Compensation et substitution de base légale en contentieux fiscal

Compensation et substitution de base légale en contentieux fiscal ( L203 du livre des procédures fiscales LPF)

Au cours de l’instruction d’une réclamation ou d’une instance juridictionnelle, l’Administration et le contribuable disposent de même d’un droit de compensation qu’ils tiennent soit des principes généraux de la procédure contentieuse, soit des dispositions des articles L203 du livre des procédures fiscales (LPF) à L205 du LPF, corollaires en matière contentieuse, de l’article L80 du LPF concernant la procédure de rectification.

Par ailleurs, toujours au sein d’un même débat contentieux, la jurisprudence distingue entre la compensation et la substitution de base légale (cf. BOI-CTX-DG-20-40-10, § 30 et 40), qui peut être invoquée comme moyen de justifier en défense le bien-fondé d’une imposition mais ne peut en revanche servir d’unique fondement à une demande de compensation présentée au titre des articles L203 du LPF à L205 du LPF.

  • Prescriptions textuelles expresses : mécanisme de compensation : Lorsqu’un contribuable demande la décharge, la réduction ou la restitution d’une imposition quelconque, l’administration peut à tout moment de la procédure et même si le délai de répétition est expiré, opposer toutes compensations entre les dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées, au cours de l’instruction, dans l’assiette ou le calcul de l’imposition contestée.
  • Construction jurisprudentielles favorable à l’administration : la substitution de base légale en phase contentieuse : Lorsque la même matière imposable est susceptible de demeurer soumise au même impôt ou taxe non pas en vertu de la disposition législative initialement invoquée mais sur le fondement d’une autre disposition législative, et qu’à la différence des cas d’application du droit de compensation, il n’existe pas d’insuffisance ou d’omission à proprement parler, l’Administration peut néanmoins, au cours de la procédure contentieuse, invoquer la nouvelle base légale en vue de justifier le bien-fondé de l’imposition litigieuse.

§1 La compensation contentieuse

Cette technique est prévue L 203 du Libre des procédures fiscales. Il dispose que « lorsqu’un contribuable demande la décharge ou la réduction d’une imposition quelconque, l’administration peut à tout moment de la procédure et malgré l’expiration des délais de la prescription, effectuer ou demander la compensation dans la limite de l’imposition contestée entre les dégrevements reconnus justifiés et des insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l’assiette ou le calcul de l’imposition en cours de l’instruction de la demande ». Cet article permet à l’administration devant le juge de sauver des impositions qui sont contestées au contentieux valablement par un contribuable en faisant valoir que certes elles doivent être déchargées parce qu’illégales, mais que ce contribuable par ailleurs a bénéficié de sous imposition et ceci alors même qu’en raison de l’expiration du délai de reprise, ces sous impositions ne pourraient plus être rectifiées. Ex. un contribuable contestait une rectification de l’IR notifiée par l’administration au motif qu’il n’avait pas mais aurait du inclure dans son revenu imposable des avantages en nature ; le juge reconnaît que l’argument du contribuable est fondé ; le juge a admis que l’administration puisse invoquer la compensation et maintenir les redressements parce que par ailleurs le contribuable avait omis d’inclure dans l’assiette de l’IR un avoir fiscal.

Si cet article n’existait pas, l’administration aurait du décharger les impositions, le délai de reprise étant expiré, l’administration n’aurait pas pu rectifier l’erreur. L’administration peut passer outre le délai de reprise par ce biais.

Des conditions sont requises :

  • · Les surimpositions et les sous impositions doivent concerner le même contribuable et le même prélèvement fiscal (IR et IR).
  • · Elles doivent pouvoir être rattachées à la même période d’imposition.
  • · Le juge exige que les insuffisances d’impositions mises en avant par l’administration n’aient pas été connues par l’administration fiscale avant l’instruction de la demande.

La compensation n’est possible qu’à hauteur des sommes correspondant à l’impôt dont le dégrèvement aurait du être constaté.

§2 La substitution de base légale

Au stade contentieux

Cette substitution n’est pas prévue par le législateur, elle a été instituée par le juge administration qui la fait découler du mécanisme de la compensation. Le juge considère que si l’article 203 autorise l’administration à substituer un élément d’assiette à un autre pour maintenir une imposition, il est normale que l’administration puisse substituer une base légale devant le juge. L’administration prétend de maintenir une imposition dont le fondement légal est erroné et qui devrait normalement déchargée, en substituant une nouvelle base légale.

La substitution de base légale est entourée d’un certain nombre de conditions particulières :

1. Il faut que la procédure au terme de laquelle l’imposition contestée a été établie, soit régulière. Cela veut dire que par ex. si l’administration a notifié des BIC suite à une vérification de comptabilité, elle se rend compte qu’il s’agit des BNC et non des BIC, elle va pouvoir demander la substitution de base légale mais elle ne pourra pas le faire si la vérification de comptabilité au cours de laquelle ces rectifications ont été découvertes est viciée.

2. Il faut que la procédure initialement suivie et régulière par hypothèse, soit équivalente en termes de garanties à celle qui aurait due être utilisée par l’administration si elle avait dès le départ invoqué la bonne base légale.

Cela permet passer outre les délais de prescription mais ne permet pas passer outre les vices de procédure.

Ces deux mécanismes (compensation et substitution) peuvent être demandés par l’administration à tout moment de la phase contentieuse : en 1er instance, en appel. En revanche, ces mécanismes ne sont pas des moyens d’ordre public. Le juge n’est pas obligé de les soulever. L’administration ne peut pas l’invoquer en cassation.

S’agissant de la substitution de base légale, les conditions procédurales sont examinées d’office par le juge sans que le contribuable ait à le demander.