Condition de brevetabilité : l’invention

LA CONDITION DE LA BREVETABILITÉ  : UNE INVENTION

  Les lois de brevet ne donnent pas de définition positive de la notion d’invention. C’est à la fois l’action d’inventer et en même temps le procédé qui résulte de cette opération. On retrouve ces deux notions dans l’invention de brevet. L’invention qui mérite d’être protégé est celle qui résulte d’une démarche intellectuelle suffisante créant des effets dans la société.
 

Les conditions de la brevetabilité sont posées à l’article L611-10 du CPI. « Sont brevetables, les inventions nouvelles impliquant une activité inventive et susceptible d’application industrielle »

L’article 52 § 1 de la Code des Brevets Européen reprend ces conditions à l’identique.

 

Il y a quatre conditions :

  • 1)         une invention (étudié ici) 
  • 2)         susceptible d’application industrielle   
  • 3)         nouvelle      
  •  4) impliquant une activité inventive.

 

Le Cours complet de droit de la propriété intellectuelle  est divisé en plusieurs fiches :

 

Nous évoquerons ici  l’exigence de la condition d’invention.

Article L611-10 vient dans un alinéa 2 indiquer les produits d’activité intellectuelle des individus qui ne constituent pas des inventions. L’invention va être définie par la négative. Sera, à contrario, considérée comme une invention, toute production intellectuelle qui n’entre pas dans l’al 2 de l’article. « Ne sont pas considérées comme des inventions au sens du premier al notamment :

–         Les découvertes et les théories scientifiques et les méthodes informatiques

–         Les créations esthétiques « Article L610-11 al 3 : Les dispositions de l’alinéa 2 n’excluent la brevetabilité des éléments énumérés aux dites dispositions que dans la mesure où la demande de brevet ou le brevet ne concernent que l’un de ces éléments considérés en tant que tel. On va discerner l’invention à partir de cette réflexion.

 

 

 

Il apparaît à la lecture du texte qu’un certain nombre d’activités sont exclues de la catégorie.

— Les découvertes : une découverte est l’observation d’un phénomène naturel préexistant alors que l’invention est le résultat du fruit d’une action volontaire de l’homme du fait de son activité créatrice. La loi des brevets exclut les découvertes du monde de la brevetabilité.

–         Ex : La description dans un brevet de l’idée d’améliorer l’acoustique dans une salle par l’utilisation de panneaux en toile d’amiante. La mise en évidence des qualités acoustiques de l’amiante revendiquée par une demande de brevet, ne sera pas protégée par un brevet. Il faut toujours distinguer entre ce qui relève de la découverte scientifique et ce qui relève de l’invention. La revendication des qualités acoustiques de l’amiante est une découverte mais si la fabrication de panneaux avec ce matériau alors l’application de ce phénomène naturel sera une invention et pourra être brevetable.

–         Ex : un produit récolté dans la nature n’est pas brevetable mais le même produit après purification peut être breveté. Il a été jugé par la division de l’office européen le 20 juin 2001, qu’est brevetable un polypeptide ayant une activité de relaxing.

–         L’auréomycine est brevetable car ne se trouve pas dans la nature spontanément mais l’action du champignon est le résultat de l’action de l’homme.

 

Un produit naturel dans l’état où il se trouve ne peut donner naissance à un droit de brevet mais l’application que l’on peut en faire si elle remplie les autres conditions peut être considérée comme une invention. Les méthodes mathématiques ne font pas non plus l’objet de brevet.

 

— Les créations esthétiques qu’elles soient dans le domaine industriel ou non ne peuvent constituer des inventions puisqu’elles sont dépourvues d’effet technique ou utile. Cependant, parce qu’elles sont des créations intellectuelles, elles seront protégeables par des lois particulières de propriété intellectuelle par la loi sur les dessins et modèles et la loi sur les propriétés littéraires et artistiques. Le droit français ne distingue pas entre l’art pur et l’art appliqué. Les créations esthétiques en tant que telles qui sont exclues de la brevetabilité peuvent bénéficier de la double protection dessin et modèle et droit d’auteur. En revanche, lorsque la forme nouvelle d’un objet bien qu’ayant un aspect esthétique est fonctionnelle = quand la forme produit un effet technique indivisible de cette forme, alors on est en présence d’une invention susceptible d’être brevetée. Article 511-3 al 2.

 

 

— Les plans, principes et méthodes sont exclus dans l’exercice d’activités intellectuelles en matière de jeux ou dans le domaine des activités économiques ainsi que les programmes d’ordinateur. 

Le caractère abstrait de ces informations écarte leur qualification d’invention car ils sont dépourvus d’effet utile ou technique. CA Paris MANPOWER a rejeté la brevetabilité d’une méthode à caractère abstrait permettant à une entreprise de personnel intérimaire de déterminer plus facilement le personnel dans la base de donnée. De même les méthodes comptables ou toute autre méthode de caractère abstrait ne constitue pas des inventions brevetables. Une méthode de traitement de texte ne constitue pas une invention par l’office européen des brevets. Les directives destinées à interpréter la convention de Munich indique à titre d’exemple qu’une méthode pour résoudre des problèmes de mots croisé, une méthode d’étude de langues étrangères, un jeu ou un plan d’organisation d’une opération commerciale ne sont pas des inventions susceptibles d’être des inventions de nature à être breveté. Aujourd’hui, la position française et de l’Office Européen des Brevets sur ces plans est en opposition avec les Etats-Unis car pour eux, l’invention peut être simplement utile.

 

— Les programmes d’ordinateurs peuvent être définis comme une série d’instruction donnée à une machine électronique pour l’obtention d’un certain résultat qui dans certains cas peut faire l’objet d’une utilisation technique voire d’un effet utile.

–         Dans un premier temps, on a considéré que les logiciels constituaient l’équivalent de méthode mathématique ou de caractère purement abstrait et étaient donc globalement exclus de la brevetabilité conformément à l’article L610-3 al 3. La CC° 28 mai 1975 a refusé la brevetabilité d’un programme d’ordinateur. Il s’agissait d’une demande de brevet ayant pour objet un procédé destiné à choisir des pigments en vue de la reproduction exacte de tête de peintures.

–         L’arrêt SCHLUMBERGER Cour d’Appel Paris 15 juin 1981 : considérant qu’un procédé ne peut être privé de la brevetabilité pour le seul motif qu’une ou plusieurs de ces étapes sont réalisées par un ordinateur devant être commandé par un programme ; qu’une telle solution aboutirait à exclure du domaine de la brevetabilité la plupart des inventions récentes qui nécessitent l’intervention d’un programme d’ordinateur. Chaque fois qu’il y aura un procédé dont la mise en œuvre suppose l’intervention d’un logiciel, le fait que le procédé ne produise d’effet qu’à travers la mise en œuvre du programme n’exclut pas la brevetabilité. Les logiciels envisagés en tant que tels ne sont pas brevetables. Cette affaire concernait une invention portant sur un procédé permettant de faciliter la protection pétrolière. La mise en œuvre du procédé supposait l’intervention d’un logiciel. Arrêt du 18 février 2004 la Cour d’Appel Paris a jugé qu’était brevetable un procédé de calcul du prix d’une course de taxis.

–         En 1985, l’Office Européen des Brevets a modifié ses directives et a admis la brevetabilité des procédés incluant un logiciel dans la mesure où celui-ci présente un effet technique. Dans une décision du 15 juillet 1986, la chambre de l’Office Européen des Brevets a jugé qu’un procédé d’amélioration de la qualité d’images vidéo incluant un programme d’ordinateur faisant intervenir des éléments de calcul matriciel pouvait être breveté du fait de l’effet technique obtenu dans l’amélioration de l’image vidéo. Dans une décision SOHEI, la chambre de recours de l’OEB a estimé qu’un bordereau de transfert unique représentant un format unique de saisie de donnés affiché à l’écran constitue une « interface utilisateur faisant intervenir des considérations techniques et justifie l’existence d’une invention ». 31 mai 1984. En revanche, dans une autre affaire, l’Office Européen des Brevets a jugé qu’une méthode d’enchère pratiquée sur internet c’est à dire à l’aide d’un ordinateur et d’un programme était non brevetable en l’espèce pour défaut d’activité inventive. Ce qui laisse ouverte la possibilité que s’il y avait eu activité inventive, il y aurait eu brevetabilité.

 

Nous sommes dans une zone délicate entre invention ou non et tout tourne autour des notions d’effet technique ou utile.  Le parlement européen n’a pas voté la transposition du règlement sur la brevetabilité des logiciels. Peut-on protéger le logiciel en lui-même ? Tout dépend de l’activité économique qui lui est attachée.

Est-ce que les logiciels peuvent être protégeables par les droits d’auteur ? Les américains ont accueilli cette protection pour la première fois et aujourd’hui en droit français cette possibilité est introduite dans la loi sur les droits d’auteur. Assemblée plénière Cour de cassation° 7 mars 1986.

 

 

— Les présentations d’informations : 

Les informations en tant que telles ne sont pas susceptibles d’être brevetées. Toutes présentations d’informations caractérisées uniquement dans l’information qu’elles contiennent ne sont brevetables. La rédaction d’une demande de brevet avec description de l’invention et revendication, il y aura un brevet. C’est le formalisme de la demande de brevet qui fait tout. Il faut un support et donc l’oral ne fonctionne pas. Ex : une bande magnétique n’est pas brevetable du seul fait des informations qu’elle contient. Un disque n’est pas brevetable par le seul fait qu’il renferme une description d’une invention brevetable. Si le support des informations présente une technique particulière relative à la présentation des informations, il pourrait constituer une invention brevetable sous réserve d’une demande de brevet. La Cour de Paris a jugé qu’un calendrier comportant une série de plage mensuelle orientée horizontalement en superposition, l’espace délimité à l’intérieur de chacune des plages étant divisé en une pluralité de plages obliques en nombre correspondant au nombre de jour du mois considéré était brevetable. Il s’agit d’un objet matériel considéré comme brevetable car n’étant pas une simple présentation d’informations.

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