désaccord entre les deux assemblées.
Principe général : Après l’adoption d’un texte par la première assemblée, celui-ci est transmis à la seconde assemblée pour une lecture similaire.
Les étapes de la navette : Lors des lectures successives, seules les dispositions encore en discussion peuvent faire l’objet d’amendements ou de débats.
Exception : la procédure accélérée (article 45, alinéa 2)
Commission mixte paritaire (CMP, article 45, alinéa 2)
En cas de désaccord persistant après deux lectures dans chaque assemblée, une commission mixte paritaire (CMP) peut être convoquée pour trouver un compromis.
Résultat de la CMP :
Bicaméralisme inégalitaire et cas spécifiques
Maintien de la domination gouvernementale
Malgré les ajustements apportés par la révision de 2008, le gouvernement conserve une maîtrise importante de la procédure législative :
Ces outils, conjugués au rôle prépondérant de l’Assemblée nationale, limitent les capacités des assemblées à s’opposer durablement à l’exécutif.
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