La condition en droit des obligations (art. 1304 code civil)

La condition :

La condition est un événement futur et incertain qui, s’il se réalise, a pour effet de créer, de modifier ou d’éteindre une obligation. Elle est prévue par la loi ou par les parties elles-mêmes et peut être suspensive ou résolutoire.

  • Une condition suspensive est une condition qui doit être remplie pour que l’obligation soit exigible. Ainsi, si la condition ne se réalise pas, l’obligation ne prend pas effet et ne peut pas être exigée.
  • Une condition résolutoire est une condition qui, une fois remplie, a pour effet de mettre fin à l’obligation. Ainsi, si la condition se réalise, l’obligation cesse d’exister, mais si elle ne se réalise pas, l’obligation continue à exister.

La condition doit être expresse et certaine, c’est-à-dire qu’elle doit être clairement définie et que sa réalisation ou non doit être objectivement vérifiable. Si la condition est ambiguë ou incertaine, elle peut être déclarée nulle par les tribunaux.

L’actuel article 1304 du code civil défini la condition comme un « évènement futur et incertain dont dépend les effets d’une obligation ». L’obligation n’est pas pure et simple, encore faut-il qu’un évènement se produise pour prendre effet. L’événement futur, c’est-à-dire qu’il ne doit pas s’être produit lors de la conclusion de l’acte, incertain car l’événement du hasard

L’art. 1304 précise qu’elle est suspensive ou résolutoire. En cas de condition suspensive, l’accomplissement de la condition rend l’obligation pure et simple. Par conséquent, avant l’arrivée de la condition, l’obligation existe seulement en germe. Après l’accomplissement de la condition, l’obligation existe purement simplement et n’est plus conditionnelle.

En cas de condition résolutoire, la réalisation de la condition va entrainer l’anéantissement de l’obligation. Il peut arriver qu’il y ait défaillance de cette condition résolutoire en cas de certitude que l’évènement ne se produira pas. Il y a donc consolidation de l’obligation pure et simple.

Remarques :

  • En droit, le mot « condition » désigne deux situations distinctes. L’on sait qu’elle peut être entendue comme un élément dont dépend la validité du contrat. Cette approche est différente de la condition entendue comme une simple modalité qui affecte les effets du contrat.
  • Les conditions simples modalités doivent être distinguées des conditions que la loi impose parfois pour la formation de certains contrats. Dans certains cas, la loi prévoira que la validité sera subordonnée à l’obtention d’une autorisation administrative. Un décret de 1934 subordonnait toutes les transactions immobilières en Polynésie à une autorisation administrative du gouverneur, décret qui sera frappé d’inconstitutionnalité.

La Cour de cassation a précisé que l’autorisation administrative, à la différence de la condition modalité de l’exécution, conditionne la validité du contrat et, en cas d’obtention, n’entraine aucune rétroactivité.

  • 2) Les caractères de la condition :

Un évènement ne peut être qualifié de condition que s’il est futur est incertain. Grâce à ces deux caractères, l’on peut distinguer la condition du terme puisque le terme nécessite un caractère futur et certain. Si un événement s’est déjà produit mais encore inconnu des parties, il faut considérer que celui-ci est certain lors de l’accord des parties. Par conséquent, il ne peut être qualifié de condition car s’est déjà produit.

La question de savoir si l’incertitude doit être appréciée objectivement ou subjectivement s’oppose. Ainsi, il faut savoir si les parties disposent du pouvoir de qualifier librement un évènement. Pour trancher la question, l’on peut adopter une conception subjective ou objective :

  • En cas d’approche subjective, l’on peut estimer que les parties ont le pouvoir de qualifier librement l’évènement qu’elles ont retenu.
  • En cas d’approche objective, seul un évènement incertain pourra être qualifié de condition et, corrélativement, seul un évènement certain objectivement pourra être qualifié de terme.

Jusqu’à présent, le Code civil ne donne pas de réponse sur cette difficulté. Ainsi, dans un premier temps, la jurisprudence a retenu la conception subjective en estimant que les parties sont libres de qualifier la modalité, même si l’évènement en question est certain.

Exemples de la conception subjective :

En l’espèce, caution s’était engagée à rembourser un prêt lors de la vente d’un local dont elle était propriétaire. Il était indiquée que la vente devait intervenir peu de temps après la signature du contrat de cautionnement. L’on a estimé que dans l’esprit des parties l’obligation de la caution, de procéder au remboursement, était assortie d’un terme. La Cour a fait appel à l’intention des parties puisque le remboursement était subordonné à la vente à venir.

Dans un autre espèce, une promesse de vente de terrain est consentie à une société en contrepartie de la construction d’une maison. La société mettait du temps à recueillir le permis de construire. Pouvait-on obtenir la résolution de la promesse en raison du manque de rapidité de la société ? Pour obtenir gain de cause, la personne soutenait que le contrat contenait une condition potestative susceptible d’annulation du contrat. Pour rejeter la demande, la Cour a estimé que dans l’intention des parties il n’y avait pas de condition mais un terme fixé, le terme était la construction à venir de la maison promise par la société.

Dans un premier temps, la jurisprudence a adopté une conception subjective afin d’éviter la qualification de la condition. Le but était aussi d’éviter l’annulation en cas de condition potestative. Or, depuis 1999, la conception objective semble prévaloir pour la Haute Cour.

En effet, par un arrêt 1ère civ. 13 avril 1999, une compagnie immobilière s’était engagée en 1981 à supporter, à la place de la société UGC, qui exploite des salles de cinémas, des charges d’exploitation liées à des salles de cinémas tant que le nombre d’entrées annuelles seraient inférieures ou égales à 380.000. Plusieurs années plus tard, ledit seuil n’avait pas été atteint et la compagnie s’est lassée de prendre en charge les frais et a dénoncé cet accord, devenu trop onéreux pour elle.

Les juges du fond avaient qualifié cet évènement de terme en raison de l’esprit des parties puisque la compagnie ne s’était pas engagée à titre perpétuel. Par conséquent, les juges ont estimé qu’il était normal que la société puisse dénoncer son engagement. L’idée qui sous-tend cette décision est qu’à partir du moment qu’un délai raisonnable s’est écoulé, il est normal que celui-ci devienne caduque.

La Cour de cassation a censuré l’arrêt de la Cour d’appel en faisant remarquer que l’évènement étant incertain, non seulement dans sa date mais aussi dans sa réalisation, il s’agissait d’une condition. Le terme a été requalifié en évènement futur et incertain, donc en condition.

Néanmoins, la Cour remarque que la compagnie était fondée à dénoncer son accord car le droit positif prohibe les engagements perpétuels.

Remarque : Cette situation est particulière puisqu’il est difficile de retenir de quelle condition il s’agit puisque l’on est ni en présence de condition suspensive ni en présence d’une condition résolutoire. Puisque l’engagement était pur et simple, la condition ne pouvait être suspensive. La condition ne pouvait non plus être résolutoire puisqu’un anéantissement rétroactif n’était pas prévu en cas de dépassement du seuil, ce qui autorisait la compagnie à obtenir la restitution des sommes versées.