La saisie conservatoire de créances : condition et effet

La procédure de saisie conservatoire des créances

Qu’est ce qu’une saisie-conservatoire des créances : les comptes bancaires du débiteur sont bloqués et les fonds vous sont virtuellement attribués

Selon le code des procédures civiles d’execution :

  • Les opérations de saisie. Article L523-1 : Lorsque la saisie porte sur une créance ayant pour objet une somme d’argent, l’acte de saisie la rend indisponible à concurrence du montant autorisé par le juge ou, lorsque cette autorisation n’est pas nécessaire, à concurrence du montant pour lequel la saisie est pratiquée. La saisie produit les effets d’une consignation prévus à l’article 2350 du code civil.
  • La conversion en saisie-attribution. L523-2 : Si la saisie conservatoire porte sur une créance, le créancier, muni d’un titre exécutoire, peut en demander le paiement. Cette demande emporte attribution immédiate de la créance saisie jusqu’à concurrence du montant de la condamnation et des sommes dont le tiers saisi s’est reconnu ou a été déclaré débiteur.

Sous-section 1 – Les étapes procédurales

  • 1 – L’établissement d’un procès verbal de saisie conservatoire des créances

ARTICLE 234 à 243 décret 1992, ARTICLE 648 Code de Procédure Civile

Il est important que des mentions obligatoires figurent dans l’acte :

  • Notamment tout ce qui relève de l’identité précise du débiteur et du créancier
  • Créance qui justifie de la mise en œuvre de la mesure conservatoire

Dans le procès verbal il est fait mention du titre ou de l’autorisation du juge qui sert de fondement à la mesure.

  • Quand le procès verbal concerne le tiers, il doit intégrer les remarques, réserves ou observations de ce tiers sur l’étendue de l’assiette de la mesure.
  • Il s’agit de faire dater le procès verbal, de le faire signer.
  • 2 – Dénonciation de la saisie conservatoire de créances

Portée officiellement à la connaissance du tiers par le biais d’une signification de l’acte de procédure.

La dénonciation est faite au débiteur, dans un délai de 8 jours à compter de l’établissement de l’acte, ARTICLE 236 décret 1992.

Pour être juridiquement valable, cette dénonciation doit contenir :

  • la référence au titre exécutoire ou à l’autorisation du juge
  • la juridiction devant laquelle le débiteur pourrait formuler des contestations
  • la reproduction des articles 210 à 219 décret 1992.
  • 3 – L’obligation pour le créancier d’engager la procédure sur le fond

ARTICLE 70 loi 1991 ; ARTICLE 215 décret 1992.

Etape obligatoire pour le créancier qui n’est pas déjà muni d’un titre exécutoire (il n’a que l’autorisation du juge).

Obligatoire car on considère que la mesure conservatoire n’est pas une fin en soi : le créancier se doit d’introduire la procédure sur le fonds dans le mois qui suit la mise en œuvre de la mesure conservatoire (ARTICLE 215 décret 1992)  —>  La Cour de cassation l’a rappelé dans Com 27 juin 2000 : le non respect de l’ARTICLE 215 rend caduque la mesure conservatoire.

  • 4 – La dénonciation au tiers saisi

Hypothèse prévue par l’ARTICLE 216 décret 1992.

Il s’agit par cette dénonciation, pour un créancier, de tenir informé le tiers sur l’évolution de la procédure, et notamment de l’informer que le tribunal a été saisi sur le fond du droit.

Etape importante : pour la saisie conservatoire de créances, ce sont souvent des établissements de crédit qui sont concernés.

 Pour s’assurer que cette étape est respectée, le législateur a prévu que dans le cadre de la dénonciation faite au tiers, le créancier remet une copie de l’assignation qui a été délivrée au débiteur.

 S’il y a défaut de dénonciation au tiers, la sanction sera la caducité de la mesure conservatoire.

  • 5 – La conversion en saisie attribution

ARTICLE 240 et 241 décret 1992

Deux obligations à la charge du créancier. Le créancier qui a obtenu son titre définitif doit signifier la décision de justice au débiteur et au tiers saisi.

La dénonciation peut être simultanée (le même jour on informe le débiteur et le tiers saisi).

Hypothèse où le débiteur peut émettre une contestation, il dispose d’un délai de 15 jours pour formuler cette contestation.

En l’absence de contestation formulée dans les 15 jours ou en cas de fin de non recevoir opposée par le juge à cette contestation : cette situation permet au tiers saisi d’appliquer concrètement la mesure = considérer que le paiement pourra être effectué entre les mains du créancier.

Deux possibilités pour le tiers :

  • Il peut se prévaloir d’un certificat de non contestation, généralement remis par le greffe du tribunal (pas par l’huissier de justice).
  • Si le débiteur lui-même procède à un « acquiescement» = déclaration écrite par laquelle il donne au tiers le pouvoir d’effectuer le paiement  —>  permettre au tiers de pouvoir régler le créancier.
  • 6 – Les incidents en matière de saisie conservatoire de créances

Trois types de contestation peuvent être envisagés tout au long de la procédure de mesure conservatoire :

  • Porte sur les conditions de validité de la saisie

L’objectif est une demande de main levée de la mesure conservatoire.

  • Le débiteur a la possibilité de saisir le juge pour proposer une garantie en lieu et place des biens concernés par l’assiette de la saisie.
  • Contestation possible du débiteur au stade de la conversion de la mesure conservatoire en saisie attribution (délai de 15 jours).

Sous-section 2 – Les effets de la saisie conservatoire de créances

Les saisies conservatoires ont pour intérêt de permettre à un créancier de protéger sa créance notamment contre toute tentative de la part du débiteur de se rendre insolvable. Elles ont pour particularité d’être pratiquées alors que le créancier ne peut procéder à une exécution forcée à défaut de disposer d’un titre exécutoire.

Selon l’article L 511-1 du code des procédures civiles d’exécution, toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut demander au juge l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement. La mesure conservatoire prend la forme d’une saisie conservatoire (ou d’une sûreté judiciaire)

  • 1 – L’effet d’indisponibilité

A)         L’effet cantonnement automatique

ARTICLE 75 loi 1991 : seules les sommes d’argent vont être concernées par l’indisponibilité  —>  si sur le compte bancaire par exemple il y a un montant supérieur qui figure sur le compte, la somme restante est qualifiée de somme disponible entre les mains du débiteur et vis-à-vis du tiers qui gère les comptes (frais de gestion, etc.).

Il n’est pas nécessaire de saisir le juge de l’exécution pour demander à ce que la cantonnement soit respecté.

En matière bancaire particularité : cantonnement relatif. A été institué en 1991 un cantonnement qui va être non pas limité uniquement au montant de la créance mais va porter sur la totalité du compte sur une période de 15 jours.

 —>  Du côté du débiteur le fonctionnement de ses comptes est suspendu pendant cette période. Pour autant n’exclut pas la possibilité de faire un règlement anticipé à partir des fonds disponibles en faveur de son créancier.

Si le cantonnement ne permet pas d’user librement des fonds, il ne fait pas obstacle à ce qu’on puisse prendre en compte différentes opérations qui viennent créditer le rendu indisponible par mesure conservatoire.

  1. B) L’effet consignation

Loi 1991 ARTICLE 75 : on reconnaît au créancier un privilège qualifié d’exclusif qui va lui permettre de se faire payer à partir de la somme qui a été déclarée indisponible et qui se trouve entre les mains du tiers.

Ne pas oublier que le créancier de droit commun reste primé (devancé) par le Trésor (« privilège du Trésor public »).

  • 2 – Les concours liés à la saisie conservatoire de créance

Il est possible qu’une même assiette de biens puisse à une période très proche faire l’objet de plusieurs saisies de nature conservatoire.

  • Hypothèse où il se peut que certains créanciers disposent de sûretés (ex : droit de gage, hypothèque) qui est antérieur à la mise en place de mesures de saisie conservatoire = primauté accordée au créancier privilégié, c’est-à-dire ceux qui sont titulaires de cette garantie.
  • Un créancier pratique une mesure conservatoire et d’autres veulent effectuer une saisie ultérieure

Si la première mesure conservatoire absorbe totalement l’assiette du patrimoine du débiteur, les créanciers ultérieurs verront leur saisie qualifiée de caduque.

  • Si l’indisponibilité n’est pas totale, il y aura concours

Les créanciers ultérieurs seront en mesure de prendre toujours une mesure de nature conservatoire mais qui portera sur ce qui reste de disponible dans le patrimoine du débiteur.

  • Hypothèse de saisie conservatoire qui serait pratiquée le même jour par différents créanciers

Loi 1991 n’a rien prévu. Répartition qui se fera au « marque le franc »  —>  proportionnel à la créance des deux, voire trois créanciers qui se manifesteraient vis-à-vis du même débiteur.

  • Hypothèse où il y aurait un créancier qui veut mettre en place une mesure de saisie conservatoire, et un autre qui lui est déjà titulaire d’un titre exécutoire et qui veut pratiquer une saisie attribution

 —>  Ou la mesure de nature conservatoire est antérieure à la mesure de voie d’exécution forcée : la première mesure va primer sur les droits de la personne qui veut pratiquer la saisie attribution.

 —>  Si le même jour il y a à la fois une mesure de nature conservatoire et une mesure d’exécution forcée, la primauté est donnée à la saisie attribution car cette dernière emporte effet attributif immédiat = elle transfert immédiatement la créance du patrimoine du débiteur au profit du patrimoine du créancier.

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