Comment le Parlement vote et discute la loi ?

La révision constitutionnelle de 2008 a renforcé le rôle du Parlement en précisant ses fonctions dans l’article 24, alinéa 1, en lui attribuant trois missions fondamentales, dont deux nouvelles.

1. Le vote de la loi : une fonction classique mais centrale :  Le vote des lois est la mission traditionnelle du Parlement, qui s’exerce dans le cadre d’une procédure législative bicamérale impliquant l’Assemblée nationale et le Sénat.

  • Cette fonction inclut :
    • L’examen des projets et propositions de loi, article par article.
    • L’adoption ou le rejet des amendements et du texte final.
    • La participation à la navette parlementaire en cas de désaccord entre les deux chambres.

Exemple récent : L’adoption de lois clés, comme les lois relatives à la réforme des retraites en 2023, illustre le rôle prépondérant du Parlement dans le vote des lois ayant un impact national majeur.

2. Le contrôle de l’action gouvernementale : une fonction renforcée : Le contrôle parlementaire de l’action du gouvernement est une prérogative ancienne, mais la révision de 2008 a élargi les moyens mis à la disposition du Parlement pour exercer cette fonction.

Instruments de contrôle :

  • Questions au gouvernement : Ces séances permettent aux parlementaires d’interroger directement les membres du gouvernement sur leur politique et leur gestion.
  • Commissions d’enquête : Utilisées pour approfondir certains sujets d’intérêt public ou examiner des dysfonctionnements éventuels.
  • Motions de censure : L’Assemblée nationale peut engager la responsabilité du gouvernement en votant une motion de censure (ce fut le cas, fin 2024)
  • Examen des rapports : Le Parlement reçoit des rapports périodiques du gouvernement sur l’application des lois et la gestion des crises (par exemple, la gestion de la pandémie de COVID-19 en 2020).

3. L’évaluation des politiques publiques : une nouvelle mission : La révision de 2008 a introduit cette mission, qui marque une évolution significative dans le rôle du Parlement.

Objectifs :

  • Mesurer l’efficacité et l’impact des politiques publiques mises en œuvre par le gouvernement.
  • Assurer une meilleure allocation des ressources en identifiant les politiques inefficaces ou coûteuses.
  • Renforcer la transparence et la reddition de comptes vis-à-vis des citoyens.

Moyens d’évaluation :

  • Rapports parlementaires : Les commissions parlementaires ou des missions temporaires sont chargées de produire des rapports d’évaluation.
  • Auditions publiques : Organisées pour entendre des experts, des membres du gouvernement ou des acteurs concernés par une politique publique spécifique.
  • Semaine dédiée à l’évaluation : Une semaine par mois est réservée à l’évaluation des politiques publiques, conformément aux dispositions de l’article 48.

 

Chapitre 1. La fonction législative.

 

La fonction législative en France, encadrée par la Constitution de 1958, repose sur une distinction claire entre le domaine de la loi et celui du règlement. Cette répartition, innovante par rapport aux régimes antérieurs, est destinée à rationaliser la production normative et à clarifier les compétences respectives du Parlement et du gouvernement.

&1. La délimitation du domaine de la loi

A) Les matières législatives de l’article 34

L’article 34 de la Constitution définit explicitement le domaine de la loi, en le divisant en deux grandes catégories : les matières où la loi fixe les règles et celles où elle détermine les principes fondamentaux.

1. Les domaines où la loi fixe les règles

Ces matières incluent les aspects les plus fondamentaux de la vie publique et des droits individuels, notamment :

  • Droits civiques et libertés publiques : Nationalité, état et capacité des personnes, détermination des délits et crimes, procédure pénale, amnistie.
  • Organisation judiciaire : Création de nouveaux ordres de juridiction, statut des magistrats.
  • Domaine fiscal et économique : Statut des fonctionnaires, création d’établissements publics, nationalisations et privatisations.
  • Pluralisme et liberté des médias : Introduit par la révision de 2008 pour garantir l’indépendance et la diversité de l’information.
  • Représentation des Français à l’étranger : Depuis 2012, 11 députés et 12 sénateurs représentent les Français résidant hors de France.

2. Les domaines où la loi détermine les principes fondamentaux

Ces principes concernent des secteurs stratégiques :

  • Défense nationale, enseignement et décentralisation.
  • Droits sociaux et environnementaux : Droits syndicaux, sécurité sociale, préservation de l’environnement (introduit en 2008).
  • Propriété et obligations civiles et commerciales.

Les lois de programmation, introduites en 2008, permettent également de fixer des objectifs pluriannuels, particulièrement dans les domaines militaire, agricole ou budgétaire.

B) Les matières réglementaires de l’article 37

L’article 37 établit un principe de subsidiarité : tout ce qui ne relève pas du domaine de la loi appartient au domaine réglementaire. Ce domaine est à la discrétion du gouvernement et concerne :

  • Les règlements autonomes, distincts des règlements d’application des lois.
  • Des matières plus techniques ou spécifiques ne nécessitant pas l’intervention du législateur.

&2. L’extension du domaine de la loi par la jurisprudence du Conseil constitutionnel

La pratique constitutionnelle a conduit à un élargissement progressif du domaine de la loi, par des mécanismes directs et indirects.

A) L’élargissement direct

Le Conseil constitutionnel a progressivement assimilé les règles aux principes fondamentaux définis à l’article 34. Cette interprétation élargie permet au législateur d’intervenir sur des domaines initialement dévolus au règlement.

Exemples d’élargissements jurisprudentiels
  • Article 1 de la Constitution : L’égal accès des citoyens aux fonctions publiques est reconnu comme relevant du domaine législatif.
  • Article 4 alinéa 3 : Tout ce qui touche au pluralisme politique relève également de la loi.
  • Article 72 alinéa 1 : La création des collectivités territoriales est expressément attribuée au législateur.
Possibilité pour le législateur d’intervenir dans le domaine réglementaire

Par tolérance, le gouvernement peut volontairement laisser des dispositions réglementaires être intégrées dans une loi. Cela s’explique par des raisons politiques ou techniques.

B) L’élargissement indirect

Dans certains cas, le législateur omet de légiférer sur des questions relevant de sa compétence. Le Conseil constitutionnel sanctionne alors ce qu’il considère comme une incompétence négative, obligeant le Parlement à intervenir sur ces sujets.

&3. La protection du domaine de la loi

La Constitution prévoit des mécanismes pour protéger le domaine de la loi ou le réorganiser lorsque cela s’avère nécessaire.

A) L’irrecevabilité de l’article 41

À tout moment de la procédure législative, le gouvernement peut invoquer l’irrecevabilité d’un projet de loi ou d’un amendement qui empiète sur le domaine réglementaire. En cas de désaccord sur cette irrecevabilité, le Conseil constitutionnel est chargé de trancher.
Cependant, cette procédure est peu utilisée depuis 1979, reflétant une tendance à tolérer l’expansion du domaine législatif.

B) La procédure de déclassement de l’article 37 alinéa 2

L’article 37 alinéa 2 permet au gouvernement de saisir le Conseil constitutionnel pour déclasser une disposition législative devenue obsolète ou qui relève désormais du domaine réglementaire. Cette procédure, bien que rarement utilisée, vise à maintenir une répartition cohérente des compétences.

Conclusion : La fonction législative en France repose sur une distinction fondamentale entre le domaine de la loi et celui du règlement, introduite par la Constitution de 1958. Bien que cette répartition vise à rationaliser l’action normative, elle est régulièrement modifiée et étendue par la pratique parlementaire et la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Ces mécanismes garantissent une certaine souplesse dans l’exercice des compétences législatives, tout en permettant de préserver l’équilibre entre les pouvoirs exécutif et législatif.

 

Chapitre 2. Une procédure législative rationalisée.

La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a modifié beaucoup d’article concernant la procédure législative ordinaire. (Remarque : le cours ne traitera que de la procédure législative ordinaire)

Section 1. L’initiative de la loi

L’initiative législative est définie par l’article 39 de la Constitution, profondément modifié lors de la révision constitutionnelle de 2008. Cette révision a introduit des dispositions précises pour clarifier les étapes de l’élaboration des lois et renforcer la rigueur de leur présentation.

A) Les projets de loi

Article 39, alinéa 1 : L’initiative des projets de loi appartient au Premier ministre. Une fois cette initiative prise, plusieurs étapes essentielles doivent être respectées :

  • Le projet de loi doit être délibéré en Conseil des ministres après avoir reçu l’avis obligatoire du Conseil d’État (alinéa 2).
  • Une fois approuvé en Conseil des ministres, le projet est déposé sur le bureau de l’une des deux assemblées (Assemblée nationale ou Sénat). Ce choix revient au Premier ministre, sauf dans les cas spécifiques prévus par l’article 39.

Exceptions au principe de dépôt :
Certains projets de loi doivent impérativement être déposés en première lecture devant une assemblée déterminée :

  • Loi de finances et loi de financement de la sécurité sociale : dépôt obligatoire devant l’Assemblée nationale.
  • Loi concernant l’organisation des collectivités territoriales : dépôt obligatoire devant le Sénat.

Règles de présentation :
L’alinéa 3 de l’article 39 introduit pour la première fois des normes de présentation des projets de loi, renforcées par la loi organique du 12 avril 2009. Ces règles visent à garantir la clarté et la pertinence des propositions législatives. Ainsi, tout projet de loi doit obligatoirement :

  • Évaluer la législation existante, en identifiant ses lacunes ou insuffisances.
  • Définir l’objectif poursuivi par la réforme proposée.
  • Analyser les différentes solutions possibles, en les comparant de manière argumentée.
  • Anticiper les conséquences prévisibles de l’application de la loi, tant sur le plan juridique que socio-économique.

En cas de non-respect de ces exigences, le projet de loi peut être déclaré irrecevable.

B) Les propositions de loi

Article 39, alinéa 1 : L’initiative des propositions de loi appartient à tout membre du Parlement, qu’il s’agisse d’un député ou d’un sénateur. Ces textes, à l’inverse des projets de loi, ne sont pas issus du gouvernement mais de l’initiative parlementaire.

Rôle du Conseil d’État :
Depuis la révision constitutionnelle de 2008, l’alinéa 4 prévoit que le président de l’assemblée saisie peut soumettre une proposition de loi au Conseil d’État pour avis. Toutefois :

  • Le parlementaire à l’origine de la proposition peut s’opposer à cette saisine.
  • Quoi qu’il en soit, si l’avis est sollicité, celui-ci doit intervenir avant l’examen en commission.

Exemple récent : En 2022, une proposition de loi visant à encadrer l’influence des plateformes numériques a illustré ce dispositif. Le Conseil d’État a été consulté pour examiner l’impact juridique et technique des mesures envisagées, permettant une discussion parlementaire mieux éclairée.

En résumé, l’initiative de la loi repose sur une distinction claire entre projets de loi, émanant du gouvernement, et propositions de loi, issues des parlementaires, toutes deux soumises à des règles rigoureuses pour assurer leur efficacité et leur pertinence.

 

Section 2. La discussion et le vote de la loi

Une fois le projet ou la proposition transmise sur le bureau d’une Assemblée, le président de l’Assemblée désigne une commission permanente chargée de l’examiner. Le processus législatif français débute par un examen en commission, suivi d’une inscription à l’ordre du jour et de débats structurés. La navette parlementaire entre l’Assemblée nationale et le Sénat peut être accélérée via des procédures spécifiques, renforçant le rôle du gouvernement. La révision constitutionnelle de 2008 a équilibré les pouvoirs, mais l’Assemblée nationale conserve une prééminence dans le cadre d’un bicaméralisme inégalitaire.

En résumé, voici les étapes et caractéristiques du processus législatif en France

Étape clé Détails Particularités
Examen en commission Analyse initiale et amendements du texte par une commission permanente. Depuis 2008, le gouvernement peut défendre sa version en cas de modifications majeures.
Ordre du jour Organisation des débats selon un calendrier révisé en 2008. Répartition équilibrée : 2 semaines pour le gouvernement, 1 semaine pour les assemblées, et 1 semaine pour le contrôle.
Discussion générale Présentation et débat sur le texte avec possibilité d’amendements. Délais de 6 semaines avant la première discussion et 4 semaines entre les lectures des assemblées.
Discussion article par article Débat détaillé sur chaque article et amendement. Depuis 2008, le texte issu de la commission devient la référence, sauf exceptions (lois de finances, sécurité sociale).
Navette parlementaire Aller-retour du texte entre les deux assemblées pour consensus. Le gouvernement peut accélérer la procédure via l’article 45 (procédure accélérée).
Adoption définitive Possible recours à une Commission mixte paritaire en cas de désaccord persistant. L’Assemblée nationale peut statuer seule si la CMP échoue (article 45, alinéa 4).
Prédominance gouvernementale Utilisation d’outils comme le vote bloqué ou la procédure accélérée pour limiter les oppositions. Le gouvernement conserve une forte influence sur le processus législatif.

&1. L’examen préalable en commission (article 43 alinéa 1)

Obligation constitutionnelle :
Chaque projet ou proposition de loi doit d’abord être examiné par une commission permanente désignée par le président de l’assemblée concernée. Cette étape est essentielle pour analyser le texte et proposer des modifications.

Déroulement de l’examen :

  • Une première réunion permet d’examiner le texte initial et d’introduire des amendements. Le texte modifié est ensuite transmis au gouvernement et aux parlementaires.
  • Une seconde réunion peut être convoquée pour examiner des amendements supplémentaires.
  • Depuis 2008 : si le gouvernement estime que le texte a été trop modifié, il peut venir défendre sa version devant la commission, ce qui renforce les échanges entre l’exécutif et le Parlement.

 

&2. L’inscription à l’ordre du jour

L’ordre du jour, c’est-à-dire le calendrier des débats parlementaires, a été réaménagé à plusieurs reprises, avec des modifications majeures introduites en 2008.

  • Avant 1958 : fixé par la conférence des présidents des assemblées.
  • 1958 : monopole du gouvernement sur l’ordre du jour.
  • 1995 : restauration partielle du rôle des assemblées, avec une séance par mois réservée à leurs initiatives.
  • 2008 : nouvelle répartition équilibrée. Désormais :
    • Le gouvernement contrôle deux semaines sur quatre pour inscrire en priorité les textes importants, notamment les lois de finances, les lois de financement de la sécurité sociale, et celles relatives à l’état de crise.
    • Une semaine par mois est dédiée à l’initiative des assemblées, sous la responsabilité de la conférence des présidents.
    • La dernière semaine est réservée au contrôle de l’action gouvernementale et à l’évaluation des politiques publiques.
    • Enfin, une journée par mois est fixée à l’initiative des groupes d’opposition, offrant une fenêtre démocratique pour des débats sur leurs propositions.

 

&3. La discussion générale

Délais imposés : Depuis 2008, de nouveaux délais ont été introduits pour structurer les débats :

  • Un délai minimal de six semaines doit être respecté entre le dépôt d’un texte sur le bureau d’une assemblée et le début de sa discussion.
  • Un délai de quatre semaines est requis entre l’adoption d’un texte en première lecture par une assemblée et son examen par l’autre.

Exceptions : Ces délais ne s’appliquent pas :

  • Si le gouvernement utilise la procédure accélérée prévue à l’article 45.
  • Pour les lois de finances, les lois relatives à l’état de crise, ou les lois constitutionnelles.

Déroulement des débats :

  1. Ouverture : Le président de séance appelle à l’ordre du jour le projet ou la proposition de loi.
  2. Rapport de la commission : Le rapporteur désigné présente les conclusions des travaux de la commission.
  3. Intervention du gouvernement : En cas de projet de loi, un représentant du gouvernement (souvent celui à l’origine du texte) peut prendre la parole pour en expliquer les objectifs.
  4. Amendements et motions :
    • Motion de renvoi en commission : proposée par un parlementaire pour améliorer le texte ; si adoptée, la discussion est suspendue.
    • Motion préjudicielle : invoque une non-conformité constitutionnelle ; si adoptée, le débat est suspendu.
    • Question préalable : si votée, elle entraîne la fin de la discussion et le rejet du texte (rarement utilisée).

Prise de parole individuelle : Chaque parlementaire peut intervenir individuellement. Depuis la Ve République, cette intervention est régulée pour éviter les abus :

  • Les parlementaires doivent s’inscrire à l’avance pour obtenir le droit de parole.
  • Le temps de parole est limité (en général 10 minutes par orateur) et ajusté selon le nombre d’inscrits.

 

&4. La discussion article par article.

Depuis la révision constitutionnelle de 2008, le cadre des discussions article par article a été repensé pour renforcer le rôle des commissions parlementaires et structurer les débats législatifs.

Texte de référence pour la discussion (article 42, alinéa 1)

Désormais, le texte débattu en séance est celui élaboré en commission, sauf exceptions. Avant 2008, c’était uniquement le texte gouvernemental qui faisait l’objet des discussions, sans tenir compte des modifications proposées par les commissions.

Exceptions :

  • Les projets de loi de finances.
  • Les projets de loi de financement de la sécurité sociale.
    Dans ces cas, le texte gouvernemental reste le point de départ de la discussion (article 42, alinéa 2).

Le droit d’amendement (article 44, alinéa 1)

Le droit d’amendement est une prérogative essentielle, reconnue aussi bien au gouvernement qu’aux parlementaires. Ce droit s’exerce :

  • En commission.
  • En séance publique, lors de la discussion.

Règles de recevabilité des amendements (article 45, alinéa 1) : Les amendements doivent respecter certaines conditions, précisées dans une décision du Conseil constitutionnel du 19 janvier 2006 et actualisées par la révision de 2008 :

  • Première lecture : Les amendements peuvent être proposés librement, à condition qu’ils aient un lien avec l’objet du texte déposé.
  • Lectures suivantes : Si le texte n’est pas adopté en première lecture, seuls les amendements ayant un lien direct avec les dispositions encore en discussion sont recevables. La révision de 2008 a assoupli cette exigence, permettant désormais un lien indirect pour ces amendements.

Les irrecevabilités soulevées par le gouvernement

Le gouvernement dispose de plusieurs outils pour contester la recevabilité des amendements :

  1. Irrecevabilité financière (article 40) :
    • Un amendement parlementaire ne doit pas augmenter les charges publiques ou réduire les ressources de l’État.
    • Si c’est le cas, le gouvernement peut invoquer cette disposition pour déclarer l’amendement irrecevable.
  2. Irrecevabilité législative (article 41) :
    • Si un amendement relève du domaine réglementaire (et non législatif), le gouvernement peut contester sa légitimité.
  3. Refus d’amendements non examinés en commission (article 44, alinéa 2) :
    • Le gouvernement peut rejeter tout amendement qui n’a pas été préalablement soumis à la commission permanente.

Déroulement de la discussion article par article

  1. Examen des articles et des amendements : Chaque article est discuté en détail, accompagné des amendements et sous-amendements proposés. Un vote est organisé pour chaque amendement. Plus il y a d’amendements, plus les débats s’allongent.

  2. Vote sur les articles : Après l’examen des amendements, un vote est organisé pour adopter ou rejeter chaque article.

  3. Vote d’ensemble : Une fois tous les articles examinés, un vote global est organisé pour approuver ou rejeter le texte dans son intégralité.

Limitation des débats : réforme de 2009. Depuis une réforme du règlement intérieur de l’Assemblée nationale en 2009, il est possible de fixer un temps maximal pour les discussions. Cette mesure vise à éviter les débats prolongés ou obstructions parlementaires, souvent utilisées pour retarder l’adoption d’un texte.

Une fois que la première assemblée saisie du texte l’a adopté ou rejeté commence l’étape suivante :

&5. La navette parlementaire

La procédure législative française repose sur le bicaméralisme, nécessitant l’approbation d’un texte par l’Assemblée nationale et le Sénat. Ce processus de navette parlementaire peut s’avérer long et complexe, surtout en cas de désaccord entre les deux assemblées.

 

Principe général :  Après l’adoption d’un texte par la première assemblée, celui-ci est transmis à la seconde assemblée pour une lecture similaire.

  • Si la seconde assemblée adopte le texte sans modifications, celui-ci est transmis au gouvernement, puis au président de la République pour promulgation. Cependant, cette situation est extrêmement rare.
  • Si des modifications sont apportées par la seconde assemblée, le texte retourne en seconde lecture devant la première assemblée.

Les étapes de la navette : Lors des lectures successives, seules les dispositions encore en discussion peuvent faire l’objet d’amendements ou de débats.

  • La navette se poursuit jusqu’à ce qu’un accord soit trouvé ou qu’un blocage persiste après deux lectures dans chaque assemblée.

Exception : la procédure accélérée (article 45, alinéa 2)

  • Le Premier ministre peut invoquer la procédure accélérée (anciennement procédure d’urgence avant 2008) pour réduire la navette à une seule lecture par assemblée.
  • Toutefois, cette procédure ne peut être utilisée pour une proposition de loi si les présidents des deux assemblées s’y opposent conjointement. Pour un projet de loi, il faut l’accord des conférences des présidents des deux assemblées.

&6. Le déblocage parlementaire : l’adoption définitive de la loi

 

Commission mixte paritaire (CMP, article 45, alinéa 2)
En cas de désaccord persistant après deux lectures dans chaque assemblée, une commission mixte paritaire (CMP) peut être convoquée pour trouver un compromis.

  • Composée de 14 membres (7 députés et 7 sénateurs), cette commission élabore un texte de compromis.
  • La convocation peut être initiée :
    • Par le gouvernement pour un projet de loi.
    • Par les présidents des deux assemblées, conjointement, pour une proposition de loi.

Résultat de la CMP :

  • Si un accord est trouvé, le texte est soumis à une nouvelle lecture dans chaque assemblée. L’adoption par les deux assemblées entraîne la promulgation de la loi.
  • En cas d’échec de la CMP ou de rejet du texte par l’une des assemblées, le gouvernement peut invoquer l’article 45, alinéa 4, permettant à l’Assemblée nationale de statuer seule en dernière lecture. Cette prérogative consacre la prééminence de l’Assemblée nationale dans le système législatif.

Bicaméralisme inégalitaire et cas spécifiques

  • Inégalités en procédure ordinaire : Dans les lois ordinaires, le système est marqué par une prédominance de l’Assemblée nationale. Si les deux assemblées restent en désaccord, c’est l’Assemblée nationale qui a le dernier mot.
  • Cas d’égalité :
    • Pour les lois constitutionnelles, le bicaméralisme est égalitaire, chaque assemblée ayant un poids identique.
    • Les lois organiques spécifiques au Sénat, qui concernent uniquement son fonctionnement, sont également soumises à un bicaméralisme égalitaire.

Maintien de la domination gouvernementale

Malgré les ajustements apportés par la révision de 2008, le gouvernement conserve une maîtrise importante de la procédure législative :

  • Vote bloqué (article 44, alinéa 3) : Permet d’imposer un vote unique sur tout ou partie du texte, limitant ainsi les amendements.
  • Procédure accélérée : Réduit les délais et les lectures nécessaires.

Ces outils, conjugués au rôle prépondérant de l’Assemblée nationale, limitent les capacités des assemblées à s’opposer durablement à l’exécutif.

 

Isa Germain

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