Quelles sont les conditions de recevabilité du recours administratif ?

Les conditions de recevabilité du recours administratif.

il y a des conditions de forme qui ne sont pas simples à appliquer.

  1. A) la rédaction du recours.

Il n’y a pas de formalisme particulier. Dès lors que l’on sait rédiger, il suffit d’expliquer son cas au juge pour rendre le recours recevable : « informalisme » total. En revanche, il y a certain nombre d’obligations minimales :

  • En français ! On a de la jurisprudence sur des recours rédigés en polonais et en breton. Tout débute avec l’ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539 (ce texte marque le passage du latin au français dans la justice, l’administration…) ; puis il y a eu la réforme constitutionnelle du 25 juin 1992 qui affirme que le français est la langue de la république ; puis celle du 4 août 1994 concernant les relations avec l’administration et qui impose le recours à la langue française dans les obligations administratives.
  • Il faut que la requête permette d’identifier le requérant : le nom et l’adresse.
  • Il faut que la requête contienne l’exposé des moyens et des conclusions. Tout cela est régularisable même après le dépôt de la requête initiale. Le juge doit redresser la requête irrégulière pour la rendre recevable.

  1. B) Le droit de timbre : rapport historique.

Il n’est plus applicable depuis le 1er janvier 2004. De 1993 à 2004 le droit de timbre était obligatoire sur chaque requête adressée au TA. C’était 100 francs puis 15 euros. Ce principe avait été instauré pour limiter le nombre de recours. Il y avait alors quatre exemptions :

  • pour les étrangers
  • pour les bénéficiaires de l’aide juridique
  • pour la commission de comptes de campagne qui saisissait le juge sur les irrégularités des comptes de campagne
  • pour toutes les requêtes adressées au Tribunal Administratif de Mayotte.

Ce droit de timbre avait été créé par la loi de finances du 30 décembre 1993. Ce texte n’était pas applicable à Mayotte car ils ont un droit fiscal qui ne dépend pas de la loi de finances nationale. Les impôts sont recouvrés là-bas par délibération du conseil général. Cela n’est-il pas contraire à l’article 34 de la Constitution ? non la loi de finance nationale érige en valeur législative cette délibération du conseil général !

  1. C) Les autres conditions.

On est obligé de déposer la requête en un nombre suffisant d’exemplaires. Il en faut autant qu’il y a de parties plus deux exemplaires. Il ne faut pas oublier d’annexer l’ensemble des pièces annexes de la requête. Le dépôt se fait au greffe du TA, de la CAA ou du Conseil d’Etat.

En ce qui concerne le contentieux électoral et fiscal, il est possible de la déposer à la préfecture.

On peut la déposer par fax, par la poste (c’est la date de réception qui sera alors pris en compte). le Conseil d’Etat est en train d’expérimenter l’e-mail, mais pour l’instant cela est réservé aux avocats près la Cour de cassation.

S’agissant du domaine de l’urbanisme, la requête doit être directement notifiée à l’auteur de l’acte et aux bénéficiaires de l’autorisation administrative : R601-1 du code de l’urbanisme et R411-7 du COJ.

La notification du recours se fait par lettre recommandée dans un délai de quinze jours après le dépôt de la requête au greffe. Cette obligation incombe à la charge du requérant et elle permet d’empêcher que le bénéficiaire de l’action administrative (par exemple le titulaire du permis délivré par l’administration) ne puisse faire tierce opposition à une décision à laquelle il n’a pas pris part.

Le CE a rendu deux avis : en 2001 Andersen et en 2005 (pas de nom), le non accomplissement de cette formalité dans les formes et conditions requise rend le recours irrecevable et définitivement irrecevable.

  1. D) La règle de la décision préalable.

Elle trouve son origine dans la théorie du ministre juge, cad la situation où un requérant mécontent doit d’abord saisir le ministre de son litige, mais cela a perduré même après la disparition de cette théorie. Cela est favorable au requérant car il y aura quelques cas où l’on pourra obtenir satisfaction sans avoir à aller devant le juge et si il faudra aller devant le juge, le litige sera très bien circonscrit et défini. Cette règle est applicable dans le contentieux de l’excès de pouvoir mais également dans le contentieux de pleine juridiction : l’absence de recours préalable rend le recours irrecevable.

Quelques exceptions :

  • dans le contentieux de pleine juridiction : le domaine des travaux publics. « sauf en matière de travaux publics » article R421-1. Cela vaut surtout dans le contentieux de la responsabilité de la puissance publique. Souvenons nous que le juge a une notion extensive de la notion de travaux publics.
  • dans les autres cas : lorsque c’est l’administration elle-même qui saisit le juge, elle est dispensée de l’obligation de la décision préalable. De même dans le contentieux de l’urgence (article R 532-1 et 2), le requérant est dispensé de cette formalité.

Deux solutions sont possibles : soit on est muni d’une décision définitive de l’administration considérée comme permettant la saisine directe du juge ; soit on n’a aucune décision, et il faut alors en faire naître une. Comment ? En saisissant l’administration d’une demande préalable, le silence gardé par l’administration vaut alors décision de rejet au bout de deux mois. Le cas pourra se produire où le silence gardé par l’administration vaudra acceptation même si la loi du 12 avril 2000 avait posé comme règle que dans les cas qui seraient fixés par voie règlementaire la non réponse de l’administration vaudra accord et que les décrets d’application n’ont jamais été pris.

  1. E) Le délai de recours.

https://cours-de-droit.net/delai-recours-administratif

  1. F) Les rapports entre Recours en excès de Pouvoir et RPC (recours de plein contentieux).
  1. La théorie des actes détachables et les actes complexes.

Lorsqu’un litige apparaît dans certain domaine, la question se pose de savoir si le Recours en excès de Pouvoir est possible sachant que le recours normal est le RPC. Mais le RPC est généralement fermé aux tiers car ne sont ne cause que les intérêts subjectifs du requérant.

Il est nécessaire d’ouvrir le contentieux aux tiers pour assurer le respect de la légalité : il est nécessaire de multi^lier les cas où les tiers pourront attaquer par la voie du Recours en excès de Pouvoir les actes qualifiés de détachable dans le contentieux de pleine juridiction. Cette théorie des actes détachables a connu une grande extension pour élargir le contentieux pour excès de pouvoir.

  1. Les applications.
  • Le contentieux électoral : avant que le Conseil d’Etat n’applique la théorie des actes détachables, le principe était que l’on ne pouvait attaquer les actes préalables à l’élection qu’à l’issue de l’élection. Si des irrégularités se produisent il vaut mieux les stopper tout de suite : arrêt Tête du 23 novembre 1984 (un des multiples arrêts Tête). Sont ainsi susceptibles d’être contestés par la théorie des actes détachables : les actes portant sur la convocation des électeurs, l’enregistrement des candidatures, la révision des listes électorales ou les actes organisant des opérations de référendum. Avant si une irrégularité était constatée il fallait attendre que les élections aient eu lieu.

Les élus restent en place le temps du procès.

  • Le contentieux fiscal : c’est un contentieux de pleine juridiction car le juge a le pouvoir de réformer la décision administrative et donc de décider la cotisation de l’impôt.

Il y une toute petite place pour le REP. D’abord en ce qui concerne les actes règlementaires ; pour les actes non règlementaires, le principe est que seul le contribuable ou l’administration fiscale ont le pouvoir de saisir le juge mais il existe quelques cas d’ouverture pour le REP. D’une part, par exemple, si l’administration refuse de délivrer une attestation de non imposition permettant au contribuable d’obtenir toute une série d’avantage qui découle de cette situation (bourse pour les enfants…), cette décision qui ne concerne pas la fixation de l’impôt est susceptible du REP. Il y a d’autre part les agréments fiscaux qui sont des actes unilatéraux et qui sont en conséquence des actes unilatéraux non règlementaires et donc susceptibles du Recours en excès de Pouvoir : maison Genestal (dans votre GAJA).

  • Le contentieux contractuel : c’est un contentieux de pleine juridiction par nature, mais parfois REP. Quels sont les actes détachables susceptibles du Recours en excès de Pouvoir ? Il y a les actes portant sur la conclusion du contrat (ex : décision de conclure est un acte unilatéral non règlementaire, les tiers au contrat peuvent la contester àCE Martin 1905 ; ou encore toutes les décisions antérieures comme les habilitations données à l’exécutif par les assemblées délibérantes ; ou encore les actes d’approbation du contrat).

En principe l’annulation de l’acte détachable portant sur la conclusion du contrat entraîne l’annulation du contrat lui-même.

Il y a également dans les actes susceptibles du Recours en excès de Pouvoir les actes portant sur l’exécution du contrat : tous les actes règlementaires qui émanent de la personne publique sont des actes règlementaires non contractuels et donc sont susceptibles du Recours en excès de Pouvoir ; mais également toutes les sanctions infligées au cocontractant que les tiers pourront être amenés à contester par la voie du REP.

L’on doit également parler toujours dans le contentieux contractuel des actes complexes. Une opération est qualifiée de complexe quand la décision exécutoire finale est précédée d’un certain nombre d’actes préparatoires. le Conseil d’Etat refuse de contrôler les actes préparatoires tant que la décision exécutoire n’a pas été prise. En revanche, une fois la décision arrêtée, le juge s’autorise à examiner l’ensemble des actes qui ont précédé la décision en question. On peut ainsi contester toute la chaîne des actes préparatoires.